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Les malgré-nous et la Waffen SS


Niafron
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Sujet dédié à @Patrick pour rebondir sur une de ses remarques sur l'autre fil.

Je vous préviens, je vais y aller carrèment dans la polémique, je suis un ouf, je mange des guêpes.

Donc, je rappelle la version officielle, les Alsaciens et les Mosellans ont été TOUS contraints de servir dans la SS pendant la guerre ( pour mémoire, la Heer ne voulait pas des Volksdeutshe, ils ne pouvaient par conséquent pas servir dans l'armée régulière ).

Sous peine de représailles sur leurs familles, etc...

En 44, la Waffen SS marchait par cercles.

L'élite, le moyen et le médiocre.

Pour faire simple, l'élite se composait des divisions originales de la Waffen SS ( Leibstandarte, Das Reich, TotenKopf... on ajoutera la Hitler Jugend ).

Cela ne représentait qu'une minorité des effectifs de la Waffen SS qui a compté plusieurs dizaines de divisions à la fin de la guerre, la majorité de valeur toute relative.

Bon...

Je suis pas le mec le plus malin du monde, mais là comme ça, j'aurais tendance à dire que dans les divisions d'élite mentionnées plus haut, on acceptait pas le tout venant et qu'on prenait des gars un minimum motivés.

J'en viens donc à cet encombrant fait divers dont la République Française ce serait bien passée:

https://fr.wikipedia.org/wiki/Massacre_d'Oradour-sur-Glane

Pour être franc, je me suis pas penché sur l'histoire depuis longtemps, donc, je suis pas sûr du dernier état de la recherche.

Mais la dernière fois que j'en ai entendu parler, les 2/3 du régiment SS impliqué, le "Der Führer" était composé d'Alsaciens.

( Je passe sur les évenements de Tulle, sur le procès clément de l'après guerre et sur le fait que les deux commununes concernées refusent toujours les commémorations officielles de l'état pour protester contre le dit procés et surtout le verdict ).

Quelqu'un pour m'expliquer comment des "malgré eux" se sont retrouvés à servir dans l'élite des forces armées allemandes?

 

 

 

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Le statut de l’Alsace et la Moselle durant l’occupation est batard , administrativement rattachées au Reich, mais pas officiellement d’un point de vue juridique,dans l’esprit des nazis, c’est l’Allemagne et à partir d’aout 42, service militaire obligatoire , tu recevais tes papiers d’identité allemands en même temps que ta lettre d’incorporation.

pour les ss, le gauleiter du land « elsass-baden « avait promis à himler 5 000 conscrits  alsaciens en 44 , pour se faire bien voir 

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il y a 45 minutes, Niafron a dit :

 

Sujet dédié à @Patrick pour rebondir sur une de ses remarques sur l'autre fil.

Je vous préviens, je vais y aller carrèment dans la polémique, je suis un ouf, je mange des guêpes.

Donc, je rappelle la version officielle, les Alsaciens et les Mosellans ont été TOUS contraints de servir dans la SS pendant la guerre ( pour mémoire, la Heer ne voulait pas des Volksdeutshe, ils ne pouvaient par conséquent pas servir dans l'armée régulière ).

Sous peine de représailles sur leurs familles, etc...

En 44, la Waffen SS marchait par cercles.

L'élite, le moyen et le médiocre.

Pour faire simple, l'élite se composait des divisions originales de la Waffen SS ( Leibstandarte, Das Reich, TotenKopf... on ajoutera la Hitler Jugend ).

Cela ne représentait qu'une minorité des effectifs de la Waffen SS qui a compté plusieurs dizaines de divisions à la fin de la guerre, la majorité de valeur toute relative.

Bon...

Je suis pas le mec le plus malin du monde, mais là comme ça, j'aurais tendance à dire que dans les divisions d'élite mentionnées plus haut, on acceptait pas le tout venant et qu'on prenait des gars un minimum motivés.

J'en viens donc à cet encombrant fait divers dont la République Française ce serait bien passée:

https://fr.wikipedia.org/wiki/Massacre_d'Oradour-sur-Glane

Pour être franc, je me suis pas penché sur l'histoire depuis longtemps, donc, je suis pas sûr du dernier état de la recherche.

Mais la dernière fois que j'en ai entendu parler, les 2/3 du régiment SS impliqué, le "Der Führer" était composé d'Alsaciens.

( Je passe sur les évenements de Tulle, sur le procès clément de l'après guerre et sur le fait que les deux commununes concernées refusent toujours les commémorations officielles de l'état pour protester contre le dit procés et surtout le verdict ).

Quelqu'un pour m'expliquer comment des "malgré eux" se sont retrouvés à servir dans l'élite des forces armées allemandes?

Mes arrière grands parents et mon grand parent mosellan n'ont jamais servi dans la waffen ss.

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Il y a 7 heures, 13RDP a dit :

La question c'est "qu'aurions nous fait, nous?" -------> Et c'est impossible d'y répondre tant que nous n'avons pas été confronté à pareils évènements malgré toutes les certitudes que l'on croit avoir. Gardons nous bien de juger une époque et des évènements que nous n'avons pas vécu.

 

 

Je te rejoins totalement sur ce point. Trop facile de juger à posteriori

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Il y a 12 heures, 13RDP a dit :

@Niafron Le mien non plus, par contre il a été prisonnier de guerre en Allemagne. Je vois pas trop ou tu veux en venir avec ton thread...

 

Où je veux en venir? Creuser un peu la question, voilà tout.

Le principe de la conscription c'est qu'on ne te demande pas ton avis, ça veut pas forcément dire que tu es contre.

La question est donc la suivante: quel est le pourcentage de la population locale dont le coeur battait pour l'Allemagne?

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Le 20/10/2022 à 18:58, Niafron a dit :

Quelqu'un pour m'expliquer comment des "malgré eux" se sont retrouvés à servir dans l'élite des forces armées allemandes?

Je ne sais pas si l'on peut expliquer vraiment... Par exemple, j'ai ancêtre espagnol qui est mort au passage de la Beresina (Lieutenant à la Demi Brigade d'Infanterie d'Elite,) alors que l'on était en pleine Guerre d'Espagne contre l'occupation française. Unité formée alors que la France et l'Espagne étaient encore alliées... Ces garçons étaient stationnés du côté du Danemark ou dans péninsule scandinave et ce sont retrouvés embrigadés dans la Campagne de Russie, pas sur que l'ait demandé leurs avis. 

En ce qui concerne les français, il y a les volontaires de la Div dite "Charlemagne" , formée avec des fonds de tiroir, LVF, restes de la Brigade Charlemagne, Miliciens et diverses organisations plus ou  moins paramilitaires. On est loin, semble-t-il,  des 3 divisions de français espérées par les Allemands. 

Pour les Alsaciens et Mosellans, considérés comme des allemands, on parle de 130 000 pax mobilisés, il est dit que la majorité a été incorporée dans l'armée régulière, quelques uns dans la marine et l'armée de l'air (mais certains ont ensuite été reversés à la SS)  je ne connais pas le chiffre exact d'incorporés directement dans la SS. Mais, tous, régulière ou SS, envoyés à l'Est (la confiance était limitée...)  De mémoire il y a eu, au début, 25 ou 30 000 réfractaires, enfermés dans des camps de concentration (ça fait un joli pourcentage) il semble que les familles des déserteurs ou "disparus" pouvaient être aussi enfermées...  

Maintenant la question qui semble te tarauder. Il parait évident qu'en Alsace et en Moselle il y a eu des partisans pro allemands, des nazis ou fascistes, voir des "aventuriers" , comme dans le reste de la population française.  Comment certains ont pu se retrouver dans des "unités d'élite" SS...? (on va donner cette classification pour bonne...) A mon avis, à partir d'un certain % de pertes, les critères devaient être plutôt souples. D'ailleurs et de mémoire, la Das Reich était au repos / reconstitution à Montauban, après avoir été étrillée dans le front de l'Est... 

Je suis d'avis que tu te casses la tête pour rien. La société française était traversée par tous les courants idéologiques qui s'affrontaient à l'époque (il y avait des nazis aux USA et en GB...) en creusant bien, tu vas trouver les 1000 gars (ou les dix mille... ) qui étaient dans la SS par idéologie; en fait, c'est le contraire qui serait étonnant. 

 

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D'accord sur le fait que c'est quasi impossible à savoir...

La question me semble néanmoins intéressante, on a mis beaucoups de choses sous le tapis en 44/45, je ne vais pas discuter de savoir si c'était une bonne ou une mauvaise chose, autre époque, difficile de juger.

Mais de l'eau a coulé sous les ponts, ne serait ce que pour des raisons académique, ça mérite qu'on essaie d'avoir une vision plus claire du tableau.

Il y a 1 heure, Fusilier a dit :

 

Je suis d'avis que tu te casses la tête pour rien. La société française était traversée par tous les courants idéologiques qui s'affrontaient à l'époque (il y avait des nazis aux USA et en GB...) en creusant bien, tu vas trouver les 1000 gars (ou les dix mille... ) qui étaient dans la SS par idéologie; en fait, c'est le contraire qui serait étonnant. 

 

 

Qu'une fraction de la population de Moselle et d'Alsace, mettons 2 à 3%, ait été pro allemande, effectivement, rien d'étonnant. Si la fraction était une minorité de 10 à 15%, ça n'a déjà plus du tout les mêmes implications.

Si c'est plus?

Et la question n'est pas purement un débat pour le fun, la compréhension de la manière dont la France s'est formée reste essentielle pour comprendre certains phénomènes modernes.

Il me semble par exemple qu'à l'avenir, on fera difficilement l'économie d'un débat République une et indivisible vs fédéralisme.

L'Alsace et la Moselle étant de ce point de vue des territoires tout à fait spécifiques ne serait ce qu'à cause de leurs particularismes tout à fait uniques sur le plan juridique.

Bon, je digresse...

@Fusilier on n'est pas obligé effectivement d'utiliser le terme "élite", effectivement, c'est plus compliqué que ça pour les raisons que tu mentionnes. Si ça te semble plus correct, disons qu'il s'agissait de divisions du "premier cercle" de la Waffen SS.

 

 

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Bazeillais vivant en Alsace depuis 1985, ce sujet des malgré-nous est une cicatrice encore bien présente pour les familles Alsaciennes. Je me suis toujours interrogé pour savoir si c'était pas pour se dédouaner d'une certaine honte de cette époque. 

Autant à mon arrivée en Alsace, j'estimais qu'il y avait une faute (et je pèse mes mots) des Alsaciens durant cette période, autant après des années sur ce territoire et après avoir abordé souvent ce sujet avec mes collègues Alsaciens souvent touché dans leurs familles, je suis devenu très modéré et compréhensif actuellement.

Voici ce que risquaient les Alsaciens réfractaires du régime nazi durant cette période:

"Le camp de sûreté de Vorbruck-Schirmeck, en allemand Sicherungslager Vorbruck-Schirmeck1, est un camp de redressement nazi situé dans la commune de Schirmeck, Bas-Rhin, en Alsace annexée, pendant la Seconde Guerre mondiale, qui fonctionna de 1940 à 1944.

Il était destiné aux Alsaciens et Mosellans réfractaires au régime nazi, hommes et femmes, ainsi qu'à leurs familles en représailles. Mais il reçut en fait des prisonniers d'un peu partout, au hasard des sorts individuels, de l'évolution des lois répressives nazies."

https://fr.wikipedia.org/wiki/Camp_de_sûreté_de_Vorbruck-Schirmeck

En plus tout le système éducatif est transformé pour en faire de jolie petit nazion

https://rhinedits.u-strasbg.fr/w/index.php/Jeunesses_hitlériennes_(0021FN0003)

Le défrancisation de l'Alsace.

https://www.memorial-alsace-moselle.com/le-memorial/un-peu-d-histoire/1940-germanisation-nazification-de-lalsace-moselle

 

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il y a 9 minutes, Niafron a dit :

L'Alsace et la Moselle étant de ce point de vue des territoires tout à fait spécifiques ne serait ce qu'à cause de leurs particularismes tout à fait uniques sur le plan juridique.

Théoriquement l'Armistice ne comportait aucune cession de souveraineté. L'Alsace et tous ces territoires n’étaient pas moins français, en droit, que le Nord qui avait aussi un statut d'occupation particulier, car destiné à être intégré au Reich dans la tête de nazis... 

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  • 1 month later...
Il y a 22 heures, Heorl a dit :

Je reviens la-dessus un peu tard mais je peux apporter un certain éclairage sur le vécu des familles alsaciennes et mosellanes de l'époque. 

Le problème ne se limite pas à la SGM, il remonte littéralement à 1870. Pendant la période allemande, malgré la forte identité française de la population (et ce bien qu'elle parle des langues germaniques pour la plupart), il y eut une véritable germanisation des terres et des populations, l'Alsace-Moselle devenant littéralement une colonie de peuplement pour l'Allemagne. Quand "Vous avez pu germaniser la plaine (d'Alsace)" est écrit, ce n'est pas pour rien. En 1918, il y avait un peu moins de 3 millions d'habitants dans la région d'Elsass-Lothringen, dont plus de 600.000 Volkdeutschen installés là par une politique économique attractive. L'usage et l'enseignement du français étaient interdits. Des noms comme Kléber, Ney et consorts, nés dans la région où dans la Sarre voisine, étaient conspués comme des traîtres à leur sang. Rien d'étonnant alors qu'apparaisse une classe bourgeoise parmi les Alsaciens de souche favorable à l'Allemagne, surtout que certains secteurs comme le vin ont beaucoup profité de la période allemande. La vieille bourgeoisie francophile et les classes populaires restaient elles favorables à la France, vivant un phénomène de "grand remplacement" au quotidien et étant encore déchirées par l'exode de 1871. 

Quand en 1918 les troupes françaises entrent en Alsace, c'est à la fois la liesse, le retour à la Mère Patrie, le tricolore de nouveau sur Metz et Strasbourg, mais c'est également une grande question : comment va être organisé le rattachement ? Et c'est là que le bât blesse : si le cas des Volkdeutschen est clair (le retour en Allemagne et leur remplacement par les anciens exilés de 1871, enfin ceux qui veulent revenir), le cas des familles mixtes est plus délicat, et en plus dans une Alsace déchirée par la guerre et dont les hommes ont pour la plupart combattu sous uniforme allemand, qui paiera les pensions de guerres, les vétérans auront-ils le droit d'arborer la Croix de Fer, etc. 

Un système de triage des populations est mis en place : lesles familles purement alsaciennes-mosellanes obtiennent des papiers temporaires avec un grand A dessus, qui indiquait que rien ne changeait dans leur situation. Les colons allemands se voyaient tous recevoir le C qui signifiait décarrer d'Alsace avec armes et bagages. Et les familles mixtes, nombreuses, recevaient un B, pour clarification. Bien souvent, l'administration française, travaillant avec les paroisses, parvint à les transformer en A dès qu'ils montraient qu'ils étaient prêts à s'adapter. 

Par contre, les alsaciens pro-allemands, par exemple le milieu du vin mentionné plus haut, recevirent un A aussi parce qu'Alsacienne. Les vétérans initialement ne reçurent aucune pension et n'eurent pas le droit d'arborer leurs décorations allemandes, ce qui créa un gros traumatisme inavoué alors que le soulagement d'un retour à la France était palpable et que même les pro-allemands préféraient être français que d'affronter la ruine économique de l'Allemagne. Dans les années 20 le problème des pensions fut réglé (l'Allemagne n'ayant jamais accepté de les payer même si ces hommes avaient combattu sous ses drapeaux), mais le rétablissement économique allemand revigora le parti pro-allemand alors que la France était dans un profond marasme et que l'idée européenne peinait de plus en plus à convaincre avec Stresemann qui disparait en Allemagne et Briand qui gueule de plus en plus seul. Le milieu du vin, toujours lui, est par exemple très mécontent parce qu'il a affaire à une énorme concurrence en France alors qu'en Allemagne il avait beaucoup prospéré.

Tout cela pour dire que lorsque l'Allemagne s'installe en 40, bien que la population soit dans son écrasante majorité bilingue français-dialecte francique et pro-française, les milieux allemands existent bel et bien et ne sont pas mécontents de voir l'Allemagne revenir. Par contre ils déchantent assez vite devant les politiques antisémites nazies alors que ce milieu comptait pas mal de Juifs qui avaient fui l'Allemagne dans les années 30. Leur Allemagne n'était pas l'Allemagne nazie, et ce d'autant plus que la région en avait attiré beaucoup pendant la période allemande, causant la construction d'une magnifique synagogue en style néoroman que les nazis brûlèrent puis dynamitèrent en 40 après l'avoir pillée. Lorsque les confiscations et les vexations furent plus nombreuses et que l'Alsace-Moselle fut réduite à un Gau et pas intégrée comme une vraie région allemande, la rupture fut consommée. C'est ce qui explique que vous pouvez trouver des jeunes conscrits pro-allemands en train de se battre sur le front de l'Est alors même que leurs familles s'éloignaient de plus en plus de l'Allemagne. Ce phénomène fut exacerbé par l'annonce d'un nouvel effort de colonisation et de défrancisation, même s'il n'a pas été du tout efficace. 

Ce qui n'a d'ailleurs pas du tout été apprécié, c'est le fait que le pillage de la France et du Benelux profite uniquement à leurs voisins d'outre-Rhin et qu'ils soient tout aussi exploités que le reste de la France malgré tous les messages de retour au Heimat. D'ailleurs, lors de la conscription, certains jeunes partaient volontairement pour éviter des problèmes à leur famille et obtenir une rentrée d'argent plus importante pour la famille, les fortunes en franc ne pouvant être utilisée dans le Gau qu'au taux de change honteux mis en place par Vichy. Rares étaient ceux qui voulaient vraiment combattre pour l'Allemagne, même parmi les pro-allemands, parce qu'ils avaient l'impression que leur patrie de coeur leur imposait tous les devoirs de l'allemand sans aucun des droits.

Bref, c'est ce qui fait que les milieux collaborationnistes, bien que plus puissants initialement que dans le reste de la France, se soient retrouvés beaucoup moins forts que dans d'autres régions dès le milieu de la guerre. Les attentes étaient plus fortes, logiquement, et la conscription a mis le clou dans le cercueil du sentiment pro-allemand. Mais il y a des exceptions : par exemple, l'Université de Strasbourg, fortement réputée à l'époque dans les sciences humaines (et pour cause, Marc Bloch en fut recteur un temps) fut repliée intégralement à Clermont durant l'Occupation, laissant le champ libre aux nazis pour la création ex-nihilo d'une université à la pointe de la science et du progrès aryen, avec des financements sans fin et des pointures allemandes qui s'y installèrent dans le but avoué de siphonner les talents de la Sorbonne et la supplanter. L'Université de Strasbourg avait éclaté en une myriade de petits groupes, entre quelques étudiants brillants peu politisés qui rentrèrent étudier dans la nouvelle Reichsuniversität et qui furent pour beaucoup mobilisés, les plus politisés qui restèrent à Clermont et prirent souvent même le maquis pour éviter le STO et/ou la conscription selon qu'ils aient été formellement identifiés comme Alsaciens ou non, ou ceux qui tentèrent de rentrer dans d'autres universités françaises en attendant mieux, et les derniers, les plus malchanceux, conscrits en 1939, capturés en 40 et récupérés dans les Stalag de force par les allemands pour leur mettre un uniforme et partir sur le front de l'Est. Par ailleurs, dans le registre du macabre, c'est dans les locaux où enseignèrent Bloch et d'autres grands noms que l'honneur de l'université fut irrémédiablement terni par des expériences antisémites sur des Juifs, avec près de 90 corps retrouvés dans les caves de l'université avec un fort doute de vivisections façon Mengele. D'ailleurs il y a désormais une exposition permanente dans le palais universitaire à ce sujet. 

Après-guerre, la cicatrice fut encore pire qu'en 1918 : contrairement à 1918, les conscrits ne revinrent pas facilement au pays. En effet en 1918, la désintégration de l'armée allemande a conduit les conscrits à tenter de rentrer par eux-mêmes chez eux, ce qui était facile pour les Alsaciennes-Mosellans étant donné qu'ils habitaient juste à côté du front. En 1945, il leur fallut souvent d'abord se rendre aux Occidentaux (les Soviétiques comprenant très rarement le français), être parqués dans des camps de prisonniers, arriver à se faire reconnaître comme mobilisé pour ne pas finir avec les survivants de la LVF et de la Charlemagne, et enfin recevoir des papiers français pour rentrer chez eux. Dans une France en plein chaos, avec une administration qui essayait tant bien que mal de se remettre en place, c'était difficile, et beaucoup d'entre eux ne rentrèrent chez eux qu'avec difficulté et seulement après avoir trimé comme prisonnier de guerre à la reconstruction du pays*. Et ça encore, c'étaient les chanceux. Les malchanceux furent capturés par les Soviétiques qui se firent beaucoup prier pour rendre les prisonniers qui n'étaient pas allemands. Le dernier des Malgré-Nous ne put rentrer en France qu'en 1958 ! Et malheureusement beaucoup de ceux capturés par les Soviétiques moururent au Goulag dans des conditions iniques, sans jamais que l'URSS ne reconnaisse une quelconque responsabilité dans leur disparition. 

Bref, quand on dit que l'histoire des Malgré-Nous est compliquée, c'est que c'est littéralement le cas.

*Chose assez ironique, après être retourné chez eux plusieurs reçurent l'ordre du mérite social pour avoir participé à la reconstruction du pays

Passionnant, merci beaucoup, rarement lu un poste d'une telle qualité.

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Bonjour,

je suis un jeune alsacien. Il se trouve que j'ai étudié la question dans mes études m'intéressant particulièrement à la chose puis je m'en suis totalement détourné, car en mettant le pied dedans, je me suis rendu compte que 80 ans après,  le sujet n'est pas sain, et les débats loin d' être clos à l'heure actuelle. On n'est pas dans l'Histoire que l'on peut étudier, documenter, rechercher, mais encore dans une  Mémoire vive, parcellaire, politique, avec de nombreuses récupérations/détournements, querelles entre associations et anciens etc. 

Le meilleur résumé (historique) de la question à mon sens, par le CRDP : http://www.crdp-strasbourg.fr/data/histoire/alsace-39-45b/textes/incorporation.pdf

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Il y a 7 heures, Rafale67 a dit :

Bonjour,

je suis un jeune alsacien. Il se trouve que j'ai étudié la question dans mes études m'intéressant particulièrement à la chose puis je m'en suis totalement détourné, car en mettant le pied dedans, je me suis rendu compte que 80 ans après,  le sujet n'est pas sain, et les débats loin d' être clos à l'heure actuelle. On n'est pas dans l'Histoire que l'on peut étudier, documenter, rechercher, mais encore dans une  Mémoire vive, parcellaire, politique, avec de nombreuses récupérations/détournements, querelles entre associations et anciens etc. 

Le meilleur résumé (historique) de la question à mon sens, par le CRDP : http://www.crdp-strasbourg.fr/data/histoire/alsace-39-45b/textes/incorporation.pdf

Il y avait aussi une exposition à un petit musée du Quartier du Port du Rhin (ou était-ce le Neudorf, j'ai oublié) à Strasbourg il y a quelques années. Je ne sais pas si elle est devenue permanente. 

Et encore, on a même pas parlé du malaise causé par les velléités d'imposition de la loi 1905 en Alsace-Moselle par le gouvernement du Cartel des Gauchs en 1924. Les élus locaux avaient émis trois conditions au rattachement à la France en 1919 sans référendum, et le maintien du Concordat sur place en faisait partie. On peut remercier l'Eglise et le général de Castelnau (un homme souvent trop peu considéré pour ses réussites exemplaires, notamment à Verdun) de s'être mobilisés pour empêcher ça.

Ah, et je te rassure, les cicatrices de l'Occupation traversent encore toute la France. Pour avoir une famille aux origines diverses avec des passeurs sur la ligne de démarcation, des Darlanistes, des vichysto-résistants, et également des "simples" survivants passifs vivant en France occupée jusqu'en mai 45 (poche de Royan), je peux t'assurer que la Seconde Guerre a enfoncé profondément ses griffes dans la psychè française. Elles sont encore bien là, même si d'autres déchirures plus récentes sont aujourd'hui plus visibles, comme l'Algérie. 

Modifié par Heorl
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Deux cas de malgré-nous dans ma famille mosellane parlant le francique rhénan.

Le premier était le plus jeune oncle de ma mère. Il refusa de se cacher malgré les avis de sa famille, pour leur éviter des représailles qui pouvaient aller jusqu'à la déportation et dont il y avait de nombreux exemples. Envoyé sur le front de l'Est, il fut blessé et mourût dans l’hôpital où il était soigné dans un bombardement à priori américain.

Après la guerre, un de ses camarades rescapé de Tambov est venu voir ses parents persuadé qu'il s'en était tiré. Ce fut la seule source d'information sur ses derniers moments sur le front de l'Est.

Le deuxième cas est un cousin au 2e ou 3e degré de mon père. Pendant une permission alors qu'il était déjà dans la Wehrmacht, son père le convainquit qu'il pouvait gérer les représailles s'il désertait. Il avait été adjudant dans l'armée allemande pendant la PGM et avait un portrait de lui en uniforme qu'il mit bien en évidence. Quand la gestapo a débarqué il y est allé à l'esbroufe: "Comment ça vous avez perdu mon fils... Jamais ce ne serait arrivé du temps du Kaiser... Qu'est ce que vous attendez pour le retrouver...." De fait, il ne fut pas inquiété.

Le cousin lui était descendu du train à Sarrebruck près de la frontière et après un périple pu s'engager dans la 2e DB. Pendant la bataille pour la libération de Strasbourg il eut face à lui un autre cousin, observateur d'artillerie, comme il le découvrira après la guerre quand les deux cousins se retrouvèrent pour encadrer une troupe de scouts dont faisait partie mon père.

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  • 1 month later...

une info, devrait aussi être dispo sur internet prochainement en Repaly, sur les "Malgre elles" : les 15.000 femmes alsaciennes incorporées de force :

https://www.coze.fr/2023/01/decouvrez-le-docu-jeunesses-volees-autour-des-alsaciennes-incorporees-de-force-en-allemagne/?fbclid=IwAR3ttP7jfSRnZn-eq-vYxU3sx-z0QWJsbZ0C5EyRDUB6diSkW_jy4yR2STM

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  • 2 weeks later...

Bon, avec un peu de recul, je remercie tous les contributeurs, je trouve que jusque là, le fil est riche en informations, ce que j'espérais, et pas tellement polémique, ce que je craignais.

Ca fait plaisir, y a pas mal de sujets historiques qui sont difficiles à aborder, là pour le coup, je trouve qu'on en parle assez sereinement.

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