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Paradise Papers


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Le Monde publie une enquête d'un consortium international de journalistes, qui a eu accès aux documents confidentiels d'un grand cabinet d'avocats fiscalistes. Les documents montrent que l'évasion fiscale des grandes entreprises et des grandes fortunes représente un manque à gagner de 350 milliards d'euros par an au niveau mondial:

http://www.lemonde.fr/paradise-papers/article/2017/11/05/les-paradise-papers-nouvelles-revelations-sur-les-milliards-caches-de-l-evasion-fiscale_5210518_5209585.html?utm_campaign=Lehuit&utm_medium=Social&utm_source=Twitter

Comme la questions des paradis fiscaux pose un gros problème diplomatique, et que les montants de l'évasion dépassent le PIB de pas mal d'états, je me suis dit que ça avait sa place dans le section politique étrangère.

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Il y a 4 heures, hadriel a dit :

Le Monde publie une enquête d'un consortium international de journalistes, qui a eu accès aux documents confidentiels d'un grand cabinet d'avocats fiscalistes. Les documents montrent que l'évasion fiscale des grandes entreprises et des grandes fortunes représente un manque à gagner de 350 milliards d'euros par an au niveau mondial:

http://www.lemonde.fr/paradise-papers/article/2017/11/05/les-paradise-papers-nouvelles-revelations-sur-les-milliards-caches-de-l-evasion-fiscale_5210518_5209585.html?utm_campaign=Lehuit&utm_medium=Social&utm_source=Twitter

Comme la questions des paradis fiscaux pose un gros problème diplomatique, et que les montants de l'évasion dépassent le PIB de pas mal d'états, je me suis dit que ça avait sa place dans le section politique étrangère.

Merci

La majorité des informations est réservée aux abonnés.

Néanmoins, voilà un petit florilège des riches et puissants dont les montages financiers sont révélés (pas strictement illégaux, juste opaques et hyper-optimisés pour réduire les impôts au maximum):

  • la plupart des ministres et donneurs de Trump dont Wilbur Ross, Rex Tillerson, Gary Cohn, les frères Koch
  • Des russes, proches du pouvoir, investissant dans facebook et twitter via des véhicules opaques
  • La Reine d'angleterre
  • des proches de Trudeau

http://www.lemonde.fr/paradise-papers/article/2017/11/05/elisabeth-ii-entourage-de-trump-de-trudeau-les-premieres-revelations-des-paradise-papers_5210561_5209585.html?utm_term=Autofeed&utm_campaign=Echobox&utm_medium=Social&utm_source=Twitter#link_time=1509907853

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Révélations sur les placements secrets de la reine d’Angleterre aux îles Caïmans

Elisabeth II, l’une des femmes les plus riches du monde, a investi ses revenus dans des places offshore et a pris des participations dans des sociétés britanniques controversées.

Le Monde | 05.11.2017 à 19h15 • Mis à jour le 05.11.2017 à 19h52 | Par Hilary Osborne ("The Guardian", texte adapté par "Le Monde")

La reine d’Angleterre a investi des millions de livres de son patrimoine privé dans un fonds des îles Caïmans, un portefeuille financier offshore jusqu’ici gardé secret, et dévoilé par les « Paradise Papers ». Ces documents prouvent, pour la première fois, que la reine a détenu — et détient encore — des intérêts dans plusieurs fonds d’investissement dans des paradis fiscaux.

Ces révélations sur les avoirs de la reine, l’une des femmes les plus riches du monde, ne vont pas manquer de relancer au Royaume-Uni le débat sur son patrimoine, d’autant que ces montages n’apparaissent pas dans les déclarations annuelles de la Couronne. Elles vont sans doute renforcer la détermination des organisations et des députés qui réclament depuis longtemps un contrôle plus sérieux des dépenses de la famille royale.

Les « Paradise Papers » en 3 points

Les « Paradise Papers » désignent la nouvelle enquête menée par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et ses 96 médias partenaires, dont Le Monde, soit 400 journalistes de 67 pays. Ces révélations s’appuient sur une fuite de documents initialement transmis, en 2016, au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung par une source anonyme.

Cette nouvelle enquête permet de lever le voile sur les mécanismes sophistiqués d’optimisation fiscale dont profitent les multinationales et les grandes fortunes mondiales.

Les « Paradise Papers » sont composés de trois ensembles de données, qui représentent au total près de 13,5 millions de documents :

6,8 millions de documents internes du cabinet international d’avocats Appleby, basé aux Bermudes mais présent dans une dizaine de paradis fiscaux.

566 000 documents internes du cabinet Asiaciti Trust, installé à Singapour.

6,2 millions de documents issus des registres confidentiels des sociétés de dix-neuf paradis fiscaux : Antigua-et-Barbuda, Aruba, Bahamas, Barbades, Bermudes, Dominique, Grenade, îles Caïman, îles Cook, îles Marshall, Labuan, Liban, Malte, Saint-Kitts-et-Nevis, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Samoa, Trinité-et-Tobago, Vanuatu.

Bien que les gestionnaires du patrimoine de la reine affirment qu’il n’y avait pas d’avantages fiscaux à investir dans ces paradis, certains détails des montages offshore pourraient en effet se révéler gênants. Le duché de Lancastre est, depuis 1399, le domaine privé du souverain britannique, et lui fournit une source de revenus indépendants. Il comprend traditionnellement des terres et des fonds, détenus en fiducie par la reine. Selon les propres estimations du duché, ses actifs s’élevaient, à la fin de mars, à 519 millions de livres (584 millions d’euros).

Or, depuis douze ans, le duché de Lancastre a indirectement investi — de manière involontaire, assure-t-il — dans la société BrightHouse, une chaîne de 270 magasins britanniques d’électroménager, accusée d’exploiter des milliers de familles pauvres et de personnes vulnérables. Cette enseigne très controversée propose des appareils électroménagers en location-vente, avec des remboursements à des taux d’intérêt annuels parfois prohibitifs. BrightHouse est notamment accusée par les autorités financières britanniques de surfacturer ses clients et d’utiliser des méthodes de vente agressives auprès de gens ayant des problèmes mentaux ou des troubles de l’apprentissage.

L’entreprise a toujours nié ces accusations et a assuré qu’on déformait la réalité. Elle a pourtant fait l’objet d’une enquête de la Financial Conduct Authority (FCA), l’autorité de réglementation des sociétés financières britannique, qui a ordonné, le mois dernier, à l’entreprise de rembourser 14,8 millions de livres sterling (16,6 millions d’euros) à quelque 249 000 clients — la FCA a d’ailleurs jugé que BrightHouse n’était pas un « prêteur responsable ».

BrightHouse s’est aussi distinguée pour avoir minimisé le montant de ses impôts en accordant un prêt important à une holding luxembourgeoise. Elle a déclaré 1,6 milliard de livres (1,8 milliard d’euros) de chiffre d’affaires entre 2007 et 2014 et a réalisé 191 millions de livres (215 millions d’euros) de bénéfices, selon le magazine britannique Private Eye. Or elle a payé moins de 6 millions de livres (6,7 millions d’euros) d’impôt sur les sociétés.

Taxe ridicule

« Brighthouse se conforme à tous les règlements fiscaux applicables, et paie ses impôts intégralement et à temps, proteste la société. Nous sommes appréciés de nos clients parce que nous aidons ceux qui sont exclus financièrement à cause de leurs faibles revenus ou de leurs problèmes antérieurs de crédit, pour leur permettre d’avoir des objets de tous les jours qu’autrement ils ne pourraient pas obtenir. »

Le directeur financier du duché de Lancastre, Chris Adcock, a répondu au Guardian qu’il n’était pas au courant de l’existence de cette royale participation dans BrightHouse. « Les investisseurs s’engagent auprès d’un fonds pour une certaine période, et ne participent pas aux décisions d’investissement », a-t-il expliqué. C’est d’ailleurs l’un des problèmes de ces fonds : l’argent peut se perdre dans une cascade d’investissements successifs, perdus de vue par les investisseurs initiaux.

Mais il apparaît que le duché utilise aussi des fonds offshore pour éviter de payer des impôts aux Etats-Unis. Les investisseurs qui ne paient pas leurs impôts en Grande-Bretagne sont en effet censés s’en acquitter aux Etats-Unis, s’ils investissent dans certains fonds américains — mais le duché, lui, assure, n’avoir bénéficié d’aucun avantage fiscal en investissant via les îles Caïmans.

Il a investi 7,5 millions de livres (8,4 millions d’euros) en 2005 dans le Dover Street VI Cayman Fund LP, dont il est devenu à la même époque commanditaire. Cette structure est allée nourrir un autre fonds américain, qui a lui-même investi dans des sociétés de capital-risque du monde entier. Les « Paradise Papers » détaillent la façon dont l’argent du duché a transité dans ces fonds.

Les gérants de Dover Street indiquent ainsi, dans un courrier de septembre 2007, qu’ils ont des intérêts aux côtés de vingt-six autres partenaires dans une société du nom de Vision Capital Partners VI B LP. Ils expliquent que cette structure a été « créée par Vision Capital Partners pour acquérir un portefeuille de deux magasins au Royaume-Uni ». Or deux mois plus tôt, Vision Capital Partners VI B LP achetait BrightHouse et Threshers, une chaîne de magasins de boissons aujourd’hui fermée.

Devoir de transparence

Le placement dans Vision Capital était l’un des investissements proposés par les gérants de Dover Street, pour lesquels le duché a été invité à contribuer à hauteur de 6 % de son engagement, soit 450 000 dollars (387 000 euros). Mais il était prévu que Dover Street VI cesse toute activité à la fin de l’année 2014. Il revend depuis ses participations, et reverse les fonds à ses investisseurs initiaux. Le montant des capitaux recouvrés par le duché n’apparaît pas dans les « Paradise Papers », on retrouve seulement la trace d’un versement de 361 367 dollars (311 000 euros) en juin 2008. Le duché semble avoir encaissé cette somme après s’être acquitté d’une taxe ridicule, 0,4 %, soit 1 505 dollars (1 300 euros).

« Tous nos investissements sont entièrement légaux et soumis à un audit », assure Chris Adcock, qui a cependant reconnu qu’il avait investi dans des fonds à l’étranger. « Mais le fonds Dover Street a été acheté en 2005 et ne constitue que 0,3 % de la valeur totale du duché, relativise le directeur financier. L’investissement dans BrightHouse a été fait à travers un tiers et ne vaut que 3 208 livres », soit 3 611 euros. Il n’a cependant pas donné de détails sur la valeur de l’investissement initial dans ce fonds, ni sur ce qu’il en a retiré depuis.

M. Adcock a également confirmé que le duché avait placé 5 millions de livres (5,6 millions d’euros), en juin 2004, aux Bermudes, dans le Jubilee Absolute Return Fund, qui a investi à son tour dans des hedge funds, des fonds spéculatifs. Jubilee a depuis quitté, en 2006, les Bermudes pour Guernesey. A sa création, Fauchier Partners, les dirigeants de cette structure, dans laquelle ont investi une série d’œuvres caritatives et de fonds de pension, ont cherché à s’assurer que les bénéfices ne seraient pas taxés aux Bermudes jusqu’en 2016.

Le fonds est à présent géré par d’autres dirigeants et a été rebaptisé Permal Absolute Return Fund. On ignore ce que ce montage a rapporté au duché — s’il lui a rapporté quelque chose. Chris Adcock explique que la Couronne en a retiré ses avoirs en 2010. Les investissements dans Dover Street devraient, eux, perdurer encore deux ou trois ans, le temps qu’il soit liquidé.

La Couronne dément catégoriquement vouloir échapper au fisc en passant par des paradis fiscaux. « Nous n’avons pas connaissance d’avantages fiscaux dont bénéficierait le duché grâce aux fonds offshore, insiste le directeur financier. La politique d’investissement du duché repose sur les conseils et les recommandations de nos consultants en investissement, et sur un souci de bonne répartition de nos actifs, et non sur une stratégie fiscale. » Quoi qu’il en soit, les « Paradise Papers » ne peuvent que relancer le débat sur le devoir de transparence de la famille royale.

 

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Le business caché du ministre du commerce de Trump avec des proches de Poutine

Wilbur Ross, le secrétaire au commerce de Donald Trump, est l’actionnaire majoritaire d’une société offshore de fret maritime, qui travaille avec des Russes

Le Monde | 05.11.2017 à 19h00 • Mis à jour le 05.11.2017 à 20h03

Par Martha M. Hamilton (ICIJ), Sasha Chavkin (ICIJ) et Nicolas Bourcier

Il est l’un des poids lourds du gouvernement Trump, avec une fortune estimée à 3 milliards de dollars, à peine moins que celle du président. Ancien démocrate comme lui, new-yorkais et banquier d’affaires, Wilbur Ross est un secrétaire d’Etat au commerce à la parole tranchante mais au profil discret. Marié, deux enfants, l’homme de 79 ans, qui se rêvait écrivain avant d’arpenter, pendant près d’un quart de siècle, les trottoirs de Wall Street, a bâti une grande partie de sa fortune en rachetant des groupes sidérurgiques en difficulté. Des usines situées pour la plupart dans le Midwest industriel — une région qui fut décisive dans la victoire, en 2016, du candidat républicain.

Connu aussi sous le nom moins flatteur de « roi de la faillite », Wilbur Ross jouit, parmi ses pairs, d’une réputation de businessman intraitable. Ses nombreux détracteurs le décrivent comme un « investisseur vautour ». Donald Trump le compare à « un tueur ». Un compliment dans la bouche du président, qui lui doit le sauvetage de son casino d’Atlantic City, le Taj Mahal, en butte, en 1990, à des problèmes de montage financier. Comme lui, Wilbur Ross est un pourfendeur de traités commerciaux et un fervent partisan de la relance par les baisses d’impôt. Les médias américains voient en lui l’âme sœur du président, la clé de voûte de cette administration dominée par des hommes d’affaires.

Les « Paradise Papers » en 3 points

Les « Paradise Papers » désignent la nouvelle enquête menée par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et ses 96 médias partenaires, dont Le Monde, soit 400 journalistes de 67 pays. Ces révélations s’appuient sur une fuite de documents initialement transmis, en 2016, au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung par une source anonyme.

Cette nouvelle enquête permet de lever le voile sur les mécanismes sophistiqués d’optimisation fiscale dont profitent les multinationales et les grandes fortunes mondiales.

Les « Paradise Papers » sont composés de trois ensembles de données, qui représentent au total près de 13,5 millions de documents :

6,8 millions de documents internes du cabinet international d’avocats Appleby, basé aux Bermudes mais présent dans une dizaine de paradis fiscaux.

566 000 documents internes du cabinet Asiaciti Trust, installé à Singapour.

6,2 millions de documents issus des registres confidentiels des sociétés de dix-neuf paradis fiscaux : Antigua-et-Barbuda, Aruba, Bahamas, Barbades, Bermudes, Dominique, Grenade, îles Caïman, îles Cook, îles Marshall, Labuan, Liban, Malte, Saint-Kitts-et-Nevis, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Samoa, Trinité-et-Tobago, Vanuatu.

Soupçons de conflits d’intérêts

Lors de sa nomination au département du commerce, Wilbur Ross a conclu avec le Bureau fédéral d’éthique du gouvernement un accord qui prévoit de céder quatre-vingts de ses sociétés — une grande partie d’entre elles étant enregistrées dans des paradis fiscaux. Il a toutefois conservé une participation dans neuf autres structures, consacrées au « financement immobilier et prêts hypothécaires » et au « transport transocéanique ». Des actifs qui n’ont pas été détaillés, excepté quatre d’entre eux, enregistrés dans les îles Caïmans. Personne ou presque n’y a trouvé à redire.

Lors des auditions au Sénat pour confirmer sa nomination, le milliardaire a répondu à un feu roulant de questions sur son passage à la Bank of Cyprus (Banque de Chypre), un établissement connu pour avoir abrité les capitaux de grandes fortunes russes, à l’origine douteuse. M.Ross en a été vice-président de 2014 à 2016 et il a même siégé un temps au côté de Vladimir Strzhalkovsky, ancien collègue de Vladimir Poutine au KGB.

« Le public américain mérite de connaître l’étendue de vos relations avec la Russie et ce que vous savez des liens entre l’administration Trump, la campagne de Trump, la Trump Organization [la société du président] et la Bank of Cyprus », a écrit un groupe de cinq sénateurs démocrates. La lettre a été signée par un seul membre de la commission chargée d’évaluer M. Ross. Elle n’eut aucune incidence sur sa nomination.

Lire aussi :   « Paradise Papers » : révélations sur les affaires offshore de 13 proches de Donald Trump

L’homme d’affaires a également été interrogé sur ses avoirs maritimes, et d’éventuels conflits d’intérêts. Ses réponses n’ont pas ébranlé la commission sénatoriale. « J’ai l’intention d’être très scrupuleux sur toutes les questions où il y a la moindre parcelle de doute », a-t-il promis. Aucune question, en revanche, ne lui a été posée sur une société de fret maritime appelée Navigator Holdings Ltd, et dont il a été membre du conseil d’administration — on se demande même si la commission était au courant de ses liens avec cette société des îles Marshall.

Des liens avec le cercle rapproché de Poutine

D’après des données confidentielles du cabinet d’avocats Appleby, obtenues par la Süddeutsche Zeitung et partagées par le Consortium international de journalistes d’investigation, dont Le Monde est partenaire, Wilbur Ross continue non seulement de gagner des millions de dollars chaque année grâce à cette société — qui concurrence pourtant directement les entreprises de transport américaines —, mais il a de surcroît des liens d’affaires avec le cercle rapproché de Vladimir Poutine.

Parmi les plus gros clients de Navigator se trouve en effet la société russe de gaz et de produits pétrochimiques Sibur, qui a contribué à hauteur de 23 millions de dollars à son chiffre d’affaires en 2016. Etablie à Moscou, Sibur appartient à Kirill Chamalov (marié à la plus jeune fille de Poutine) et à Guennadi Timtchenko, un oligarque sanctionné par le Trésor américain après l’invasion russe de la Crimée.

Fondateur de Gunvor, l’une des plus grosses sociétés mondiales de négoce de pétrole, M. Timtchenko est considéré, avec une fortune estimée à 15,3 milliards de dollars par Forbes, comme l’un des relais financiers du président russe. Le plus grand actionnaire de Sibur (57,5 % des parts) est également un oligarque célèbre, Leonid Mikhelson, deuxième fortune de Russie. Novatek, une de ses compagnies d’énergie, a, elle aussi, été visée par les sanctions américaines.

A ce confortable carnet de commandes russe, Navigator a ajouté PDVSA, la compagnie pétrolière nationale vénézuélienne. Bien que, là encore, l’administration américaine ait sanctionné, en août dernier, l’entreprise du régime de Nicolas Maduro. Un paradoxe, pour le ministre du commerce américain.

« Ce ne sont pas des histoires à la Rockefeller »

Comment en est-on arrivé là ? L’entrée de Wilbur Ross dans Navigator remonte à 2011, lorsqu’il en acquiert 19,4 % du capital et obtient deux sièges au conseil d’administration. Quelques mois plus tard, avec l’approbation d’un tribunal des faillites, il récupère un paquet d’actions de la banque Lehman Brothers et devient l’actionnaire majoritaire de Navigator.

Wilbur Ross se rapproche alors de David Butters, l’ancien patron de Lehman Brothers qui dirige Navigator depuis la faillite de la banque, en 2008. Il l’a côtoyé plus de deux ans au conseil d’administration de la société maritime, de 2012 à 2014, avant de laisser son siège à Wendy Teramoto, l’une de ses proches : elle fut longtemps la directrice générale et l’associée de sa holding WL Ross & Co LLC, avant de démissionner en 2017 pour intégrer son cabinet à Washington.

Malgré son départ du conseil d’administration, Wilbur Ross a conservé sa participation dans Navigator. Il contrôlerait aujourd’hui, à travers différentes entités offshore, 31,5 % de la société — une participation estimée à 200 millions de dollars (172 millions d’euros).

C’est seulement quelques mois après l’entrée au capital de Ross que Navigator a signé son premier contrat avec Sibur, au début de 2012, en affrétant deux navires pour transporter des produits pétrochimiques vers l’Europe. Comme beaucoup d’entreprises énergétiques russes, Sibur a été créée par l’Etat, en 1995. Elle a été rachetée en 2001 par le géant russe Gazprom, qui l’a revendue neuf ans plus tard à MM. Timtchenko et Mikhelson.

Deux hommes à la trajectoire « caractéristique » de ces magnats de l’énergie russe qui se sont enrichis sous l’ère Poutine, marquée par la corruption et le capitalisme de copinage, selon Amos Hochstein, le plus haut diplomate américain en matière d’énergie sous l’administration Obama : « Ce ne sont pas des histoires à la Rockefeller. Ils sont devenus proches de Poutine, fidèles à Poutine, obtenant des biens de l’Etat tout en s’enrichissant. »

Malgré la vente, le gouvernement russe a continué à soutenir Sibur. En 2013, un programme fédéral a permis à l’entreprise de construire un terminal de 700 millions de dollars à Oust-Louga, le port de la Baltique où Navigator embarque ses cargaisons.

Après l’invasion russe de la Crimée en 2014, les Etats-Unis et d’autres pays occidentaux ont imposé des sanctions économiques aux principaux alliés de Poutine, dont M. Timtchenko, deuxième actionnaire de Sibur, et quelques mois plus tard, M. Mikhelson. La société Sibur n’a pas été visée, mais des banques occidentales, comme Bank of America et la Royal Bank of Scotland, ont retiré leurs prêts à l’entreprise.

Le gouvernement russe est alors de nouveau intervenu. En septembre 2014, sous la pression des sanctions, M. Timtchenko vend 17 % de Sibur à Kirill Chamalov — un achat financé par un prêt de 1,3 milliard de dollars de la banque publique Gazprombank, qui porte la participation du gendre de M. Poutine dans la société à plus de 20 %.

« Votre intérêt est aligné sur le mien »

Et malgré les sanctions, les affaires de Navigator et de Sibur croissent et embellissent. En 2015, la part des recettes de la compagnie américaine provenant de ce client russe passent de 5,3 % à 9,1 % : Sibur devient l’un des cinq premiers clients de Navigator. Cette année, la compagnie de transport a même doublé sa flotte réservée aux exportations de Sibur.

Que les sociétés de Wilbur Ross établies dans des paradis fiscaux tirent bénéfice d’une entreprise contrôlée par des proches de M. Poutine pose évidemment la question des conflits d’intérêts. Le ministre peut peser sur le commerce américain ou sur d’éventuelles sanctions susceptibles d’affecter les dirigeants de Sibur. La loi fédérale exige que les fonctionnaires se récusent dans les affaires qui auraient un effet « direct et prévisible » sur leurs intérêts ou s’ils ont une relation étroite qui pourrait faire douter de leur impartialité.

Un porte-parole de Wilbur Ross a dit à l’ICIJ que l’homme d’affaires, depuis sa nomination, s’était toujours déporté de « toute décision liée au transport maritime transocéanique » ; il assure n’avoir « jamais réclamé ni reçu » d’exemptions d’éthique — une procédure qui permet aux responsables publics américains de conserver un dossier malgré un possible conflit d’intérêts.

M. Ross assure qu’il n’était pas encore au conseil d’administration de Navigator quand les premiers contrats ont été signés avec Sibur, en mars 2012 — ce que contredit sa déclaration d’intérêts. Il a enfin fait remarquer qu’il avait toujours « plutôt soutenu les sanctions administratives » contre les entités russes.

Richard Painter, avocat et ancien conseiller éthique de George W. Bush, estime toutefois que le cas de Navigator mériterait un examen plus approfondi : « Je serais très inquiet si un membre du gouvernement américain gagnait de l’argent en traitant avec les Russes, souligne-t-il. Je voudrais en connaître le détail. »

Quelques heures après avoir été nommé secrétaire d’Etat au commerce, Wilbur Ross s’est rendu, le 30 novembre 2016, à la Gramercy Tavern, un restaurant chic de Manhattan. Une salle avait été réservée par Navigator. David Butters, le directeur général de la société, et lui sont arrivés un peu avant les autres convives, racontait l’agence Bloomberg dans un article paru en janvier. David Butters affirme que le tout nouveau ministre lui a glissé : « Votre intérêt est aligné sur le mien. L’économie américaine se développera, et Navigator sera bénéficiaire. »

Lorsque les autres invités sont entrés, Wilbur Ross a été chaleureusement félicité. Le repas s’est déroulé dans la bonne humeur, a dit M. Butters à Bloomberg. « C’était comme : nous avons la possibilité maintenant de faire des affaires. » L’histoire ne dit pas si « le tueur » a eu un sourire.

 

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Les affaires offshore de Stephen Bronfman, l’ami proche de Justin Trudeau

L’ancien trésorier de campagne de Justin Trudeau est impliqué dans un trust aux îles Caïmans. Le premier ministre canadien s’est pourtant fait le héraut de la lutte contre les paradis fiscaux.

Le Monde | 05.11.2017 à 19h15 • Mis à jour le 05.11.2017 à 19h58

Par Nicolas Bourcier, Chelsea Gomez (CBC), Gillian Findlay (CBC) et Harvey Cashore (CBC)

La scène remonte à l’été 2012. Justin Trudeau réunit ses proches et ses conseillers dans un chalet de Mont-Tremblant, un village carte postale niché dans les montagnes Laurentides, à moins de deux heures de Montréal. Le fils du flamboyant Pierre Elliott Trudeau, premier ministre pendant quinze ans, de 1968 à 1979 et de 1980 à 1984, cherche à tester ses troupes. Il veut lancer une campagne pour devenir premier ministre. Il a 40 ans, siège au Parlement comme député d’un Parti libéral en chute dans les sondages et se dit persuadé qu’il a une carte à jouer.

Les « Paradise Papers » en 3 points

Les « Paradise Papers » désignent la nouvelle enquête menée par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et ses 96 médias partenaires, dont Le Monde, soit 400 journalistes de 67 pays. Ces révélations s’appuient sur une fuite de documents initialement transmis, en 2016, au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung par une source anonyme.

Cette nouvelle enquête permet de lever le voile sur les mécanismes sophistiqués d’optimisation fiscale dont profitent les multinationales et les grandes fortunes mondiales.

Les « Paradise Papers » sont composés de trois ensembles de données, qui représentent au total près de 13,5 millions de documents :

6,8 millions de documents internes du cabinet international d’avocats Appleby, basé aux Bermudes mais présent dans une dizaine de paradis fiscaux.

566 000 documents internes du cabinet Asiaciti Trust, installé à Singapour.

6,2 millions de documents issus des registres confidentiels des sociétés de dix-neuf paradis fiscaux : Antigua-et-Barbuda, Aruba, Bahamas, Barbades, Bermudes, Dominique, Grenade, îles Caïman, îles Cook, îles Marshall, Labuan, Liban, Malte, Saint-Kitts-et-Nevis, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Samoa, Trinité-et-Tobago, Vanuatu.

Parmi ses convives se trouve Stephen Bronfman. L’homme d’affaires, philanthrope et ami de longue date du jeune député n’a pas besoin d’être présenté. Fils du milliardaire Charles Bronfman, lui-même fils de Samuel Bronfman — qui fit fortune en vendant du whisky Seagram durant la prohibition aux Etats-Unis (1919-1933) —, Stephen Bronfman est à la tête de la firme d’investissement Claridge, spécialisée dans l’immobilier, l’alimentation et le divertissement. Plutôt discret sur la scène publique, il fait partie intégrante du sérail des grands noms et des puissantes familles du Canada.

« Je suis le gars de la finance »

C’est à lui que Justin Trudeau demande de recueillir des fonds pour sa campagne. L’entrepreneur accepte. « Je suis le gars de la finance », dira-t-il plus tard aux meetings de son poulain. Très vite, les médias le décriront comme un de ses principaux conseillers. Après avoir pris les rênes du parti, en avril 2013, Justin Trudeau se tourne à nouveau vers lui. Il lui propose de devenir le collecteur de fonds de la formation et de siéger au sein de l’organe exécutif du parti. Stephen Bronfman dit oui.

« Le but est de lever beaucoup d’argent et d’aider Justin à devenir le prochain premier ministre, tout simplement », explique-t-il à l’époque. En deux ans, il collecte 27 millions de dollars (23,2 millions d’euros). Pour la seule année 2014, il amasse plus d’argent que lors de n’importe quelle autre campagne des libéraux de ces dix dernières années. Indispensable au parti, essentiel dans l’ascension du candidat, Stephen Bronfman fait son entrée parmi les cinquante personnalités « les plus importantes » du Canada, selon le classement du magazine Maclean’s.

La faconde et le style de Justin Trudeau l’emportent. Il est le candidat du « vrai changement », il est jeune, porté par un souffle nouveau, une parole qui bouscule les lignes de ce Canada engourdi après une décennie de gouvernement conservateur, marquée par l’austérité et le repli sur soi. Justin Trudeau promet de renforcer les classes moyennes, de taxer davantage les plus riches et de lutter contre les paradis fiscaux, où des milliards de dollars canadiens échappent chaque année au fisc.

Un message, qu’une fois premier ministre, il continuera de répéter : « Nous savons que l’évitement fiscal pose depuis longtemps un problème, a-t-il insisté devant la Chambre des communes. Nous avons été élus sur la promesse que tout le monde paierait de manière juste ses impôts. L’évasion fiscale est quelque chose que nous prenons très au sérieux. »

Or il s’avère que Stephen Brofman et sa société Claridge ont activement investi dans une structure financière opaque des îles Caïmans, le Kolber Trust, un trust de 60 millions de dollars (52 millions d’euros) qui pourrait avoir soustrait aux caisses fédérales des sommes colossales en impayés d’impôt.

« Frais de subsistance »

L’analyse par plusieurs experts des « Paradise Papers », un vaste ensemble de notes et de mails privés s’étendant sur plus de vingt ans, issus des données confidentielles du cabinet d’avocats Appleby, jette une lumière crue sur l’exploitation de failles fiscales, de paiements déguisés et de possibles transactions frauduleuses de la société canadienne.

Le cabinet d’avocats de la famille Bronfman a en outre orchestré pendant des années une campagne de lobbying à Ottawa afin de combattre toute législation susceptible de restreindre l’utilisation d’officines offshore. Contacté, Stephen Bronfman n’a pas souhaité réagir. Son avocat, William Brock, a tenu à souligner que son client « a [vait] toujours agi correctement et de manière éthique, notamment en se conformant pleinement à toutes les lois et exigences réglementaires ». Il a dénoncé « toute allégation de faux, de fraude, de dissimulation ou d’évasion fiscale », où il ne voit qu’une « distorsion des faits ».

Au cœur des révélations des « Paradise Papers » se trouve Kolber Trust, une entité des îles Caïmans, créée en 1991 par Leo Kolber, le parrain de Stephen Bronfman. L’homme est alors un influent sénateur au sein du Parti libéral, ancien responsable des collectes de fonds du parti — et farouche opposant à toute réglementation financière. C’est également un proche du père de Justin Trudeau.

Ce trust a été ouvert pour les enfants Kolber, Jonathan et Lynne ; ce type de structure très opaque est parfois utilisé par de gros patrimoines pour dissimuler une partie de leur fortune. Selon les données du cabinet Appleby, les deux enfants auraient tous deux reçu plusieurs millions de dollars de « décaissements » non imposés, durant toute la durée de vie du trust.

En 2007, par exemple, 3 millions de dollars (2,6 millions d’euros) ont été transférés à Jonathan Kolber pour des « frais de subsistance » — et pour aider à l’achat d’un appartement à Manhattan. En 2012, il a reçu 1 million de dollars (860 000 euros) pour ses « dépenses personnelles ». En 2013, 6 millions de dollars (5,1 millions d’euros) « pour coût de la vie + train de vie », selon un mémorandum. Au total, le fils Kolber a reçu 16,5 millions de dollars (14,2 millions d’euros), exempts d’impôt. Les documents montrent que sa sœur Lynne, quant à elle, a reçu 1,2 million de dollars (1 million d’euros).

Au mépris des règles

Claridge, la société d’investissement de Stephen Bronfman, n’avait aucune position officielle dans le trust, mais les « Paradise Papers » montrent que ses cadres fournissaient régulièrement des conseils et organisaient des transactions commerciales entre les Bronfman et cette structure. Charles Bronfman et son fils Stephen ont eux-mêmes prêté plusieurs millions de dollars au Kolber Trust au cours des années 1990 et 2000 — des prêts parfois sans intérêt, au mépris des règles fiscales américaines.

Au Canada, il est parfaitement légal d’avoir un trust, tant que certaines règles fiscales sont respectées. Le fisc canadien insiste, par exemple, sur le fait qu’une telle structure ne peut être exemptée de taxe que si son siège effectif, c’est-à-dire l’endroit où sont prises les décisions, est à l’étranger. Or, les documents d’Appleby foisonnent d’exemples de décisions prises non dans les îles Caïmans, mais bien au Canada.

En raison de sa nationalité américaine, Lynn Kolber ne pouvait de toute façon pas échapper aux taxes sur les versements du trust — ce qui a conduit Appleby à rayer la fille de Leo Kolber de la liste des bénéficiaires en 2007. Pour compenser l’arrêt des versements, son frère « Jonathan s’arrangera pour lui offrir des cadeaux » qui, eux, ne sont pas taxés aux Etats-Unis, propose alors le cabinet. Les avocats de la famille jurent aujourd’hui qu’il n’y en a finalement pas eu. En revanche, un deuxième trust familial a été ouvert pour répondre aux « questions fiscales que posent ou pourraient poser » le premier montage.

Depuis 2015, le Kolber Trust n’existe plus. Après vingt-quatre ans dans les îles Caïmans, les fonds ont été transférés dans un autre trust en Israël. Les « Paradise Papers » prouvent toutefois que Jonathan Kolber, qui a la citoyenneté israélienne, craignait que soit une « difficulté majeure pour lui » de révéler aux autorités israéliennes ses liens avec le Kolber Trust, estimé aujourd’hui à 64 millions de dollars (55 millions d’euros). Il a finalement opté pour une « divulgation volontaire », et a accepté de payer ses impôts en Israël, assortis d’un règlement financier.

Déménagement en Israël

Mais son déménagement en Israël pourrait soulever des problèmes fiscaux au Canada, en raison d’une petite phrase rédigée lors de sa déclaration : « l’origine des actifs du trust est le père du bénéficiaire, qui est un citoyen canadien ». Le détail a son importance, car en 2013 la Chambre des communes du Canada a adopté une loi — rétroactive jusqu’en 2007 — qui entend appliquer aux trusts offshore l’impôt sur les contributions d’origine canadienne.

Geoffrey Loomer, professeur de droit fiscal à l’université Dalhousie, à Halifax (Nouvelle-Ecosse), qui a examiné les documents, affirme que l’Agence du revenu du Canada « serait intéressée par cette déclaration » de Kolber. Et d’ajouter : « Nous parlons de revenus de plusieurs millions, et probablement de millions de dollars en recettes fiscales. »

Stephen Bronfman continue activement à lever des fonds pour le Parti libéral. Dans un courriel envoyé en septembre aux membres du parti, il a félicité Justin Trudeau d’avoir « défendu la classe moyenne ». Le premier ministre, lui, promet une réforme fiscale qui touchera les plus riches. « Le système que nous avons actuellement les encourage à payer moins d’impôt et oblige les Canadiens de la classe moyenne à payer plus, a-t-il lancé au début d’octobre, avec son enthousiasme habituel. Eh bien, nous allons le changer. »

Harvey Cashore, Gillian Findlay et Chelsea Gomez (CBC), avec Nicolas Bourcier pour Le Monde

 

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« Paradise Papers » : révélations sur les affaires offshore de 13 proches de Donald Trump

Les Paradise Papers révèlent les stratégiges d’optimisation fiscale de ministres, conseillers et donateurs du président américain. De quoi s’interroger sur la réforme fiscale annoncée par la Maison Blanche.

Le Monde | 05.11.2017 à 19h19 • Mis à jour le 05.11.2017 à 20h02

Par Jérémie Baruch, Nicolas Bourcier, Jean-Baptiste Chastand, Anne Michel, Maxime Vaudano et ICIJ

Il flotte depuis longtemps un parfum d’aversion à l’impôt autour de Donald Trump, le premier président des Etats-Unis à refuser de publier sa déclaration d’impôt depuis le républicain Gerald Ford, en 1976. Mais si quelque doute subsistait sur la réalité des secrets offshore de son proche entourage, les « Paradise Papers » viendraient le balayer de façon éclatante.

Les documents confidentiels du cabinet d’avocats Appleby, obtenus par la Süddeutsche Zeitung et partagés avec le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), révèlent les coulisses des montages de treize proches du président américain aux Bermudes, aux îles Caïmans, à l’île de Man ou à Jersey. Parmi eux, Wilbur Ross, le secrétaire d’Etat au commerce, Rex Tillerson, le chef de la diplomatie américaine, ou Gary Cohn, l’un des principaux conseillers économiques du président.

Les « Paradise Papers » en 3 points

Les « Paradise Papers » désignent la nouvelle enquête menée par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et ses 96 médias partenaires, dont Le Monde, soit 400 journalistes de 67 pays. Ces révélations s’appuient sur une fuite de documents initialement transmis, en 2016, au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung par une source anonyme.

Cette nouvelle enquête permet de lever le voile sur les mécanismes sophistiqués d’optimisation fiscale dont profitent les multinationales et les grandes fortunes mondiales.

Les « Paradise Papers » sont composés de trois ensembles de données, qui représentent au total près de 13,5 millions de documents :

6,8 millions de documents internes du cabinet international d’avocats Appleby, basé aux Bermudes mais présent dans une dizaine de paradis fiscaux.

566 000 documents internes du cabinet Asiaciti Trust, installé à Singapour.

6,2 millions de documents issus des registres confidentiels des sociétés de dix-neuf paradis fiscaux : Antigua-et-Barbuda, Aruba, Bahamas, Barbades, Bermudes, Dominique, Grenade, îles Caïman, îles Cook, îles Marshall, Labuan, Liban, Malte, Saint-Kitts-et-Nevis, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Samoa, Trinité-et-Tobago, Vanuatu.

Aucun de ces montages ne peut, à ce jour, être qualifié de frauduleux. En revanche, tous ont en commun d’utiliser les paradis fiscaux pour optimiser, voire éluder l’impôt, en dressant un écran de fumée autour d’activités et de contrats destinés à rester secrets. Une démarche contre laquelle la communauté internationale tente à grand-peine de lutter depuis la crise financière de 2008.

Lire aussi :   Le business caché du ministre du commerce de Trump avec des proches de Poutine

Faut-il s’étonner de retrouver des contribuables aussi peu exemplaires autour d’un président qui a fait du slogan « America First » son mantra ? Donald Trump a lui même créé près de 400 sociétés dans l’Etat du Delaware, le paradis fiscal « maison » des Etats-Unis, et dans des centres financiers offshore des Bermudes, de Saint-Martin et de Saint-Vincent-et-les Grenadines, qui ont été révélés dans ses déclarations d’intérêts auprès de la Commission électorale fédérale (FEC). Pendant la campagne présidentielle de 2016, le candidat républicain avait répondu avec aplomb à Hillary Clinton, qui l’accusait de ne plus payer d’impôts fédéraux depuis une vingtaine d’années : « Ça fait de moi quelqu’un d’intelligent. »

Le gouvernement le plus riche de l’histoire américaine

Grâce aux « Paradise Papers », le président américain pourra se rassurer sur l’intelligence de son entourage. Ses ministres, proches conseillers et grands donateurs de sa campagne, identifiés par Le Monde et ses partenaires, sont tous multimillionnaires voire milliardaires, et maîtrisent parfaitement un art de la finance offshore qui ignore les frontières, méprise les impôts et s’agace des réglementations.

Le président s’apprête à faire voter l’une des plus importantes baisses d’impôt de l’histoire américaine, qui promet de bénéficier aux grands patrimoines et aux multinationales

Le candidat Trump avait certes appelé à briser les grandes banques et à forcer les financiers à payer plus d’impôt. Une fois élu, le roi de l’immobilier de luxe et de la télé-réalité est revenu à ses fondamentaux : « J’aime tous les gens, riches ou pauvres, a-t-il lancé devant ses supporters de l’Iowa, en juin 2017. Mais lorsqu’il s’agit de postes à un tel niveau, je ne veux pas d’une personne pauvre. » Son gouvernement apparaît effectivement aujourd’hui comme le plus riche de l’histoire du pays. D’après Forbes, les fortunes cumulées de ses membres atteignent 4,3 milliards de dollars (3,7 milliards d’euros), soit plus de quinze fois celles du cabinet de George W. Bush.

Ces ultrariches ont aussi la particularité de payer peu d’impôt, et de veiller à ce que leurs entreprises suivent le même chemin, qu’il s’agisse de la finance, de casinos, de commerce de matières premières ou d’immobilier. Des profils taillés sur mesure pour accompagner l’agenda de relance économique de la Maison Blanche : après avoir lancé un vaste plan de déréglementation du secteur financier au tout début de son mandat, Donald Trump s’apprête à faire voter l’une des plus importantes baisses d’impôt de l’histoire américaine, qui promet de bénéficier aux grands patrimoines et aux multinationales.

Le projet de réforme fiscale prévoit, en effet, de ramener de 35 % à 20 % le taux d’imposition sur les sociétés, de façon permanente et pour toutes les entreprises. L’une des mesures les plus spectaculaires est la « vacance fiscale » que la majorité républicaine s’apprête à instaurer, si la réforme passe l’étape du Congrès. En échange d’une taxe réduite à 12 %, s’il s’agit d’avoirs en cash (au lieu de 35 %), des multinationales comme Apple, Google ou Nike pourraient rapatrier sur le sol américain, dès 2018, les près de 3 000 milliards de dollars (2 600 milliards d’euros) de trésorerie qu’ils accumulent dans des places offshore, et depuis des années, pour se soustraire au fisc américain.

Nouvelles règles du jeu

Les proches du président américain sont tous rompus aux pratiques de la planification fiscale et se voient aujourd’hui en mesure de décider des nouvelles règles du jeu : déterminer les conditions dans lesquelles l’argent offshore pourra être rapatrié ; tracer les nouvelles limites de la légalité…

Les treize hommes du président ont en commun une autre obsession : le secret des affaires. Qu’il ait fallu attendre la fuite des données du cabinet Appleby pour découvrir que le ministre du commerce en exercice, Wilbur Ross, continue de gagner des millions grâce à une société de fret maritime qui travaille avec le cercle rapproché de Vladimir Poutine est symptomatique : le monde de l’offshore reste un refuge inestimable pour les puissants de ce monde.

De même, le procureur spécial Robert Mueller a récemment découvert, au détour de son enquête sur l’influence russe dans la campagne présidentielle, que le directeur de la campagne présidentielle de M. Trump, Paul Manafort, avait probablement blanchi 75 millions de dollars avec son associé, en passant par trois paradis fiscaux opaques.

Lire aussi :   « Paradise Papers » : le lexique pour tout comprendre

Ces révélations ébranleront-elles la classe politique ou l’opinion publique américaines ? Washington s’est montré prompt, par le passé, à sanctionner ceux de ses ressortissants qui avaient dissimulé des avoirs non déclarés à l’étranger, et à exiger une transparence absolue de pays qui, comme la Suisse, les avait hébergés. Les mêmes exigences s’appliqueront-elles envers les dirigeants et les paradis fiscaux des Caraïbes, qui prospèrent aux portes des Etats-Unis ?

Les montages offshore des treize hommes du président

Pictogramme par Royyan Wijaya, the Noun Project

Par Jérémie Baruch, Nicolas Bourcier, Jean-Baptiste Chastand, Anne Michel, Maxime Vaudano et ICIJ

 

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Le Canada, l’autre pays de l’offshore

Le quart des investissements canadiens vont vers des paradis fiscaux. Malgré des années de promesses, le pays ne parvient pas à endiguer l’emprise de la finance offshore.

Le Monde | 05.11.2017 à 19h12 • Mis à jour le 05.11.2017 à 19h31 | Par Nicolas Bourcier (Montréal, envoyé spécial)

C’est l’angle mort d’un pays prospère, le Canada : un quart de ses investissements à l’étranger sont faits dans des paradis fiscaux. L’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC), à Montréal, a calculé que les stocks d’actifs canadiens dans les sept principaux paradis fiscaux avaient été multipliés par 37,6 entre 1987 et 2014, alors que le produit intérieur brut (PIB) canadien triplait pendant la même période. Pour ne prendre qu’elle, la Barbade est même devenue le troisième pays où les multinationales canadiennes investissent le plus, après les Etats-Unis, le grand partenaire commercial, et le Royaume-Uni, pour des raisons historiques évidentes. Loin devant donc l’Allemagne, la France, le Japon ou la Chine.

En 2016, quand le bilan net de l’investissement direct du Canada à l’étranger a atteint un nouveau pic, le stock d’actifs cachés dans les principaux paradis fiscaux s’élevait à 231 milliards de dollars (199 milliards d’euros). Soit une perte de revenus fiscaux estimée, selon les sources, entre 12 et plus de 20 milliards de dollars (10 à 17 milliards d’euros).

Lorsque les membres du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), associés à une trentaine de médias, avaient dissipé dans l’enquête « Offshore Leaks », en avril 2013, une partie du mystère entourant les paradis fiscaux, le Canada avait évidemment réagi. Le gouvernement conservateur de Stephen Harper avait annoncé les jours suivants un programme de traque aux « fraudeurs ». Et menacé de poursuites judiciaires les journalistes de Radio Canada, partenaires de l’ICIJ, pour les contraindre à fournir les informations auxquelles ils avaient eu accès. Et puis, rien.

Les « Paradise Papers » en 3 points

Les « Paradise Papers » désignent la nouvelle enquête menée par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et ses 96 médias partenaires, dont Le Monde, soit 400 journalistes de 67 pays. Ces révélations s’appuient sur une fuite de documents initialement transmis, en 2016, au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung par une source anonyme.

Cette nouvelle enquête permet de lever le voile sur les mécanismes sophistiqués d’optimisation fiscale dont profitent les multinationales et les grandes fortunes mondiales.

Les « Paradise Papers » sont composés de trois ensembles de données, qui représentent au total près de 13,5 millions de documents :

6,8 millions de documents internes du cabinet international d’avocats Appleby, basé aux Bermudes mais présent dans une dizaine de paradis fiscaux.

566 000 documents internes du cabinet Asiaciti Trust, installé à Singapour.

6,2 millions de documents issus des registres confidentiels des sociétés de dix-neuf paradis fiscaux : Antigua-et-Barbuda, Aruba, Bahamas, Barbades, Bermudes, Dominique, Grenade, îles Caïman, îles Cook, îles Marshall, Labuan, Liban, Malte, Saint-Kitts-et-Nevis, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Samoa, Trinité-et-Tobago, Vanuatu.

Une semaine après ces révélations, le ministre des finances, Jim Flaherty, s’était même envolé pour les Bermudes, non pour sermonner le paradis fiscal, mais pour rassurer la communauté des affaires. L’île est en effet signataire des Accords d’échange de renseignements fiscaux (AERF) avec le Canada — ces accords, qui sont censés percer les secrets bancaires des législations de complaisance, permettent surtout aux Canadiens, comme l’écrit Alain Deneault, dans son enquête Paradis fiscaux : la filière canadienne (Ed. Ecosociété, 2014, 392 p.), d’y inscrire des actifs qu’ils génèrent au Canada afin de les transférer au pays sous forme de dividendes exemptés d’impôt.

« Un acteur central dans le processus “d’offshorisation” »

Jim Flaherty a été accueilli à bras ouverts par Business Bermuda, l’association chargée de la promotion des investissements de l’archipel. Le ministre a même reconnu aux Bermudes le statut de « leader mondial » de l’assurance. L’île compte en effet des centaines de sociétés de cette branche, soupçonnées de contourner le fisc et la réglementation de pays comme le Canada.

« On touche là au cœur même du double discours des autorités canadiennes qui, d’un côté, affirment à voix haute vouloir lutter contre l’évasion fiscale et, de l’autre, légalisent les transferts dans les paradis fiscaux », affirme Alain Deneault. Le plus désolant, selon lui, c’est que rien ne change : « Le Canada est un acteur central dans le processus “d’offshorisation” du monde. Il apparaît aujourd’hui prisonnier d’une logique qu’il a lui même contribué à mettre en place, quoi qu’en disent ses dirigeants ».

Pour comprendre la proximité qu’entretient le Canada avec ces paradis fiscaux, il faut remonter à l’après-guerre, alors que le pays cultive des liens commerciaux et bancaires importants avec les dépendances britanniques de la Caraïbe. A partir des années 1950, avec l’aide de juristes, de financiers et de responsables politiques canadiens, ces petits pays se convertissent en Etats de complaisance.

En 1955, un ancien gouverneur de la Banque centrale du Canada contribue à faire de la Jamaïque un pays à la fiscalité réduite. Dans les années 1960, c’est un avocat de l’Alberta, ancien poids lourd du Parti conservateur, qui construit une législation offshore opaque pour les îles Caïmans.

Lire aussi :   Les affaires offshore de Stephen Bronfman, l’ami proche de Justin Trudeau

Ses propres créatures

Mais c’est à la Barbade que le gouvernement fédéral d’Ottawa a poussé le plus loin la logique. Il a signé en novembre 1980 un traité sur la « non double imposition », qui permet aux Canadiens d’enregistrer leurs actifs à la Barbade en n’y acquittant pratiquement aucun impôt — les taux y varient entre 0,25 % et 2,5 % — pour les transférer au Canada sans y être imposés. En 1995, le ministre des finances Paul Martin décide d’enregistrer à la Barbade sa propre société, Canada Steamship Line. C’est le coup d’envoi d’une course à l’offshore : l’île devient un corridor d’amnistie fiscale pour les contribuables riches et pour les entreprises canadiennes. D’autres leur emboîtent le pas.

En 2009, le gouvernement conservateur de Stephen Harper « légalise » ensuite une vingtaine de paradis fiscaux, et convient d’un partage de renseignements fiscaux. Les libéraux de Justin Trudeau viennent d’ajouter une place offshore de plus au printemps dernier : Chypre. Au total, le Canada a signé cent quinze conventions et traités fiscaux, un record mondial. Le pays partage même son siège au FMI et à la Banque mondiale avec un collectif de onze paradis fiscaux des Caraïbes. C’est bientôt au tour du Canada de subir l’impact des places offshore, ses propres créatures : des agglomérations comme Montréal font partie des villes du monde où les entreprises sont les moins taxées.

« Il y a tellement de traités et de textes fiscaux que n’importe qui peut dire qu’il ne fait rien d’illégal, dit Lyne Latulippe, chercheuse à la chaire en fiscalité et en finances publiques à l’université de Sherbrooke. C’est à se demander si les hauts fonctionnaires canadiens ne sont pas uniquement là pour négocier des conventions fiscales. » Sur l’échiquier politique, les libéraux et les conservateurs, les deux partis qui se partagent le pouvoir depuis plus d’un siècle, poussent traditionnellement à la baisse de l’impôt. « La différence est dans la nuance, précise la spécialiste. Les conservateurs sont plus directs et le disent. Les libéraux se sentent obligés d’aider les entreprises, mais ils le font plus discrètement. »

Echec de tous les projets de loi

Une demi-douzaine de projets de loi ont été déposés entre 1999 et 2013 pour limiter ou mettre un terme à l’évitement fiscal. Ils ont tous échoué. En novembre 2016, la motion présentée par Gabriel Sainte-Marie, député du Bloc québécois, qui dénonçait le recours aux paradis fiscaux, a été rejetée à la Chambre des communes par les deux principales formations. « Les élus de tous les partis, dont celui du premier ministre Trudeau [libéral], avaient donné leur aval lors du vote à l’Assemblée du Québec, souligne l’élu. Cela n’a visiblement pas été suffisant pour ébranler le gouvernement à Ottawa. »

Pour l’éditorialiste au Financial Times, Diane Francis, il n’y a pas de volonté d’y mettre fin, « parce que le Canada est le pays où les lobbys des paradis fiscaux sont le plus implantés au monde ». Alain Deneault pousse même le raisonnement en affirmant que le « lobby est le pouvoir », et il rappelle que les premiers ministres Harper, Mulroney et Chrétien, entre 1993 et 2015, étaient eux-mêmes liés aux grands groupes pétroliers, miniers et avocats d’affaires.

« Nous avons un premier ministre qui se présente comme jeune et moderne, qui se dit en faveur de la justice fiscale… alors qu’il est l’ami de ceux qui profitent le plus des paradis fiscaux, tranche le professeur. J’ai conscience toutefois que certaines lignes commencent à bouger avec ces révélations successives. On peut de moins en moins faire semblant. »

Difficile en effet d’imaginer aujourd’hui un voyage du ministre des finances dans une île offshore comme en 2013. L’actuel ministre, Bill Morneau, se trouve lui-même plongé depuis des semaines dans une affaire de conflit d’intérêts avec l’une de ses sociétés des Bahamas.

 

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Comment de l’argent russe a été investi dans Facebook et Twitter

Le milliardaire russe Youri Milner a placé des fonds dans les médias sociaux américains, grâce à deux sociétés russes proches du Kremlin.

Le Monde | 05.11.2017 à 19h07 • Mis à jour le 05.11.2017 à 19h15 | Par Spencer Woodman (ICIJ)

A 55 ans, Youri Milner est l’un des investisseurs les plus prospères et les plus performants de sa génération. Le milliardaire russe, renommé dans la Silicon Valley, a investi 800 millions de dollars (688 millions d’euros) dans Facebook, 400 millions (344 millions d’euros) dans Twitter, plus de 100 millions (86 millions d’euros) dans Airbnb et dans Spotify, pour ne citer qu’eux. Selon les données confidentielles du cabinet d’avocats Appleby, obtenues par la Süddeutsche Zeitung et partagées par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), dont Le Monde est partenaire, une partie de ces investissements dans Facebook et Twitter provenait en fait de l’argent de deux sociétés proches du gouvernement russe.

Les « Paradise Papers » en 3 points

Les « Paradise Papers » désignent la nouvelle enquête menée par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et ses 96 médias partenaires, dont Le Monde, soit 400 journalistes de 67 pays. Ces révélations s’appuient sur une fuite de documents initialement transmis, en 2016, au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung par une source anonyme.

Cette nouvelle enquête permet de lever le voile sur les mécanismes sophistiqués d’optimisation fiscale dont profitent les multinationales et les grandes fortunes mondiales.

Les « Paradise Papers » sont composés de trois ensembles de données, qui représentent au total près de 13,5 millions de documents :

6,8 millions de documents internes du cabinet international d’avocats Appleby, basé aux Bermudes mais présent dans une dizaine de paradis fiscaux.

566 000 documents internes du cabinet Asiaciti Trust, installé à Singapour.

6,2 millions de documents issus des registres confidentiels des sociétés de dix-neuf paradis fiscaux : Antigua-et-Barbuda, Aruba, Bahamas, Barbades, Bermudes, Dominique, Grenade, îles Caïman, îles Cook, îles Marshall, Labuan, Liban, Malte, Saint-Kitts-et-Nevis, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Samoa, Trinité-et-Tobago, Vanuatu.

191 millions de dollars investis dans Twitter

Les documents montrent que VTB, la deuxième plus grosse banque de Russie, a fait passer discrètement 191 millions de dollars (164 millions d’euros) dans DST Global, le fonds d’investissement contrôlé par le milliardaire. La somme ayant ensuite été utilisée pour acheter une importante participation dans Twitter en 2011. Le président de VTB, Andreï Kostin, est un proche de Vladimir Poutine. Les fichiers prouvent également qu’une filiale du groupe russe Gazprom, également dans les mains du pouvoir russe, a investi des montants importants dans une société offshore qui a participé, avec DST Global, à un investissement dans Facebook. A peine un an à deux ans plus tard, Youri Milner et ses partenaires ont réalisé des gains substantiels en vendant leurs parts, peu après l’introduction en Bourse de Facebook et de Twitter, respectivement en 2012 et en 2013.

Rien n’indique que le Kremlin ait eu une influence sur Twitter ou Facebook ou ait obtenu des informations internes sur ces deux géants de l’Internet grâce à ces investissements. Mais ces révélations montrent que, quelques années avant même les premiers soupçons sur l’éventuelle intervention de la Russie dans les élections américaines, le Kremlin avait des intérêts financiers dans les réseaux sociaux américains. Elles surviennent à un moment où le Congrès a lancé une enquête sur les rôles des géants américains de l’Internet dans la propagation de rumeurs russes pendant la campagne.

Investisseur « passif »

En réponse aux questions de l’ICIJ, Youri Milner a affirmé que les investissements de sa société, y compris les transactions avec Twitter et Facebook, n’avaient été fondés que sur des critères strictement commerciaux, totalement détachés des sphères politiques. L’homme d’affaires a reconnu que la banque VTB était l’un des partenaires qui l’avaient aidé à financer l’investissement dans Twitter, et aussi la participation de DST Global dans le site de commerce électronique chinois JD. com. Il a toutefois insisté sur le fait que VTB n’était qu’un investisseur purement « passif ». D’après ses calculs, moins de 5 % des fonds d’investissement de son entreprise provenaient d’institutions gouvernementales russes.

L’homme d’affaires tient à rappeler que toute cette période était marquée par des relations diplomatiques bien meilleures entre Moscou et Washington, « il ne me serait jamais venu à l’esprit, dit-il, que VTB puisse être autre chose qu’un simple investisseur ». Interrogé sur le rôle de Gazprom Investholding, Youri Milner a répondu qu’il n’avait pas connaissance d’éventuels liens financiers entre la filiale de Gazprom Kanton Services et DST Global avant que l’ICIJ ne lui pose la question.

Un porte-parole de Twitter a expliqué que DST Global était « une entité bien connue dans la Silicon Valley » et que son entreprise « avait soigneusement examiné tous ses investisseurs ». De son côté, Facebook a souligné que DST Global n’avait aucun contrôle sur l’entreprise. « Investisseur passif, DST n’avait ni droit de vote ni siège au conseil d’administration », a dit l’entreprise. L’investissement a été fait il y a huit ans, et DST Global a depuis vendu toutes ses participations dans Facebook, il y a cinq ans. »

Liens avec Poutine

Ces investissements restent cependant sensibles, car VTB et Gazprom ont tous les deux un passé controversé et des liens avec Vladimir Poutine et des officiels russes. En juillet 2014, le gouvernement américain a sanctionné VTB après l’invasion de la Crimée par la Russie. « D’un côté c’est une banque, de l’autre c’est un instrument du Kremlin, explique Sergey Aleksashenko, spécialiste du secteur bancaire russe et ancien membre du conseil d’administration de la banque dans les années 1990. Quoi que veuille le Kremlin, VTB est prêt à le faire. » Gazprom Investholding, la filiale de Gazprom liée à l’investissement de Youri Milner dans Facebook a, elle, été gérée pendant plus d’une décennie par Alicher Ousmanov, un milliardaire russe d’origine ouzbèke, lui aussi proche de Poutine. Le Kremlin a utilisé cette filiale pour « des affaires politiquement et stratégiquement importantes », assure Ilya Zaslavskiy, conseillère au Hudson Institute, un think tank conservateur américain.

Un porte-parole de Gazprom Investholding interrogé par l’ICIJ a tenu à préciser qu’aucun « responsable russe n’était impliqué dans ces prêts ». De son côté la banque VTB a assuré qu’elle était « uniquement une banque commerciale », qui « n’a jamais fait d’investissements politiquement marqués ». Les placements de Youri Milner ne se sont pas limités aux grandes entreprises de la Silicon Valley. En 2015, il a été l’un des principaux investisseurs de Cadre, une société cofondée par Jared Kushner, le gendre de Donald Trump. Les 850 000 dollars (731 000 euros) investis venaient de son propre argent, affirme le milliardaire. Aucun fonds ne vient de DST Global, a-t-il assuré.

Le milliardaire a déclaré avoir rencontré Jared Kushner une seule fois, lors d’une conférence, et n’avoir fait aucun investissement supplémentaire dans sa société. Il a insisté pour faire observer que la participation du gendre de M. Trump dans Cadre n’était « pas différente » des autres investissements qu’il a réalisés — comprendre : il s’agit d’affaires, pas de relations politiques. « Quand j’étais jeune, mon père m’a dit : “S’il te plaît, ne t’implique pas en politique”, rappelle Youri Milner. Et comme j’ai passé la plus grande partie de ma vie en Union soviétique, c’était mon principe de base à l’époque, et ça l’est encore aujourd’hui. »

 

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« Paradise Papers » : le lexique pour tout comprendre

Dans les paradis fiscaux, un actionnaire n’est pas forcément le véritable propriétaire d’une société et les multinationales ne sont pas toujours domiciliées fiscalement là où l’on croit. Difficile de s’y retrouver !

Le Monde | 05.11.2017 à 19h10 | Par Maxime Vaudano, Laura Motet et Jérémie Baruch

Voici un kit de survie lexicale pour tout comprendre aux révélations du Monde et de ses partenaires sur les « Paradise Papers ».

Actifs

En comptabilité, un actif est un élément de patrimoine susceptible de générer de la valeur, pour l’entité ou la personne qui le possède. Il peut s’agir d’un actif immobilier (bâtiments, etc.) mais aussi d’actions ou de créances (c’est-à-dire de l’argent prêté qui doit être remboursé par une autre entreprise ou une autre personne).

Actionnaire

Propriétaire déclaré d’une société. Certains actionnaires possèdent réellement le capital de ces sociétés, d’autres ne sont que des prête-noms.

Administrateur

Personne qui dirige une société, qui peut être indifféremment directeur ou membre du conseil d’administration. Dans les sociétés offshore, cela n’implique pas de gérer l’activité de l’entreprise au quotidien, mais seulement d’en assumer la responsabilité légale.

Agent de domiciliation de société offshore

C’est l’une des activités du cabinet d’avocats Appleby : l’enregistrement de sociétés dans des paradis fiscaux pour le compte de clients, un métier qui implique une solide connaissance du droit. En appui, la firme propose d’autres services : la location de prête-noms, des services bancaires, la création de trusts…

Assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés (ACCIS)

La Commission européenne souhaite mettre en place cette réforme pour limiter l’optimisation fiscale des multinationales. L’idée est de taxer les multinationales sur la base du bénéfice total qu’elles réalisent dans l’Union européenne, plutôt que pays par pays. Cela les dissuaderait de déplacer leurs profits dans les pays les plus avantageux, comme les Pays-Bas ou l’Irlande, pour payer moins d’impôts.

Bénéficiaire d’un trust

C’est la personne pour laquelle sont gérés les actifs d’un trust. Mais elle est distincte de la personne qui a créé le trust (le constituant) et de celle qui le gère (le fiduciaire ou trustee).

Généralement, les bénéficiaires ou des membres de leur famille, sont les propriétaires initiaux des actifs du trust. Mais il peut aussi s’agir d’une organisation caritative.

Blanchiment d’argent

Il consiste à réinvestir des fonds de provenance illicite (trafic de drogue, vente d’armes, fraude fiscale…) dans des activités légales pour les « recycler ». Les sociétés offshore sont parfois utilisées pour blanchir de l’argent.

Constituant d’un trust

Il s’agit d’un individu qui confie une partie de ses actifs à une société spécialisée ou à une personne de confiance (le fiduciaire ou trustee). Ce dernier a dès lors le contrôle des biens et les gère pour le compte de bénéficiaires (qui peuvent être le constituant ou des membres de sa famille par exemple). Le constituant est également appelé fiduciant ou settlor.

Contrat sous seing privé

Contrat signé entre deux parties « privées » (particulier, entreprise, avocat, etc.) Il s’oppose aux « actes authentiques » qui, eux, doivent être rédigés par un individu agissant en tant qu’officier public (huissier, notaire).

CV-BV

Le CV-BV (la « commanditaire vennootschap » en néerlandais) est un montage fiscal qui permet à des multinationales américaines de limiter ou d’éliminer leurs impôts, en étant taxées ni aux Etats-Unis ni aux Pays-Bas.

Déplacement de profits

Afin de payer moins d’impôts, certaines entreprises multinationales « déplacent » artificiellement leurs profits des pays où elles vendent leurs produits ou services vers d’autres Etats à la fiscalité plus avantageuse.

Plusieurs techniques sont utilisées, en détournant des techniques de comptabilité à l’origine légales, pour artificiellement baisser les profits. Parmi elles, le prix de transfert, les redevances de propriété intellectuelle ou les prêts entre filiales.

Dividende

Quand une entreprise engendre des bénéfices, elle peut en reverser une partie à ses actionnaires, à hauteur du nombre d’actions qu’ils possèdent dans le capital.

Double irlandais

Montage fiscal permettant de diminuer l’impôt payé en créant en Irlande une société au statut « hybride ». Ce statut permet à la société créée de faire ses affaires dans le cadre du droit commercial irlandais, tout en établissant sa résidence fiscale dans un paradis fiscal – ou nulle part – et évitant ainsi l’impôt. L’Irlande a adopté une réforme fiscale visant à supprimer ce statut à l’horizon 2020.

Echange automatique d’informations

C’est l’un des meilleurs outils de coopération internationale pour lutter contre la fraude fiscale : il astreint les Etats à partager toutes les informations fiscales importantes (comme l’identité des détenteurs de comptes, etc.) avec les autres Etats. Par exemple, une banque suisse abritant le compte d’un Français doit signaler l’existence de ce compte au fisc français. Une centaine de pays, dont les principaux paradis fiscaux, se sont engagés à commencer l’échange automatique en 2017 ou en 2018.

Evasion fiscale

Stratégie d’évitement de l’impôt en plaçant une partie ou la totalité de ses actifs dans des pays à la fiscalité avantageuse, sans s’y expatrier. Elle peut relever soit de l’optimisation fiscale (légale), soit de la fraude fiscale (illégale).

Exilé fiscal

Se dit d’une personne qui, pour échapper à un impôt qu’elle considère trop important, déménage dans un pays à la fiscalité plus légère.

Fiduciaire d’un trust

Le fiduciaire (ou trustee) est la personne physique ou la société qui détient temporairement de l’argent ou des biens pour le compte d’un tiers (le fiduciant). A charge pour lui de gérer les fonds ou les mandats qui lui ont été transférés, non dans son propre intérêt, mais pour le compte du bénéficiaire. Les deux parties, fiduciaire et fiduciant, sont liées par un contrat, appelé « trust » ou fiducie.

Formulaire d’importation

Déclaration remplie par l’importateur d’un véhicule (voiture, avion, etc.), signée par les douanes du pays où il est livré. En Europe, ce formulaire certifie officiellement que le véhicule est en règle sur le plan de la TVA et donc, qu’il peut être utilisé au sein des territoires européens sans avoir à s’acquitter de la TVA dans les pays où il circule.

Fraude fiscale

Utilisation de moyens illégaux pour baisser le montant de son imposition, voire y échapper totalement. Le fait de déplacer des capitaux dans des juridictions étrangères sans en avertir le fisc constitue une forme de fraude fiscale.

Holding

Il s’agit généralement d’une société qui n’a pas d’activité économique réelle : sa seule fonction est de prendre des participations dans d’autres sociétés et d’effectuer des opérations financières. La holding peut permettre de regrouper l’ensemble des filiales d’un groupe. Nombreux sont ceux qui créent des holdings au Luxembourg pour gérer leurs affaires, car l’imposition y est très faible.

Impôt sur les sociétés

Impôt dont doivent s’acquitter les sociétés auprès des Etats, selon leur résidence fiscale. Généralement, il s’agit d’un pourcentage des bénéfices réalisés par l’entreprise (environ 33 % en France).

Leasing maltais

Montage fiscal permettant de faire baisser le taux de la TVA à 5 %, principalement pour les yachts. Pour en bénéficier, il faut acheter le bateau par l’intermédiaire d’une société maltaise et se le louer via une seconde société maltaise, qui deviendra propriétaire du bateau au bout de plusieurs années.

Multinationale

Société ayant des liens économiques forts avec plusieurs pays, que ce soit grâce à ses filiales locales (qui créent des bénéfices en produisant ou en vendant sur place) ou à ses investisseurs (qui apportent le capital nécessaire pour financer l’entreprise).

Optimisation fiscale

Utilisation de moyens légaux pour baisser le montant de son imposition, voire y échapper. Elle suppose une bonne connaissance des lois et de leurs failles.

Elle est aussi bien pratiquée par des particuliers que par des entreprises, souvent multinationales. La Commission européenne a ainsi relevé que ces dernières contribuaient à l’impôt en moyenne à hauteur de 10 % de leurs bénéfices réalisés en Europe, contre 23 % en moyenne pour les autres entreprises.

Paradis fiscal

Pays ou territoire où certains impôts sont très bas, voire inexistants, et qui cultive une certaine opacité sur les titulaires des comptes et des sociétés. Leur définition varie selon l’époque et l’organisation qui établit la liste des paradis fiscaux.

Prête-nom

Personne qui agit au nom d’une autre comme actionnaire ou administrateur d’une société. L’utilisation de prête-noms, ou d’homme de paille, permet de dissimuler l’identité du bénéficiaire réel.

Quitus fiscal

Certificat indiquant qu’un véhicule (avion, voiture, etc.) est en règle par rapport à la TVA. En Europe, il permet notamment d’autoriser la circulation d’un véhicule ayant été acheté dans un autre pays que celui où réside son acheteur. En effet, dans le cas d’un achat à l’étranger, la TVA doit normalement être acquittée dans le pays de livraison.

Rabais maltais

Dispositif fiscal permettant aux entreprises étrangères de réduire l’impôt sur les sociétés de leurs filiales maltaises à un taux effectif d’environ 5 %, bien loin des 33 % applicables en France.

Redevances de propriété intellectuelle

Egalement appelées royalties, ces redevances permettent de facturer à d’autres sociétés d’un groupe l’exploitation d’un brevet ou d’une marque.

Régime fiscal « mère-fille »

Une société mère est une société qui détient plus de 50 % du capital d’autres sociétés, appelées « sociétés filles » ou filiales. Pour éviter une double imposition, la plupart des Etats permettent à la société mère de bénéficier d’une exonération d’impôt sur les sociétés sur les dividendes reçus par ses filiales. En France, la société mère doit payer une taxe forfaitaire de 5 % sur le montant des dividendes reçus de ses filiales.

Registre du commerce

Un registre du commerce est une base de données rassemblant les informations importantes relatives aux entreprises immatriculées dans un pays. On y trouve généralement l’identité de leurs administrateurs, leur date de création (et de fermeture), leur forme juridique, raison sociale et, parfois, leurs actionnaires.

Rescrit fiscal

Accord fiscal secret entre un pays et une entreprise, qui permet de fixer, au cas par cas, un niveau d’imposition moins élevé que le taux normal. Ce système, mis en lumière par le scandale « LuxLeaks », a notamment permis à des multinationales de payer très peu d’impôts au Luxembourg. Depuis début 2017, les Etats européens ont l’obligation de communiquer tous les rescrits fiscaux qu’ils signent aux autres capitales européennes.

Résident fiscal

Est résidente fiscale française toute personne ayant en France son lieu de séjour principal, son activité professionnelle principale, le « centre de ses intérêts économiques » ou les agents de l’Etat exerçant leur fonction à l’étranger. Si l’un de ces critères est rempli, l’individu devra s’acquitter de ses impôts en France.

Selon les Etats, cette définition varie. La plupart signe des conventions bilatérales pour définir où le citoyen doit quel impôt. Avec pour but affiché d’éviter la double imposition… mais aussi l’absence d’imposition.

Secret bancaire

Une banque ou un Etat proposant le secret bancaire s’engage à ne pas transmettre les informations concernant ses clients (identité, comptes) à des tiers. Elle peut choisir de ne lever la confidentialité qu’au cas par cas, souvent après une demande judiciaire. Ce principe d’opacité a longtemps nourri le succès de la Suisse auprès des fraudeurs, mais il est aujourd’hui largement écorné.

Société coquille ou société écran

Société qui n’exerce pas d’activité économique réelle. Généralement installée dans un paradis fiscal, elle peut servir à détenir discrètement des comptes en banque, des participations ou des investissements, dans le but d’opacifier des transactions financières.

Société offshore

Littéralement, « offshore » signifie « extraterritorial ». Une société offshore est enregistrée dans un pays non pour y exercer une activité, mais pour disposer d’une boîte à lettres - souvent pour profiter des avantages fiscaux ou réglementaires du paradis fiscal choisi.

Trust

Le trust, ou fiducie, est un contrat par lequel un constituant délègue ses actifs à un fiduciaire, qui a pour mission de les gérer dans l’intérêt d’un bénéficiaire.

L’intérêt principal de ce montage, dans le cadre de l’optimisation fiscale, est qu’en mettant dans un trust une partie de ses actifs, le constituant n’en est plus le propriétaire effectif. Son impôt s’en trouve donc diminué.

TVA

La taxe sur la valeur ajoutée est un impôt indirect sur la consommation. L’entreprise collecte cette taxe auprès des consommateurs pour tout service ou produit qu’elle vend, puis la reverse au fisc.

Dans l’Union européenne, chaque Etat fixe lui-même le niveau de sa TVA nationale. Si une entreprise se fait livrer en France un bien acheté dans un autre pays de l’UE, elle paiera la TVA française. Si une entreprise livre un bien dans un autre pays de l’UE, la TVA sera payée dans cet autre pays. Ce système de « TVA intracommunautaire » a été créé pour éviter une double taxation de l’expéditeur et de l’acquéreur.

Unité fiscale

Une unité fiscale permet aux sociétés d’un même groupe, présentes dans un pays donné, de ne remettre qu’une seule déclaration fiscale (impôt sur les sociétés, mais aussi TVA), pour l’ensemble du groupe, aux autorités fiscales.

Les groupes qui l’utilisent peuvent compenser les pertes de l’une des sociétés avec les bénéfices d’une autre, ce qui peut diminuer le montant de leur impôt. Ce régime permet également d’éliminer les opérations de vente et d’achat entre les sociétés d’une même unité fiscale.

Les « Paradise Papers » en 3 points

Les « Paradise Papers » désignent la nouvelle enquête menée par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et ses 96 médias partenaires, dont Le Monde, soit 400 journalistes de 67 pays. Ces révélations s’appuient sur une fuite de documents initialement transmis, en 2016, au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung par une source anonyme.

Cette nouvelle enquête permet de lever le voile sur les mécanismes sophistiqués d’optimisation fiscale dont profitent les multinationales et les grandes fortunes mondiales.

Les « Paradise Papers » sont composés de trois ensembles de données, qui représentent au total près de 13,5 millions de documents :

6,8 millions de documents internes du cabinet international d’avocats Appleby, basé aux Bermudes mais présent dans une dizaine de paradis fiscaux.

566 000 documents internes du cabinet Asiaciti Trust, installé à Singapour.

6,2 millions de documents issus des registres confidentiels des sociétés de dix-neuf paradis fiscaux : Antigua-et-Barbuda, Aruba, Bahamas, Barbades, Bermudes, Dominique, Grenade, îles Caïman, îles Cook, îles Marshall, Labuan, Liban, Malte, Saint-Kitts-et-Nevis, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Samoa, Trinité-et-Tobago, Vanuatu.

 

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http://abonnes.lemonde.fr/paradise-papers/article/2017/11/06/paradise-papers-les-montages-fiscaux-agressifs-de-nike-pour-eviter-l-impot-en-europe_5211049_5209585.html

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« Paradise Papers » : les montages fiscaux agressifs de Nike pour éviter l’impôt en Europe

L’équipementier sportif américain profite d’un « trou » dans la législation des Pays-Bas pour réduire son taux d’imposition à 2 % en Europe.

Le Monde | 06.11.2017 à 19h31 • Mis à jour le 07.11.2017 à 07h10 | Par Jérémie Baruch

La virgule « Swoosh » et l’iconique « Just do it » sont deux symboles phares de Nike. Reconnaissables par le public presque partout dans le monde, ils portent l’identité de la marque, mais leur valeur financière est surtout au cœur du complexe montage fiscal qu’ont échafaudé l’équipementier sportif et ses juristes depuis plus de dix ans.

Ce schéma, qui passe notamment par les Bermudes – un centre offshore bien connu pour sa fiscalité nulle – et par les Pays-Bas, leur a permis d’échapper à plusieurs milliards de dollars d’impôt. C’est ce que révèlent les « Paradise Papers », enquête du Monde avec le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ).

Les « Paradise Papers » en 3 points

Les « Paradise Papers » désignent la nouvelle enquête menée par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et ses 96 médias partenaires, dont Le Monde, soit 400 journalistes de 67 pays. Ces révélations s’appuient sur une fuite de documents initialement transmis, en 2016, au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung par une source anonyme.

Cette nouvelle enquête permet de lever le voile sur les mécanismes sophistiqués d’optimisation fiscale dont profitent les multinationales et les grandes fortunes mondiales.

Les « Paradise Papers » sont composés de trois ensembles de données, qui représentent au total près de 13,5 millions de documents :

6,8 millions de documents internes du cabinet international d’avocats Appleby, basé aux Bermudes mais présent dans une dizaine de paradis fiscaux.

566 000 documents internes du cabinet Asiaciti Trust, installé à Singapour.

6,2 millions de documents issus des registres confidentiels des sociétés de dix-neuf paradis fiscaux : Antigua-et-Barbuda, Aruba, Bahamas, Barbades, Bermudes, Dominique, Grenade, îles Caïman, îles Cook, îles Marshall, Labuan, Liban, Malte, Saint-Christophe-et-Niévès, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Samoa, Trinité-et-Tobago, Vanuatu.

Une activité européenne centralisée aux Pays-Bas

Pour comprendre ce montage, il faut remonter à la source : l’acte d’achat du consommateur. Pour s’offrir une paire de chaussures Nike, un client français n’a que deux solutions : les enseignes Nike (les magasins ou la boutique en ligne) et les revendeurs indépendants. Quoi qu’il en soit, la filiale française de Nike, Nike France S.A.S., n’est à aucun moment impliquée dans la vente au client final.

Dans les deux cas, la transaction se fait directement avec les Pays-Bas, où deux sociétés concentrent tous les revenus européens du géant de la chaussure : pour les ventes qui passent par des magasins non affiliés au fabricant américain, Nike European Operations Netherlands BV, surnommé « NEON » en interne ; pour les ventes via les enseignes de l’équipementier, Nike Retail BV, une de ses filiales.

En détournant tous les produits de ses ventes européennes vers les Pays-Bas, Nike échappe à la taxe sur les bénéfices dans les pays où il vend effectivement des chaussures. S’il existe bien des filiales de Nike dans tous les pays du Vieux Continent, elles apportent surtout un soutien logistique et ne récoltent pas un euro sur les ventes. Leurs seuls revenus proviennent du service qu’elles rendent à NEON : jouer les intermédiaires pour faciliter les ventes de produits Nike.

Pour cela, elles ne reçoivent qu’une petite obole versée par NEON censée couvrir leurs frais de fonctionnement, à laquelle s’ajoute un modique bonus sur les ventes. Ainsi, avec un revenu de 80 millions d’euros par an, ridiculement bas pour une société de cet acabit, Nike France paie très peu d’impôts au fisc français.

Nike se paye à lui-même le droit d’utiliser sa marque

Rassembler ainsi tous ses revenus européens dans un même pays n’est pas inhabituel pour une multinationale. Ce qui l’est plus, c’est d’y payer moins de 2 % en impôt sur les bénéfices – contre 25 % pour la moyenne des entreprises européennes.

Pour réussir ce tour de force, Nike a utilisé toutes les ressources du système fiscal néerlandais et ses immenses possibilités d’optimisation. Récupérant chaque année près de 7,5 milliards d’euros de recettes rapatriées des quatre coins de l’Europe, du Moyen-Orient et de l’Afrique, NEON devrait théoriquement être soumis à l’impôt sur les sociétés de 25 % qui s’applique à toutes les entreprises néerlandaises.

Mais les conseillers fiscaux de Nike ont trouvé la parade : un groupe de sociétés hollandaises autour de NEON lui paie chaque année plusieurs centaines de millions d’euros en « royalties » pour s’acheter le droit d’utiliser le « Swoosh » et le « Just do it » – certaines années, les sommes ont dépassé le milliard. Si l’opération est absolument artificielle – Nike se paie à lui-même le droit d’utiliser sa marque –, elle permet à NEON d’« assécher » artificiellement ses profits et donc de baisser ses impôts, tout en constituant un trésor avec ces « royalties ».

En toute logique, même déplacés, ces milliards d’euros de « royalties » devraient être taxés quelque part. Mais c’est là qu’intervient une autre « astuce » de la firme américaine. Nike Innovate CV, la structure qui reçoit la redevance sur les droits de propriété intellectuelle, a un statut très particulier qui la rend invisible aux yeux du fisc.

Il ne s’agit pas d’une véritable société, mais d’un accord de partenariat (« commanditaire vennootschap », en nééerlandais, d’où le sigle CV) entre deux filiales américaines du groupe Nike. Pour le fisc néerlandais, cette structure doit être taxée aux Etats-Unis. Pour le fisc américain, elle doit l’être aux Pays-Bas. Ce mirage hollandais est un jackpot pour Nike Innovate, qui ne paie pas un centime d’impôts.

De 24 % à 16 % d’imposition en trois ans

Le schéma, mis en place en 2014, a permis à Nike de réduire sensiblement son taux d’imposition global, passé de 24 % à 16 % en trois ans. Au niveau mondial, le taux d’imposition du groupe est bien plus bas que celui de Google et sa maison mère Alphabet – 19,5 % – ou d’Apple – 25,6 % –, pourtant dans le viseur de la Commission européenne. Ce montage fiscal s’avère encore plus efficace que le précédent, qui consistait pour Nike à stocker ses profits dans l’archipel caribéen des Bermudes.

Etat européen à la réputation bien plus respectable, les Pays-Bas constituent donc pour Nike une implantation de premier choix. L’idylle pourrait toutefois s’arrêter rapidement, car Amsterdam a été contraint par ses voisins européens de combler d’ici à 2020 cette faille fiscale dans laquelle s’engouffrent de nombreuses multinationales américaines. A moins qu’une nouvelle brèche ne soit trouvée d’ici là par les fiscalistes de Nike, la marque à la virgule pourrait avoir à payer son dû au fisc néerlandais.

Quant aux milliards déjà économisés par la firme américaine sur ses bénéfices à l’étranger, ils pourraient bientôt retrouver la mère patrie américaine. Le président américain, Donald Trump, a en effet annoncé son intention de réduire drastiquement la taxe sur le rapatriement des avoirs offshore pour inciter les multinationales à les investir aux Etats-Unis. Les milliards cachés de Nike pourraient donc remonter jusqu’à la société mère contre un impôt très modéré de 12,5 %, au lieu de 35 % actuellement.

Interrogé par Le Monde et ses partenaires du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), Nike a refusé de répondre aux nombreuses questions qui lui étaient soumises, se contentant de faire savoir que « Nike se conforme pleinement à la législation fiscale », tandis que le ministère néerlandais des finances affirme « ne pas être autorisé à expliquer la situation fiscale de ses contribuables ».

Qu’est-ce que la planification fiscale agressive ?

La planification fiscale agressive consiste pour une multinationale à profiter des aspects techniques d’un système fiscal ou de l’inadéquation entre plusieurs systèmes fiscaux dans le but de réduire son imposition. Alors que les systèmes fiscaux tentent d’épargner aux multinationales une double imposition (en étant taxé à la fois dans le pays où elle a son siège et celui où elle a ses activités), celles-ci peuvent parfois aboutir à une double déduction (en étant taxé nulle part sur une partie de leur activité).

Si ces techniques sont légales, les Etats coopèrent en permanence pour tenter de combler ces « trous dans la raquette » que les multinationales exploitent à l’aide de cabinets fiscalistes. La Commission européenne a également proposé le vote d’une directive qui obligerait ces cabinets à communiquer aux autorités le détail de leurs schémas de planification agressive, pour aider les Etats à lutter contre.

 

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il y a une heure, g4lly a dit :

Une partie du probleme c'est de discuter de la "légalité" de montages qui usent de l'abus de droit ... pour léser la collectivité.

La notion légale d'abus de droit par exemple n'est pas la même dans les divers pays ... de la même manière qu'il n'y a pas de droit homogène. Parler de légalité dans ce cadre c'est assez cavalier.

C'est cet argumentaire "d'optimisation" ... donc de banalisation qui  sert aux multinationales a s’exonérer sans faire de vague alors que naturellement ce sont les pauvres qui finance la collectivité a leur place.

Tant que la collectivité n'aura pas intégrer que frauder l’impôt c'est voler dans la poche de chacun donc de tous ... rien ne changera vraiment.

Voir pire, cela fait reposer l'effort collectif sur les "moyens", les mêmes qui se plaignent de "trop payer" et que l'on va spontanément orienter vers ... la liquidation des structures collectives / sociales ... 

 

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Beaucoup d'hypocrisie quand même ces paradise papers. Les entreprises utilisent le droit à leur avantage comme n'importe quel citoyen lambda. Les responsables sont les Etats.

A moins que l'on découvre que les dispositifs fiscaux mis en place dans d'innombrables pays et qui bénéficient aux entreprises sont le résultat de corruption active de ces sociétés ou de lobbying, c'est assez crétin de venir pleurer que les entreprises utilisent les dispositifs mis à leur disposition. On parle d'abus de droit mais tous les exemples que je lis pour l'instant dans ces paradise papers ne sont pas des abus de droit. A chaque fois il s'agit simplement d'utiliser une niche fiscal crée pour ce but bien précis et pas l'abus d'un dispositif qui avait d'autres objectifs.

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Le ‎06‎/‎11‎/‎2017 à 03:59, g4lly a dit :

(méga-post des articles sur le paradise paper)

 

Merci

y aurait il moyen d'éditer le post pour splitter chaque article dans un message dédié ?

j'aimerais faire référence à ces articles dans d'autres fils, mais dur de faire ça avec ce méga-pavé

EDIT: avec les liens vers les articles sources par exemple:

Lien de synthèse sur les premiers articles sur Elizabeth, l'entourage de Trump, les liens russes, et cie

http://www.lemonde.fr/paradise-papers/article/2017/11/06/paradise-papers-le-resume-de-notre-premiere-journee-de-revelations_5211064_5209585.html

http://www.lemonde.fr/paradise-papers/article/2017/11/05/paradise-papers-revelations-sur-les-affaires-offshore-de-13-proches-de-donald-trump_5210554_5209585.html

http://www.lemonde.fr/paradise-papers/article/2017/11/05/le-business-cache-de-wilbur-ross-ministre-du-commerce-de-trump-avec-des-proches-de-poutine_5210521_5209585.html

http://www.lemonde.fr/paradise-papers/article/2017/11/05/les-affaires-offshore-de-stephen-bronfman-l-ami-proche-de-justin-trudeau_5210544_5209585.html

Modifié par rogue0
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Il y a 1 heure, Julien a dit :

Beaucoup d'hypocrisie quand même ces paradise papers. Les entreprises utilisent le droit à leur avantage comme n'importe quel citoyen lambda. Les responsables sont les Etats.

A moins que l'on découvre que les dispositifs fiscaux mis en place dans d'innombrables pays et qui bénéficient aux entreprises sont le résultat de corruption active de ces sociétés ou de lobbying, c'est assez crétin de venir pleurer que les entreprises utilisent les dispositifs mis à leur disposition. On parle d'abus de droit mais tous les exemples que je lis pour l'instant dans ces paradise papers ne sont pas des abus de droit. A chaque fois il s'agit simplement d'utiliser une niche fiscal crée pour ce but bien précis et pas l'abus d'un dispositif qui avait d'autres objectifs.

Ta réponse est sensée et logique.
Sauf que, il me semble que les dites entreprises font régulièrement usage de lobbying et autres méthodes d'influence pour ... faire apparaître et pérenniser de tels dispositifs fiscaux.

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Il y a 2 heures, Julien a dit :

Beaucoup d'hypocrisie quand même ces paradise papers. Les entreprises utilisent le droit à leur avantage comme n'importe quel citoyen lambda. Les responsables sont les Etats.

A moins que l'on découvre que les dispositifs fiscaux mis en place dans d'innombrables pays et qui bénéficient aux entreprises sont le résultat de corruption active de ces sociétés ou de lobbying,

Justement, c'est souvent le cas.
Les députés vont rarement imaginer une niche fiscale sauf sur suggestion d'un "conseiller" / lobbyiste

Sur le sujet canadien, le monde avait un article sur la genèse des accords fiscaux (des centaines) depuis 30 ans...
Où tous les partis politiques ont contribué (conservateurs et libéraux)
Malheureusement, il est passé sous paywall.
Quelqu'un a un abonnement? @g4lly ?

http://www.lemonde.fr/paradise-papers/article/2017/11/05/le-canada-l-autre-pays-de-l-offshore_5210537_5209585.html

http://www.lemonde.fr/paradise-papers/article/2017/11/05/les-affaires-offshore-de-stephen-bronfman-l-ami-proche-de-justin-trudeau_5210544_5209585.html

Sinon, les détails des compte-rendus montrent que les (maigres) conditions des exonérations fiscales sont parfois (souvent?) complètement ignorées.

Par exemple, le statut société hybride Irlande - Caïman (0 impôts société au lieu des déjà faibles 12.5% irlandais) demande "juste" à ce que le centre de décision de la société soit bien aux Caïmans (les décisions et assemblées générales soient prises là-bas).
Et dixit les "minutes", ce n'est pas toujours le cas.

http://www.lemonde.fr/paradise-papers/article/2017/11/07/comment-appleby-aide-facebook-a-rapatrier-ses-profits-aux-caimans_5211345_5209585.html

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il y a une heure, Julien a dit :

Beaucoup d'hypocrisie quand même ces paradise papers. Les entreprises utilisent le droit à leur avantage comme n'importe quel citoyen lambda. Les responsables sont les Etats.

Utilises-tu le droit à ton avantage ? M'est avis que l'instrumentation du droit ne concerne qu'une fraction de la population, et éventuellement en matière de droit du travail ou de droit des affaires. Pour le reste, qui finasse sauf ceux qui peuvent se payer un fiscaliste ou un spécialiste du contentieux immobilier ? Ça ne doit pas faire un gros pourcentage.

il y a une heure, Julien a dit :

A moins que l'on découvre que les dispositifs fiscaux mis en place dans d'innombrables pays et qui bénéficient aux entreprises sont le résultat de corruption active de ces sociétés ou de lobbying, c'est assez crétin de venir pleurer que les entreprises utilisent les dispositifs mis à leur disposition. On parle d'abus de droit mais tous les exemples que je lis pour l'instant dans ces paradise papers ne sont pas des abus de droit. A chaque fois il s'agit simplement d'utiliser une niche fiscal crée pour ce but bien précis et pas l'abus d'un dispositif qui avait d'autres objectifs.

Le coup de Nike (Europe) qui ne paye d'impôt sur les bénéfices nulle part, c'est bien apparemment appuyé sur le "droit", mais, vu du citoyen lambda (et des compétiteurs moins retors), ça présente quand même toutes les caractéristiques d'exploitation d'une faille juridique, comme on exploiterait une faille informatique.

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il y a une heure, Tancrède a dit :

C'est le genre de "respect du droit" qui peut déboucher, à force, par une réaction violente de ceux qui ne peuvent se payer un fiscaliste (donc beaucoup de monde) et, malgré tout, paient pour garder le bouzin ensemble. Pour ceux qui souvent assimilent l'Etat à quelque chose d'illégitime qui doit être aussi petit que possible, voire quelque chose de malhonnête par essence (et "contre nature" pour les zêlotes du "droit naturel" si fantasmé), je dis que les Etats devraient, finalement, se comporter comme des parrains maffieux face à de tels comportements: ces entreprises ne paient pas le pizzu, ben il arrive quelque chose à leurs magasins  et à leurs produits. Si elles persistent, elles n'ont plus le droit de vendre sur le territoire du dit parrain:coolc:. C'est peut-être pas très productif, à terme, mais ça fait du bien :laugh:. Et si elles font vraiment chier, faut la jouer full on Michael Corleone en fin de film: la purge à distance et simultanée de tous les décideurs impliqués (avec avertissement préalable à base de tête de cheval?). 

Cela suppose que le "parrain" ne soit pas en cheville avec le protégé. Ce qui est quasi toujours le cas les conflits d'intérêts sont devenus la norme plutôt que l'exception suffit de jeter un œil sur les tazus..

Modifié par nemo
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Il y a 1 heure, Tancrède a dit :

C'est le genre de "respect du droit" qui peut déboucher, à force, par une réaction violente de ceux qui ne peuvent se payer un fiscaliste (donc beaucoup de monde) et, malgré tout, paient pour garder le bouzin ensemble. Pour ceux qui souvent assimilent l'Etat à quelque chose d'illégitime qui doit être aussi petit que possible, voire quelque chose de malhonnête par essence (et "contre nature" pour les zêlotes du "droit naturel" si fantasmé), je dis que les Etats devraient, finalement, se comporter comme des parrains maffieux face à de tels comportements: ces entreprises ne paient pas le pizzu, ben il arrive quelque chose à leurs magasins  et à leurs produits. Si elles persistent, elles n'ont plus le droit de vendre sur le territoire du dit parrain:coolc:. C'est peut-être pas très productif, à terme, mais ça fait du bien :laugh:. Et si elles font vraiment chier, faut la jouer full on Michael Corleone en fin de film: la purge à distance et simultanée de tous les décideurs impliqués (avec avertissement préalable à base de tête de cheval?). 

C'est amusant :smile: et ce n'est pas vraiment faux.

Mais c'est inefficace. Les Etats n'ont aucun besoin d'appliquer les méthodes de Don Corleone, car ils sont quelques crans au-dessus dans la chaîne alimentaire. Bien sûr qu'ils sont à la base des parrains mafieux, mais ils ont à leur disposition des méthodes plus fines, plus efficaces - et plus implacables pour peu qu'on les utilise - parce qu'ils ne sont pas du menu fretin comme les mafieux et autres bandits de grand chemin. Et leurs méthodes se résument en un mot : la Loi, et tout ce qui contribue à l'appliquer.

Comme le disait @Scarabé plus haut, l'optimisation fiscale pour immorale qu'elle soit n'est pas illégale. Autrement dit, il y a décalage entre la loi d'une part, la moralité d'autre part. Une situation... qui est immorale, justement !

Pour faire cesser le scandale, l'Etat n'aurait besoin que d'adapter la loi à la morale.

Il ne reste dans le cas de la France qu'une difficulté, et une impossibilité :

- La difficulté, c'est qu'en situation de mondialisation, il est facile à une multinationale de faire apparaître ses profits là où elle le veut, en pratique chez le moins-disant fiscal. Ce qui appelle une évolution du mode de calcul de l'impôt sur ces sociétés - à calibrer précisément, mais rien de bloquant

- L'impossibilité, c'est qu'en situation d'union européenne, aucun pays n'est libre d'établir sa législation : les lois les plus importantes sont décidées dans les instances européennes, là où il est extrêmement facile aux lobbies d'entreprises de jouer les pays les uns contre les autres et de faire jouer à plein leur puissance d'influence, pour ne pas dire de corruption.

Pour lever cette impossibilité, il faudrait soit un Etat européen aussi solide que peuvent l'être par exemple l'Etat en France ou en Allemagne - ce qui n'est pas prêt d'arriver et est sans doute politiquement impossible. Soit sortir de l'union européenne ou au minimum du marché unique - ce qui est possible mais n'est pas à l'ordre du jour.

Les fantasmes sur un Etat qui saurait se faire respecter tout autant qu'un mafieux de bas étage - c'est-à-dire mieux qu'il ne le peut maintenant - sont donc tout ce qui reste, du moins pour l'instant.

L'optimisation fiscale à outrance a de beaux jours devant elle.

 

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@Alexis : à la fois d'accord et pas d'accord. Les nuances :

Sur les moyens, les états sont susceptibles de s'appuyer sur leurs services de renseignements, pour les renseignements comme pour d'éventuelles "actions économiques offensives", et on a eu des exemples récents : les USA vis à vis du CIO, les allemands par rapport à certains fraudeurs du fisc en Suisse, la Corée du Nord apparemment qui a siphonné quelques comptes en banques au Bangladesh, etc... M'est avis qu'en cherchant bien, on trouverait moult autres exemples. Ce n'est pas mafieux mais ça peut, à l'occasion, être vicieux. D'ailleurs d'où viennent tous ces beaux "papers" récents, sont-ils tous le produit d'aimables lanceurs d'alerte bénévoles ? Je ne parierais pas dessus.

Sur les finalités, il est certaines sociétés dont les actions sont si néfastes qu'elles pourraient, à terme, conduire à quelque énervement. Si demain le siège de Monsanto (encore, désolé, je les déteste) explose avec la totalité du conseil d'administration et les principaux actionnaires dedans et, si possible, l'essentiel des cadre supp', les responsables des labos qui truquent les études et deux ou trois thuriféraires stipendiés, on enverra peut être un petit bouquet de fleurs noires, mais pas plus.

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il y a une heure, nemo a dit :

Cela suppose que le "parrain" ne soit pas en cheville avec le protégé. Ce qui est quasi toujours le cas les conflits d'intérêts sont devenus la norme plutôt que l'exception suffit de jeter un œil sur les tazus..

 

il y a 32 minutes, Alexis a dit :

C'est amusant :smile: et ce n'est pas vraiment faux.

Mais c'est inefficace. Les Etats n'ont aucun besoin d'appliquer les méthodes de Don Corleone, car ils sont quelques crans au-dessus dans la chaîne alimentaire. Bien sûr qu'ils sont à la base des parrains mafieux, mais ils ont à leur disposition des méthodes plus fines, plus efficaces - et plus implacables pour peu qu'on les utilise - parce qu'ils ne sont pas du menu fretin comme les mafieux et autres bandits de grand chemin. Et leurs méthodes se résument en un mot : la Loi, et tout ce qui contribue à l'appliquer.

Comme le disait @Scarabé plus haut, l'optimisation fiscale pour immorale qu'elle soit n'est pas illégale. Autrement dit, il y a décalage entre la loi d'une part, la moralité d'autre part. Une situation... qui est immorale, justement !

Pour faire cesser le scandale, l'Etat n'aurait besoin que d'adapter la loi à la morale.

Il ne reste dans le cas de la France qu'une difficulté, et une impossibilité :

- La difficulté, c'est qu'en situation de mondialisation, il est facile à une multinationale de faire apparaître ses profits là où elle le veut, en pratique chez le moins-disant fiscal. Ce qui appelle une évolution du mode de calcul de l'impôt sur ces sociétés - à calibrer précisément, mais rien de bloquant

- L'impossibilité, c'est qu'en situation d'union européenne, aucun pays n'est libre d'établir sa législation : les lois les plus importantes sont décidées dans les instances européennes, là où il est extrêmement facile aux lobbies d'entreprises de jouer les pays les uns contre les autres et de faire jouer à plein leur puissance d'influence, pour ne pas dire de corruption.

Pour lever cette impossibilité, il faudrait soit un Etat européen aussi solide que peuvent l'être par exemple l'Etat en France ou en Allemagne - ce qui n'est pas prêt d'arriver et est sans doute politiquement impossible. Soit sortir de l'union européenne ou au minimum du marché unique - ce qui est possible mais n'est pas à l'ordre du jour.

Les fantasmes sur un Etat qui saurait se faire respecter tout autant qu'un mafieux de bas étage - c'est-à-dire mieux qu'il ne le peut maintenant - sont donc tout ce qui reste, du moins pour l'instant.

L'optimisation fiscale à outrance a de beaux jours devant elle.

 

Messieurs ! Vous passez à coté de l’essentiel, de ce qui fait la substance du post de Tancrède : l'important n'est pas d’être efficace, mais de se faire plaisir  !

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Il y a 12 heures, Scarabé a dit :

Même si c'est immoral pour certains ce n'est pas illégale.

 

Il y a 12 heures, g4lly a dit :

Une partie du probleme c'est de discuter de la "légalité" de montages qui usent de l'abus de droit ... pour léser la collectivité.(...)

C'est cet argumentaire "d'optimisation" ... donc de banalisation qui  sert aux multinationales a s’exonérer sans faire de vague alors que naturellement ce sont les pauvres qui finance la collectivité a leur place.

Tant que la collectivité n'aura pas intégrer que frauder l’impôt c'est voler dans la poche de chacun donc de tous ... rien ne changera vraiment.

J'ai trouvé une excellente métaphore visuelle pour notre discussion.

Observez ce que fait le propriétaire de cette superbe voiture:

Ben quoi ?

  • Le règlement dit seulement qu'il faut payer pour faire lever la barrière.
  • Moi, je n'ai pas besoin de faire lever la barrière, donc j'ai optimisé ces #!* taxes qui découragent l'activité économique
  • (même si j'ai le cash pour me payer une supercars à 500K$)
  • J'ai un bon avocat, allez-y, faites-moi un procès, j'ai les juges et les députés dans la poche.

Réponse en mode "fun" de @Tancrède.

  • Le parking est seulement gardé pour les clients qui ont payé.
  • Ne vous plaignez pas si l'intérieur de votre belle voiture est repeint en rose fluo, et parfumé putois.
  • Ou si elle sert pour un tournage
    • d'un rodéo urbain
    • ou un "SINKEX" avec une démo de Gatling et RPG-29PV
    • (viral sur youtube, et dont la pub a plus que remboursé votre ticket de parking "manquant".
  • signé, Iron Monkey :bloblaugh:
    (on va voir qui connait ses classiques ici :tongue:)
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Il y a 13 heures, g4lly a dit :

Une partie du probleme c'est de discuter de la "légalité" de montages qui usent de l'abus de droit ... pour léser la collectivité.

 

Pour toi c'est quoi un retraite qui s'exile au Portugal pour ne plus payer ses impôts en France et qui continue de percevoir sa retraite tout les mois. Un riche qui s'installe en suisse ou en Belgique. Un anglais qui vient se faire opérer en France parce que chez eux le système de santé est pourri. Des mecs qui touche le RSA en résidant à l'étranger etc..

A tout les niveaux et partout tout le monde essaye de payer le moins possible d'impôts à l'état .   

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il y a 33 minutes, Scarabé a dit :

Pour toi c'est quoi un retraite qui s'exile au Portugal pour ne plus payer ses impôts en France et qui continue de percevoir sa retraite tout les mois. Un riche qui s'installe en suisse ou en Belgique. Un anglais qui vient se faire opérer en France parce que chez eux le système de santé est pourri. Des mecs qui touche le RSA en résidant à l'étranger etc..

A tout les niveaux et partout tout le monde essaye de payer le moins possible d'impôts à l'état .   

Le poisson pourrit toujours par la tête dixit le Grand Timonier.

Modifié par Shorr kan
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il y a 31 minutes, Scarabé a dit :

A tout les niveaux et partout tout le monde essaye de payer le moins possible d'impôts à l'état .   

Tu ne peux pas mettre sur le même plan des gens qui profitent des dispositifs Pinel ou autres pour gratter sur leurs revenus et des déjà très riches qui tordent le système : dans le premier cas, certes, la défiscalisation joue dans la motivation, mais c'est une politique assumée par l'état qui dirige ainsi une part des investissements pour favoriser une plus-value sociale. Dans le second, c'est juste de l'évitement pur et dur et la marque d'un égoïsme crasse d'autant plus grossier qu'il ne correspond à aucun besoin immédiat et est évidemment nuisible.

En outre j'ai à disposition un paquet d'exemple de gens qui comprennent l'utilité de l'impôt, de la dépense publique et en acceptent la contrainte. Un certain nombre d'exemple contraires aussi en creusant un peu, mais pas majoritaires et surtout pas frénétiques comme ce qui est décrit là. Affirmer que "tout le monde fait pareil", outre que c'est faux, c'est la fable classique du voleur qui se rassure en voulant croire que tout le monde vole.

 

Un autre aspect du problème c'est que c'est nuisible, économiquement parlant, ça fausse complètement la concurrence quand il s'agit des entreprises. On méprise les tenants des économies de prédation en Algérie ou ailleurs, et en pratique ça revient à peu près au même en termes d'effets.

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il y a 52 minutes, Boule75 a dit :

Tu ne peux pas mettre sur le même plan des gens qui profitent des dispositifs Pinel ou autres pour gratter sur leurs revenus et des déjà très riches qui tordent le système:

Les grandes entreprises comme total il paye combien d'impôt en France? les exemple ne manque pas   

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8 hours ago, Scarabé said:

Les grandes entreprises comme total il paye combien d'impôt en France? les exemple ne manque pas   

Tu mélanges tout plein de chose comme si tu te faisais l'idiot utile des fraudeurs.

L’impôt, son assiette, les raisons pour lesquelles ils existent, ce n'est pas rien... ça ne sort pas du chapeau.

L'impot sert a payer ce que collectivement on utilise et les entreprise pour faire commerce elles utilisent massivement.

Il se trouve que les fraudeurs dont on parle utilisent largement le bien commun, la sécurité, les transport, l'économie stable, la formation, la santé ... et ne paient pas. D'ailleurs quand les états même les plus libéraux constatent qu'ils ne parviennent plus a lever l’impôt, c'est sauve qui peu ... et le bien commun n'est plus garanti. C'est le cas au Uk ... à vouloir jouer aux cons avec les arrangements fiscaux ils sont les dindons de la farce, plus personne n'y paie son impôt et le pays n'a plus de quoi financer l'essentiel des SP... déficit de fonctionnement et d'investissement qui rendent alors le pays in-attractif ... et c'est un cercle vicieux.

Après on peut estimer que c'est une fatalité ... et que l'état ne sert a rien, que la collectivité non plus ... que les routes s'entretiennent toute seule et que les client poussent dans les choux ... mais après il faut pas s'étonner du bordel qui en découle a moyen terme.

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