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Tu seras une armée digne de ce nom, mon fils


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Un article du seul journaliste dans la presse généraliste compétent en matière de politique étrangère c'est toujours un évenement.

Analyse

Le réveil militaire (prudent) de l'Allemagne, par Laurent Zecchini

LE MONDE | 27.04.07 | 14h18 • Mis à jour le 27.04.07 | 14h18

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a Bundeswehr présente toutes les apparences d'une armée moderne qui assume son passé pour mieux se projeter dans l'avenir. En perdant ses inhibitions, elle n'hésite plus à faire des offres de service pour contribuer à la stabilisation des crises, à l'unisson du rôle que sa diplomatie revendique sur la scène internationale. Mais c'est aussi une armée paradoxale, qui se dote de systèmes d'armes capables d'infliger de lourdes pertes à l'adversaire, tout en étant anxieuse à l'idée de verser le sang, celui des autres et le sien. L'Allemagne ne songe pas encore à se doter d'instruments de projection de puissance comme un porte-avions, mais le concept de "marine expéditionnaire" existe déjà. Alors que la Bundeswehr veut pouvoir compter sur une force de réaction rapide de quelque 14 000 hommes, capable d'agir simultanément au sein de cinq missions internationales, la Luftwaffe alignera 250 avions de combat modernes en 2015, dont 180 Eurofighter.

L'Allemagne aura à sa disposition un potentiel militaire conséquent dans les années à venir, qui lui permettra de peser davantage au sein de l'Alliance atlantique et de la défense européenne, à une longueur derrière les pays qui en sont les fers de lance, la Grande-Bretagne et la France. Déjà, elle occupe une place de premier plan dans la gestion des crises : 8 128 soldats allemands sont présents sur des théâtres d'opérations extérieures, dont 3 000 en Afghanistan et autant au Kosovo, contre 14 500 pour la France et 14 520 pour la Grande-Bretagne.

Mais la Bundeswehr est un Gulliver entravé par le Bundestag : aucun engagement à l'étranger de soldats allemands ne peut se faire sans autorisation parlementaire. Comme la chancelière Angela Merkel doit compter avec la surenchère pacifiste de ses alliés sociaux-démocrates, il en résulte un engagement de l'armée allemande pesé au trébuchet. En Afghanistan, les soldats de la Bundeswehr sont cantonnés dans les équipes provinciales de reconstruction (PRT) du nord du pays, et il n'est pas question de les envoyer au Sud et à l'Est, où se déroule l'essentiel des combats.

Soucieux de raffermir un lien avec l'OTAN et les Etats-Unis distendu par son opposition à la guerre en Irak, Berlin vient de dépêcher six avions Tornado à Mazar-e-Charif, qui se borneront à des missions de reconnaissance à haute altitude. Au Liban, l'Allemagne dirige la branche navale de la Finul (Force intérimaire des Nations unies), laquelle ne risque pas d'être mêlée à une éventuelle reprise des hostilités entre Israël et le Hezbollah.

Une âpre discussion s'est déroulée au Bundestag avant l'envoi d'une force militaire européenne au Congo, et au dernier jour de leur mandat les soldats de la Bundeswehr ont été rapatriés sans tarder. L'Allemagne est fière, parfois grisée, de voir son drapeau flotter à travers le monde, y compris dans des situations de crise, mais, comme le résume un diplomate, "elle est pétrifiée à l'idée que ses soldats pourraient tirer sur des juifs au Liban et tuer des enfants au Congo".

Les forces allemandes déplorent 66 morts depuis 1990 lors d'opérations extérieures, tous à la suite d'accidents. C'est un bilan inespéré, sur lequel il serait peu réaliste de tabler à long terme. Tout laisse à penser que l'opinion allemande aurait du mal à supporter un nombre élevé de victimes, et qu'elle réagirait en exigeant un repli des forces armées sur la "défense fédérale" (la "Bundeswehr") et en réduisant encore les crédits militaires.

Plus que tout autre pays européen, l'Allemagne avait des raisons de vouloir toucher les "dividendes de la paix" à la fin de la guerre froide. Son budget de la défense, qui a diminué de 10 % depuis 1991, s'élève à 24 milliards d'euros et représente 1,4 % de son PIB. Comme d'autres nations européennes, elle a vu dans son appartenance à l'OTAN un moyen commode de se doter d'un parapluie de sécurité collective à moindre coût. Pour des raisons historiques, elle s'y est impliquée plus que d'autres.

"FORT LIEN DE CONSANGUINITÉ"

Pendant cinquante ans, les généraux de la Bundeswehr n'ont eu comme perspective de carrière que des postes à Bruxelles et à Mons, le quartier général de l'Alliance, et rares sont les officiers supérieurs qui ne se flattent pas d'un stage dans une académie militaire américaine. Ils ont ainsi développé, comme le souligne un officier supérieur, un "fort lien de consanguinité" avec l'Alliance atlantique, lequel s'est renforcé de la présence des bases militaires américaines en Allemagne. La crise de 2003 à propos de l'Irak a donc pris de court bon nombre de généraux allemands. La politique de Gerhard Schröder était, de leur point de vue, considérée comme "aventureuse" et son successeur n'a eu de cesse de raffermir les relations germano-américaines.

Sans doute parce qu'elle voyait beaucoup de soldats russes dans sa petite ville du Brandebourg (ex-RDA), Mme Merkel est foncièrement "otanienne". C'est pour cela - et pour préserver la relation germano-russe - qu'elle est sensible au risque de voir l'affaire du bouclier antimissile américain réintroduire une nouvelle division de l'Europe, voire un retour à la guerre froide. Dans le nouveau rôle de puissance militaire qu'elle essaie d'endosser, l'Allemagne est cependant handicapée : la Bundeswehr est une armée amputée d'une partie de son histoire (celle de la Wehrmacht), dépouillée de ses traditions et de ses commémorations, voire de ses décorations (rares sont les officiers qui en portent), qui évite marches et parades. Elle a souvent le sentiment d'avoir, encore et toujours, à se justifier de son lourd passé.

L'opinion allemande conserve une grande méfiance envers l'institution militaire, et dans nombre de familles liées au métier des armes, celui-ci est relégué au second plan. L'obsession d'une dérive autoritaire fait la part belle à la "formation civique et morale" du soldat (l'Innere Fürhung), ce qui est salutaire, mais le médiateur de l'armée veillant jalousement au bien-être de la troupe, l'armée allemande n'a pas la réputation d'être très "rustique".

"En Allemagne, résume Thomas Kossendey, secrétaire d'Etat à la défense, il n'existe pas, comme en France, une acceptation naturelle de l'armée, qui n'a pas vocation à prolonger la politique. Nos concitoyens considèrent qu'elle devrait rester une sorte de Croix-Rouge dévolue aux missions humanitaires." Ces pesanteurs psychologiques sont à l'origine de la pusillanimité dont la Bundeswehr fait preuve dans son action extérieure. Elles expliquent que l'armée allemande avance à pas prudents vers la maturité militaire, en surveillant en permanence l'ombre de son passé.

Laurent Zecchini

Quelle(s) perspective(s) d'alliance?

Le développement militaire de l'Allemagne est-il durable ou conjoncturel?

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J'ai juste eu le courage de lire ce que tu a mis en évidence, et d'après ce qu'elle dit, le développement militaire Allemand, serait le contraire de son ancienne armée de 40 en gros elle ne va pas créer de vaisseau comme un porte avion n'y de navire de guerre lourd. Seulement le suffisant pour une projection humanitaire comme l'onu, en gros elle fait en sorte d'éviter que l'armée Allemande prend un grosseur proportionnel à l'état actuel de son pays. Juste le suffisant pour aider d'autre pays dans la sécurisation et l'aide comme au Liban... Le développement militaire Allemand risque de patiner sur place en gros. Les Alliances sera par contre complet, pour eu l'alliance est un atout ! J'ai seulement essayé de tiré des propos en accord avec les dire de Mme Merkel

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D'une mission otanienne de défense de son territoire face au pacte de Varsovie, l'armée allemande commence (enfin) à réfléchir à une refonte de son armée pour des projections dans le cadre de l'ONU ou de l'OTAN (il faut apparemment un alibi béton pour ne pas tourmenter le peuple allemand et lui donner des cauchemars... aux français aussi d'ailleurs...) Cette retenue volontaire peut être louable dans un certain sens puisque l'utilisation de la force par l'armée allemande est ainsi pleinement légitimée, la cause défendue étant juste car avalisée par l'ONU... Ce qui me dérange plus, c'est les missions éventuelles effectuées dans le cadre de l'OTAN... Les américains, moteurs de l'alliance, ne profiteront-ils pas de la circonspection allemande pour entrainer l'Allemagne dans un conflit qu'elle ne désirait pas? On peut imaginer que les allemands seraient allés en Irak si les Etats-Unis avaient été soutenus par les membres de l'OTAN... Quoiqu'il en soit, les temps changent et l'armée allemande s'y adapte comme toutes les autres armées occidentales.

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D'une mission otanienne de défense de son territoire face au pacte de Varsovie, l'armée allemande commence (enfin) à réfléchir à une refonte de son armée pour des projections dans le cadre de l'ONU ou de l'OTAN (il faut apparemment un alibi béton pour ne pas tourmenter le peuple allemand et lui donner des cauchemars... aux français aussi d'ailleurs...)

Cette retenue volontaire peut être louable dans un certain sens puisque l'utilisation de la force par l'armée allemande est ainsi pleinement légitimée, la cause défendue étant juste car avalisée par l'ONU... Ce qui me dérange plus, c'est les missions éventuelles effectuées dans le cadre de l'OTAN... Les américains, moteurs de l'alliance, ne profiteront-ils pas de la circonspection allemande pour entrainer l'Allemagne dans un conflit qu'elle ne désirait pas? On peut imaginer que les allemands seraient allés en Irak si les Etats-Unis avaient été soutenus par les membres de l'OTAN...

Quoiqu'il en soit, les temps changent et l'armée allemande s'y adapte comme toutes les autres armées occidentales.

Oh! Je crois que les amerloks ont bien essayé d'entraîner les Allemands (et d'autres) en Afghanistan en tentant de fusionner les misions ISAF et OEF. D'ailleurs, je ne sais pas jusqu'a quel point ils n'ont pas réussi la fusion....
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