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Survie de l'Empire romain d'Occident au détriment de l'Empire romain d'Orient


Revan
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Je ne parlais pas d'art ou d'organisation politique, toutes les civilisations un peu raffinées ont des production originales dans ces domaines.
L'apport romain occidental aux sciences (mathématiques, physique,...) est déjà assez pauvre, comparativement à la période hellénistique qui a précédé, même s'il y a quelques noms qui surnagent.
Concrètement, qu'a produit l'empire d'Orient dans ces domaines ? Peut-on citer un ou deux mathématiciens de Constantinople ?

Pour ce qui est machines de guerre, je connais moins le sujet, j'imagine bien qu'un Etat qui a pu durer presque 1000 ans devait avoir de bonnes compétences dans ces domaines, mais quoi de vraiment nouveau par rapport à ce que connaissaient déjà des romains occidentaux (et qui a pu être perdu en Occident après la disparition de l'Empire) ? Et sur la fin, les murs de Constantinople se prenaient des boulets de canon tirés par les Turcs, sans que les byzantins aient de quoi répliquer.

 

 

C'est vrai que c'est quelque chose d'assez marquant que cette puissance technologique, assez remarquable, n'est pratiquement rien produit d'important scientifiquement, en terme de concepts. Le pendant latin de cette civilisation souffrait d'un désintérêt presque complet pour les l’abstraction et la spéculation gratuite comme pouvait l'avoir les Grecs.

On dirait que la seule connaissance qui est de la valeur pour les romains ne peut être qu'utilitaire, qu'elle doit servir un but, une fin concrète. J'avoue que ce manque de "gratuité" de la pensé est l'aspect qui me répugne le plus dans leur civilisation, avec aussi leur obsession du fric et leur violence. Comme tout le monde on me dira, mais chez eux ça prend des proportions assez dantesque.

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Le Moyen-Age des sciences ne commence pas à la disparition de l'empire romain, mais à son avènement, après absorption des Etats hellénistiques. Et les quelques noms postérieurs à l'absorption retenus par l'histoire des sciences sont surtout des Grecs (Ptolémée, Galien,...). Même le système de numération romain était une régression par rapport à d'autres systèmes connus dans l'Antiquité (essayez de calculer une multiplication en chiffres romains).
Quant aux Byzantins, ils ont dormis pendant des siècles sur le trésor du savoir grec (ils se méfiaient de ce savoir d'origine paienne), que les Arabes ont su récupérer et développer, après une période d'assimilation de quelques siècles. Moyennant quoi, on trouve des études riches sur la science Arabe, alors que Constantinople est absente de l'histoire des sciences.
Et pourtant, les Byzantins devaient bien avoir un certain goût pour l'abstraction, mais qui parait avoir été détourné vers les débats théologiques.

 

 

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Une uchronie pourrait faire dériver l'empire romain comme l'empire chinois.

Sous Hadrien, un grand mur aurait pu définir les frontières "définitives" de l'empire et tous les empereurs successifs auraient pu le consolider pour en faire un mur digne de la grande muraille de chine. Cette Uchronie permet de régler le problème des menaces extérieures.

Il y avait déjà des structures qui devaient limiter l'empire romain, dont les murs d'Hadrien et d'Antonin sont aujourd'hui les plus visible, bien que dans les faits les murs d'Hadrien et d'Antonin sont plus des obstacles aux opérations de raid et pillage que un moyen pour empêcher les incursions. A vrai dire c'est une sorte de "stratégie de défense en profondeur" que se met en  place au cours du IIIème siècle. Sauf que voilà comme souligné plus haut, le vrai problème ce n'est pas tant les menaces "extérieur" ou en bordure en de l'empire mais bien la fragilité du système impériale romain. Ce qui fait que l'empire d'occident s'effondre plus vite que sa consœur orientale c'est que cette dernière a longtemps été la partie la plus riche de l'empire, tandis que l'empire romain d'occident a accès à beaucoup moins de ressource sans pour autant que les menaces de trouble intérieur (conjuguaient aux menaces de pillage) soit moins nombreux.

Personnellement je doute fort de l'existence d'un empire universel ... comme précisé plus haut vu l'importance de la Méditerrannée dans la stratégie d'expansion et de contrôle de l'empire romain, qui lui facilite les déplacement rapide au quatre coin de l'empire permettant une concentration dans des zones de conflit, elle lui permet aussi de maintenir son système d'Etat-client (du moins durant tout le système dit julio-claudien) pour les garder dans sa "zone d'influence".  Il est donc improbable que les romain poussent l'aventure au delà tant les problèmes logistiques seraient trop grand, sans parler du fait qu'un empire universel est impossible à gérer.

De même, tu as raison de rappeler que le Moyen Age n'est pas une époque sale: les bains publics, et plus largement, les étuves (établissements de bains privés) abondent jusqu'à la Renaissance qui les supprime pour des raisons religieuses. 

Encore que là m'est venu une réflexion en matant l'avatar féminin que j'ai créé dans ma partie sur Xenoblade, qu'il n'y avait pas que la raison religieuse pour la fermeture de ces étuves et autre bains publics. Il est vrai que l'avènement du protestantisme, qui est généralement plus coincé que ne l'était encore le catholisme, a du mettre à mal ces structures ou du moins un effet de concurrence car souvent c'était l'église qui était propriétaire de ces bains. Je suppose qu'il y a eu aussi une dégradation du non seulement aux guerres de religion, mais aussi à une forte urbanisation dans des villes comme Paris qui font que les structures sont de plus en plus mal desservies en eau. L'effet mode aussi a du avoir une influence à cela,  ou une sorte d'embourgeoisement des classe privilégiés font que les étuves sont "has been" comme c'est actuellement le cas au Japon.

Et pourtant, les Byzantins devaient bien avoir un certain goût pour l'abstraction, mais qui parait avoir été détourné vers les débats théologiques.

Ce qui est le plus troublant c'est que très vite l'occident va ingérer les connaissances venant d'Orient, alors qu'elle a longtemps souffert d'un certain ostracisme de la part de Byzance. Le concept moderne du zéro nous venant des arabes est introduite en occident via Gerbert d'Aurillac, alors qu'en en même temps que celle-ci est quelque peu méprisé par les byzantins, pour définitivement devenir une norme vers le XIIIème en Occident grâce aux mathématiciens italiens. C'est encore une fois via nos contact avec le monde islamique que la société scientifique occidental commence a avoir accès au savoir des grecques.

C'est vrai que c'est quelque chose d'assez marquant que cette puissance technologique, assez remarquable, n'est pratiquement rien produit d'important scientifiquement, en terme de concepts. Le pendant latin de cette civilisation souffrait d'un désintérêt presque complet pour les l’abstraction et la spéculation gratuite comme pouvait l'avoir les Grecs.

Oui, on peut aussi faire le même reproche aux musulmans et chinois qui ont toujours eu une approche utilitariste des sciences, cela donne un peu cette image que les grecques étaient les seul nerd ou geek du bahut.

Modifié par Rochambeau
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Je ne parlais pas d'art ou d'organisation politique, toutes les civilisations un peu raffinées ont des production originales dans ces domaines.
L'apport romain occidental aux sciences (mathématiques, physique,...) est déjà assez pauvre, comparativement à la période hellénistique qui a précédé, même s'il y a quelques noms qui surnagent.
Concrètement, qu'a produit l'empire d'Orient dans ces domaines ? Peut-on citer un ou deux mathématiciens de Constantinople ?

Pour ce qui est machines de guerre, je connais moins le sujet, j'imagine bien qu'un Etat qui a pu durer presque 1000 ans devait avoir de bonnes compétences dans ces domaines, mais quoi de vraiment nouveau par rapport à ce que connaissaient déjà des romains occidentaux (et qui a pu être perdu en Occident après la disparition de l'Empire) ? Et sur la fin, les murs de Constantinople se prenaient des boulets de canon tirés par les Turcs, sans que les byzantins aient de quoi répliquer.

 

 

 

Les byzantins disposaient de quelques canons légers acquis aux génois. Il faut savoir que les murs de Constantinople étaient vieux et ne pouvaient supporter de trop grosses pièces d'artillerie. Les travaux d'infrastructure pour adapter ces défenses auraient été colossaux et hors de portée du pouvoir byzantin poste 1204. Résultat, la contrebatterie est impossible. Il convient aussi de souligner que Byzance ne tombe pas suite à la canonnade mais à cause d'une poterne laissée ouverte...
 

Il faut en effet se rappeler que la croisade ravageant Byzance est le point de rupture, de non retour, qui brise définitivement la colonne vertébrale de l'Empire. Un Royaume franc est constitué mais celui-ci se limite à la ville sans hinterland sérieux. La ville devient donc un Etat souffrant d'hypercéphalie, ne dispose plus de l'apport des provinces qui perdent elles-même leur centre administratif. Les Francs en sont alors réduits à des sorties quasi quotidiennes ne serait-ce que pour nourrir la ville. L'empire ne s'en remettra jamais. En 1453, la ville est sous peuplée, de nombreux quartiers sont vides et la banlieue a été remise à la culture et l'élevage.

Ceci ne veut pas dire que l'Empire ne tente pas d'agir en l'espèce. L'Empereur approcha en effet Urbanus, l'ingénieur hongrois à l'origine des canons turcs. Il se trouvait cependant qu'il n'avait tout simplement pas de quoi le payer, contrairement au Sultan...

Modifié par Chronos
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Il y avait déjà des structures qui devaient limiter l'empire romain, dont les murs d'Hadrien et d'Antonin sont aujourd'hui les plus visible, bien que dans les faits les murs d'Hadrien et d'Antonin sont plus des obstacles aux opérations de raid et pillage que un moyen pour empêcher les incursions. A vrai dire c'est une sorte de "stratégie de défense en profondeur" que se met en  place au cours du IIIème siècle. Sauf que voilà comme souligné plus haut, le vrai problème ce n'est pas tant les menaces "extérieur" ou en bordure en de l'empire mais bien la fragilité du système impériale romain. Ce qui fait que l'empire d'occident s'effondre plus vite que sa consœur orientale c'est que cette dernière a longtemps été la partie la plus riche de l'empire, tandis que l'empire romain d'occident a accès à beaucoup moins de ressource sans pour autant que les menaces de trouble intérieur (conjuguaient aux menaces de pillage) soit moins nombreux.

Personnellement je doute fort de l'existence d'un empire universel ... comme précisé plus haut vu l'importance de la Méditerrannée dans la stratégie d'expansion et de contrôle de l'empire romain, qui lui facilite les déplacement rapide au quatre coin de l'empire permettant une concentration dans des zones de conflit, elle lui permet aussi de maintenir son système d'Etat-client (du moins durant tout le système dit julio-claudien) pour les garder dans sa "zone d'influence".  Il est donc improbable que les romain poussent l'aventure au delà tant les problèmes logistiques seraient trop grand, sans parler du fait qu'un empire universel est impossible à gérer.

...

Aussi rappelons que Rome est une civilisation urbaine qui a conquise d'autre civilisations urbaines essentiellement. Et ce, pour s’accaparer des surplus économiques de ses dernières, et s'il n'ont pas poussé leur expansion plus loin c'est qu'il n'y avait plus rien à rafler. On a toujours en tête qu'un empire est d'autant plus fort qu'il est vaste avec de jolis cartes colorés, mais rien n'est plus éloigné de la géopolitique romaine qui pense en terme de cout-bénéfice. Ils n'avaient aucun intérêt à assujettir des peuples et territoires sous-développés, même si à postériori une certaine propagande à présenté leur conquête comme une œuvre entreprise pour civiliser de moins bien natis. 

 

...

Oui, on peut aussi faire le même reproche aux musulmans et chinois qui ont toujours eu une approche utilitariste des sciences, cela donne un peu cette image que les grecques étaient les seul nerd ou geek du bahut.

Pas vraiment. Et un certain utilitarisme - dont ne sont pas dénués les grecs, notamment ceux d’Égypte et de Sicile - n'exclue pas le gout pour la pensé spéculative. Le propos est surtout de souligner qu'il y a une classe de problèmes intellectuels qui n’intéressent pas les romains et leur absence dans certains secteurs de la pensé est remarquable, dans le sens où ça se remarque, mais vraiment très fort.

Par exemple WizzardOfLinn parle de l'inexistence de mathématiciens de renoms à proprement parlé romains-latin. De mon coté je métrais en avant ce manque en astronomie: je ne connais aucunes tables astronomiques de leur part, malgré l’intérêt très concret qu'elles représentes. Alors que dans le monde islamique et chinois, c'est l’État ou ce qui en tient lieu, qui "salarie" des savants pour faire de longues observations astronomiques. ça a un intérêt pratique : ça servira à faire des calendriers, de l'astrologie pour le Fils du Ciel, à naviguer dans le désert ou les mers..ecetera. Mais à la base, il y a une vrai curiosité scientifique avec des méthodes pré-scientifiques ou pseudo-scientifiques sur comment fonctionne vraiment la nature. L’État romain ne financera jamais de "programmes de recherches" de ce genre et les installations dédiées, comme un observatoire. On a littéralement l’impression qu'ils ne lèvent jamais la tête au ciel !

Aussi, dans le genre geek tu as la civilisation indienne depuis la plus haute antiquité :happy:. Avec par exemple le zéro qui a du être accouché par eux comme une conception philosophico-religieuse avant d’être mathématique. On reste ici dans le domaine du pur effort intellectuel. 

 

Modifié par Shorr kan
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Les indiens avaient quelques motivations religieuses : il leur fallait un puissant système de numération pour dénombrer leurs 330 millions de dieux (et plusieurs trillions d'entités mineures). Les arithméticiens indiens manipulaient des nombres gigantesques, et il y a un mot sanskrit pour exprimer le nombre 10^140. Cf G. Ifrah, "Histoire universelle des chiffres"

En cherchant bien, on doit quand même à Rome notre calendrier un peu tordu, avec ses mois qui varient de 28 à 31 jours et son jour d'année bissextile fichu n'importe où, calendrier qui a quand même dû être révisé en 1582, le calendrier julien dérivait de 10 jours par rapport au soleil - et évidemment, tout le monde n'a pas adopté la réforme en même temps.
Le calendrier égyptien de l'Antiquité comptait 12 mois de 30 jours, et 5 jours complémentaires placés à la fin. Ca nous aurait un peu simplifié les calculs de dates à notre époque des logiciels...

 

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Encore que là m'est venu une réflexion en matant l'avatar féminin que j'ai créé dans ma partie sur Xenoblade, qu'il n'y avait pas que la raison religieuse pour la fermeture de ces étuves et autre bains publics. Il est vrai que l'avènement du protestantisme, qui est généralement plus coincé que ne l'était encore le catholisme, a du mettre à mal ces structures ou du moins un effet de concurrence car souvent c'était l'église qui était propriétaire de ces bains. Je suppose qu'il y a eu aussi une dégradation du non seulement aux guerres de religion, mais aussi à une forte urbanisation dans des villes comme Paris qui font que les structures sont de plus en plus mal desservies en eau. L'effet mode aussi a du avoir une influence à cela,  ou une sorte d'embourgeoisement des classe privilégiés font que les étuves sont "has been" comme c'est actuellement le cas au Japon.

Pas tant que ça une évolution qui va de soi: ce changement, en fait assez brutal en terme de chronologie et d'évolutions des moeurs, survient essentiellement pour des raisons religieuses poussées à un moment d'extrême qui s'exprime parfois de la façon la plus absurde. L'Eglise n'est pas propriétaire d'étuves; les étuves sont des établissements privés, pour la plupart très petits. Quand on regarde par exemple une carte de Paris au milieu du XVIème siècle, on se rend compte qu'elles pullulent un peu partout: il y en a parfois plus d'une dizaine dans une seule rue (et les rues de l'époque sont rarement longues). Ce sont des établissements de bain tout simples, où on chauffe de l'eau qu'on apporte à dos d'homme ou en chariot, ou, pour ceux qui ont cet avantage, via un puit dans le jardin, et qui n'ont bien souvent que quelques baignoires et/ou baquets. La raison pour laquelle elles ont été fermées par édit (via un lobbying religieux intensif), c'est que, comme tout commerce, ceux-ci avaient évidemment développé tous les services possibles entourant/allant avec leur activité (rasage, coiffure, épilation, voire massages....), et que parmi ses services, certains n'avaient pas de publicité, mais étaient bien connus et très demandés: les coiffeurs/masseurs/épileurs étaient souvent des coiffeuses/masseuses/épileuses, et offraient des prestations que la morale réprouve mais que le corps approuve (tarifées bien évidemment). Un usage bien rentré dans les moeurs, mais qui, outre le fait de souvent emmerder les patrons de bordels (qui payaient depuis St Louis un écot pour la tolérance de leur activité), étaient dans le pif de l'Eglise.

Or, quand arrive la période des guerres de religion, à la montée du protestantisme répond un renouveau de l'affirmation catholique et de la mobilisation permanente des zélotes (via les prêcheurs de quartier et l'organisation locale -qui passe par les corporations, très religieuses). Les étuves furent une victime de ce zèle qui tapait dans toutes les directions, souvent à tort, et toujours à travers et à l'excès. Le grand chroniqueur de Paris à l'époque, Pierre de l'Estoile, signalait ainsi que de cette réforme, la morale publique gagnerait bien peu, mais que l'hygiène y perdrait beaucoup. Quelques années plus tard (en fait à peine une décennie), on voyait ainsi des dames de la cour, la reine Margot en tête, se vanter de la quantité de crasse qu'elles avaient sous les ongles. Du changement des mentalités et des moeurs....

Mais avant cela, aller à l'étuve plusieurs fois par semaine était une activité réalisée plusieurs fois par semaine pour les citadins de tous niveaux de vie (sauf les vraiment très modestes), puisque les étuves étaient une réalité si importante et diverse (y'en avait pour toutes les bourses) depuis toujours dans Paris. En fait depuis l'époque romaine. Ce qui a cessé de marcher dans les décennies qui suivirent la fin de l'Empire d'occident, ce sont les systèmes d'adduction d'eau, lourds et complexes à l'entretien, nécessitant une administration centralisée, une fiscalité poussée et fiable, des personnels qualifiés.... La rive gauche (la ville romaine avec l'île de la cité) est désertée graduellement, et quel est le lobby qui prend les rênes de la ville? Les métiers liés à l'eau: les transporteurs fluviaux (les "nautes" dont Paris a hérité beaucoup), les porteurs d'eau (pas ceux qui se colletinent la charge au sens physique: ceux qui les emploient).... Et les patrons d'étuves/bains (enfin, ceux qui gagnent suffisamment ainsi). Les moeurs implantées par Rome ont eu la vie dure jusqu'aux guerres de religion. 

Modifié par Tancrède
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Les indiens avaient quelques motivations religieuses : il leur fallait un puissant système de numération pour dénombrer leurs 330 millions de dieux (et plusieurs trillions d'entités mineures). Les arithméticiens indiens manipulaient des nombres gigantesques, et il y a un mot sanskrit pour exprimer le nombre 10^140. Cf G. Ifrah, "Histoire universelle des chiffres"

En cherchant bien, on doit quand même à Rome notre calendrier un peu tordu, avec ses mois qui varient de 28 à 31 jours et son jour d'année bissextile fichu n'importe où, calendrier qui a quand même dû être révisé en 1582, le calendrier julien dérivait de 10 jours par rapport au soleil - et évidemment, tout le monde n'a pas adopté la réforme en même temps.
Le calendrier égyptien de l'Antiquité comptait 12 mois de 30 jours, et 5 jours complémentaires placés à la fin. Ca nous aurait un peu simplifié les calculs de dates à notre époque des logiciels...

 

Le calendrier romain et ses problèmes n'ont en fait rien à voir avec une quelconque ignorance en matière d'astronomie, c'est bien plus prosaïque. Il existait depuis bien longtemps sous la République et était devenu une question hautement politisée dans un système hautement adversarial; le réformer ou non était à chaque fois une question ultra politicienne, surtout  partir du IIème siècle av JC quand la république commence à être très sérieusement polarisée et de plus en plus bloquée. Sur une question pas si fondamentale que ça (ça n'empêche pas de vivre et de calculer le temps quand on en a besoin), bien peu d'élus allaient gaspiller du capital politique sur ce point, même s'ils en avaient envie. Depuis des décennies, quand César se fait "élire" dictateur (et cumulant cette fonction avec ses prérogatives de Pontifex Maximus, job qui pèse le plus sur ce sujet, ET avec celui de consul, qui y pèse aussi), les saisons n'étaient plus en phase avec le calendrier de façon ridicule, et il sera le premier à les aligner et à maintenir cet effort suffisamment pour obtenir un peu de rationalité, en faisant notamment comme Rome l'avait toujours fait quand une majorité politique pouvait être dégagée (mais à une échelle jamais vue): créer un mois spécial (appelé "intercalaris") pendant une ou deux années (avec un nombre de jours supplémentaires déterminé), pour recaler le calendrier, mais aussi réévaluer la durée de certains mois pour parvenir à un nouveau total de jours annuels (c'est lui qui a amené une année de 365 jours il me semble, compensée par des années bissextiles prolongées). Mais même lui n'était pas insensible aux raisons pour lesquelles le calendrier romain a connu de multiples problèmes: en -46, il prolonge l'année en cours à plus de 440 jours.... Afin de proroger son mandat de consul, chose dont il avait besoin (malgré ses autres fonctions non dépendantes d'élections) pour des raisons politiques. 

Parce que tout est là à Rome: tout est modifiable par la loi et le système contractuel (sur lequel repose la religion romaine, qui fonctionne par contrats conclus et modifiés avec les dieux), et surtout, le pouvoir est réparti sur de nombreuses têtes, ces têtes sont souvent en désaccord, individuellement ambitieuses, et réparties en factions et réseaux d'alliances complexes, ce qui fait qu'il y a toujours un intérêt bien senti à profiter du calendrier comme d'un outil politique parmi d'autres. Répéter ces pratiques sur des années et des décennies produit un effet de cumul aux résultats parfois.... Etonnants. Rien à voir avec le niveau de connaissances, tout à voir avec les intérêts des uns et des autres.

Ce à quoi il faut ajouter un phénomène qu'il ne faut jamais négliger; les superstitions particulières d'un peuple. En l'occurrence, les Romains considèrent que certains nombres et certains chiffres sont "nefas" (mot latin qui je pense se comprend aisément en français), et aucune compréhension rationnelle au monde ne les empêchera du coup d'aligner le nombre de jours d'un mois sur un nombre néfaste, d'arrêter un mois sur un tel jour inauspicieux.... Un exemple: février n'avait que 28 jours dans le calendrier romain (depuis Numa Pompilius), ce qui est un nombre malchanceux: c'est le seul dans l'année.... Parce que c'est le mois de l'expiation. Une habitude qui s'est prolongée via le christianisme (le carême part le plus souvent en février). 

Et là est une des contraintes majeures du système romain, qui n'a, encore une fois, rien à voir avec un défaut de connaissances; c'est purement religieux/superstitieux, et lié aux craintes de certaines choses et certains phénomènes, tout comme de la crainte de trop de changements (absolument universelle) trop vite. Cette crainte motive aussi bien des politiciens (aussi éduqués soient-ils), notamment, à Rome, la partie la plus archéo-conservatrice de la faction dite des optimates (ou "bonii": les "bons hommes", cad les "élites"), les ennemis acharnés de César, qui se retrouvent, ironie du sort, avec Pompée à leur tête à un certain stade, lui qui, quand il avait été consul, avait poussé à la modification du calendrier pour recaler saisons et calendrier, et avait imposé un intercalaris significatif pour l'époque (à ce moment, il adorait hérisser le poil des conservateurs et bigots). 

C'est l'autre aspect de la culture romaine qui joue dans ce domaine psychologique, le pendant actif de cette crainte: les Romains sont un des peuples les plus conservateurs qui soient sur certains sujets, et c'est sur de tels sujets que même les "boni", en général impopulaires, pouvaient rallier de significatives majorités pour s'opposer au changement. 

Mais au final, il ne faut pas juger hâtivement les calendriers et préjuger du niveau de connaissances qui en décidait: il y a juste d'autres impératifs que ceux de la simple raison scientifique en jeu. 

 

Modifié par Tancrède
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Une limite technologique soulignée par Tancrède : le cheval.

Curieusement l'Empire se développe avant tout sur la Méditerranée, zone ou la circulation navale accélère considérablement les déplacements. Et les voies romaines sont avant tout destinées aux piétons et aux charrois, pas aux cavaliers. De fait contrôler un ensemble trop large avec des moyens de communication limité est impossible. Typiquement l'orient romain ne peut être "tenu" depuis le centre que si il est possible d'envoyer des expéditions militaires depuis celui-ci. Quand cela devient impossible il faut décentraliser, c'est une nécessité.
Nommer des Consuls ne résoud pas le problème, le premier Consul un peu ambitieux a tellement de marge de manoeuvre pour se tailler son propre empire (surtout avec un orient riche et populeux) qu'il vaut mieux acter ce fait.

Je ne suis pas sur que le Cheval soit vraiment un outil efficace.

Un cavalier ne va "que" deux ou trois fois plus vite qu'un fantassin en "vitesse de pointe" mais sur une journée de marche, une troupe de cavalerie ne va pas beaucoup plus vite que les grognards napoléonien. Pour transporter des troupes, le cheval risque de ne pas faire gagner beaucoup de temps, mais d'augmenter considérablement le coût du transport. Le coût d'une troupe de quelques centaines de cavaliers risque d'être assez proche de celui d'une troupe de quelques milliers de fantassins.

S'il s'agit juste d'utiliser le cheval comme outil de communication pour transporter des messages, on va avoir un outil bien moins performant que le pigeon voyageur. Et il doit être bien moins cher d'entretenir un réseau de pigeonniers que des relais de postes permettant d'approvisionner en chevaux frais les messagers.

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Je ne suis pas sur que le Cheval soit vraiment un outil efficace.

Un cavalier ne va "que" deux ou trois fois plus vite qu'un fantassin en "vitesse de pointe" mais sur une journée de marche, une troupe de cavalerie ne va pas beaucoup plus vite que les grognards napoléonien. Pour transporter des troupes, le cheval risque de ne pas faire gagner beaucoup de temps, mais d'augmenter considérablement le coût du transport. Le coût d'une troupe de quelques centaines de cavaliers risque d'être assez proche de celui d'une troupe de quelques milliers de fantassins.

S'il s'agit juste d'utiliser le cheval comme outil de communication pour transporter des messages, on va avoir un outil bien moins performant que le pigeon voyageur. Et il doit être bien moins cher d'entretenir un réseau de pigeonniers que des relais de postes permettant d'approvisionner en chevaux frais les messagers.

Pour la mobilité tactique, l'avantage est évident et les romains vont en chier contre les Perses malgré une infanterie au taquet. Par contre pour la mobilité opérative/stratégique tu soulèves une question intéressante.

Je noterais cependant qu'après la crise du III ème siècle, que la réserve centrale dont j'ai oublié le nom, sous le commandement de l'empereur est entièrement montée. Si c'est le cas, c'est qu'il devait y avoir un avantage quand même en terme de rapidité de projection. Plusieurs dynasties chinoises feront aussi ce choix du "tout cavalerie", que ce soit pour mater des révoltes internes ou intercepter les incursions nomades. Enfin, son immense corps de cavalerie était l'atout maitre de Charlemagne et ce qui lui a permis de se balader d'un bout à l'autre de l'Europe en un temps record.

 

 

Le calendrier romain et ses problèmes n'ont en fait rien à voir avec une quelconque ignorance en matière d'astronomie, c'est bien plus prosaïque. Il existait depuis bien longtemps sous la République et était devenu une question hautement politisée dans un système hautement adversarial; le réformer ou non était à chaque fois une question ultra politicienne, surtout  partir du IIème siècle av JC quand la république commence à être très sérieusement polarisée et de plus en plus bloquée. Sur une question pas si fondamentale que ça (ça n'empêche pas de vivre et de calculer le temps quand on en a besoin), bien peu d'élus allaient gaspiller du capital politique sur ce point, même s'ils en avaient envie. Depuis des décennies, quand César se fait "élire" dictateur (et cumulant cette fonction avec ses prérogatives de Pontifex Maximus, job qui pèse le plus sur ce sujet, ET avec celui de consul, qui y pèse aussi), les saisons n'étaient plus en phase avec le calendrier de façon ridicule, et il sera le premier à les aligner et à maintenir cet effort suffisamment pour obtenir un peu de rationalité, en faisant notamment comme Rome l'avait toujours fait quand une majorité politique pouvait être dégagée (mais à une échelle jamais vue): créer un mois spécial (appelé "intercalaris") pendant une ou deux années (avec un nombre de jours supplémentaires déterminé), pour recaler le calendrier, mais aussi réévaluer la durée de certains mois pour parvenir à un nouveau total de jours annuels (c'est lui qui a amené une année de 365 jours il me semble, compensée par des années bissextiles prolongées). Mais même lui n'était pas insensible aux raisons pour lesquelles le calendrier romain a connu de multiples problèmes: en -46, il prolonge l'année en cours à plus de 440 jours.... Afin de proroger son mandat de consul, chose dont il avait besoin (malgré ses autres fonctions non dépendantes d'élections) pour des raisons politiques. 

Parce que tout est là à Rome: tout est modifiable par la loi et le système contractuel (sur lequel repose la religion romaine, qui fonctionne par contrats conclus et modifiés avec les dieux), et surtout, le pouvoir est réparti sur de nombreuses têtes, ces têtes sont souvent en désaccord, individuellement ambitieuses, et réparties en factions et réseaux d'alliances complexes, ce qui fait qu'il y a toujours un intérêt bien senti à profiter du calendrier comme d'un outil politique parmi d'autres. Répéter ces pratiques sur des années et des décennies produit un effet de cumul aux résultats parfois.... Etonnants. Rien à voir avec le niveau de connaissances, tout à voir avec les intérêts des uns et des autres.

Ce à quoi il faut ajouter un phénomène qu'il ne faut jamais négliger; les superstitions particulières d'un peuple. En l'occurrence, les Romains considèrent que certains nombres et certains chiffres sont "nefas" (mot latin qui je pense se comprend aisément en français), et aucune compréhension rationnelle au monde ne les empêchera du coup d'aligner le nombre de jours d'un mois sur un nombre néfaste, d'arrêter un mois sur un tel jour inauspicieux.... Un exemple: février n'avait que 28 jours dans le calendrier romain (depuis Numa Pompilius), ce qui est un nombre malchanceux: c'est le seul dans l'année.... Parce que c'est le mois de l'expiation. Une habitude qui s'est prolongée via le christianisme (le carême part le plus souvent en février). 

Et là est une des contraintes majeures du système romain, qui n'a, encore une fois, rien à voir avec un défaut de connaissances; c'est purement religieux/superstitieux, et lié aux craintes de certaines choses et certains phénomènes, tout comme de la crainte de trop de changements (absolument universelle) trop vite. Cette crainte motive aussi bien des politiciens (aussi éduqués soient-ils), notamment, à Rome, la partie la plus archéo-conservatrice de la faction dite des optimates (ou "bonii": les "bons hommes", cad les "élites"), les ennemis acharnés de César, qui se retrouvent, ironie du sort, avec Pompée à leur tête à un certain stade, lui qui, quand il avait été consul, avait poussé à la modification du calendrier pour recaler saisons et calendrier, et avait imposé un intercalaris significatif pour l'époque (à ce moment, il adorait hérisser le poil des conservateurs et bigots). 

C'est l'autre aspect de la culture romaine qui joue dans ce domaine psychologique, le pendant actif de cette crainte: les Romains sont un des peuples les plus conservateurs qui soient sur certains sujets, et c'est sur de tels sujets que même les "boni", en général impopulaires, pouvaient rallier de significatives majorités pour s'opposer au changement. 

Mais au final, il ne faut pas juger hâtivement les calendriers et préjuger du niveau de connaissances qui en décidait: il y a juste d'autres impératifs que ceux de la simple raison scientifique en jeu. 

 

En fait les mecs ont inventé la relativité du temps bien avant Einstein :laugh:.

Modifié par Shorr kan
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Pour la mobilité tactique, l'avantage est évident et les romains vont en chier contre les Perses malgré une infanterie au taquet. Par contre pour la mobilité opérative/stratégique tu soulèves une question intéressante.

Je noterais cependant qu'après la crise du III ème siècle, que la réserve centrale dont j'ai oublié le nom, sous le commandement de l'empereur est entièrement montée. Si c'est le cas, c'est qu'il devait y avoir un avantage quand même en terme de rapidité de projection. Plusieurs dynasties chinoises feront aussi ce choix du "tout cavalerie", que ce soit pour mater des révoltes internes ou intercepter les incursions nomades. Enfin, son immense corps de cavalerie était l'atout maitre de Charlemagne et ce qui lui a permis de se balader dans toute l'Europe.

La cavalerie coûte cher et a donc l'avantage (à effectif égal) d'être plus performante et impressionnante qu'une troupe de fantassins. Pour mater une révolte interne, c'est même bien plus efficace que des fantassins.

Pour un pouvoir politique central et encore plus pour les troupes de réserve centrale, une cavalerie permet pour un coût humain assez réduit d'avoir une force de projection performante qui complétera l'infanterie déjà prépositionnée. Et puis la cavalerie a le gros défaut de coûter cher, mais c'est un détail si tous les harras de l'empire sont mis à contribution. Surtout que ça permet d'éviter d'avoir à financer des détachements de cavalerie.

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La cavalerie coûte cher et a donc l'avantage (à effectif égal) d'être plus performante et impressionnante qu'une troupe de fantassins. Pour mater une révolte interne, c'est même bien plus efficace que des fantassins.

Pour un pouvoir politique central et encore plus pour les troupes de réserve centrale, une cavalerie permet pour un coût humain assez réduit d'avoir une force de projection performante qui complétera l'infanterie déjà prépositionnée. Et puis la cavalerie a le gros défaut de coûter cher, mais c'est un détail si tous les harras de l'empire sont mis à contribution. Surtout que ça permet d'éviter d'avoir à financer des détachements de cavalerie.

C'est exactement comme ça d'ailleurs que fonctionne pendant la période du despotat  l'armée romaine : séparé en forces frontalières et d'autres mobiles - pour les détails voir Tancrède.

D'ailleurs l'empire romain et l'empire chinois sont confronté aux mêmes types de difficultés de natures essentiellement interne, et y ont apparemment répondu de la même façon aussi avec une armée typée actions policières pour le maintient de l'ordre et la répression des séditions. En tout cas pour le cas chinois c'est certain. Pour Rome, on peut soupçonner que les réformes militaires ont largement pour but de rendre l'Empire plus "tenable". 

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Je ne suis pas sur que le Cheval soit vraiment un outil efficace.

Un cavalier ne va "que" deux ou trois fois plus vite qu'un fantassin en "vitesse de pointe" mais sur une journée de marche, une troupe de cavalerie ne va pas beaucoup plus vite que les grognards napoléonien. Pour transporter des troupes, le cheval risque de ne pas faire gagner beaucoup de temps, mais d'augmenter considérablement le coût du transport. Le coût d'une troupe de quelques centaines de cavaliers risque d'être assez proche de celui d'une troupe de quelques milliers de fantassins.

S'il s'agit juste d'utiliser le cheval comme outil de communication pour transporter des messages, on va avoir un outil bien moins performant que le pigeon voyageur. Et il doit être bien moins cher d'entretenir un réseau de pigeonniers que des relais de postes permettant d'approvisionner en chevaux frais les messagers.

Le pigeon n'est pas tellement plus efficace qu'une poste à cheval bien organisée parce qu'il n'offre pas réellement d'avantages significatifs hors de la plus grande rapidité, ni autant de modularité dans le type de service, raison pour laquelle les Romains, qui connaissaient et utilisaient le pigeon voyageur, n'en ont pas fait un système pesant significativement dans le fonctionnement de leur empire, par rapport au Cursus Publicus essentiellement tourné autour de la messagerie à cheval. Pas plus que les Perses à la même époque d'ailleurs (ça se fera plus tard). Rome a organisé un service unifié et développé l'infrastructure qui va avec (routes, relais, élevages, messagers....) parce que, malgré la dépense, les avantages étaient plus nombreux et significatifs: les messagers peuvent par exemple confirmer/supplémenter le contenu du message dans de nombreux cas, raison pour laquelle une part du service était réservée à ceux qui faisaient le trajet d'un bout à l'autre, seul le cheval changeant. Tout comme on peut hiérarchiser les messages suivant leur importance et/ou leur urgence en modulant le service en plusieurs degrés de vitesse et de confidentialité (ainsi que de capacité de charge: faut parfois envoyer des documents, ou des biens plus conséquents ou de l'argent, avec le messager) afin d'utiliser au mieux les ressources disponibles (le niveau de qualité et de fiabilité n'étant pas complètement homogénéisable, et la confiance, particulièrement, étant une denrée vraiment limitée). Un service de pigeonniers, par ailleurs, nécessiterait aussi une infrastructure au sol importante, pour faire circuler sans arrêt les cageots de pigeons qu'il faut faire revoyager dans l'autre sens, tout en garantissant qu'ils ne sont pas remplacés par des mal-intentionnés voulant pirater ou simplement saboter les communications (en les interchangeant, les volant, les tuant), ce qui de toute façon implique des bâtiments et un service spécialisé très nombreux. 

Le messager humain utilisant les moyens de transport terrestre (routes, fleuves, mers), à cette époque, offre plus d'avantages parce que la chose qui compte le plus n'est pas le vecteur définissant la vitesse, mais le porteur du message (dans le cas du pigeon, ces deux choses sont confondues), au moins à partir d'un certain niveau de confidentialité et/ou de complexité. Parce qu'il s'agit avant tout de communiquer une intention, bien plus qu'une simple information. Ce messager peut évoquer l'intention -plus que juste l'écrit- de l'auteur originel, apporter de l'info en plus, être lui-même un agent avec plus de connaissances,  de prérogatives, de contexte et de moyens; il peut aussi voir plus d'une personne, porter plus d'un message, être chargé d'une mission en plus de juste porter le message (notamment voir la gueule du destinataire quand il lit la lettre), voir porter un autre message plutôt différent de celui dans la lettre (redondance de la sécurité, en plus du chiffrage des correspondances).... Raison pour laquelle les correspondances qui comptent sont de toute façon suffisamment nombreuses et fréquentes pour justifier l'investissement dans le cursus publicus, qu'on ait des pigeons ou pas. Parce qu'outre les messagers "de base" et plus "évolués" qu'offre le cursus publicus, ce système est consubstantiel des services secrets de l'empire (les Frumentari, puis les Agentes in Rebus, en plus des correspondances du Prêtoire -plus tard des "schola"- et des envoyés personnels/informels, généralement prélevés dans certaines unités prétoriennes -speculatores augusti) dont l'une des premières fonctions est précisément le réseau de communication de l'empereur. Un messager formé et initié à un degré ou un autre de confiance et de confidentialité est la part la plus importante de l'activité, pas ce qui fait sa vitesse. Qui plus est, à cheval et dans ce système, un messager peut couvrir entre 60 et 100km par jour, ce qui n'est pas si mal quand même et il peut traverser la mer, ce que les pigeons ne peuvent pas faire dans tous les points de l'empire). 

Pour la mobilité tactique, l'avantage est évident et les romains vont en chier contre les Perses malgré une infanterie au taquet. Par contre pour la mobilité opérative/stratégique tu soulèves une question intéressante.

Je noterais cependant qu'après la crise du III ème siècle, que la réserve centrale dont j'ai oublié le nom, sous le commandement de l'empereur est entièrement montée. Si c'est le cas, c'est qu'il devait y avoir un avantage quand même en terme de rapidité de projection. Plusieurs dynasties chinoises feront aussi ce choix du "tout cavalerie", que ce soit pour mater des révoltes internes ou intercepter les incursions nomades. Enfin, son immense corps de cavalerie était l'atout maitre de Charlemagne et ce qui lui a permis de se balader d'un bout à l'autre de l'Europe en un temps record.

 

Limitons le comparatif cavalerie-infanterie: il dépend de beaucoup trop de paramètres pour qu'on puisse résumer la chose ainsi, même au niveau tactique. Les Perses n'avaient d'avantage net que dans certains cas: grandes plaines dégagées à perte de vue (pour la mobilité opérative puis tactique sur la durée et la distance d'une campagne) et une logistique qui suit en terme de mobilité et de capacité (parce que le cavalier archer perse consomme BEAUCOUP de flèches, et qu'il ne peut en emporter tant que ça.... Et il lui faut beaucoup de chevaux de remonte.... Et que les chevaux consomment alors que l'environnement au MO loin des grands fleuves est plutôt aride). Il y a essentiellement deux axes pour que le monde romain et le monde perse aillent se fracasser la gueule: l'est de la Syrie actuelle, et le Caucase. Dans ce dernier, les Romains sont pas loin d'un avantage absolu, tant il est impropre à un usage efficace de la cavalerie. Dans le premier, les Perses ont des conditions de succès pas si facilement réunissables (surtout sous les Arsacides), et ont un problème sitôt qu'on arrive aux chaînes montagneuses de l'est du Liban et d'Israël, frein naturel à leurs attaques. Ca ne laisse qu'un terrain de jeu possible, que les Romains tiendront jusqu'à l'Euphrate, pour l'essentiel jusqu'au Vème siècle de façon pas/peu contestée (sauf pendant le bref "moment" du début des Sassanides, qui est aussi au plus fort de la crise du IIIème siècle: années 250), et ensuite de façon plus aléatoire pendant les affrontements permanents qui ne se termineront que juste avant l'expansion islamique. 

Pour la "réserve centrale", oui, les unités que l'empereur contrôle directement (au sens: elles sont littéralement dans le Palais: ce sont les Prétoriens, coexistants avec puis remplacés en 312 par les Scholae Palatinae) sont toutes montées à partir de 312 (les Prétoriens sont des fantassins, mais ont une composante cavalerie qui s'ajoute aux Equites Singulares Augusti, la garde personnelle, montée), mais c'est à ce moment un système "à étages". Jamais loin (moins d'une journée de marche) se trouve aussi la majorité des troupes palatines réunies en armées impériales "de réserve" (comitatus praesentales) qui sont la masse de manoeuvre stratégique de "l'échelon" impérial. C'est là qu'il puise pour envoyer des renforts (et/ou partir avec) sur un point chaud pour lequel la réserve régionale (de la préfecture, second échelon stratégique "régional") ne suffit pas, lancer une grande expédition extérieure, ou en lancer une punitive contre une sédition. La proportion de cavaliers dans ces armées palatines est plus élevée, mais le principal facteur qui en décide est avant tout géographique: c'est en orient que la majorité de la cavalerie romaine tardive est nettement plus développée (avec un accent sur la cavalerie très lourde, type cataphractaire/clibanaire, et un autre sur la cavalerie légère d'archers montés). Pareil pour le 3ème échelon, celui des comitatenses et pseudocomintatenses régionaux, avec une réserve centrale au niveau des préfectures, et des réserves de première urgence plus dispatchées dans les capitales de diocèses ou provinces frontières. 

Ceci dit, pour Charlemagne, de ce qu'on peut savoir, son "immense" corps de cavalerie devait surtout paraître immense parce qu'il n'y avait pas beaucoup de cavalerie en occident à cette époque: c'était une chose rare et chère (sans doute à l'origine de son prestige social qui permettra à la noblesse de le convertir en avantages statutaires, exagérant son importance bien au-delà de la réalité de son utilité militaire), et pouvait donc seulement être l'arme des plus fortunés dans un système reposant non pas sur une organisation militaire étatique, mais sur la mobilisation, une forme de conscription modulée des hommes libres (selon le rang et la fortune) que Charlemagne codifie sous la forme de base de la féodalité. De fait, Charlemagne entretient certes, comme tout magnat d'alors, une abondante suite militaire personnelle (des employés, quoi, et comme il est le roi puis l'empereur, on peut dire que c'est la seule armée pro), mais elle ne doit pas dépasser quelques centaines/milliers d'hommes; la majorité de sa "réserve" centrale doit être faite de ses vassaux géographiquement proches, donc déjà une force à laquelle on ne peut commander sans contreparties. Et apparemment, on est encore loin de la charge "à la normande", puisqu'il semble bien que le cheval servait en fait essentiellement alors à la mobilité stratégique et opératique: la grande majorité des combattants démonte pour cogner. 

Modifié par Tancrède
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Qui plus est, à cheval et dans ce système, un messager peut couvrir entre 60 et 100km par jour, ce qui n'est pas si mal quand même et il peut traverser la mer, ce que les pigeons ne peuvent pas faire dans tous les points de l'empire). 

Avec un cheval correct et monté en cavalier "léger", en réutilisant le même cheval on peut monter à 60-80 km tous les jours. A bonne allure (mais pas au max) tu peux avaler 30 Km en deux heures. En changeant de monture tu peux aller carrément dans le 120, et sur terrain pas forcément plat.
En montagne par contre ça ralentit beaucoup, pas tellement à cause des montées (bon si ça tire sur l'organisme du bourrin) mais des risques de blessures en descentes. Après pas sur que les bourrins de l'époque aient le même apport énergétique qu'un cheval moderne, cela dit ils sont surement aussi plus rustiques.
Consommation : 10 L d'eau à la journée, pas mal de fourrage (5kg), et idéalement des céréales (deux rations de 2 litres environ je dirais)

Un cavalier plus lourd consomme surement beaucoup d'énergie et est beaucoup moins mobile. De toute façon avec la traîne logistique, il va à la vitesse du train.

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