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Généralisme ou spécialisation dans le combat terrestre....


Tancrède
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Vague? C'est là un sujet qui concerne avant tout l'armée de terre en général, et les troupes de mêlée en particulier. Historiquement, les modèles d'armées se sont adaptés à leurs environnements, mais en gardant le plus souvent un "thème" dominant, parfois trop affirmé. Et la question ici est moins d'en trouver les raisons politiques, culturelles, géographiques, économiques.... Que de discuter de leur efficacité comparée et des évolutions de ces organisations qui ont abouti aux modèles d'armées actuelles, de celles qui n'ont pas eu de suite, celles qui ont été méjugées....

Qu'il s'agisse d'avant ou après l'arrivée des armes à feu, il est loisible d'en parler de manière peu différenciée via l'approche "traditionnelle" en termes de choc, feu et mouvement, pour voir comment, face à un état technique donné, certains décideurs ont choisi d'adapter leur dispositif, de changer les proportions de telle ou telle composante, d'implémenter un thème tactique utilisant les mêmes outils à des fins différentes et à des niveaux d'efficacité radicalement différents....

Par exemple, l'infanterie, à n'importe quelle époque, a souvent été confrontée au choix d'adopter un modèle, sinon unique, du moins dominant, maximisant le nombre d'un seul type de fantassin multi-usage là ou d'autres préféraient de multiples spécialités utilisées en combinaison; et cela marche aussi en interarme.... Entre l'armée romaine et la macédonienne, il n'y a pas confrontation du phalangite contre le légionnaire, mais d'un dispositif interarme contre le légionnaire.... A ceci près que le dispositif interarme macédonien avait sérieusement dérivé et que le phalangiste lourd y était sur-représenté, et ce qui était une spécialité parmi d'autres dans l'orbat de Philippe de Macédoine et d'Alexandre le Grand était devenu une composante absolument dominante limitant la capacité de l'armée au global.

A plus petite échelle, on voit aussi pendant la guerre de Trente Ans des armées qui semblent avoir toutes la même gueule (grosso merdo), mais sont en fait radicalement différentes: proportions piquiers-mousquetaires dans l'infanterie, doctrine d'emploi, usage de la cavalerie, usage de l'artillerie, répartition des fantassins par type dans chaque unité.... Tout diffère: Gustave Adolphe, précurseur de l'époque, est le premier à organiser son infanterie d'une manière étonnamment moderne en lui assignant des armes collectives, les "canons de cuir" (canons légers portables à main, maniables par 2 à 4h, dont l'âme très fine est entourée de cuir, et dont la cadence de feu est supérieure à celle d'un mousquet), répartis au sein des compagnies de combat. Soit un usage pur comme appui mobile qui force la dite infanterie à avoir des mousquetaires, des piquiers, mais aussi ces équipes d'appui-feu et des fantassins "d'assaut" pour le corps à corps, plus les inévitables "enfants perdus" (fantassins légers organiques à chaque régiment pour la reco, le harcèlement, mais aussi pour "tâter" les premiers rangs adverses en cas de confrontation de lignes de piquiers). Il ajoute en plus des compagnies autonome d'artillerie légère à cheval (concept qui se développera à nouveau au XVIIIème siècle) pour maximiser l'appui feu mobile aux endroits cruciaux; cette approche est aussi ce qui incitera l'armée française à développer les dragons, fantassins montés qui servent de troupes légères, mais aussi de réserve d'infanterie mobile sur le champ de bataille, pour aller appuyer une position cruciale pendant le mouvement.

L'effet voulu, avec la doctrine de tir massif des mousquetaires à très courte distance, est le choc localisé, d'autant plus étonnant à une époque où tout le monde cherche au contraire à étendre sa ligne de feu via l'adoption d'un ordre de plus en plus mince des unités afin d'utiliser toute la puissance de feu. Le différentiel d'efficacité varie selon le niveau de professionalisme (Gustave Adolphe ne l'aura pas aussi facile face à des unités porfessionnelles très solides comme les tercios viejos, certes peu nombreux), mais couplée à un haut niveau d'entraînement, il y a clairement le choix du choc, avec le feu qui lui sert de multiplicateur d'impact au dernier moment, là où les armées adverses privilégient le feu avec le choc venant seulement en conclusion si la configuration s'y prête.

La distinction infanterie légère-infanterie lourde est aussi de toutes les époques, et tend à revenir aujourd'hui, même si évidemment selon d'autres normes (c'est plus l'infanterie de ligne et son ordre serré vs la légère en mode tirailleur, ou les fantassins lourds cuirassés contre les légers), entre aussi éminemment dans cette discussion.... Avec un point qui est que plus ces distinctions se font, nécessaires ou non suivant l'époque et la technique, plus il peut y avoir tendance à sécèrement compartimenter les troupes en spécialités là où d'autres, sans se fermer à cela, essaient de maintenir le plus possible un "coeur de métier" polyvalent pour le troupier, qu'il s'agisse du cavalier ou du fantassin.

Alors la troupe: faite d'ouvriers spécialisés ou qualifiés :lol:?

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  • 1 month later...

Le sujet a pas fait florès, sans doute à cause d'un mélange de faible définition et d'une obsession pour mes petites marottes personnelles :-X :-[....

Présenté autrement, sous forme d'un théorème:

Plus une armée opte pour le modèle professionnel, plus elle se contractera avec le temps en raison de la chèreté de la chose et d'un besoin de haute valeur ajouté et de technicité (quelle que soit l'époque) tant au niveau des matériels employés que des savoirs-faires nécessaires (à tout niveau, de l'officier général "maniant" de grandes unités ou gérant un théâtre d'opération, jusqu'au soldat du rang appelé à pousser son savoir-faire). La division du travail, à un point très avancé, devient une suite logique (appelant une intégration interarme au plus bas niveau possible).

Mais le risque ne devient-il pas de trop la pousser? Subdiviser trop les tâches et spécialisations, et de façon trop fixe, au point de s'enferrer dans ce modèle et de rendre chaque soldat, chaque unité, trop unique (ou rare) dans son "métier", donc trop précieuse et peu "risquable", ce qui impacte autant la capacité à combattre à certaines échelles (besoin d'avoir de tout pour une task force ou une armée opérationnelle, peu de réservoir, ce qui donne des armées de campagne trop petites?) que la capacité à décider de risquer la chose, de risquer le conflit, de risquer le déploiement même préventif? Plus gravement, à bas échelon, cela ne fait-il pas des soldats trop "partiels", des ouvriers trop spécialisés et trop peu versatiles? Sans aller jusqu'à croire au mythe inverse du soldat universel et totalement polyvalent à tout niveau et dans tous les métiers, il y a sans doute un compromis à trouver dont certaines époques s'éloignent, ce faisant impactant gravement leur propre capacité stratégique, et même tactique.

Et ce facteur est aggravé par un axiome complémentaire: plus une armée est anciennement professionnalisée, plus le recrutement de qualité est difficile, ce qui donne des recrues venant majoritairement du "bas du panier" et qui n'ont pas la capacité et/ou aucun encouragement (favoriser la "bonne volonté" d'apprendre et développer des formations plus largement) à sortir de ce modèle, de cette vision du soldat comme main d'oeuvre semi-qualifiée et cantonné à une tâche ou une gamme de tâches limitées.

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Le sujet a pas fait florès, sans doute à cause d'un mélange de faible définition et d'une obsession pour mes petites marottes personnelles :-X :-[...

En fait je crois qu'il est carrément pasé inapercu ;) je m'en vais te lire de ce pas :)

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Dans la gamme des 2 approches fondamentales de la chose, les ricains sont aujourd'hui emblématiques, avec un corps des Marines qui insiste sur la polyvalence fondamentale du troufion via le métier de base de fantassin pour chaque Marine, et l'Army qui spécialise le plus possible le plus tôt possible. Evidemment, il y a le principe fondamental et il y a la pratique: chaque marine ne sera pas un fantassin de même niveau, ni même forcément un fantassin compétent, et tous ne sont pas interchangeables malgré l'organisation en unités élémentaires réservoirs servant à former des task forces à la carte (il y a même un mouvement de spécialisation permanente via la formation des MEU qui sont de plus en plus organiques), et l'Army ne forme pas non plus forcément des troufions à usage unique. Mais il s'agit bien d'une approche différente, d'une insistance différente sur le niveau et la durée de la formation, sur la valorisation du capital humain et pas conséquent sa place dans la façon d'approcher une opération ou un théâtre d'opération, et surtout dans la façon de penser la guerre et le combat (avec une différence notable d'investissement par tête de soldat, toutes proportion gardée -c'est quand même les USA :lol:-, les Marines étant moins budgétés).

De plus, ce débat est toujours conditionné par la qualité moyenne du recrutement, et même si les Marines ont plus de candidats par poste, le niveau global reste celui commun au pays développés, à savoir pas très haut. Cela peut être en partie limité par la proportion de carrières longues, la fidélisation d'une proportion plus ou moins grande de bons éléments.... Mais cela se voit aussi dans les forces spéciales qui drainent une bonne partie de ce qui devrait être le matériau type des armées modernes, ou en tout cas ce vers quoi elles devraient tendre.

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les Marines sont formé dans le même moule ,mais s'est vrai qu'un Marines artilleur n'aura pas disons le même niveau qu'un Marine fantassin ,mais l'esprit sera là ,celui du Marine et de son fusil ,le socle de cette vieille institution qu'est le corps des Marines .

comme tu le dis ,il y a une finalité dans la vision "Marines" ,on commence tous pareil ,mais on se spécialise dans un domaine qui n'a pour but que la finalité ,celle du combat de base ,et donc tout se qui peu permettre de réussir le combat de base ,ben on l'emploiera .

en gros ,s'est l'esprit GTIA mais permanent ,et qui disons a quand même une longue histoire ,quand on regarde leur histoire (il y a eu pas mal d'expérimentation suggéré par les Marines eux mêmes ou basé sur l'expérience de test en réel dans d'autres armées du monde à l'occasion de conflit mais qui n'a pas perduré dans ses armées lors du retour à la paix au début du 20 siècles  ,voir lors de l'apparition de l'aviation ,etc ...) .

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C'est surtout lié à l'expérience du Pacifique qui a réellement formé les Marines, pas à une si longue histoire: force expéditionnaire, donc de premire ligne, ils s'attendent aux pertes, et c'est le Pacifique qui a conditionné la perception de ce problème, avec le développement initial du "métier de base" et l'importance numérique du groupe de combat par exemple. Tout soldat doit pouvoir combler un vide rapidement, monter un bataillon de marche éventuellement.... Mais après, il y a le principe et la réalité: le recrutement variable en qualité impacte nécessairement les possibilités, et quand la recrue de qualité manque, il y a de facto une sélection interne pour différencier des unités a priori identiques (les bataillons d'infanterie formant les MEU par exemple tendent à être de plus en plus les mêmes).

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Dans la gamme des 2 approches fondamentales de la chose, les ricains sont aujourd'hui emblématiques,

Ce n'est pas pour être chauvin, mais on peut en dire autant de la Légion étrangère.

Car que se soit le soldat du REI, du REG ou celui du REC, ils se considèrent avant tout des Légionnaires.

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C'est surtout lié à l'expérience du Pacifique qui a réellement formé les Marines, pas à une si longue histoire: force expéditionnaire, donc de premire ligne, ils s'attendent aux pertes, et c'est le Pacifique qui a conditionné la perception de ce problème, avec le développement initial du "métier de base" et l'importance numérique du groupe de combat par exemple. Tout soldat doit pouvoir combler un vide rapidement, monter un bataillon de marche éventuellement.... Mais après, il y a le principe et la réalité: le recrutement variable en qualité impacte nécessairement les possibilités, et quand la recrue de qualité manque, il y a de facto une sélection interne pour différencier des unités a priori identiques (les bataillons d'infanterie formant les MEU par exemple tendent à être de plus en plus les mêmes).

+1

Ce n'est pas pour être chauvin, mais on peut en dire autant de la Légion étrangère.

Car que se soit le soldat du REI, du REG ou celui du REC, ils se considèrent avant tout des Légionnaires.

certes mais la différence notable reste que les unités Légion sont à consonance infanterie ,génie et cavalerie ,donc pas de réel autonomie .

disons qu'il n'y a pas tous le spectre comme chez les Marines tel que les artilleurs ,aviateurs (voir la gamme d'appareil piloté ,C130 ,F18 etc ... ) ,pilote d'hélico ,logisticien (je parle en unité constitué ),etc ...

bien entendu ma comparaison n'est pas là pour dire qui est le meilleur ,mais dans l'esprit du file ,je pense que le corps des marines à une autonomie autre que celle de la Légion .

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La question du "généralisme" n'est pas celle de l'étendue du spectre d'une formation en matière de systèmes d'armes, mais plus de l'aptitude de chaque soldat dans les troupes terrestres, attention.

De toute façon, aucun soldat ne sera à la fois un fantassin, un chef de char, un pilote d'avion et d'hélico.... Quand même, faut être raisonnable :lol:! Mais au sein des troupes de mêlée actuellement, comme à toutes époques, il est possible de voir quand même ces 2 pôles de conception s'affronter, entre le troupier monotâche et le soldat qualifié capable de changer rapidement si besoin est, et surtout d'appréhender le métier des autres pour une meilleure efficacité/intégration du dispositif interarme.

Les armées d'Ancien Régime au XVIIIème siècle sont l'incarnation d'un retour vers une spécialisation extrême et de l'usage unique du troupier dans son métier très stricto censu. A l'inverse, la Guerre de Trente Ans avait vu quelques armées entraîner intensivement leurs troupes pour qu'elles puissent se redéployer rapidement dans les métiers divers de leur arme afin de conserver une capacité homogène et équilibrée en cas de pertes disproportionnées, mais surtout pour qu'elles fonctionnent bien ensemble.

Autre exemple: pendant la 1ère GM, il y a eu un moment, dans les armées allemandes, françaises et anglaises, où les unités de mitrailleuses ont bien failli ne pas être considérées et ne pas se considérer comme de l'infanterie, mais comme une spécialité, voire une arme, à part, soit extension lointaine de l'artillerie, soit quelque chose de nouveau. Et ça aurait pu advenir, écartant les groupes de mitrailleuses de la troupe au lieu d'en faire un métier du fantassin. C'est ce genre de trucs que la "spécialisation" implique.

Et dans l'exemple américain, c'est vraiment une tendance fondamentale qui oppose Marines et Army: le Marines des troupes de mêlée est plus polyvalent (ou censé l'être) que l'ouvrier spécialisé de l'Army. Et plus le recrutement baisse en qualité, plus la mentalité de l'institution tend vers cette spécialisation, plus cette tendance s'affirme. La baisse de qualité du recrutement (et éventuellement le mépris du "haut" pour la basequi peut s'accroître à cause de ça) est même un facteur fort d'accentuation de cette tendance.

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La question du "généralisme" n'est pas celle de l'étendue du spectre d'une formation en matière de systèmes d'armes, mais plus de l'aptitude de chaque soldat dans les troupes terrestres, attention.

De toute façon, aucun soldat ne sera à la fois un fantassin, un chef de char, un pilote d'avion et d'hélico.... Quand même, faut être raisonnable :lol:!

à mais je ne voulais pas allé dans se sens dans mon explication car s'est évident qu'un soldat ne pourra pas être un spécialiste dans pas mal de domaine  ;)

Mais au sein des troupes de mêlée actuellement, comme à toutes époques, il est possible de voir quand même ces 2 pôles de conception s'affronter, entre le troupier monotâche et le soldat qualifié capable de changer rapidement si besoin est, et surtout d'appréhender le métier des autres pour une meilleure efficacité/intégration du dispositif interarme.

s'est à sa que je voulais que je voulais faire référence .

j'ai un exemple concret ,lors de la professionnalisation en France ,pas mal de militaire du rang on put continué une carrière (avant la professionnalisation ,même des "bons" n'étaient pas sur de faire carrière chez les MDR dans les régiments déjà pro ) en étant muté dans d'autres régiment et d'autres armes .sa a permit par exemple d'apporté une expérience et de "militarisé" dans l'esprit .

exemple dans l'ALAT sa a permit à l'encadrement (sous off ) qui géraient du technique (pilote mécano ,soutien etc...) d'avoir une aide dans le domaine de la discipline (avant s'était des appelés qui étaient là pour soutenir et en faisant très peu de travail "militaire" ,le gars faisait un taf peinard pendant son service ) ,le travail de base de soldat (utiliser les différentes armes ,faire du 0/0 etc ...) déjà au travers de la formation de base des jeunes EVAT et dans la continuité (examen type CME )et sur des sorties terrain .

la création de PRB dans l'ALAT avec une équipe IMEX comme gâteau sur la cerise pour un EVAT ou un cadre en est un exemple .

on a accentué les liens est les sentiments inter-arme rien qu'avec la côte d'ivoire ,lorsque les gazelles canon de 20 mm faisaient de l'appui en 2002 au profit des troupes au sol

on s'est aperçut qu'on manqué d'une véritable liaison/coordination appui air sol au niveau ALAT ,et les exercices avant le départ en RCI ont travaillé dans se sens par la suite .

donc quelques part on a prit conscience qu'on n'était plus dans un mode chacun dans son coin opérant occasionnellement en commun .

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Autre exemple historique: l'armée romaine, qui a évolué lentement du modèle légionnaire "généraliste" vers la spécialisation dans un dispositif interarme. Le modèle légionnaire pour les citoyens romains ne pouvait fonctionner sans des unités spécialisées, d'abord alliées (socii) puis, avec le changement d'échelles des armées et l'extension progressive de la citoyenneté, mercenaires et alliés moins fixes (auxilliaires). L'avènement de l'empire a intégré militairement les auxiliaires pour en faire une "deuxième armée" numériquement équivalente à l'effectif légionnaire, puis plus nombreuse, mais surtout rendue ainsi plus homogène en qualité et fiable politiquement. La mise en garnisons communes, l'extension de la citoyenneté, puis l'usage opérationnel de task forces adaptées aux tâches du jour (donc n'emmenant pas des légions entières, mais "dosant" mieux les forces nécessaires, surtout en fonction des impératifs de mobilité et de conservation de troupes aux frontières) ont progressivement rendu inévitable une spécialisation.

Il est discutable de voir aussi dans cette spécialisation progressive des unités un corollaire d'une baisse de qualité du recrutement, ce qui ne compromettait pas forcément l'efficacité globale, mais si et seulement si le commandement, et par là aussi la tête politique, était à la fois compétent (et il faut plus de compétence pour gérer un tas d'unités spécialisées) et uni (et les querelles internes peuvent être nombreuses: des rivalités "calmes" aux conflits de personnes et aux guerres civiles ouvertes ou en devenir). Mais il est clair que de toute façon, la spécialisation fragilise un dispositif global en rendant chaque unité relativement plus "précieuse", moins risquable, mais aussi plus dépendante des autres, ce qui exige une coordination supérieure. De même, l'adaptabilité, la réactivité, peut en pâtir.

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Autre exemple historique: l'armée romaine, qui a évolué lentement du modèle légionnaire "généraliste" vers la spécialisation dans un dispositif interarme. Le modèle légionnaire pour les citoyens romains ne pouvait fonctionner sans des unités spécialisées, d'abord alliées (socii) puis, avec le changement d'échelles des armées et l'extension progressive de la citoyenneté, mercenaires et alliés moins fixes (auxilliaires). L'avènement de l'empire a intégré militairement les auxiliaires pour en faire une "deuxième armée" numériquement équivalente à l'effectif légionnaire, puis plus nombreuse, mais surtout rendue ainsi plus homogène en qualité et fiable politiquement. La mise en garnisons communes, l'extension de la citoyenneté, puis l'usage opérationnel de task forces adaptées aux tâches du jour (donc n'emmenant pas des légions entières, mais "dosant" mieux les forces nécessaires, surtout en fonction des impératifs de mobilité et de conservation de troupes aux frontières) ont progressivement rendu inévitable une spécialisation.

Il est discutable de voir aussi dans cette spécialisation progressive des unités un corollaire d'une baisse de qualité du recrutement, ce qui ne compromettait pas forcément l'efficacité globale, mais si et seulement si le commandement, et par là aussi la tête politique, était à la fois compétent (et il faut plus de compétence pour gérer un tas d'unités spécialisées) et uni (et les querelles internes peuvent être nombreuses: des rivalités "calmes" aux conflits de personnes et aux guerres civiles ouvertes ou en devenir). Mais il est clair que de toute façon, la spécialisation fragilise un dispositif global en rendant chaque unité relativement plus "précieuse", moins risquable, mais aussi plus dépendante des autres, ce qui exige une coordination supérieure. De même, l'adaptabilité, la réactivité, peut en pâtir.

s'est marrant ,mais le schéma Romain que tu détails me fait penser approximativement à celui des USA actuelle ,enfin je le perçoit comme sa .

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En quoi? Là, la "double armée" légionnaires-auxilliaires est terriblement interdépendante; les groupements d'unités d'auxilliaires ne sont pas les Marines, même s'ils peuvent souvent gérer seuls les petits accrochages locaux. mais quand il faut se déployer en task forces un peu plus conséquentes, la totalité du dispositif est requise pour avoir une force "complète". Les auxillaires, ce sont des unités d'archers, de cavalerie lourde (puis aussi "d'ultra-lourds"), de cavalerie légère (archers et javelinistes montés), des fantassins légers (pour l'escarmouche, l'embuscade, la reco, le harcèlement, la poursuite) et des fantassins d'assaut et flanquement. Les légionnaires, bien que polyvalents, fournissent l'infanterie lourde, les spécialités techniques (avant que des unités permanentes d'ingénieurs et artilleurs ne se créent aussi) et surtout la capacité d'infanterie lourde en grandes unités avec sous-unités, pour le combat articulé.

Plus globalement, il est quand même loisible de constater dans l'Histoire la tendance au conformisme des appareils militaires, qui tendent toujours vers la spécialisation de leurs unités pour une foultitude de raisons, bonnes (recherche d'optimisation d'efficacité, maximisation de l'avantage comparatif particulier) et mauvaises (rivalités et concurrences internes, poursuite jusqu'à l'absurde de la logique en cours, pensée en "petites cases" qui hait la versatilité, réflexe grégaire, castes d'appartenance interne à l'armée, compensation de la faiblesse réelle ou perçue du recrutement et trop faible formation interne qui incite à driller au maximum une tâche unique).... Et ce aux dépends de la versatilité, de la formation.... Résultat, il faut régulièrement créer ou recréer des unités "intermédiaires" entre 2 métiers devenus trop spécialisés pour assurer la cohérence du tout, complexifiant ainsi le dispositif, rendant la coordination plus dure, ainsi que la rapidité, cassant la souplesse, privilégiant certaines armes aux dépends d'autres, créant de nouvelles chapelles.... Et à l'arrivée réduisant la capacité opérationnelle, non seulement parce que le dispositif est plus dur à gérer mais parce qu'il existe plus de catégories avec un effectif équivalent, donc moins de chaque type de troupe, ce qui limite le nombre de "task forces"/armées dont il est possible de disposer, sous peine d'avoir des forces incomplètes ou trop réduites.

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rien n'est figé ,enfin on a une base qui doit se réadapté en "presque" permanence ,car s'est le facteur humain (bon ou mauvais ) qui tend à réapparaître (donc en fonction des aléas et menace )on tente de réajusté ,chose pas évidente car on se base sur une expérience et des personnels qui peuvent prétendre qu'ils sont incontournable .

en réduisant des effectifs par exemple ,on pousse indirectement aussi certaines spécialités ou Armes à se remettre en cause (une sorte de message subliminale qui dirait par exemple on en est plus à attendre les hordes de moujik venant de l'EST ,donc faut revoir la copie au vu de vos effectifs ) ,donc d'une certaine manière à les "poussés" dans une autre direction ,direction qu'on a décidé comme par exemple l'inter-arme qui est disons dans la culture actuelle .

en espérant ne pas être confus .

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Sauf que l'interarme reste une réalité limitée dans l'AdT (pas d'unités interarmes permanentes sauf outremer, et encore ont-elles des compagnies tournantes). Le "plug and play" est une idéologie plus qu'une réalité, parce que pour le faire, il faut plus de cohérence doctrinale, plus de cohérence entre les matériels (ce qui se définit en amont, en fonction d'une conception tactique), une meilleure formation, un meilleur recrutement, une haute exigence, une forte dispo, des cadres réellement adaptés, et aussi une reconnaissance des limites du principe qui imposent certains éléments de spécialisation à certains niveaux (EM opérationnels surtout, mais aussi spécificité de certains métiers de grandes unités: amphibie, montagne, para, blindés).

Entre le soldat universel et l'ouvrier spécialisé, il y a plusieurs options réalistes, mais encore faut-il bien les approcher.

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Pour moi, il me semble que l’élément le plus discriminant est l’échelle à laquelle opère l’armée en question. Prenons l’exemple romain. Tant que ces derniers on à affronter des adversaires proches et rudimentaires le soldat universel suffit à les affronter, et de toutes façon autre chose est inenvisageable au regard de leurs moyens limités ; Mais une fois que leur impérialisme commence à ressembler à quelque, ils s’adjoignent les services d’auxiliaires, qui au fur et à mesure prennent une place grandissante, au point de passer d’appoint, de variable d’ajustement à un organes à part entière de l’armée romaine, et qui finira après un effort de réflexion alliée à la mentalité romaine (ou il faut être actif et aller au devant des problèmes…rien que pour ça ils aurons mon admiration éternelle :-X) par déboucher sur les grandes réformes du IIIème siècles qui institutionnaliserons le système (un coming out impérial quoi :lol:).

Je suppose que ça c’est passé comme ça : les adversaires de plus en plus nombreux et différent dans leurs art de la guerre, a confronté leurs forces à des situations toujours plus complexe à gérer ; sans compter que l’efficacité brut de la légion à du s’émousser avec l’adaptation des ennemies et leurs montés en puissance, au point de rendre ultimement la légion elle-même interarmes dans le fonctionnement de ses unités élémentaires.

En fait, ils ont découvert très empiriquement ce qu’ils avaient entraperçus, mais pas vraiment compris dans la seconde guerre punique.

Il est intéressant de comparer a un autre cas d’école, ou le problème à été pensé beaucoup plus en amont : « L’armée intégré » de Philippe et Alexandre. Les macédoniens – et leur monarchie très déterminé à s’imposer à l’extérieur comme elle la fait en interne, c.à.d. avec violence…- on eu à  penser très tôt l’interarmes ; c’était le seul moyens pour eux d’écraser des adversaires qui était à la fois très capable et leurs égaux, et comme dans le cas romain très divers. 

Dans ce modèle, la spécialisation a le beau rôle : De grandes unités constituées  manœuvrent pour ce concentrer et fracasser un point de l’adversaire (généralement le centre) le tout dans une manouvre coordonné et scripté (dans une certaine mesure), qui s’insère dans une séquence.

Et la spécialisation en questions est très développé, les plus emblématique sont les phalanges et leurs Sarisa démesurés, qui en fait des unités peu maniable, mais elles peuvent bénéficier du soutient des autres éléments de l’armée, soit directement (ils étaient très pote avec les cavaliers :lol:) ou indirectement, par leurs actions de leur coté du dispositif. Et c’est comme ça que ce qui parait très limité est en fait très souple d’usage.

Bien sur la spécialisation n’était pas un absolu, la versatilité dans une certaine mesure était exigé, les lourds pouvaient devenir médians, et les médians léger à l’usage. L’homogénéité des unités élémentaires qui servaient de modules était dans ce cadre d’une grande aide, et n’oublions pas l’excellence du commandement à les manier.

Au fur et à mesure de leurs victoires, ils mettront à contribution les ressources des nouvelles conquêtes, et leurs savoirs faires pour avoir un outil toujours plus complet.  Il suffit de penser aux hoplites Grecs, à la cavalerie Thessalienne aussi importante en nombre et en force que La Pointe par exemple.

Un cas typique ou des spécialistes on ouvert la voie est celle de l’infanterie Agrienne (De grands mecs tatoué qui venait d’un pays froid et venteux, et escaladaient des parois vertical aussi facilement que l’on fait un jogging :lol:) à Halicarnasse ou contre les Uxiens (si si ils ont existé, ce n’est pas sortie d’une BD :lol:, c’était une tribu qui tenait un important défilé) 

Pour l’anecdote, il est intéressant de constater que c’est presque toujours les formations légères et en particulier l’infanterie du même non, qui fait la « boniche » dans les armées de tout temps et à qui on demande le plus d’adaptabilité :O, d’Alexandre à Napoléon.

Je pense que c’est ce qui est arrivé aux romains, très pratiques qu’ils sont, ils ont mis à profits les locaux et ça a finis par déboucher sur une façon d’envisager la guerre qui leur donnaient un atout, leurs permettant de tenir la dragée haute aux éventuelles ennemie par la grâce d’une organisation supérieur ; et c’est comme ça qu’une contrainte est devenue une ressource, un retournement qui a permis de voir une « crise de surextension » se stabiliser.  C’est en tout cas comme ça que je vois la dynamique en questions.

La suite de l’épisode incessamment…

Sur ce, déguster bien vos œufs de pâques les gars ;).

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Pour moi, il me semble que l’élément le plus discriminant est l’échelle à laquelle opère l’armée en question

Tant en termes d'effectifs qu'en termes de distances des théâtres d'opération, c'est effectivement l'une des logiques les plus déterminantes qui soit. Chaque "tranche" d'effectifs supplémentaires (une légion en plus, 5 divisions en plus....) ajoute un grand commandement en plus, donc assez vite un niveau de commandement en plus, avec toutes les logiques pratiques et politiques que ça implique. Mais évidemment, cela change aussi la donne politique, économique (le soutien avant tout, le coût de l'appareil, de la mobilisation....), les enjeux de commandement et luttes internes, les notions de durées d'engagement et les conditions politiques pour une guerre, surtout si elle dure....

Tant que ces derniers on à affronter des adversaires proches et rudimentaires le soldat universel suffit à les affronter

Rudimentaires n'est pas le terme; "limités" tactiquement est plus juste en ce qu'il s'agit de forces adaptées à la dimension des belligérants et au théâtre d'opération, mais les "systèmes d'armes" existants, chez les romains, les Etrusques, les latins, les Samnites.... Sont hautement développés, organisés, sophistiqués et maniés. Il ne s'agit pas de cités ou populations barbares ou arriérées, mais de sociétés développées pour l'époque. C'est principalement le terrain montagneux de l'Italie centrale et du sud qui a fait évoluer les romains d'un modèle phalangite grec vers des formations plus petites, coordonnées et articulées comme la centurie et la manipule, pour trouver un multiplicateur de forces tactique à plus petite échelon, combiné avec le fait de garder toujours des réserves organisées, pas seulement pour faire la décision ou combler une brèche, mais pour assurer la rotation des troupes en cours de combat et optimiser la fraîcheur des combattants.

Cependant, il ne faut pas non plus penser que l'évolution militaire romaine ne dépend que de facteurs opérationnels: le recours aux socii apparaît très tôt et accompagne la spécialisation croissante des Romains dans l'infanterie légionnaire. Dès la conquête des proches voisins latins, Rome met en place un système novateur pour l'époque en n'accablant pas les vaincus autant que les canons de l'époque le veulent, afin de créer une division du travail: l'armée romaine (de Rome proprement dite) cesse d'avoir des masses de fantassins légers et de cavalerie de tous types pour conférer ce rôle aux dits alliés, afin de montrer sa confiance, de les mettre à contribution tout en les intéressant à la conquête, et de les rendre plus dépendants tout en "intégrant" progressivement les populations et élites. C'est de ce moment que date le maintien d'une cavalerie proprement romaine de très faible effectif, qui correspond aussi au lobbying de la classe des equites pour garder ce qui "marque" leur statut, les rend uniques. De même, comme infanterie légère romaine ne restent que les vélites, soit la plus basse catégorie sociale de citoyens recensés ET astreints au service (la plus basse du cens n'a pas d'obligation militaire parce qu'elle ne possède rien et n'a donc, dans la mentalité d'alors, pas de motivation pour se battre sauf en cas de menace absolue contre la vie de Rome), ceux qui n'ont pas les moyens d'un équipement militaire.

Par la suite, la "romanisation" progressive des socii d'Italie (surtout pendant et après les Guerres Puniques, et définitivement avec les guerres sociales) les intègre dans le dispositif légionnaire, renvoyant les spécialités autres à des élliés de plus en plus lointains, et surtout au recours au mercenariat.

Mais une fois que leur impérialisme commence à ressembler à quelque, ils s’adjoignent les services d’auxiliaires, qui au fur et à mesure prennent une place grandissante, au point de passer d’appoint, de variable d’ajustement à un organes à part entière de l’armée romaine, et qui finira après un effort de réflexion alliée à la mentalité romaine (ou il faut être actif et aller au devant des problèmes…rien que pour ça ils aurons mon admiration éternelle ) par déboucher sur les grandes réformes du IIIème siècles qui institutionnaliserons le système

Attention, les auxilliaires sont des soldats réguliers (uniforme, rôle de paie, règles, homogénéité de l'entraînement, intégration dans le dispositif permanent, garnisons, discipline, officiers, carrières, contrats....) à partir des grandes réformes d'Auguste directement après la dernière guerre civile, soit avec la "création" de l'Empire. Une différence de statut, de paie ou de conditions spécifiques ne change pas cela, étant donné que ces petites distinctions entre unités demeurent après le IIIème siècle (paie, uniformes, privilèges....).

sans compter que l’efficacité brut de la légion à du s’émousser avec l’adaptation des ennemies et leurs montés en puissance, au point de rendre ultimement la légion elle-même interarmes dans le fonctionnement de ses unités élémentaires.

C'est là apparemment que la qualité du recrutement a pu jouer (c'est discutable et discuté d'ailleurs), la spécialisation pouvant aussi correspondre au potentiel plus limité des recrues.... Mais effectivement, le premier motif est sans doute avant tout opérationnel, et correspondant somme toute au schéma d'évolution romain, la spécialisation montante du dispositif à grande échelle (continue depuis les guerres puniques), la sophistication du dispositif et des systèmes d'armes, la maximisation des effets collectifs combinés comme de l'effet de chaque unité et spécialité, la rapidité de la coordination.... Soit le travail des avantages comparatifs romains. Mais le tout à effectifs constants induit une fragilisation corollaire du dispositif global, puisque la dépendance accrue des unités de spécialités différentes va nécessairement de pair avec le développement de leur avantage particulier.

Mais la légion est à la base interarme par la polyvalence du légionnaire et des petits effectifs de spécialistes permanents (auxquels, selon la tâche, s'adjoignent des légionnaires affectés temporairement au rôle spécialisé). L'évolution impériale est justement l'abandon progressif de ce caractère interarme, surtout à partir du IIème puis du IIIème siècle: la légion n'est alors plus qu'un bataillon d'infanterie lourde d'un millier d'hommes (avec peut-être un petit contingent organique d'archers/javelinistes, mais c'est pas sûr), généralement couplé avec une cohorte auxiliaire de fantassins d'assaut et/ou légers (lanceurs de traits ou unité de choc).

Pour l’anecdote, il est intéressant de constater que c’est presque toujours les formations légères et en particulier l’infanterie du même non, qui fait la « boniche » dans les armées de tout temps et à qui on demande le plus d’adaptabilité , d’Alexandre à Napoléon.

Et elle est rarement créditée pour ces rôles par rapport aux unités "stars" que sont les unités de ligne qui font l'essentiel du boulot mais uniquement dans la bataille proprement dite, là où les "légers" et polyvalents font le boulot entre les batailles, pendant les campagnes et la marche (accrochages, combats -par opposition aux batailles-, reconnaissance, commandos....). Et plus la spécialisation des unités de ligne est poussée en avant, pour X ou Y raison (qualité faiblissante du recrutement, raisons opérationnelles/tactiques, logique de chapelle....), plus il faudra d'unités de "boniches", voire d'unités faisant le lien entre les "purs" légers et les "lourds", alourdissant la complexité du dispositif, sa fragilité.... L'armée macédonienne des guerres contre les Romains est l'exemple type d'une dérive grave de la spécialisation: disproportionnée (l'infanterie phalangite passe de 25-30% de l'effectif sous Alexandre à plus de 40 voire 50%), monotâche, avec un commandement qui n'est plus capable de gérer ce dispositif très exigeant dans des temporalités satisfaisantes et avec une souplesse et une adaptabilité optimales. Le pouvait-il, vu l'évolution du dispositif?

Insistance culturelle occidentale pour le choc concentré, importance sociale à certaines époques (hoplites, chevaliers, légionnaires).... Font que l'Histoire est en fait mal racontée d'un point de vue opérationnel, en écartant les autres unités des récits malgré l'importance de leur rôle et en accroissant, parfois jusqu'à la caricature, l'importance des unités lourdes, ce qui a fait plus d'une fois commettre de lourdes erreurs militaires dans la définition des appareils de combat et de la tactique.

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Un point particulier et contemporain du débat: le cas de l'aviation d'attaque/d'assaut/tactique, donc celle qui se focalise comme appui du combat terrestre. La question semble pour l'instant relativement tranchée par la séparation entre les voilures tournantes qui concourent des forces terrestres, et les voilures fixes qui ressortent des armée de l'air (quoique les marines semblent pas tout à fait d'accord :lol:). Mais le cas de l'A-10 dans l'US Air Force était marrant: c'est typiquement l'avion dont l'Army a besoin comme appui, et typiquement l'avion dont les forces aériennes ne veulent pas, tout en refusant qu'il soit alloué (ou plutôt ses budgets et son "créneau de marché"/place dans l'orbat) aux forces terrestres. Ces distinctions ne sont pas anodines puisque l'affectation de telle ou telle spécialité à telle ou telle branche déterminera son futur; dans le cas de l'A-10, ça n'a pas été tranché, et l'avion sera juste prolongé un moment sans avoir de remplaçant. Une AdA voudra faire des trucs "plus hauts, plus grands, plus rapides", une AdT voudra des trucs "plus nombreux, plus rustiques, plus bas", mais l'arme qui "a" cette spécialité détermine ce qu'elle deviendra; résultat, en vertu de cette séparation hélicos-avions, les AdA condamnent l'appui rapproché sur voilure fixe, et des trucs comme l'A-10 seront plutôt des exceptions. Selon le moment, ça peut n'être pas trop dérangeant, à d'autre, il peut se créer, surtout avec le temps, un gap important qui ne sera pas forcément compensé.

Côté combat terrestre, du coup, pas de camion à bombes pour l'appui rapproché, des avions AdA au compte goutte qui décident de ce qu'ils peuvent larguer, et uniquement des hélicos rares et chers vu que s'il est une constante militaire historique, c'est la limitation des budgets :lol:.

Question de néophyte absolu sur le sujet: pourquoi les AdT en général, et sans doute les artilleries et/ou les ALAT en particulier, ne cherchent pas à développer du drone le plus cheap possible pour retrouver un effet masse/rustique/sacrifiable dans l'attaque rapprochée? Du Sturmovik sans pilote, quoi :lol:! Plutôt que les cantonner au repérage, et vu que les aviations/unités de renseignement vont déjà dans le drone très cher et persistent dans la montée en gamme et en coûts rapide (cas du successeur du Reaper), pourquoi ne pas faire la solution "grande distribution et effet non sur les marges mais sur la masse"? L'obus est sans doute bien plus rentable, mais en l'occurence, ce genre d'idée implique t-il des coûts si énorme que les 2 ne sont pas envisageables de concert, surtout vu ce que coûtent les hélicos d'attaque modernes?

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Question de néophyte absolu sur le sujet: pourquoi les AdT en général, et sans doute les artilleries et/ou les ALAT en particulier, ne cherchent pas à développer du drone le plus cheap possible pour retrouver un effet masse/rustique/sacrifiable dans l'attaque rapprochée?

parceque tout ce qui vole et qui fait boom sur les gars avec les rangers sales plus bas est sous controle des AdA

et que les AdA ont décidées que y'aurait plus d'appui CAS sans munitions de précisions

avec ces 2 raisons tu peux comprendre pourquoi y'a pas de drone blindé monté autour d'un canon de 30-40-60 mm

il n'y a que le X47 de l'USNavy qui se soit un tantinet echappé de cette querelle de clochers (vu que l'USN a une autonomie plus large de missions et un poids au congrès > à celui des biffins/marines)

quant à l'A10 il a faillit passer par pertes et profits s'il n'avait pas démontré son utilité pendant la guerre du Golfe (et pourtant ca a fait grincer des dents et crisser des ongles chez pas mal de généraux de l'USAF)

c'est pourtant pas moi qui vais t'apprendre quel peut etre le poids d'un lobby version guerre de clochers

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Yup! Y'a en plus le lobbying de la chapelle des industriels qui ne veulent pas trop de matos cheaps en grandes quantités: pour des boîtes qui calculent avant tout en bénfice marginal et cherchent à maximiser les marges à tous les échelons, ça le fait pas trop :lol:!

Mais comme quoi, placer telle ou telle spécialité, nouvelle ou moins nouvelle, dans une arme donnée, dans une chapelle ou sous-chapelle donnée, c'est vraiment pas neutre: que se serait-il passé, rétrospectivement, si pendant la 1ère GM, les unités de mitrailleuses (voire toutes les unités d'appuis mobiles légers) avaient été considérées comme une arme à part, placées auprès de l'artillerie, ou instituées comme spécialité (donc chapelle) en propre dans l'AdT au même titre que l'infanterie? Après tout pourquoi pas? Des développements pas si inintéressants auraient pu avoir lieu.... Ou bien des impasses et des conneries sans nom.

L'histoire du char est à cet égard édifiante, particulièrement en France (voire le sujet dédié sur la cavalerie); il aurait pu rester organique à l'artillerie (son arme de départ), devenir une "panzerwaffe" autonome de l'infanterie et de l'artillerie comme de la cavalerie (qui serait devenue une petite branche spécialisée dans la reco, les coups de main rapides, l'intervention mobile....), développant prématurément ses propres "pré-divisions blindées" précisément parce que se pensant à partir de ses besoins propres et "pesant" en interne en ce sens.... Ou être de la cavalerie autocentrée avec une vision de cavalerie comme actuellement, totalement inadapté au champ de bataille, qu'il s'agisse des conflits en cours ou prévisibles, ou même en cas de "grand conflit" contre un adversaire tout aussi mécanisé.

Les chapelles, armes et spécialités sont au final toujours le témoignage de l'enkystement de l'organisation et de la réflexion, pesant par essence, surtout dans les armées permanentes ET professionnelles, sur l'organisation pratique et la réflexion d'une manière qui ne se proportionne pas tant à l'aspect opérationnel qu'aux intérêts, affectations de ressources et rapports de forces internes, comme jadis se disputaient les aristos, ministres, hauts magistrats et autres, en interne, pour la puissance politique de leurs départements respectifs (évidemment ça n'existe plus aujourd'hui, ça :-[ :rolleyes: :P :lol:).

Le pire étant qu'une part de ces luttes se justifie aussi en partie par l'honnêteté de chaque chapelle quand à sa propre réflexion opérationnelle, à ceci près qu'elles pensent la guerre en fonction de LEUR point de vue (ce qui est normal dans le principe).... mais plus le temps passe, plus la pensée de spécialiste l'emporte, et parallèlement, plus les disproportions dans les dispositifs et réflexions s'accentuent et se conjugent aux immobilismes divers, le tout dans le cadre de crédits toujours insuffisants (qui accroissent la concurrence pour les ressources). Après 10 ans, c'est folklorique. Après 40 ans, c'est dramatique.

Pour compenser, il faut un "centre" avec une vue d'ensemble dépassionnée et pointue, qui plus est un qui a aussi l'autorité et la marge de manoeuvre politique pour imposer ses solutions.... Mais ça se trouve pas sous les sabots d'un cheval ou les chenilles d'un blindé (et de toute façon ils sont à roues maintenant).

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Mais le cas de l'A-10 dans l'US Air Force était marrant: c'est typiquement l'avion dont l'Army a besoin comme appui, et typiquement l'avion dont les forces aériennes ne veulent pas, tout en refusant qu'il soit alloué (ou plutôt ses budgets et son "créneau de marché"/place dans l'orbat) aux forces terrestres. Ces distinctions ne sont pas anodines puisque l'affectation de telle ou telle spécialité à telle ou telle branche déterminera son futur; dans le cas de l'A-10, ça n'a pas été tranché, et l'avion sera juste prolongé un moment sans avoir de remplaçant. Une AdA voudra faire des trucs "plus hauts, plus grands, plus rapides", une AdT voudra des trucs "plus nombreux, plus rustiques, plus bas", mais l'arme qui "a" cette spécialité détermine ce qu'elle deviendra; résultat, en vertu de cette séparation hélicos-avions, les AdA condamnent l'appui rapproché sur voilure fixe, et des trucs comme l'A-10 seront plutôt des exceptions. Selon le moment, ça peut n'être pas trop dérangeant, à d'autre, il peut se créer, surtout avec le temps, un gap important qui ne sera pas forcément compensé.

Bah ! J’ai longtemps pensé qu’ils étaient reliés à l’Army, induit en erreur que j’ai été…………par la couleur :-X :lol:

parceque tout ce qui vole et qui fait boom sur les gars avec les rangers sales plus bas est sous controle des AdA

et que les AdA ont décidées que y'aurait plus d'appui CAS sans munitions de précisions

avec ces 2 raisons tu peux comprendre pourquoi y'a pas de drone blindé monté autour d'un canon de 30-40-60 mm

il n'y a que le X47 de l'USNavy qui se soit un tantinet echappé de cette querelle de clochers (vu que l'USN a une autonomie plus large de missions et un poids au congrès > à celui des biffins/marines)

quant à l'A10 il a faillit passer par pertes et profits s'il n'avait pas démontré son utilité pendant la guerre du Golfe (et pourtant ca a fait grincer des dents et crisser des ongles chez pas mal de généraux de l'USAF)

c'est pourtant pas moi qui vais t'apprendre quel peut etre le poids d'un lobby version guerre de clochers

Ce genre de débat a des airs de déjà vu…mmmm ?

Je me souviens ! Juste après la seconde guerre mondial ; la Navy s’opposait à  l’Air Force qui voulait monopoliser la toutes nouvelle arme nucléaire ; la violence de l’affrontement partait de l’idée que tout les problèmes à l'avenir pourraient être réglé au nuke ; c’est ce que pensait les américains, et même tout le monde à l’époque. Conséquence, le détenteur de la Bombe est le patron……..mais la Corée et passé par là.

La question des drones se pose en des termes à peine différents, sauf que là, une vision réaliste du problème met du temps  à s’imposer. 

Il suffit de voir comment les américains, dans une petite guerre comme Afghanistan, ont manqué de suffisamment de drones en début de conflit. Ils ont un peu compensé le problème, mais je les imagine mal faire face à un conflit d’ampleur, dans un environnement complexe, surtout quand on connait la proportion de ces engins à tomber facilement.

Je trouve qu’ils passent trop à coté, ou plutôt négligent l’effet de masse et la notion de quantité.

C’est d’ailleurs, pour en revenir au sujet, dans des armées modernes avec des ressources compté qui impose de fait, exige de porter au pinacle l’unité généraliste ; des équipements cheap, peu couteux mais très spécialisé, sont de bonne prothèse à envisager pour des troupes en mal de versatilité

Autre chose, l’Ada est jalouse de ses prérogative, mais je me demande à quel point la faute n’incombe pas aussi aux « Terriens » qui se complairaient dans un certain conservatisme, et seraient un peu « paresseux » en ne se saisissant pas de ces nouvelles opportunités.

Après tout, mobiliser quelque millions, centaines ou encore dizaines de milliers d’euros et utiliser du matos civil pour faire des essais, valider des concepts, des doctrines, ne doit pas être très compliqué. Rappelez-vous Guderian et ses premiers tests de Panzers : juste du papier mâché sur des voitures qu’il a fait driller et manœuvrer ; ça a du en faire marrer plus d’un, mais comme ont dit « rira bien qui rira le dernier », et pour le coup ça a du rire jaune…

Mais au fait ! La chasse aux œufs de pâques a été bonne ? Les lapins en chocolats étaient gouteux  ? :lol:  :happy:    :oops:

 

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  • 1 month later...

Un petit remontage sur la genèse (rapidement) du "greek warfare" de l'apogée hoplitique aux lendemains des guerres des Diadoques et à la conquête romaine; à mentionner parce qu'il s'agit bien d'une évolution assez prononcée vers un cadre profondément ancré dans une logique de spécialisation.

A noter que cette spécialisation correspond aussi à la baisse du modèle démocratique au profit des monarchies et systèmes centralisés qui suivent la conquête alexandrienne: un chef, généralement un roi, peut être durablement un expert militaire et donc appréhender le maniement complexe d'un "système interarme" sur le champ de bataille et en campagne, et en coordonner sans contestation ou discussion les effets combinés. En tout cas il le devrait. Mais ce modèle est né des lendemains d'Alexandre car tous ceux qui lui ont succédé, les Diadoques, étaient ses généraux, répétant le modèle qu'ils ont connu et qu'ils savaient utiliser au mieux même s'ils se sont adaptés aux réalités locales de leurs territoires. Plus tard, il ne restait plus que 3 royaumes qui devinrent des dynasties durables (Macédoine, Empire Séleucide et Egypte lagide). Donc il s'agit d'une tactique éminemment centralisée, et qui ne marche que si le général/roi connaît et comprend la chose, ce que beaucoup de successeurs ont perdu de vue.

Au début de la guerre du Péloponèse, n'existe en théorie comme arme réellement entraînée que le hoplite: le reste est fait de conscrits et/ou mercenaires auxquels peu de ressources sont consacrées, sauf pour la cavalerie, souvent en partie aristocratique, qui sert surtout à transporter rapidement des combattants à pieds et/ou qui frappent à l'épée depuis leur cheval, ciblant les troupes légères. Existent aussi les Ekdromoi, qui sont une partie du contingent hoplitique dont l'équipement est allégé pour combattre à l'épée sur les flancs de la phalange, de façon plus mobile et en petits groupes. Hors les hoplites, il y a des fantassins légers de 2 types: les frondeurs, javeliniers et archers (= "troupes de tir" et escarmoucheurs, appelés "psiloi" quoique ce terme puisse aussi recouvrir des épéistes sans armure ni bouclier), culturellement mal vus (arme de "lâche") mais nécessaires, et les peltastes.

Ces derniers sont une sorte d'infanterie médiane: équipés à la hoplite pour l'armement, avec en plus des javelots, ils n'ont pas d'armure ou une légère, et combattent peu en phalange quoiqu'ils puissent le faire, surtout après les guerres du Péloponèse. Cependant, leur emploi tend à faire évoluer tant leur capacité que leur armement, leur statut et leur niveau, de même que l'évolution sociale, économique et politique grecque les fait changer. A la base, il s'agit des hommes libres et citoyens les plus modestes (ne pouvant se payer un équipement de hoplite), assez peu nombreux, et dont le rôle est celui de troupes de poursuite, d'éclaireurs et de protection des flancs de la phalange, surtout le flanc droit, le plus exposé (le bouclier étant porté à gauche). Ils sont généralement mieux formés: s'ils n'ont pas d'équipement de hoplite, ils ont suivi l'entraînement et ont eu une éducation citoyenne qui comporte donc le sport et l'art de la guerre, partie intégrale de l'éducation grecque, terriblement belliqueuse par nature. Au final, la distinction initiale entre eux et les Ekdromoi va finir par disparaître au moins pour le volant opérationnel.

2 choses vont accélérer le changement:

- les guerres du Péloponèse qui rompent le rythme cyclique de la guerre entre phalanges de cité qui s'affrontent sur rendez-vous pour une confrontation purement frontale. Il s'agit d'une "vraie" guerre, d'une guerre totale qui voit le cadre socio-politico-religieux voler en éclat et les cités s'affronter en utilisant tactique et stratégie, donc en développant leurs outils de guerre selon ce fait. Les Peltastes sont largement plus utilisés que la phalange pendant cette guerre, et le plus souvent, les citoyens hoplites combattent à la peltaste dans des affrontements plus souvent faits de raids et de coups de main que de grandes batailles rangées. Une troupe athénienne de peltastes détruira d'ailleurs un lochos de hoplites spartiates en utilisant le couple javelots-épée. La spécialiation s'affirme donc, et développe des savoirs-faires

- la polarisation des richesses, accélérée par les guerres du Péloponèse qui ravagent les économies grecques. Un grand nombre de paysans-citoyens sont chassés de leurs terres, celles-ci sont laissées à l'abandon pendant longtemps.... Bref, des hordes d'hommes sans emploi ni biens se retrouvent sans rien aux lendemains de la guerre. Sans rien sinon une éducation guerrière et un savoir-faire acquis: ils se font mercenaires, et le mercenariat explose à cette date, les effectifs se comptant par dizaines de milliers. L'empire perse sera de loin le premier client de ces hommes, et le plus célèbre traité militaire antique, L'Anabase de Xénophon, est ainsi l'histoire d'une troupe mercenaire grecque avant tout faite de peltastes (avec aussi des hoplites et des ekdromoi quoiqu'à cette époque il soit difficile de savoir si ces derniers sont un type de soldats ou des hoplites et/ou peltastes employés ainsi) retraitant depuis la défaite de leur patron, prétendant vaincu à l'empire, vers la côte anatolienne.

A ce stade, le peltaste est nettement plsu professionalisé et polyvalent: il peut aussi bien jouer le "hoplite léger" qu'éclater en formations plus petites pour aller au contact offensif (javelot-épée), ou encore faire le fantassin léger (reco, escarmouches, opérations "spéciales"). Et ce avant tout parce qu'il s'agit désormais d'un soldat professionnel et permanent. Plus tard, l'évolution se fera en partie aussi vers le thuerophoroi, combattant léger, et le thorakites, 2 spécialités issues des évolutions du hoplite et du peltaste face aux changements des modes de combat, "peltaste" devenant une appellation institutionalisée dans les armées des diadoques, et un corps à part entière et très valorisé après avoir été successivement du combattant léger à peine mieux que du rebut, puis un synonyme de "mercenaire", puis enfin avec la Macédoine une spécialité à part entière.

D'autres spécialités sont devenues permanentes avec la guerre du Péloponèse: la Crète forme ses fameux archers (qui ont un arc spécial, mais portent aussi un bouclier et une épée et savent s'en servir, ce que prouve leurs tarifs) qui sont loués par unités entières, et toutes les cités ont leurs contingents de peltastes, de valeurs variables, qui sont à louer. Des unités de cavalerie, comme en Thessalie particulièrement, se sont spécialisées et professionalisées: la cavalerie lourde thessalienne est de loin la meilleure, ses hommes chargeant à la lance longue et à l'épée en formations organisées et souples, et emmenant aussi des javelots.

Quand commence la conquête macédonienne, la guerre a donc déjà radicalement changé en Grèce. Thèbes a monté son "Bataillon Sacré", coeur professionnel de sa troupe, pour défaire la phalange spartiate, jusqu'ici la seule armée pro de Grèce, mais en se servant d'une tactiqeu innovante (l'ordre dit "oblique") pour optimiser leur effectif plus faible. C'est l'ensemble de ces leçons que Philippe de Macédoine, longtemps otage à Thèbes, va mettre à profit pour édifier, comme une gigantesque synthèse portée à son point le plus élevé de professionalisme dans toutes ses branches.

Le modèle macédonien n'a pu naître ainsi que dans un royaume et non une cité: la volonté centralisatrice, les moyens permanents (par opposition aux cités qui ont besoin d'un recours à la conscription, à un faile noyau permanent et à un apport ponctuel de mercenaires) et la capacité de commandement professionel et incontesté n'existent que là. Donc l'outil qui va avec en vient et a débarrassé l'art grec de la guerre des conceptions sociales, ulturelles et économiques qui déséquilibraient, affaiblissaient et tronquaient le modèle. Rome a eu une autre évolution, à partir d'un petit noyau dont elle a généralisé le modèle au fur et à mesure de la conquête.

L'armée macédonienne a ainsi développé toutes les spécialités avec la même volonté de professionalisme; il ne faut pas se laisser abuser par la place, dans les récits, de la phalange:

- la phalange elle-même: équipée d'une nouvelle lance 2 fois plus longue (6m en moyenne) et à 2 pointes (une de chaque côté pour l'équilibre et pouvoir retourner si l'autre est cassé), d'une épée courte, d'un bouclier nettement réduit (60-70cm contre 1m) et allégé (pas de doublage en bronze ou fer), d'une armure de cuir (pas en métal) et de protections (jambes et casque) en bronze ou fer, le phalangite macédonien a un équipement 2 fois moins lourd que son homologue hoplite des cités. Il est donc nettement plus mobile et endurant, et ce d'autant plus que même s'il est issu de la conscription en Macédoine, il est un professionnel dont l'entraînement est nettement plus poussé et donc aussi varié: apte à utiliser aussi l'équipement hoplitique traditionnel ou à opérer comme peltaste (à l'épée surtout), il est surtout très drillé pour un usage développé de la phalange, non seulement comme unité lourde lente, mais aussi comme unité mobile (grâce à la légèreté) d'attaque, aux longues marches rapides, aux manoeuvres et formations désormais variées.... L'organisation est standardisée et professionalisée en unités de 1500h (taxeis) et sous-unités de 256h (syntagmata ou lochoi), la compagnie de l'époque, divisée en 4 tétrarchies de 64h (qui se décompose en 4 files, ou lochos, de 16h). L'encadrement est plus important (3 sous-offs pour chaque file -le groupe de combat- de 16h), de même que les coms et l'encadrement de sous-unités (1 chef par lochoi et ses aides séparés de l'effectif, plus 5 "transmetteurs" visuels, par messages et audios). La mobilité autorisée par le professionalisme (temps d'entraînement, variété des savoirs-faires, encadrement nombreux et séparé, chaîne de com spécialisée) et la légèreté fait plus que compenser la protection moindre: coordination, tactique offensive, manoeuvres complexes et combat interarme diminuent l'attrition bien plus que la lourdeur des armures.

- la cavalerie lourde (hetairoi et thessaliens): arme de la décision désormais, il s'agit d'une formation d'élite faite de combattants à pied ou à cheval, protégés et chargeant à cheval à la lance (donc arme de choc et rupture contre la cavalerie ou l'infanterie), emmenant quelques javelots, et apte à la mêlée au glaive, à cheval comme à pied. Elle a une capacité de manoeuvre en formations complexes. A la base formée par les compagnons cavaliers du roi, elle se double de la thessalienne rapidement

- la cavalerie légère (prodromoi): là aussi des professionnels et non plus du "rebut" (certains pensent que tout ou partie de l'effectif est fait des jeunes nobles qui y "font leurs classes" avant d'aller dans la lourde), il s'agit d'unités de reco et de coups de mains, mais aussi d'unités qui appuient la lourde en mêlée (en s'équipant d'une lance longue, devenant ainsi "sarissophores") et en poursuite, toute aussi apte au combat en formation

- l'infanterie lourde/médiane: les hypaspistes sont l'élite à pied de l'armée macédonienne. Leur équipement standard est celui de hoplites traditionnels (sans doute en allégé), mais ils peuvent aussi utiliser la sarisse comme les phalangites ou combattre "à la légère" comme peltastes (plus tard leur "corps" d'appartenance). leur degré de professionalisme et leur niveau de sélection (il s'agit d'unités "royales" et non d'unités basées sur la conscription, donc organisées sur base locale, ce qui suggère un processus de sélection; pas mal d'entre eux ont du être des phalangistes qui se sont fait remarquer) permet une grande souplesse d'emploi. Ils mènent combat plus souvent avec la lance (polyvalente: à lancer ou comme lance d'arrêt) et l'épée (pour l'assaut), mais sont avant tout faits pour la polyvalence, jouer l'élément de souplesse du dispositif de bataille. Leur organisation est en Chilliarchies de 1000h environs, comptant 4 lochoi de 256h analogues à ceux de la phalange.

- les peltastes: combattants légers et mobiles, ils sont là pour la reco (en campagne) et la mêlée sur le flanc des phalanges et entre elles si besoin est, avec une capacité à la manoeuvre sur le flanc. Une partie seulement est macédonienne, l'autre étant celle des "alliés" grecs et de mercenaires, ce qui explique l'usage moindre qui en est fait, ou limité à la couverture de flancs et à la tenue des arrières. Plus tard, sous les diadoques, eux aussi deviendront une arme de plein droit, que les hypaspistes rejoindront et dont ils formeront l'élite

- les psiloi: essentiellement des troupes de missiles faites pour la reco, le harcèlement (en guérilla et en bataille), ils sont aussi en partie faits de mercenaires et alliés. A noter que dès le début du règne d'Alexandre, certains sont aussi des combattants légers à l'épée issus des tribus celtes des bouches du Danube

- l'artillerie: pour la première fois, une armée va se servir d'armes "collectives" pour autre chose que les sièges. De engins propulsant pierres et flèches servent en bataille à Alexandre, au sein de ce qui est désormais un corps de spécialistes

Et ce dispositif ne serait rien sans des officiers ayant un vrai EM et un savoir-faire pour coordonner l'effort dans une volonté commune qui sait s'adapter et opérer avec un timing précis pour optimiser l'effet interarme. La phalange sous Alexandre comme les Diadoques, ne représentera jamais plus du tiers d'un effectif de campagne (Alexandre n'aura même jamais plus de 6 phalanges/taxeis à la fois dans son armée, soit 9000h sur un effectif moyen de 40 000h, ce qui prouve avant tout un focus sur l'approche interarme, la mobilité, la versatilité et la manoeuvre. A opposer avec les guerres Macédoine-Rome où les descendants des diadoques, confrontés pendant plus d'un siècle les uns aux autres avec le même modèle d'armée, ont perdu beaucoup de capacités et entraîné un affaiblissement du modèle philippo-alexandrien de la guerre: les armées confrontées à Rome étaient faites pour moitié, ou jusqu'aux 2/3, de phalangistes lourds qui étaient d'ailleurs pluslourds ("blindés"/protégés par des armures métalliques) et sans doute moins mobiles/versatiles et drillés (moins de savoirs-faires) que leurs ancêtres. C'est un des risques de la spécialisation: pousser toujours la chose un cran plus loin (une arme devient plus dépendante des autres, perd du savoir-faire, sans doute avant tout par mesure d'économie sur la formation: recherche d'effectif, temps d'entraînement écourté, équipement fait pour la tâche unique), et surtout illusion qu'un système d'arme est nettement plus décisif que les autres, ce qui le fait bénéficier d'une place disproportionnée et de ressources démesurées. A ajouter au fait d'une évolution en vase clos: les guerres des diadoques ont vu en fait des armées similaires s'affronter et s'adapter de plus en plus purement contre leurs adversaires

EXTENSION: le légionnaire romain tel qu'il se profile avant Marius et tel qu'il se généralise après lui et pendant 1 siècle et demie est en fait l'équivalent d'un peltaste/hypaspiste qui s'organise en vastes formations au service d'une tactique plus élaborée. Mais le même mouvement de spécialisation se fait jour dans l'armée romaine au profit d'une vision de plus en plus étriquée concevant le légionnaire comme "fantassin lourd" (dès le règne d'Auguste) alors qu'il est à la base un fantassin médian et assez polyvalent. Sous César, le légionnaire n'a pas vraiment un équipement lourd, bien au contraire. Il se blinde au premier siècle après JC, amorçant, ou plutôt poursuivant une évolution romaine au final analogue à toute armée professionnelle qui existe sur une longue période, avec les avantages que cela implique, mais aussi tous les travers. Cet alourdissement, corollaire d'une spécialisation, est accompagné par la régularisation massive des unités d'auxilliaires qui couvrent de façon de plus en plus professionnelle et organisée toutes les fonctions que le légionnaire pouvait jadis remplir -mais au prix d'un affaiblissement quantitatif de l'effectif dédié au combat d'infanterie de ligne- et ne sait plus faire. Nécessité en raison d'une armée moins nombreuse et/ou d'un effectif limité au regard du territoire à couvrir? Nécessité face à des adversaires croissant en compétence? Evolution dictée par les retex et constats des limites de la "polyvalence"? Evolution par mentalité "de chapelle"? Optimisation des moyens collectifs dans une armée permanente regroupée en garnisons interarmes, et dont les officiers veulent et peuvent désormais optimiser le rendement tactique (en ayant plein "d'excellents en une ou deux tâches" qu'ils savent combiner, et non plus une masse de "bons en tout")?

Cette brève  :-[ histoire montre quand même le corollaire majeur d'une spécialisation: plus on divise une armée en spécialités, plus ces spécialités tendront à pousser plus avant leur expertise, devenant plus dépendantes d'autres systèmes d'armes et/ou créant un gap avec les autres spécialités. A cela n'existent que 2 remèdes:

- accroître la qualité du recrutement, de l'encadrement et de l'entraînement (voire de l'équipement) pour maintenir un plus vaste panel de savoir-faire dans chaque spécialité et éviter les gaps, mais aussi avoir des unités pouvant avoir plusieurs fonctions

- créer sans arrêt de nouvelles spécialités "intermédiaires" entre les unités qui se spécialisent trop, ce qui complexifie et alourdit le dispositif, l'éclate en un plus grand nombre de corps pour un effectif égal, le rend moins apte à être séparé en un nombre donné d'unités interarmes autonomes

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