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Premiere guerre mondiale


Pegase
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Je n'ai pas pu trouver de lien vers le livre non plus.

Puisque l'auteur est assimilé à l'école de Fischer ( ca couvre plusieurs lignes différentes en fait ) comment et sur quel base archivistique réussit' il à surmonter les critiques opposées à cette école ( si tu as eu le temps de lire le livre jusqu'à ce point ) :

- as t'il identifié chez le personnel politique et en particulier chez Guillaume II et Bethmann Hollweg une volonté de déclencher une guerre d'agression ou préventive ( ce sont les 2 hypothèses des historiens qui se revendiquent comme l'école de Fischer )avant juillet 1914 ?

- comment explique t'il les documents associés au chèque en blanc allemand ( "mission hoyos" ) qui démontrent que les responsables du Reich envisagent seulement une guerre balkanique entre l'Autriche-Hongrie et la Serbie et pressent les responsables austro-hongrois d'agir vite pour éviter toute complication européenne

Sur ce point j'ai terminé récemment la participation de Dale Copeland ( dans The Outbreak of First World War de Levy et Vasquez, éditeurs ) qui défend une idée proche ( lui c'est l'option de guerre préventive qu'il défend ) en invoquant la responsabilité de Bethmann Hollweg et en citant comme source documentaire la conférence décembre 1912 :

https://en.wikipedia.org/wiki/German_Imperial_War_Council_of_8_December_1912

 Pour écarter les documents démontrant la volonté de localiser le conflit en juillet 1914, Copeland invoque des documents qui auraient été destinés par avance à démontrer que l'Allemagne ne voulait pas d'un conflit généralisé mais ne parvient pas à démontrer son hypothèse

Enfin et à titre personnel commet l'auteur articule t'il son hypothèse avec les décisions russes ( au plus tard le 30 juillet mais plus probablement entre le 24 et le 29 juillet ) et françaises ( conseils des ministres des 30 et 31 juillet ) de déclencher une guerre généralisée en Europe ( c'est à dire visant l'Allemagne ) à un moment où l'Allemagne n'a pas encore pris une seule mesure ( l'Etat d'alerte en Allemagne qui n'est pas encore une mobilisation date du 31 juillet tout comme l'ultimatum adressé à la Russie ) ?      

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Le 06/05/2019 à 21:36, loki a dit :

Je n'ai pas pu trouver de lien vers le livre non plus.

Puisque l'auteur est assimilé à l'école de Fischer ( ca couvre plusieurs lignes différentes en fait ) comment et sur quel base archivistique réussit' il à surmonter les critiques opposées à cette école ( si tu as eu le temps de lire le livre jusqu'à ce point ) :

- as t'il identifié chez le personnel politique et en particulier chez Guillaume II et Bethmann Hollweg une volonté de déclencher une guerre d'agression ou préventive ( ce sont les 2 hypothèses des historiens qui se revendiquent comme l'école de Fischer )avant juillet 1914 ?

- comment explique t'il les documents associés au chèque en blanc allemand ( "mission hoyos" ) qui démontrent que les responsables du Reich envisagent seulement une guerre balkanique entre l'Autriche-Hongrie et la Serbie et pressent les responsables austro-hongrois d'agir vite pour éviter toute complication européenne

Sur ce point j'ai terminé récemment la participation de Dale Copeland ( dans The Outbreak of First World War de Levy et Vasquez, éditeurs ) qui défend une idée proche ( lui c'est l'option de guerre préventive qu'il défend ) en invoquant la responsabilité de Bethmann Hollweg et en citant comme source documentaire la conférence décembre 1912 :

https://en.wikipedia.org/wiki/German_Imperial_War_Council_of_8_December_1912

 Pour écarter les documents démontrant la volonté de localiser le conflit en juillet 1914, Copeland invoque des documents qui auraient été destinés par avance à démontrer que l'Allemagne ne voulait pas d'un conflit généralisé mais ne parvient pas à démontrer son hypothèse

Enfin et à titre personnel commet l'auteur articule t'il son hypothèse avec les décisions russes ( au plus tard le 30 juillet mais plus probablement entre le 24 et le 29 juillet ) et françaises ( conseils des ministres des 30 et 31 juillet ) de déclencher une guerre généralisée en Europe ( c'est à dire visant l'Allemagne ) à un moment où l'Allemagne n'a pas encore pris une seule mesure ( l'Etat d'alerte en Allemagne qui n'est pas encore une mobilisation date du 31 juillet tout comme l'ultimatum adressé à la Russie ) ?      

Je n'ai malheureusement pas la réponse à ces questions précises. Voici les quelques notes que j'ai prises, en brut de fonderie :

Karlheinz Schonauer 1914 - Protokoll eines gewollten Krieges

p. 64 Bebel meilleur politicien (Bismark, Bülow)
p.64 der verrückte Kaiser
p.65 Bethmann Hollweg wollte den Krieg (im Gegensatz zu Bülow)
p.67 Tirpitz hatte den Kaiser hinter sich.
p.69 Bebel schreckliches staat
p.70 kiderlen prend Guillaume pour un Trottel (gourde)
p.78 manifs SPD pendant la crise d'Agadir.
p.87 livre de Bernhardi
p.89 octobre 2012, avant la 1e guerre des Balkans, Poincaré essaie une solution internationale : https://it.wikipedia.org/wiki/Prima_guerra_balcanica#Ultime_manovre_diplomatiche
Guillaume II belliciste lors de cette guerre
p.90 Moltke et Guillaume ii : parti de la guerre ; nouvelles manifs SPD
p.97 die Zeit die wir zur Entscheidung gegen Frankreich zur Verfügung haben, ist durch Beschleugigung der russischen Kriegsbereitschaft zusammengeschrumpft.
p.99 parallèle 1913-1914 : le gouvernement allemand ne fait rien pour la paix
p.103 der Untertan d'Heinrich Mann https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Sujet_de_l'Empereur
p. 103 https://fr.wikipedia.org/wiki/Incident_de_Saverne

p.114 article de Die Post sur la guerre préventive
p.115 article de Die Post analysé par l'ambassade américaine à Londres
p.117 Kölnische Zeitung
p.118 National-Zeitung Deshalb will man den Krieg lieber heute als morgen

Ce que je garde comme impression générale, c'est que Schonauer défend un point de vue SPD : il montre comment le SPD ou parmi le SPD, on trouve des gens lucides et dont les principes vu d'aujourd'hui avec nos lunettes démocrates, les rendent sympathiques à nos yeux de lecteurs du XXIe siècle. C'est une sorte d'éloge du SPD qui se trouve ainsi justifié, par une sorte d'auréole morale, ou une invitation pour les militants SPD d'aujourd'hui à se replonger dans cette histoire pour en retirer une philosophie qui pourrait rester valable aujourd'hui. Je crois qu'il y a un petit côté militant dans le livre. C'est la 1e guerre mondiale, vue avec des lunettes SPD. Il restitue un climat, et une sensibilité SPD.

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Il y a 2 heures, Wallaby a dit :

 Est-ce que la peur britannique d'une Europe sous domination française les conduisant à laisser à l'Allemagne la base pour reconstruire sa puissance, aura été une si bonne idée ? Est-ce que la position anglaise sur l'Allemagne aura été très "réaliste" au vu du fait que cela aura créé les conditions dans lesquelles est né le nazisme ?

 

En 1919, personne n'anticipe la nazisme : la position britannique est et a toujours été de conserver un équilibre entre les puissances continentales, de leur point de vue il est impensable d'être entré en guerre pour préserver l'Europe d'une domination allemande pour créer une Europe sous domination française sachant que nous sommes historiquement un adversaire plus dangereux dans les colonies et sur mer ( la position géographique de l'Allemagne qui est coincée en mer du Nord n'est pas la même que celle de la France ).

Historiquement il faut se poser la question du traité par rapport aux idées qui existaient alors et pas en anticipant une situation différente

Si les britanniques nous avaient laissé les clés de l'Europe ( sachant que l'empire des Habsbourgs avait disparu de lui même et que le sort de l'empire Russe était en suspens en 1919 ) cela aurait tout aussi bien débouché sur une confrontation franco-britannique à moyenne échéance     

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Il y a 3 heures, Wallaby a dit :

Heureusement Corelli Barnett s'en est chargé :

https://en.wikipedia.org/wiki/Treaty_of_Versailles

L'historien militaire britannique Correlli Barnett a affimé que le traité de Versailles était "extrêmement doux en comparaison avec les conditions de paix que l'Allemagne elle-même, lorsqu'elle pensait gagner la guerre, avait l'intention d'imposer aux Alliés". De plus, affirma-t-il, ce ne fut qu'une "petite tape sur le poignet" en comparaison du Traité de Brest-Litovsk que l'Allemagne avait imposé à une Russie défaite en mars 1918, qui avait pris un tiers de la population de la Russie (quoique d'ethnicité non-russe), la moitié des investissements industriels russes et les neuf dixièmes des mines de charbon russes, couplé à une indemnité de six milliards de marks.

 

Finalement, même sous les termes "cruels" du Traité de Versailles, l'économie de l'Allemagne avait retrouvé son statut d'avant-guerre.

Barnett affirme également que, d'un point de vue stratégique, l'Allemagne se trouvait en fait dans une position supérieure à celle qu'elle occupait en 1914 après la signature du Traité. Les frontières orientales de l'Allemagne faisaient face à la Russie et à l'Autriche, qui avaient toutes deux dans le passé rééquilibré la puissance allemande. Barnett affirme que ses frontières orientales d'après-guerre étaient plus sûres, parce que l'ancien empire autrichien avait été divisé après la guerre en États plus petits et plus faibles, que la Russie a été ravagée par la révolution et la guerre civile et que la Pologne récemment restaurée n'était même pas à la hauteur d'une Allemagne vaincue. Dans l'Ouest, l'Allemagne n'était équilibrée que par la France et la Belgique, qui étaient toutes deux moins peuplées et moins dynamiques économiquement que l'Allemagne. Barnett conclut en disant qu'au lieu d'affaiblir l'Allemagne, le traité a "beaucoup renforcé" la puissance allemande. La Grande-Bretagne et la France auraient dû (selon Barnett) "diviser et affaiblir définitivement" l'Allemagne en défaisant le travail de Bismarck et en partitionnant l'Allemagne en petits États plus faibles, afin qu'elle ne perturbe plus la paix en Europe. En ne faisant rien et donc sans résoudre le problème du pouvoir allemand et rétablir l'équilibre en Europe, la Grande-Bretagne "avait manqué son objectif principal en participant à la Grande Guerre".

L'analyse de Corelli Barnett n'est pas totalement exacte notamment car il exclut de son analyse les clauses militaires du traité qui entrainent une démilitarisation définitive ( dans l'idée de ses concepteurs ) de l'Allemagne, si on reprends l'exemple polonais que soumet Barnett, il a raison pour les critères démographiques et économiques mais il a tort militairement : le traité de Versailles entraine de facto que la seule Pologne a des moyens militaires doubles ou triples de ceux de l'Allemagne.

La position stratégique de l'Allemagne dans les années 20 est indéfendable au vu de ses faibles moyens et des réseaux d'alliances de la France en Europe centrale et orientale.

Quant à la sévérité du traité de Versailles, elle dépend du traité que l'on prends en référence :

- bien moins dur que els conditions imposées en 1945

- à peu près équivalent au traité de Brest-Litovsk ( quoi qu'en dise Barnett : un exemple l'indemnité financière du traité de Versailles porte sur 132 milliards de marks contre 6 milliards pour Brest-Litovsk soit 22 fois plus ) 

- bien plus sévère que les traités imposés à la France en 1871 ( traité de Francfort ) et 1815 ( traité de Paris ) : si on reprends l'indemnité financière, le traité de Versailles prévoit une indemnité ( convertie en Or ) 30 fois supérieure à celle du traité de Francfort

Le traité de Versailles porte en lui 2 graves erreurs :

- des conditions économiques non réalistes 

- la séparation de la Prusse en 2 entités via un corridor attribué à la Pologne de terres allemandes : ça garantissait une future guerre entre la Pologne et l'Allemagne ( outres les guerres indirectes en Silésie du début des années 20 )  

 

Modifié par loki
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Il y a 5 heures, Wallaby a dit :

Je reviens sur cette interview de Georges-Henri Soutou, datant du 6 octobre 2016, non pas pour parler de la première partie qui traite des causes et des responsabilités dans le déclenchement de la guerre, mais de la seconde partie qui porte sur la France qui "perd la paix" après avoir "gagné la guerre", en commençant par les buts de guerre français, qui apparaissent assez clairement par exemple dans certains débats parlementaires de 1916  :

- récupérer l'Alsace et la Lorraine

- occuper la Sarre et la rhénanie, voire les annexer carrément

- la Sarre produit exactement la quantité du déficit charbonnier français, qui est de 20 millions de tonnes. Cela permettrait à la France de rattraper le niveau de production britannique et d'être moins distancée par le niveau de production allemand, qui est encore supérieur.

- remettre en cause l'unité allemande par la création d'une Bavière ou d'un Hanovre indépendants

Mais comme on a bien conscience que cela pourrait ne pas passer chez nos alliés, on habille le discours différemment (on va créer un état rhénan autonome, l'indépendance de la Bavière sera le résultat du droit des peuples à l'autodétermination...). En plus l'allié principal de la France change au cours du temps. C'est d'abord la Russie, plutôt compréhensive, puis c'est l'Angleterre et enfin les Etats-Unis, beaucoup moins compréhensifs.

La critique de Soutou consiste à dire que ce n'était pas du tout réaliste, parce que nos alliés anglais et américains n'étaient pas sur la même longueur d'onde.

Cela donne l'impression que l'opinion des anglais et des américains est une vérité indépassable, qu'on n'a pas le droit elle-même de critiquer. Est-ce que la peur britannique d'une Europe sous domination française les conduisant à laisser à l'Allemagne la base pour reconstruire sa puissance, aura été une si bonne idée ? Est-ce que la position anglaise sur l'Allemagne aura été très "réaliste" au vu du fait que cela aura créé les conditions dans lesquelles est né le nazisme ?

Est-ce que le refus anglo-américain des buts de guerre français, ou d'une partie d'entre eux ne mérite pas aussi une critique ?

Heureusement Corelli Barnett s'en est chargé :

https://en.wikipedia.org/wiki/Treaty_of_Versailles

L'historien militaire britannique Correlli Barnett a affimé que le traité de Versailles était "extrêmement doux en comparaison avec les conditions de paix que l'Allemagne elle-même, lorsqu'elle pensait gagner la guerre, avait l'intention d'imposer aux Alliés". De plus, affirma-t-il, ce ne fut qu'une "petite tape sur le poignet" en comparaison du Traité de Brest-Litovsk que l'Allemagne avait imposé à une Russie défaite en mars 1918, qui avait pris un tiers de la population de la Russie (quoique d'ethnicité non-russe), la moitié des investissements industriels russes et les neuf dixièmes des mines de charbon russes, couplé à une indemnité de six milliards de marks.

 

Finalement, même sous les termes "cruels" du Traité de Versailles, l'économie de l'Allemagne avait retrouvé son statut d'avant-guerre.

Barnett affirme également que, d'un point de vue stratégique, l'Allemagne se trouvait en fait dans une position supérieure à celle qu'elle occupait en 1914 après la signature du Traité. Les frontières orientales de l'Allemagne faisaient face à la Russie et à l'Autriche, qui avaient toutes deux dans le passé rééquilibré la puissance allemande. Barnett affirme que ses frontières orientales d'après-guerre étaient plus sûres, parce que l'ancien empire autrichien avait été divisé après la guerre en États plus petits et plus faibles, que la Russie a été ravagée par la révolution et la guerre civile et que la Pologne récemment restaurée n'était même pas à la hauteur d'une Allemagne vaincue. Dans l'Ouest, l'Allemagne n'était équilibrée que par la France et la Belgique, qui étaient toutes deux moins peuplées et moins dynamiques économiquement que l'Allemagne. Barnett conclut en disant qu'au lieu d'affaiblir l'Allemagne, le traité a "beaucoup renforcé" la puissance allemande. La Grande-Bretagne et la France auraient dû (selon Barnett) "diviser et affaiblir définitivement" l'Allemagne en défaisant le travail de Bismarck et en partitionnant l'Allemagne en petits États plus faibles, afin qu'elle ne perturbe plus la paix en Europe. En ne faisant rien et donc sans résoudre le problème du pouvoir allemand et rétablir l'équilibre en Europe, la Grande-Bretagne "avait manqué son objectif principal en participant à la Grande Guerre".

 

Il y a 3 heures, loki a dit :

En 1919, personne n'anticipe la nazisme : la position britannique est et a toujours été de conserver un équilibre entre les puissances continentales, de leur point de vue il est impensable d'être entré en guerre pour préserver l'Europe d'une domination allemande pour créer une Europe sous domination française sachant que nous sommes historiquement un adversaire plus dangereux dans les colonies et sur mer ( la position géographique de l'Allemagne qui est coincée en mer du Nord n'est pas la même que celle de la France ).

Historiquement il faut se poser la question du traité par rapport aux idées qui existaient alors et pas en anticipant une situation différente

Si les britanniques nous avaient laissé les clés de l'Europe ( sachant que l'empire des Habsbourgs avait disparu de lui même et que le sort de l'empire Russe était en suspens en 1919 ) cela aurait tout aussi bien débouché sur une confrontation franco-britannique à moyenne échéance     

D’accord, la monté du nazisme n'a pas été anticipé, mais dès que l’Allemagne a montré des signes de redressement, c'est à dire avant même l’avènement des nazis, la GB aurait du changer son fusil d'épaule et adopter une vision des rapport de forces plus réaliste sur le Continent.

Et cette balourdise prend sa source dans la crainte que le communisme n'emporte l'Europe et l’Allemagne en premier lieu. Et c'est ce même anticommunisme qui sabotera le rapprochement militaire de la France et de la Russie soviétique.

Les britanniques ont été d'une complaisance coupable avec les politiques nazis pour cette même raison et le traité de Versailles en a été le terreau fertile.

Modifié par Shorr kan
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Il n'y a pas que la GB qui a été lente à réagir : la France a refusé lors de l'accession de Hitler au poste de chancelier un projet de guerre préventive ( je ne me souviens plus de la date exacte ) proposé par la Pologne ( qui changera de position peu après )

Et quand le gouvernement veut réagir ( remilitarisation de la Rhénanie ) c'est l'EM qui refuse sauf si on proclame la mobilisation générale ( alors qu'en face il n'y a rien à part 5/6 000 hommes ) !!

Pour les projets d'accord avec l'URSS, la France ne veut pas non plus de convention militaire : Soutou explique que ça n'est pas par anticommunisme mais parce que le souvenir de la convention franco-russe et de l'attitude russe en juillet 1914 ( et dans les années précédentes ) est encore à vif. La Russie ayant choisi de déclencher la guerre sans en référer à ses alliés en juillet 1914, on craint la même chose de Staline en cas d'accords contraignants

De plus, l'URSS n'a pas de frontières avec l'Allemagne et la Pologne ( pour des motifs historiques ) refuse qu'elle intervienne sur son territoire ( le ministre des affaires étrangères polonais expliquera en 1939 qu'avec les allemands la Pologne risque son indépendance alors qu'avec l'URSS elle risque son âme …..)   

 

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Fondamentalement la France n'aait strictement pas intérêt à déclaner la guerre en 1914. Par contre en 1920 c'était la bonne idée.

Les éléments les plus importants jouant en sa faveur sont:

- la Russie se renforce terriblement année après année. Ils sortent effectivement du MA et les productions industrielles explosent. Avec 4-5 ans sa capacité de production (munitions en particulier) auraient été bien plus importantes (malgré la nullité toujours réelle de son corps d'officiers)

- les pays centraux n'ont pas de développement majeur à attendre

- l'Allemagne avec ses cuirassés prendre de plus en plus la tête à l'Angleterre

- Les tensions internes dans l'empire autrichien deviennent de plus en plus ingérables

- La position de la Turquie serait moins évidente.

Bref la France a tout à agagner en attendant un peu.

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Il y a 13 heures, loki a dit :

bien plus sévère que les traités imposés à la France en 1871 ( traité de Francfort ) et 1815 ( traité de Paris ) : si on reprends l'indemnité financière, le traité de Versailles prévoit une indemnité ( convertie en Or ) 30 fois supérieure à celle du traité de Francfort

Faudrait pas tout confondre. En 1871 la France reste la première puissance militaire en Europe. La défaite est dû à un ensemble de facteurs (comme 40) qui ont placé temporairement la futur Allemagne en position de force mais seulement temporairement. Une France à l'avantage militaire jusqu à la fin du XIX siècle. . .

Puis en terme de dureté la 1 GM n'a alors pas d'équivalent du tout.

Citation

Il n'y a pas que la GB qui a été lente à réagir : la France a refusé lors de l'accession de Hitler au poste de chancelier un projet de guerre préventive ( je ne me souviens plus de la date exacte ) proposé par la Pologne ( qui changera de position peu après )

Et quand le gouvernement veut réagir ( remilitarisation de la Rhénanie ) c'est l'EM qui refuse sauf si on proclame la mobilisation générale ( alors qu'en face il n'y a rien à part 5/6 000 hommes ) !! 

C'est oublié que la France devient dès 1919 l'adversaire déclaré du monde anglo-saxon. La crise de 1923 le démontre parfaitement et les traités navals de l'époque (alors oui la limitation nous a finalement évité de nous perdre dans une course "à la plus grosse" dispendieuse mais le message politique demeurait fort explicite ).

Citation

En 1919, personne n'anticipe la nazisme : la position britannique est et a toujours été de conserver un équilibre entre les puissances continentales, de leur point de vue il est impensable d'être entré en guerre pour préserver l'Europe d'une domination allemande pour créer une Europe sous domination française sachant que nous sommes historiquement un adversaire plus dangereux dans les colonies et sur mer ( la position géographique de l'Allemagne qui est coincée en mer du Nord n'est pas la même que celle de la France ).

CQFD non ? Le coup de poignard dans le dos c'est la France qui le prend au  nom des intérêts supérieures britanniques (et US à terme).

Modifié par elannion
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J'ai l'impression que le sort fait à l'Allemagne en 1945, vaut ratification par nos alliés des buts de guerre français de 1916 : on coupe l'Allemagne en morceaux. Au départ, de 1945 à 1949, il n'y a pas d'État allemand, juste une pluralité de régions autogérées sous le contrôle de forces d'occupation étrangères. En 1949, c'est la guerre froide, la bipolarisation est-ouest qui fait tout en même temps renaître la nécessité d'une Allemagne de l'Ouest forte, avec un État, et comprendre aux Français et aux Allemands de l'Ouest qu'ils sont alliés, dans le même camp, et qu'ils peuvent et doivent enterrer la hache de guerre et se réconcilier en profondeur. Mais la période 1945-1949 c'est vraiment ce que souhaitait la France en 1916.

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Le 13/05/2019 à 13:37, mayamac a dit :

tiens d'ailleurs au passage, on s'est pas re-foutu sur la gueule depuis,...  de la à dire que si ça avait été fait en 1918 y aurait pas eu 39/45...

Il y a un pas !:laugh:

C'est même certain et déjà compris par les contemporains de l'époque (la fameuse armistice de 20 ans. . .). Ne pas démembrer l'Allemagne après la 1 GM a été une erreur terrible qu'on continue encore de payer aujourd'hui.

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Le 13/05/2019 à 14:37, mayamac a dit :

tiens d'ailleurs au passage, on s'est pas re-foutu sur la gueule depuis,...  de la à dire que si ça avait été fait en 1918 y aurait pas eu 39/45...

Il y a un pas !:laugh:

qui est ce qui disait, déjà " les traités de paix portent en eux les germes de la prochaine guerre " ?

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Il y a 13 heures, elannion a dit :

C'est même certain et déjà compris par les contemporains de l'époque (la fameuse armistice de 20 ans. . .). Ne pas démembrer l'Allemagne après la 1 GM a été une erreur terrible qu'on continue encore de payer aujourd'hui.

Les Allemands prennent conscience petit à petit qu'ils ont besoin des Français dans le monde de demain. Et nous autres Français avoir une Allemagne assez puissante ne nous apporte pas que du mauvais. N'oublions pas que c'est la France qui a voulu l'Euro (l'Allemagne serait bien restée au Deutschmark sans nous) et que l'Allemagne quoi qu'on en pense constitue un Etat tempon de 80 millions d'habitants à nos frontières en cas de surprise stratégique venant de très à l'Est.

Si nous voulons une UE forte, il faut qu'il y'ait quelques Etats puissants en son sein pour porter cette politique puissance. Avec le départ des Brits de l'UE la France se retrouverait seule dans son club des Etats puissants en Europe si il n'y avait pas les Allemands.

Enfin regardons les choses objectivement, sauf évênement majeur imprévisible (météorite qui tombe sur Paris, attaque des martiens!) la France sera la première puissance économique et démographique de l'UE aux alentours de 2055. Certes c'est dans longtemps mais la France reprend son rang historique petit à petit.

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il y a 1 minute, Neuron a dit :

Les Allemands prennent conscience petit à petit qu'ils ont besoin des Français dans le monde de demain. Et nous autres Français avoir une Allemagne assez puissante ne nous apporte pas que du mauvais. N'oublions pas que c'est la France qui a voulu l'Euro (l'Allemagne serait bien restée au Deutschmark sans nous) et que l'Allemagne quoi qu'on en pense constitue un Etat tempon de 80 millions d'habitants à nos frontières en cas de surprise stratégique venant de très à l'Est.

Si nous voulons une UE forte, il faut qu'il y'ait quelques Etats puissants en son sein pour porter cette politique puissance. Avec le départ des Brits de l'UE la France se retrouverait seule dans son club des Etats puissants en Europe si il n'y avait pas les Allemands.

Enfin regardons les choses objectivement, sauf évênement majeur imprévisible (météorite qui tombe sur Paris, attaque des martiens!) la France sera la première puissance économique et démographique de l'UE aux alentours de 2055. Certes c'est dans longtemps mais la France reprend son rang historique petit à petit.

Il faut faire attention à ne pas tout mélanger. On va être HS mais l'euro était au départ un marché entre la France et l'Allemagne. La France ne s'oppose par à la réunification de l'Allemagne mais en échange cette dernière abandonne son Deutschmark qui avait une grande importance aux yeux des allemands. L'adoption de l'Euro avait comme objectif d'éviter une mainmise trop forte de l'Allemagne sur l'économie de l'Europe. . .

Autant dire une grande réussite stratégique. . . . Ah les politiciens français. . . . . . . . . C'est un marché de dupe à l'instar du traité de Versailles dirions nous. . .

Quand à la suite je me préserverais bien de prédire quoi que ce soit. Mais une de mes craintes justement avec l'UE et l'Allemagne c'est le dépeçage de notre industrie. Son éclatement et son incorporation dans de gros machins transnationales. La recherche d'interdépendance nous amène à sacrifier notre indépendance.

Mais ce n'est pas le sujet ^^

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https://encyclopedia.1914-1918-online.net/article/the_historiography_of_the_origins_of_the_first_world_war (30 novembre 2016)

Historiographie des origines de la Première Guerre Mondiale

Avant d'examiner son contexte et ses conséquences politiques, la thèse de Fischer nécessite un bref résumé. Dès la tristement célèbre réunion du Conseil de guerre en décembre 1912, les dirigeants allemands ont planifié une guerre d'agression. Le déclenchement de la guerre résulte de l'inquiétude croissante des élites allemandes face à la détérioration de la stabilité intérieure et internationale du Reich. Selon M. Fischer, ce sont les dirigeants allemands qui sont à l'origine de cette situation. Sur le plan intérieur, ils ont bloqué les changements constitutionnels, tandis que l'isolement de l'Allemagne dans la politique internationale a été le résultat de mouvements menaçants sur le Maroc et les Balkans après le début du siècle. Ce fut un cas d'auto-encerclement. Il a montré comment les chefs militaires et politiques se préparaient à la guerre à partir de la fin de 1912, en augmentant la taille de l'armée et en encourageant une opinion publique nationaliste agressive. Cette interprétation a considérablement réduit le poids interprétatif accordé au système international. Cette interprétation découle d'un déplacement méthodologique, de la primauté de la politique étrangère à la primauté de la politique intérieure. Dans cette lecture, la politique étrangère est principalement le produit des pressions politiques intérieures. Étant donné l'importance de la primauté de la politique étrangère dans l'historiographie allemande, la thèse de Fischer représentait une attaque contre les approches favorites ainsi que contre les explications rassurantes sur les origines de la guerre.

Dans des ouvrages ultérieurs, il a développé ses arguments sur l'échec des élites allemandes quant à l'introduction d'une réforme constitutionnelle et sur les tentations de politique étrangère agressive. Ce fut la force motrice fondamentale de l'histoire de l'État-nation allemand entre 1871 et 1945. Les implications de cet argument étaient déjà évidentes dans ses livres sur les objectifs de guerre allemands et sur la politique étrangère d'avant-guerre. Ce récit remettait en question les efforts de Ritter et d'autres pour séparer le régime nazi des continuités de l'histoire allemande. Comme dit le titre d'un des livres de Fischer, "Hitler war kein Betriebsunfall" ("Hitler n'était pas un accident industriel")[17].

Les historiens conservateurs, notamment Ritter et Egmont Zechlin (1896-1992), ont critiqué l'utilisation des sources par Fischer, ses hypothèses méthodologiques et les conséquences politiques de ce récit révisionniste sur les origines de la guerre. Ils ont fait valoir que bon nombre de documents pouvaient être interprétés d'autres façons. En fait, des controverses complexes au sujet de l'interprétation de la réunion du Conseil de guerre se poursuivent encore aujourd'hui. Bien que les historiens de part et d'autre du débat aient affirmé que les documents donnaient accès à la "vérité" historique, le contexte complexe de chaque document rendait les interprétations singulières difficiles. Les intentions de l'auteur étaient également sujettes à interprétation. Les annotations de Guillaume II peuvent être interprétées soit comme la preuve de ses plans de guerre, soit comme la preuve de ses tendances impulsives. Ritter a critiqué la méthodologie de Fischer. Bien que ses propres travaux aient disséqué le rôle de l'armée allemande dans la politique d'avant-guerre, il part du principe que la politique étrangère est une réponse aux conditions politiques internationales et non intérieures. Les inquiétudes des dirigeants allemands avant 1914 étaient le produit de l'isolement et de l'encerclement, cimentés par l'entente anglo-russe de 1907. Certains historiens allemands - et l'Américain Paul Schroeder - ont soutenu que les puissances de l'entente, en particulier la Grande-Bretagne, étaient les États les plus expansionnistes des décennies précédant 1914. En termes globaux - alors une perspective inhabituelle pour un spécialiste de la politique de puissance européenne - l'expansion des empires britannique et français a rendu l'Allemagne relativement plus faible.

La controverse doit une grande partie de son atmosphère fébrile aux enjeux politiques. Des recherches récentes ont montré que Fischer avait déjà vu la profession historique allemande conservatrice avec suspicion, voire mépris, dans les années 1930. À ce stade, Fischer était certainement ouvert à certaines idées nazies et il a été nommé professeur d'histoire moderne à l'Université de Hambourg en 1942. La défaite en 1945 et son expérience en tant que prisonnier de guerre ont eu un impact profond sur l'attitude de Fischer à l'égard de l'étude de l'histoire allemande, et peut-être même à l'égard des historiens conservateurs dominants de la classe moyenne allemande. "Ce n'est qu'alors que j'ai pris conscience des effets fatidiques que la tradition de l'obéissance inconditionnelle... a eus sur l'histoire allemande ", a-t-il fait remarquer plus tard[18] La recherche et l'écriture historiques avaient un but pédagogique national ; l'histoire allait instruire le peuple sur le développement de la tradition autoritaire et maléfique de la culture politique allemande. Là où Ritter et ses alliés cherchaient à sauver un "passé utilisable", pour utiliser le terme de Charles Maier, Fischer cherchait à mettre le passé au service d'un avertissement, d'un appel aux réformes politiques et sociales. A cet égard, les deux camps partageaient un objectif similaire, quoique négatif, à savoir éviter un retour à la dictature.

Les historiens conservateurs allemands, cependant, accusèrent Fischer de saper l'intégration de la République fédérale dans la communauté des nations occidentales et la stabilité politique intérieure. Non seulement ils ont contesté la thèse de Fischer dans les revues et la presse, mais ils ont également cherché à entraver ses tournées prévues aux États-Unis pour promouvoir son travail.

Arrivé aux années 1970, la thèse de Fischer était devenue la nouvelle orthodoxie. Le poids des pièces à conviction et la clarté de son argumentation ont sans aucun doute contribué à son succès. Mais le succès de tout argument historique doit aussi beaucoup aux contextes politiques et sociaux plus larges. Au sein des universités ouest-allemandes, une nouvelle génération d'étudiants diplômés avait adopté une perspective plus critique sur l'histoire allemande. Ils avaient tendance à mettre l'accent sur les continuités à long terme qui ont culminé dans le Troisième Reich. Les études de l'Empire allemand constituaient un affrontement par procuration avec l'histoire du passé nazi. Une nouvelle génération d'historiens allemands est allée beaucoup plus loin que Fischer en mettant l'accent sur les racines nationales des origines de la guerre. Hans Ulrich Wehler (1931-2014), basé à Bielefeld, était le plus éminent de ces historiens. Il a introduit de nouvelles approches des sciences sociales, qui considéraient la politique intérieure comme une lutte entre différents groupes économiques et sociaux. Les élites sociales - les gens d'affaires, les agriculteurs, le corps des officiers et la classe des mandarins - ont forgé des alliances pour conserver le pouvoir et la richesse aux dépens des travailleurs, des paysans et des autres groupes sociaux. Ils ont contrecarré la réforme constitutionnelle. Pourtant, ces alliances d'élite étaient truffées de contradictions. Une politique impérialiste expansionniste offrait aux élites de l'Empire allemand un moyen d'échapper à ces contradictions et d'étouffer les réformes internes - mais au risque de la guerre. L'enquête de Wehler sur l'Empire allemand a retracé les origines de la guerre jusqu'aux caractéristiques autoritaires de la constitution de Bismarck en 1871. Alors que dans l'entre-deux-guerres, les historiens voyaient dans l'antagonisme franco-allemand le défaut originel du système international, Wehler et d'autres trouvaient désormais la source des problèmes dans la constitution allemande.

Parmi les historiens français, on observe un changement d'orientation similaire, passant de l'histoire diplomatique pratiquée par Renouvin dans l'entre-deux-guerres à un intérêt accru pour les bases économiques et sociales de la politique étrangère. Mais ce changement trouve son origine dans l'application des recherches de Fernand Braudel sur les processus historiques à long terme à l'étude des "forces profondes" de la politique internationale. Entre la fin des années 1960 et le milieu des années 1970, Renouvin lui-même et Jean-Baptiste Duroselle (1917-1994) ont supervisé des travaux importants sur l'expansion impériale française, les relations économiques et l'opinion publique. Pourtant, leur impact sur l'historiographie des origines de la guerre a été moins marqué que celui des élèves de Fischer et de l'école de Bielefeld. En partie, les études françaises n'ont pas traité directement des décisions politiques de la crise de juillet et en partie elles ont confirmé les interprétations existantes selon lesquelles la politique française avait contribué à créer les conditions de la guerre, mais n'avait pas activement cherché la guerre[19].

Une deuxième source du succès de Fischer a été le soutien qu'il a reçu en Grande-Bretagne et aux États-Unis. Ses arguments ont confirmé l'orientation générale de l'érudition de l'après-Seconde Guerre mondiale sur les origines de la guerre. Son dialogue avec les universitaires américains et britanniques a été important en inspirant ses propres critiques des hypothèses méthodologiques au sein de la profession historique allemande. Les invitations à donner des conférences dans les universités et les traductions de ses livres ont donné une validation supplémentaire à ses recherches. James Joll (1918-1994), l'un des plus importants historiens britanniques des relations internationales de l'après-guerre, a présenté les travaux de Fischer à un large public anglophone dans l'influent journal Past & Present et a rédigé la préface de la traduction anglaise de Der Griff nach der Weltmacht[20] Joll a soutenu que l'attention que Fischer portait aux impulsions politiques intérieures derrière la politique étrangère conduirait les historiens à revoir les politiques étrangères des autres grandes puissances. Et ils l'ont fait, en élargissant la base de données source et en posant de nouvelles questions. Les ouvrages de Zara Steiner sur la Grande-Bretagne, de John Keiger sur la France et de Dominic Lieven sur la Russie, publiés par Macmillan dans la série Making of the Twentieth Century, offrent des interprétations remarquables de la politique étrangère des autres nations avant 1914. Mais l'une des conséquences de la thèse de Fischer était qu'elle renforçait l'argument selon lequel la politique étrangère allemande avait été la plus agressive et déstabilisatrice en Europe avant 1914 et que les autres puissances avaient réagi de manière défensive au défi allemand. Vers la fin des années 1970, une nouvelle orthodoxie sur les origines de la guerre a été établie, soulignant la responsabilité première des dirigeants allemands pour mettre fin à la paix en Europe et le développement politique interne pathologique de l'État-nation allemand après 1871.

À la fin des années 1990, Niall Ferguson et John Charmley ont publié deux des critiques les plus virulentes de la politique étrangère britannique avant 1914. Tous deux soutenaient que la Grande-Bretagne aurait dû rester en dehors de la guerre et qu'une Europe sous hégémonie allemande - l'Union européenne du Kaiser, selon l'expression révélatrice de Ferguson - aurait été compatible avec les intérêts britanniques. Selon Charmley, la crainte de Grey de l'Empire allemand était dénuée de fondement, tandis que Ferguson suivait l'argument de Wilson selon lequel Grey apaisait la Russie pour conjurer une menace en Asie centrale - mais au prix d'encercler l'Allemagne en Europe et de créer des conditions qui rendaient la guerre plus probable.

Samuel Williamson - dans la série Macmillan mentionnée ci-dessus - a fait valoir que les dirigeants de Vienne ont la responsabilité d'avoir poussé à la guerre en 1914. En d'autres termes, le soutien allemand était essentiel pour l'attaque austro-hongroise contre la Serbie, mais Léopold von Berchtold (1863-1942), Franz Conrad von Hötzendorf (1852-1925) et d'autres personnalités de Vienne avaient leurs propres objectifs et n'étaient pas de simples pions dans la machination allemande.

Le travail de Sean McMeekin a beaucoup fait pour attirer l'attention des historiens sur les conflits entre la Russie et l'Empire ottoman, bien que ses affirmations sur la responsabilité de la Russie dans le déclenchement de la guerre aient été fortement critiquées, notamment dans le récit pénétrant de Dominic Lieven.

Comme on pouvait s'y attendre, le centenaire a été marqué par une vague de publications, dont beaucoup portaient sur les origines de la guerre. Deux de ces ouvrages - Sleepwalkers de Christopher Clark et la crise de juillet de Thomas Otte - représentent les analyses les plus complètes de l'éclatement de la guerre depuis les travaux d'Albertini. Tous deux combinent la recherche dans une masse de sources primaires et d'archives publiées en plusieurs langues avec une maîtrise de l'immense littérature secondaire.

D'un poids de plus de 500 pages chacun, les deux livres offrent un espace pour différentes interprétations de moments clés et d'individus.

Otte critique "l'imprudence" des hommes d'État à Vienne, Berlin et, dans une moindre mesure, Saint-Pétersbourg. Léopold von Berchtold, ministre des Affaires étrangères des Habsbourg, et ses collègues diplomates de la Ballhausplatz, affirme Otte, ont souffert d'une "vision tunnel" qui a réduit la politique étrangère austro-hongroise à la politique des Balkans. Otte qualifie souvent la diplomatie de crise de Berlin d'"imprudente", tandis que le chancelier, Theobald von Bethmann Hollweg, apparaît comme "marginal" dans de nombreuses décisions importantes. D'autre part, Sir Edward Grey, le ministre des Affaires étrangères, est un homme d'action, perspicace et engagé en faveur de la paix, même si les fondements de sa diplomatie étaient faussés par l'imprudence et l'intransigeance des autres.[33]

Clark propose une lecture alternative de la crise. Bien qu'accusé d'avoir ignoré la question de la responsabilité et bien que revendiquant d'abjurer la position des procureurs, si commune à de nombreuses histoires du déclenchement de la guerre, il n'hésite pas à porter des jugements tranchants sur des personnages clés. Le président français, Raymond Poincaré, a discrédité les accusations austro-hongroises contre la Serbie et a eu un comportement dissimulateur pendant les derniers jours de paix. Grey, affirme-t-il, a toujours accordé la priorité au maintien de la Triple Entente plutôt qu'à la résolution pacifique de la crise, ce qui signifie que sa série de propositions de conférence de la fin juillet était bâclée, alors qu'il n'a pas non plus réussi à freiner les initiatives russes, même après sa mobilisation partielle le 25 juillet. Pendant ce temps, les décisions russes de mobilisation partielle puis totale ont alimenté l'escalade de la crise, alors que " les Allemands étaient restés, sur le plan militaire, un îlot de calme relatif tout au long de la crise ".

Bien que ces divergences d'interprétation se rapportent à certains des débats les plus fondamentaux sur la crise de juillet et suggèrent un large fossé entre Clark et Otte, à bien des égards, leurs interprétations générales ont beaucoup en commun. Tout d'abord, ils soulignent tous deux le caractère contingent de la crise de juillet, comment l'accumulation des décisions individuelles a conduit à des résultats souvent en contradiction avec les intentions des auteurs de ces décisions. Les deux livres, pour reprendre l'expression de Clark, sont "saturés d'autonomie des acteurs". Deuxièmement, malgré l'accent mis sur les décisions individuelles, ils ont tendance à considérer la crise en termes systémiques. En soulignant "comment" les puissances européennes sont entrées en guerre en 1914, plutôt que "pourquoi", Clark a déplacé l'attention des intentions des décideurs vers l'impact de leurs décisions au sein d'un système international étroitement ordonné qui finir par saper l'ordre d'avant-guerre. Alors qu'Otte met en garde les historiens contre le fait de juger les décisions en fonction de certaines normes putatives d'un ordre international donné - l'ordre des grandes puissances du début du XXe siècle - sa propre analyse attentive, qui montre comment les considérations d'alliance, de détente et de puissance militaire relative ont façonné les hypothèses et conduit à des erreurs de calcul désastreuses, est un modèle instructif sur la façon de placer des décisions individuelles dans un contexte systémique. Troisièmement, tous deux expriment des doutes quant à la conception de la crise de juillet en termes de "politiques" nationales. De l'avis de Clark, la politique implique une cohérence qu'il était impossible d'atteindre dans les régimes polycratiques et les liens transnationaux poreux de l'époque, tandis que Otte note à maintes reprises les divisions entre les dirigeants militaires et civils, et même au sein des différents ministères des affaires étrangères, qui ont entravé l'articulation de stratégies claires. Encore une fois, cela reflète le recadrage par Clark de la question en termes de "comment", plutôt que de "pourquoi". L'historien exploite leur point de vue pour montrer comment le système a fonctionné et s'est effondré. Peut-être plus fondamentalement, les deux s'entendent pour dire qu'aucun belligérant ou individu ne devrait assumer à lui seul l'essentiel de la responsabilité du déclenchement de la guerre. Leurs différences sont des différences d'emphase et de détail.

Reste à savoir si ces ouvrages permettront d'unifier un domaine de recherche fragmenté. Ils montrent comment des questions sur des questions individuelles de politique internationale peuvent contribuer au débat plus large sur les origines de la guerre. Le succès du livre de Clark, en particulier en Allemagne, a également suscité un débat public sur les origines de la guerre. Son travail est souvent lu à la lumière de celui de Fischer, la dernière contribution publique de haut niveau au débat en Allemagne. Comme toujours, les événements politiques contemporains se cachent à l'arrière-plan. Clark mentionne, à différents moments, les attentats terroristes du 11 septembre 2001, l'Accord de Dayton pendant les guerres yougoslaves et la crise dans la zone euro. Les deux premiers sont directement liés à son argument sur l'impact des moments individuels et de la contingence sur les processus historiques - l'assassinat de François-Ferdinand, archiduc d'Autriche-Este (1863-1914) et l'ultimatum lancé à la Serbie. La publication de la traduction allemande a coïncidé avec la crise de l'euro, ce qui a soulevé à son tour des questions sur la position de l'Allemagne en Europe. L'histoire reste incontournable dans le débat politique. Pour certains, la thèse de Clark sur la responsabilité partagée des belligérants dans le déclenchement de la guerre donnera du secours à ceux qui veulent mettre de côté le rôle de l'Allemagne dans deux guerres mondiales et adopter une lecture plus affirmée de l'intérêt national. Pour d'autres, le fardeau de la "culpabilité de guerre" paralyse la direction de Berlin, portant préjudice aux institutions européennes ainsi qu'aux intérêts allemands. Au fur et à mesure que de nouveaux défis et de nouvelles questions surgiront en politique internationale, il est probable que les historiens continueront à réexaminer les origines de la guerre avec de nouvelles questions et de nouveaux arguments.

William Mulligan, University College Dublin

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  • 2 weeks later...

Pour les travaux de Clark, il faut rappeler qu'il s'agit d'une relecture des origines du conflit en prenant comme trame le conflit austro-serbe à partir du coup d'état ( serbe ) de 1903. Le livre a l'avantage d'être traduit en Français et la qualité des sources utilisées est hallucinante ( un même historien capable de travailler sur des sources allemandes, russes, autrichiennes, serbes, françaises, britanniques, bulgares etc.……. c'était du jamais vu depuis la trilogie d'Albertini )

Pour Otte, il s'agit d'une étude de la seule crise de juillet 1914 ( les origines de la crise ne sont pas vraiment étudiées ) et hélas pas ( encore ) traduite en Français      

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https://de.wikipedia.org/wiki/Fischer-Kontroverse

La controverse de Fischer est une controverse qui a duré de 1959 à 1985 environ - au sens étroit de 1962 à 1970-71 - entre historiens ouest-allemands et étrangers sur la stratégie politique de l'Empire allemand avant et pendant la Première Guerre mondiale, la responsabilité allemande dans le déclenchement de la guerre en 1914 et le problème de la continuité à long terme de la politique hégémonique allemande. Elle a été créée grâce aux recherches de l'historien hambourgeois Fritz Fischer, et surtout grâce à son livre Griff nach der Weltmacht (La Quête de la puissance mondiale), publié en 1961. La controverse a eu une importance énorme en termes de mémoire et d'histoire et a été intensément relayée à son apogée par un journalisme extérieur au milieu scientifique. Du côté des opposants de Fischer, des hommes politiques influents sont intervenus à plusieurs reprises, notamment le chancelier fédéral Ludwig Erhard, Franz Josef Strauß et le président du Bundestag Eugen Gerstenmaier.

La controverse avait déjà été débattue en tant que question de la culpabilité de guerre pendant la République de Weimar sous des aspects apologétiques et propagandistes, mais elle s'était une première fois éteinte après 1945. Le livre de Fischer a donné lieu à un nouveau débat. La controverse a eu un effet durable sur l'évaluation historique des causes de la guerre en 1914 et sur les priorités et les méthodes de recherche sur la Première Guerre mondiale. Elle est donc considérée comme le débat historique le plus important de la République fédérale d'Allemagne, avec le "conflit des historiens" qui a éclaté en 1986.

Volker Ullrich écrivait en 1999 : "Il[le livre] a éliminé la suprématie de l'interprétation nationale conservatrice, introduit l'historiographie allemande dans la recherche internationale et a soulevé de nouvelles questions, notamment celle de la continuité des élites entre l'Empire et le IIIe Reich"[1] John C. G. Röhl a écrit en 2011 dans Die Welt que "les œuvres controversées de Fischer il y a 50 ans" se sont avérées " étonnamment durables et fécondes"[2].

Contexte

Jusqu'en 1960, la présentation par l'histoire académique ouest-allemande de la contribution de la politique étrangère wilhelmienne à l'émergence de la Première Guerre mondiale et de son rôle au cours de la guerre était fondée sur trois axiomes :

1- Il n'existait pas de responsabilité allemande dans le déclenchement de la Première Guerre mondiale à l'été 1914, cette guerre n'avait pas été voulue ou même provoquée délibérément par un politicien ou un militaire responsable, c'était une « tragédie » et un « destin » ; il n'y avait donc aucun lien direct entre la guerre et la « politique mondiale » wilhelmienne, et d'un point de vue subjectif, la guerre avait été débutée et menée (au moins durant les premières années) comme une guerre défensive.

2- Pendant la guerre, il y a eu une contradiction fondamentale et irréconciliable entre l'expansionnisme de toute l'Allemagne dans l'environnement du troisième commandement suprême de l'armée (OHL) et le commandement civil du Reich, qui a été progressivement privé de pouvoir par les militaires ; il ne saurait être question de continuité ou même d'homogénéité des concepts des objectifs de guerre

3- Il n'y avait aucune continuité entre la politique allemande d'objectifs de guerre de 1914 à 1918 et la ligne de politique étrangère du régime national-socialiste.

Déjà dans les années 1950, des éléments essentiels de ces hypothèses, qui faisaient suite aux vastes travaux de Hermann Oncken (1932),[3] Erich Brandenburg (1924)[4] et Alfred von Wegerer (1939)[5], ne pouvaient être soutenus que par une ignorance consciente des sources et la suppression des monographies en langues étrangères. Hans Herzfeld, par exemple, avait déjà découvert le programme de septembre dans les archives du Reich en 1942, mais avait gardé le silence à son sujet.[6] Le récit de Luigi Albertini[7], qui avait critiqué la politique allemande lors de la crise de juillet sur la base d'un examen approfondi des sources imprimées disponibles et de la littérature des mémoires, et l'étude de l'historien allemand américain Hans Wilhelm Gatzke[8], qui avait fait la distinction entre "impérialistes conservateurs" et "libéraux" en 1950 et évalué les différences de vues entre ces courants en les considérant comme purement tactiques, n'avaient été ni publiés ni reçus en République fédérale. En tout cas, les premières œuvres marxistes sur cet ensemble de thèmes[9] n'ont de toute façon pas été prises en compte. Dans la première phase de la controverse, ce lien trop évident entre les études historiques académiques et les considérations politiques et d'opportunité historico-pédagogique s'est avéré être un lourd fardeau pour les critiques de Fischer et a donné à ses thèses - qui ont souvent été traitées par leurs adversaires non pas du tout comme un problème historiographique mais politique - une signification scientifique et politique qui allait au-delà du simple débat scientifique.

Les principales thèses de Fischer

Le travail de Fischer était basé sur une recherche méticuleuse et une évaluation approfondie de nouvelles sources, tout en maintenant la méthodologie traditionnelle d'analyse des décisions gouvernementales au sein de la direction des grandes puissances concernées. En conséquence, il est arrivé à des positions qui s'écartaient clairement du consensus scientifique valable jusqu'alors en Allemagne et l'a remis en question. Cela a déclenché une controverse féroce et persistante, qui a également retenu l'attention de la communauté internationale.

Les Buts de guerre Allemands

Dès 1957, Fischer avait commencé à fouiller systématiquement les dossiers des archives nationales pour connaître les objectifs de guerre des puissances centrales. Il fut l'un des premiers historiens allemands à pouvoir évaluer les dossiers du ministère des Affaires étrangères et de la Chancellerie du Reich, qui avaient été gardés sous clé par les Alliés, et, avec l'autorisation du gouvernement de la RDA, à inspecter les archives centrales de Potsdam. Le premier résultat de ses recherches a été son essai "Deutsche Kriegsziele. Revolutionierung und Separatfrieden im Osten 1914-1918" (Les Buts de guerre allemands : Révolution et paix séparée à l'Est 1914-1918), qu'il a publié en 1959 dans le Historische Zeitschrift (HZ). Il y décrivait les objectifs de guerre du gouvernement du Reich sous le chancelier du Reich Theobald von Bethmann Hollweg comme largement conformes à ceux des annexionnistes et comme une continuation de la politique mondiale wilhelminienne d'avant guerre, en termes de leur but - hégémonie européenne et donc établissement comme puissance mondiale -[10] Par ailleurs, au moins pendant les premières années de guerre les objectifs de Bethmann Hollweg ont reçu le soutien d'une alliance informelle allant des conservateurs à la droite du SPD. Cet essai a été critiqué par de nombreux observateurs et discuté négativement par Hans Herzfeld, mais n'a pas encore été perçu comme une déclaration de guerre, puisque Fischer semblait n'avoir apporté qu'une contribution peu orthodoxe, mais encore débattable à la discussion des objectifs de guerre. Gerhard Ritter, qui deviendrait peu après l'adversaire le plus amer de Fischer, lui écrivit dans une lettre privée que l'essai pourrait devenir "oui, un argument très intéressant"[11].

Le livre "La Quête de la puissance mondiale : La politique des objectifs de guerre de l'Allemagne impériale 1914/18" parut à la suite, en octobre 1961, dans lequel Fischer souligne l'importance du "Programme de septembre" de Bethmann Hollweg de 1914, qu'il avait trouvé dans les archives de Potsdam. Bethmann Hollweg s'attendait à une victoire allemande rapide et prévoyait ensuite des annexions de grande envergure en France et au Benelux ainsi que des saisies coloniales en Afrique centrale. Fischer a classé ce document comme suit :[12].

    "D'une part, le programme ne représentait pas des demandes isolées du chancelier, mais les idées de chefs de file de l'économie, de la politique et de l'armée. D'autre part, (...) les orientations définies dans le programme constituaient en principe la base de toute la politique allemande en matière d'objectifs de guerre jusqu'à la fin de la guerre, même si des modifications individuelles résultèrent de la la situation générale".

Fischer interpréta alors ces objectifs de guerre comme la conséquence logique de la "politique mondiale" impérialiste allemande avant 1914 : l'empire s'était ainsi déjà battu avant la guerre pour une hégémonie allemande en Europe. En tant que traînard des puissances coloniales européennes, il avait tenté de s'emparer de la "puissance mondiale". En tant que concept politique, cette "Quête de la puissance mondiale" va au-delà de la Première Guerre mondiale. Dans son avant-propos, Fischer décrit son travail comme une "contribution au problème de la continuité de l'histoire allemande de la Première à la Seconde Guerre mondiale".13] C'est précisément ce lien intellectuel, que suggéraient implicitement et systématiquement les résultats des recherches de Fischer, qui a été ressenti par presque tous les historiens de l'époque contemporaine comme un bris de tabou scandaleux - Theodor Schieder a parlé peu après la publication du livre à Johannes Ullrich d'une "catastrophe nationale"[14], En tant que concept politique, cette "Quête de la puissance mondiale" va au-delà de la Première Guerre mondiale. C'est précisément ce lien intellectuel, qui suggérait implicitement les résultats des recherches de Fischer, qui a été perçu par presque tous les historiens de l'époque contemporaine comme un tabou scandaleux - Theodor Schieder parla peu après la publication du livre à Johannes Ullrich d'une "catastrophe nationale"[14], car Fischer n'a pas seulement attaqué ici les éléments de langage habituels du débat sur la Première Guerre mondiale, il a aussi mis en doute la formule, encore plus importante et soigneusement cultivée en termes de politique historique, selon laquelle le régime nazi et sa politique étrangère avaient été une rupture pratiquement dépourvue de préalable, un "accident industriel" de l'histoire allemande qui était essentiellement lié à Hitler. Fischer a d'abord été complètement seul avec cette thèse en République fédérale d'Allemagne. Ludwig Dehio, qui depuis la fin des années 1940 avait présenté des études relativement critiques sur le problème de l'hégémonie et de la continuité et avait d'abord compté sur le soutien de Fischer, s'est immédiatement distingué de lui et a insisté sur un "noyau défensif"[15] de la politique de Bethmann Hollweg en matière de buts de guerre.

La crise de juillet

Non seulement en raison de la politique étrangère impérialiste, mais aussi en raison de son comportement concret lors de la crise de juillet 1914, Fischer a rendu le gouvernement du Reich responsable de la guerre mondiale. Il interprète le soutien sans réserve de Bethmann Hollweg au gouvernement austro-hongrois le 5 juillet 1914 comme un "chèque en blanc" pour ses actions contre la Serbie et le montre sur la base de documents et de citations : La tentative d'assassinat à Sarajevo le 28 juin 1914 avait été une bonne occasion pour les dirigeants du Reich allemand d'atteindre leurs objectifs ambitieux. Berlin avait presque exhorté Vienne à déclarer rapidement la guerre à la Serbie et - contrairement aux déclarations officielles - avait systématiquement empêché un règlement pacifique du conflit ou du moins son endiguement. Dans le même temps, parmi toutes les grandes puissances européennes, le Reich était toujours le mieux placé pour parvenir à une désescalade efficace.

Fischer décrivit plus tard l'origine de sa description dans "Quête de la puissance mondiale" comme suit :[16].

"La brève esquisse de la crise de juillet de ce livre s'inspire largement de la présentation de l'italien Luigi Albertini, dont l'ouvrage en trois volumes paru dès 1942/43 et traduit en anglais en 1953, n'a pas encore été traduit en allemand[17] L'accent sur les événements de Berlin, début juillet lors de la mission dite Hoyos, dans " Griff nach der Weltmacht " (Quête de la puissance mondiale), a fortement souligné la responsabilité du gouvernement allemand au début du conflit, contrairement aux éléments de langage de 1951."

Dans son analyse détaillée des processus décisionnels en juillet/août 1914, Fischer se refusa à faire référence à d'autres politiques étrangères allemandes passées, telles que la conduite des Conférences de La Haye pour la paix (1899 et 1907) : Un accord aurait pu empêcher la guerre, mais l'insistance allemande sur l'armement de la flotte a fait échouer les conférences. Il en tire la conclusion :[19].

"Dans la situation mondiale tendue de 1914, notamment en raison de la politique mondiale allemande - qui avait déjà déclenché trois crises dangereuses en 1905/06, 1908/09 et 1911/12 - chaque guerre limitée (locale) en Europe, dans laquelle une grande puissance était directement impliquée, devait inévitablement aborder le danger d'une guerre générale. Comme l'Allemagne voulait, souhaitait et couvrait la guerre austro-serbe et, faisant confiance à la supériorité militaire allemande, a délibérément laissé un conflit avec la Russie et la France suivre son cours en 1914, les dirigeants du Reich allemand portent une part considérable de la responsabilité historique dans le déclenchement d'une guerre générale. Cette responsabilité n'est pas amoindrie par le fait que l'Allemagne a essayé au dernier moment d'arrêter la catastrophe : car l'influence sur Vienne a eu lieu exclusivement à cause de l'intervention menaçante de l'Angleterre, et même alors elle n'a été entreprise qu'avec des demi-pas, des pas retardés et des mesures qui ont été immédiatement annulées".

Cela contredisait explicitement l'opinion des historiens ouest-allemands selon laquelle le Reich avait d'abord été orienté défensivement en juillet 1914 et avait tenté d'éviter la guerre.

Décision de guerre dès 1911

Sous la pression de la critique professionnelle qui avait eu lieu entre-temps - en partie aussi des attaques personnelles - Fischer a affirmé ses deux thèses centrales de la lutte à long terme pour l'hégémonie et de l'acceptation consciente de la guerre et les a pointées encore davantage. Dans le livre de 800 pages "Guerre des illusions : La politique allemande de 1911 à 1914" (1969) il a présenté d'autres trouvailles d'archives qui ont prouvé la politique étrangère allemande agressive avant 1914. Avec elles, il justifie la thèse selon laquelle Guillaume II et ses conseillers militaires avaient décidé, au plus tard lors d'un conseil de guerre secret le 8 décembre 1912, de déclencher délibérément une guerre majeure dès l'été 1914 afin d'exploiter à temps leur propre supériorité militaire. La période de transition aurait dû être utilisée pour préparer la population à cette "solution" sur le plan propagandiste. Il est probable que cela visait également à empêcher la troisième Conférence de paix de La Haye, prévue pour 1915, qui en était à la phase préparatoire et au cours de laquelle un arbitrage international contraignant aurait été fixé par décision majoritaire confié à un exécutif international.

À partir de 1970, Fischer ne publia que des essais plus courts pour étayer en détail ses thèses sur le cours de la guerre, la mégalomanie et l'échec politique du gouvernement du Reich. Il a également pris part à la discussion sur l'authenticité des journaux intimes tenus par Kurt Riezler le secrétaire particulier de Bethmann Hollweg pendant la crise de juillet. Mais c'est surtout la thèse du "Sonderweg (voie spéciale) allemand(e)" au XXe siècle qu'il a défendue. Suivant la théorie de l'impérialisme social de Hans-Ulrich Wehler, Fischer met de plus en plus l'accent sur les motivations politiques intérieures : le gouvernement veut canaliser les tensions et intégrer les forces d'opposition dans la guerre. L'essai "juillet 1914" (1983) résume pour la dernière fois son argumentation.

La controverse

Débats historiques

La recherche de M. Fischer a été honorée par la plupart des critiques de ses deux premières publications. La réponse modérée de Hans Herzfeld à l'essai de Fischer de 1959 dans le Historische Zeitschrift (HZ) ouvrit la controverse Fischer[20] Herzfeld se concentra initialement sur l'attitude du chancelier du Reich : Bethmann Hollweg n'avait nullement soutenu sans réserve les objectifs de guerre des annexionnistes mais avait essayé de trouver un certain consensus parmi les décideurs non coordonnés sans partager entièrement leurs positions. Les sources de Fischer n'auraient en fait pas établi une continuation de la politique mondiale par d'autres moyens, mais seulement une crise permanente du système politique.

La controverse s'est donc concentrée sur l'interprétation de Fischer de la crise de juillet. Ceci a été rejeté avec véhémence dans un premier temps par la majorité en Allemagne. Cela reflétait aussi un certain choc face à la rupture du tabou par un seul historien qui s'opposait au consensus d'après-guerre avec les sources traditionnelles : les grandes puissances européennes étaient plus ou moins également responsables du développement vers la seconde guerre mondiale, mais personne ne voulait la guerre. À l'étranger, en revanche, la position de Fischer a été plutôt soutenue.

Gerhard Ritter, représentant de l'historiographie conservatrice nationale de l'entre-deux-guerres et porte-parole de l'Association des historiens ouest-allemands, s'est distingué comme le critique le plus sévère de Fischer. C'est pourquoi, selon Herfried Münkler, Ritter, associé à la résistance à la dictature nazie, a été marqué "d'extrême droite" par le camp Fischer dans un renversement remarquable des fronts. Fischer, d'autre part, "lui plus que quiconque, ancien membre de la SA et du NSDAP, est devenu le porte-parole d'une vision libérale de gauche"[21] Ritter a continué d'évaluer la politique allemande en juillet/août 1914 comme fondamentalement défensive comme avant 1933 :[22].

"Sur le plan de la politique étrangère, il[le gouvernement du Reich] s'est retrouvé pris dans toute une série de " crises " dangereuses et dans un isolement de plus en plus menaçant : dans cet " encerclement " par les Ententes et les alliances militaires que toute personne politiquement concernée depuis 1911 au plus tard ressentait comme une pression sévère. Seul un gouvernement d'aventuriers dans une telle situation aurait pu penser à provoquer une guerre pour "atteindre la puissance mondiale" afin de gagner en hégémonie."

Des auteurs conservateurs de droite comme Giselher Wirsing ont même accusé Fischer de falsifier l'histoire[23] Erwin Hölzle a présenté la thèse de la culpabilité russe de la guerre contre Fischer[24] En 1976, il a nié toute responsabilité allemande dans le déclenchement et le déroulement de la guerre et a vu dans la Grande-Bretagne et la Russie les principaux responsables :[25].

"L'origine de la guerre est essentiellement conditionnée par l'endurcissement des amis et ennemis des alliances européennes et renforcée par leur implication dans les contrastes et les changements politiques mondiaux, ainsi que par l'élan révolutionnaire du principe de la nationalité. L'autre cause plus grave en termes de politique de puissance s'est avérée être la conclusion du dernier maillon de l'encerclement par les deux puissances du monde réel, l'Angleterre et la Russie, connue sous le nom de "trahison de l'Allemagne".

Egmont Zechlin,[26] Karl Dietrich Erdmann et Andreas Hillgruber étaient d'autres adversaires importants de Fischer. Au cours de la controverse, ils ont partiellement modifié leur position. Lors de la Journée des historiens de Berlin en 1964, Fischer s'imposa pour la première fois contre ses interlocuteurs dans sa thèse de base dans une bataille de plusieurs heures devant de nombreux auditeurs. Hillgruber interprétait aussi le comportement du gouvernement du Reich en juillet 1914 comme "la conception d'un risque calculé pour la mise en œuvre de changements limités dans la politique de puissance en exploitant des situations de crise internationale"[27] Il n'acceptait donc pas, contre la volonté de Fischer, que les objectifs de guerre documentés en septembre 1914 avaient déjà été poursuivis auparavant, mais admettait que le chancelier du Reich était consciemment disposé à prendre des risques et que le Kaiserreich était donc conjointement responsable de la guerre :[28]

"Dans la conception de Bethmann-Hollweg du risque calculé lors de la crise de juillet 1914, le doute est évident. Même si la direction politique du Reich en 1914 est incapable de reconnaître une quelconque volonté expansionniste, la coresponsabilité de la direction du Reich allemand dans le déclenchement de la Grande Guerre est évidente".

Hillgruber a donc supposé que les dirigeants du Reich n'avaient pas cherché directement la guerre, mais qu'ils avaient plutôt cherché une offensive politique - et seulement si nécessaire militaire - découlant de leur sentiment que la défensive était devenue intenable pour l'Allemagne.

Hillgruber et d'autres tentèrent ainsi, selon l'historien marxiste-léniniste de la RDA Fritz Klein, de stabiliser le "front ébranlé"[29] de l'historiographie allemande sur une ligne médiane. Fischer a involontairement travaillé à ces efforts par la radicalisation continue de ses déclarations. Il a ainsi donné à ses opposants l'occasion d'adopter certaines parties de ses thèses originales et d'organiser un "nouveau consensus" contre Fischer, qui a ensuite prévalu jusqu'à ce que le débat s'apaise après 1970.

Les opposants de M. Fischer ont également mis davantage l'accent sur les décisions et les objectifs politiques des autres grandes puissances lors de la crise de juillet. Par exemple, la mobilisation de l'armée russe était considérée comme un facteur d'escalade tout aussi important que la "chèque en blanc" allemand pour l'Autriche-Hongrie du 5 juillet 1914. Le travail de Fischer a également été critiqué pour sa méthodologie. Fischer s'était intensément occupé d'une prétendue lutte allemande pour le pouvoir mondial, mais sans placer la politique allemande dans le contexte général de la politique des autres grandes puissances européennes. Sans une telle analyse, les conclusions profondes de Fischer sur la culpabilité globale de la guerre ne pourraient être tirées.

Malgré un rejet majoritaire, certains historiens sont d'accord sur l'essentiel avec Fischer dans la suite de la controverse, selon ses élèves Imanuel Geiss en République fédérale, et John C. G. Röhl en Grande-Bretagne.

En 2011, Röhl écrivait rétrospectivement : "Ce n'est pas la "responsabilité unique" de l'Allemagne, que Fischer n'a jamais défendue non plus, mais la responsabilité "considérable" des dirigeants du Reich de Berlin dans le déclenchement de la guerre à l'été 1914 qui est devenue évidente"[2].

Vers 1964, quelques années après la publication des découvertes de Fischer et au cours des recherches complémentaires d'Imanuel Geiss, la partie du journal du secrétaire du chancelier Theobald von Bethmann Hollweg, Kurt Riezler, qui se trouvait entre le Conseil de guerre du 8 décembre 1912 et la crise de juillet, fut détruite par des inconnus. [30] Fischer écrivit à ce sujet en 1983 l'ouvrage "Juli 1914: Wir sind nicht hineingeschlittert. Das Staatsgeheimnis um die Riezler-Tagebücher".

Débats médiatiques

La parution même de "Quête pour la puissance mondiale" a déclenché une longue série de critiques dans les quotidiens nationaux. La grande majorité d'entre eux ont reconnu le travail méticuleux de Fischer avec les sources, et beaucoup ont considéré que la réinterprétation par Fischer de la culpabilité de la guerre était prouvée. La contextualisation du problème de continuité de la Première à la Seconde Guerre mondiale décrite par Fischer, quoique en une seule phrase, était particulièrement explosive. L'enquête détaillée a donc été placée dans une perspective historique plus large, qui visait les conditions dans lesquelles le Troisième Reich a vu le jour. Cette dimension de l'œuvre de Fischer a ensuite déclenché un débat public émotionnel auquel ont participé historiens, journalistes et hommes politiques.

Après une phase de recensions de 1961 à 1963, au cours de laquelle les auteurs ont souvent reconnu le caractère explosif de l'œuvre de Fischer pour la question de la continuité, le point culminant n'est apparu qu'en 1964, année qui marque à la fois le début de la Première Guerre mondiale (50 ans) et celui de la Deuxième Guerre mondiale (25 ans). Cela a permis aux médias d'intensifier le débat. En outre, la culture politique de la République fédérale avait changé depuis 1959. Le traitement du passé nazi était de plus en plus abordé dans les médias. Cela a créé un cadre d'accueil positif pour les thèses de Fischer.

Le débat public a eu lieu principalement dans les quotidiens nationaux Frankfurter Allgemeine Zeitung, Die Welt, Süddeutsche Zeitung, l'hebdomadaire Die Zeit[31] et le magazine Der Spiegel[32][33]. L'éditeur de ce dernier, Rudolf Augstein, a participé activement à la discussion et n'a laissé aucun doute qu'il était du côté de Fischer avec une pré-publication de la deuxième édition de "Quête de la puissance mondiale"[34].

Les politiciens se sont également immiscés dans le débat historique. Le chancelier Ludwig Erhard et le président du Bundestag Eugen Gerstenmaier ont tous deux pris fermement position contre Fischer dans leurs discours à l'occasion des anniversaires. La tournée de conférences de Fischer à travers les Etats-Unis, prévue en 1964 à l'invitation du Goethe-Institut, a été empêchée par l'annulation des subventions initialement accordées. Dans la tempête de protestations publiques qui a suivi, également de la part d'historiens américains, il s'est avéré que Gerhard Ritter avait obtenu le rejet des subventions en en faisant la proposition au ministre fédéral des Affaires étrangères de l'époque, Gerhard Schröder (CDU).

Konrad Jarausch a expliqué l'excitation de l'époque à partir de la situation particulière de l'histoire contemporaine :[35].

    "Les thèses de Fischer ont été un choc. Adolf Eichmann était jugé à Jérusalem, les procès d'Auschwitz ont commencé à Francfort. Tous les Allemands ont été mis au courant des terribles choses qui s'étaient produites dans le Troisième Reich. Et maintenant, ils devaient aussi être responsables de la Première Guerre mondiale. La confrontation a été intensifiée par la guerre froide. Les verdicts sévères avec lesquels les savants est-allemands condamnèrent la politique de l'Empire frappaient en outre de tabou la question de la culpabilité de guerre parmi les historiens allemands."

Conséquences historiographiques

Depuis 1970 environ, les travaux de Fischer stimulent de plus en plus la recherche sur les causes socio-économiques de la guerre, telles que l'orientation vers une économie de guerre, l'incapacité de la monarchie impériale à réformer sa politique intérieure et les luttes de politique intérieure de répartition des richesses. Depuis la réunification de l'Allemagne en 1990, les archives de l'ex-RDA et de l'Union soviétique ont également été évaluées scientifiquement. Sous l'impulsion des thèses de Fischer, des chercheurs tels que Horst Lademacher, Lilli Lewerenz, Winfried Baumgart, Peter Borowsky et Horst Günther Linke se sont de plus en plus consacrés à la politique allemande dans les États occupés par le Reich.

Wolfgang J. Mommsen a noté des plans concrets pour la réinstallation forcée des Polonais et des Juifs[36] Ceci est considéré comme une indication de la mise en œuvre d'objectifs de guerre expansionnistes visant aux annexions et à l'établissement d'États satellites. L'empire tsariste russe poursuivait des objectifs similaires pour la Pologne et certaines parties de la Prusse[37].

En 1981, Mommsen a imputé les actions du gouvernement au nationalisme de groupes d'intérêts importants : les "hommes d'Etat responsables" n'avaient pas assez de soutien au Reichstag pour une politique de compromis, car ils avaient perdu le contrôle du corps des officiers, de la magistrature et de l'administration prussiennes. Ils n'avaient donc pas osé " contrer efficacement la montée des attentes nationalistes ". Ainsi, en juillet 1914, le gouvernement allemand s'était "en fait prononcé contre ses propres convictions en faveur d'une voie politique", "qui, selon Bethmann-Hollweg, équivalait à un "saut dans le noir" et rendait inévitable le déclenchement de la Première Guerre mondiale"[38] a-t-il souligné ailleurs :

"Avec une certaine volonté de conciliation, les autres puissances auraient néanmoins pu éviter la Première Guerre mondiale. En fait, des divergences diplomatiques d'une ampleur relativement faible, qui auraient pu facilement être réglées dans d'autres circonstances sans une guerre majeure, ont mis le feu au monde[...]"[39].

Wolfgang Steglich, par contre, a utilisé des documents d'archives étrangers pour souligner les efforts allemands et autrichiens depuis 1915 pour parvenir à une paix mutuelle ou séparée[40].

En 1991, Thomas Nipperdey a réfuté les explications socio-historiques en affirmant que "la guerre, la préparation allemande à la guerre et la politique de crise" n'étaient pas une conséquence du système social allemand. Il a légèrement modifié la thèse de David Lloyd George du " glissement " et a fait référence aux plans militaires désastreux et aux décisions de guerre du pouvoir exécutif, également dans les États parlementaires :[41].

"Ils se croyaient tous sur la défensive, et tous étaient prêts pour la guerre. Tous ont surestimé leur propre menace existentielle, tous ont sous-estimé la guerre à venir. (...) La guerre est venue parce que tous ou certains voulaient désespérément la paix, et non parce que tous ou certains étaient déterminés à partir en guerre en toutes circonstances. Et si l'on considère la marge de manœuvre, la liberté de décision des acteurs, chacun a sa part dans l'escalade de la crise, mais différemment dans l'échec de la gestion de crise, à la fin de la paix. C'est pourquoi nous parlons de l'éclatement, pas du déclenchement de la Première Guerre mondiale."

Avec le changement d'orientation de la recherche, la controverse Fischer a également pris de l'importance en tant que débat sur les fondements théoriques de l'histoire allemande. Alors que l'histoire politique traditionnelle soulignait l'importance des actions et des décisions des " grands hommes ", une nouvelle génération d'historiens a souligné la pertinence des structures sociales pour l'historiographie. La vision apologétique qui prédominait auparavant et qui était axée sur les décisions des dirigeants individuels, s'est effacée derrière une analyse sobre des événements. Les questions de Fischer ont ainsi été reprises et élargies en ce qui concerne l'histoire sociale de l'empire, les bouleversements sociaux pendant la guerre et la continuité des élites dirigeantes et des objectifs de guerre dans les deux guerres mondiales. Ceci a contribué au fait que les historiens non allemands ont également souligné la responsabilité personnelle de leurs états pour la Première Guerre mondiale d'une manière plus différenciée.

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Bilan

L'historien contemporain Klaus Große Kracht a tiré le bilan suivant :[42].

"Malgré l'attitude défensive de presque tous les grands historiens contemporains de la République fédérale d'Allemagne, et même malgré l'implication des autorités politiques, les thèses de Fischer sur l'emprise du pouvoir mondial sont de plus en plus acceptées au cours des années 1960, surtout parmi la jeune génération, qui elle-même n'est plus liée par aucune expérience à la Première Guerre mondiale. Cependant, l'importance centrale de la controverse Fischer, qui peut à juste titre être considérée comme un " débat clé " dans la recherche ouest-allemande sur l'histoire contemporaine, ne réside pas dans le renouvellement de la " question de la culpabilité de guerre ", mais dans le fait qu'elle a remis la question de la continuité à l'ordre du jour et donc renvoyé " l'histoire contemporaine " après 1917 vers l'histoire de l'empire. Ce sont surtout des historiens plus jeunes comme Wolfgang J. Mommsen et Hans-Ulrich Wehler qui ont pris cette impulsion à la fin des années 1960, élargissant l'approche politico-historique étroite de Fischer aux approches socio-historiques, notamment en s'inspirant des premières œuvres d'Eckhart Kehr, et rouvrant ainsi le débat sur le "Sonderweg" allemand de l'Empire au "Troisième Reich".

Dans une revue des grands débats historiques, Konrad Jarausch a décrit la controverse comme un " débat par procuration " sur la Seconde Guerre mondiale qui était toujours en arrière-plan. Il s'agissait de "la continuité de l'autocompréhension historique et de la légitimité de la politique nationale allemande qui en découle" (p. 34). Le mérite de ce "débat clé" pour une science historique critique et une conscience historique critique en République fédérale d'Allemagne avait été "moins dans la découverte de la culpabilité allemande pour la guerre que dans l'universalisation de l'autocritique nationale comme une tâche centrale de l'histoire contemporaine en général" (p. 36).[43]

Au lendemain de la controverse de Fischer, la contribution décisive de l'Allemagne au déclenchement de la guerre en 1914 a été historiquement largement reconnue[44], mais expliquée d'une manière plus différenciée que celle de Fischer. C'est ainsi que Jürgen Kocka a résumé l'histoire de la recherche dans une conférence sur la présentation de l'encyclopédie La Première Guerre mondiale à Stuttgart le 27 novembre 2003 :[45].

"La recherche a modifié les thèses de Fischer, les a mises en perspective, les a complétées, mais les a également confirmées. Certaines d'entre elles font partie des connaissances incontestées des manuels scolaires d'aujourd'hui. La contribution décisive de l'Allemagne au déclenchement de la guerre est aujourd'hui largement reconnue, mais elle s'explique d'une manière plus complète et plus éloignée que celle de Fischer, à savoir, d'une part, par le statut de puissance impérialiste de l'Allemagne et des mécanismes de concurrence internationale de l'époque et, d'autre part et surtout, par les crises économique, sociale, constitutionnelle et mentale de l'empire wilhelmien, et non uniquement par ses intérêts économiques. L'environnement européen de l'Allemagne est beaucoup mieux éclairé aujourd'hui qu'il ne l'était en 1961, et la thèse de Fischer a, pour ainsi dire, intégré cela. De plus, les historiens d'aujourd'hui débattent à peine de la culpabilité et des objectifs de la guerre. La controverse Fischer fait partie de l'histoire. (....) La question de la culpabilité pour la guerre de 1914 ne suscite guère de réponses passionnées. (...) Le sort est rompu dans lequel le souvenir de la Grande Guerre est resté pendant des décennies. La Seconde Guerre mondiale et son traitement y ont grandement contribué."

Heinrich August Winkler a une fois de plus donné raison à la thèse principale de Fischer au vu de l'état actuel de la recherche :[46].

"Le but avec lequel les élites allemandes ont été attirées dans la Première Guerre mondiale était l'hégémonie en Europe et la montée en puissance mondiale. Finalement, il y eut un traité de paix que les Allemands considéraient comme une injustice criante, même s'il permit au Reich d'exister et lui donna l'occasion de redevenir une grande puissance. Il n'y a pas eu d'examen autocritique de la culpabilité allemande pour la guerre, bien qu'une collection interne de dossiers était déjà disponible en avril 1919, ce qui ne laissait aucun doute que l'administration du Reich avait tout fait en juillet 1914 pour aggraver la crise internationale. Pour faire échec à la thèse alliée selon laquelle l'Allemagne et ses alliés étaient les seuls responsables du déclenchement de la guerre, une légende de l'innocence de guerre a surgi, qui a causé autant de mal que sa sœur jumelle, la légende du coup de poignard dans le dos.

En 2010, Jürgen Angelow a résumé l'état de la recherche de son point de vue comme suit :

"Dans l'historiographie allemande, en confrontation aux thèses de Fritz Fischer, l'idée s'est imposée que les actions des autorités du Reich pendant la crise de juillet 1914 étaient le résultat d'une politique étrangère défensive. L'amélioration nécessaire de sa propre position devait être mise en œuvre à l'aide d'une "politique d'offensive limitée", en acceptant un "risque calculé". Le risque de leur échec avait été d'être contraints de mener une guerre majeure, dont les chances de victoire étaient de plus en plus perçues avec scepticisme par les principaux chefs militaires année après année. En fait, les termes " offensive limitée " et " risque calculé " n'expriment pas pleinement le caractère irresponsable et abyssal de la position allemande. En revanche, le terme de " brinkmanship " utilisé par les jeunes historiens décrit une politique audacieuse de " risque non calculé ", de déambulation au bord de l'abîme[47] ".

L'historien australien Christopher Clark a centré ses recherches, publiées pour la première fois en 2012, sur les actions de l'Entente et de la Serbie. En résumé, il arrive à la conclusion suivante :

"Le déclenchement de la guerre en 1914 n'est pas un thriller d'Agatha Christie, à la fin duquel nous attrapons le coupable dans le jardin d'hiver courbé sur un cadavre en flagrant délit. Dans cette histoire, il n'y a pas d'arme comme preuve irréfutable, ou plus précisément : elle est entre les mains de chaque acteur important. Vu sous cet angle, le déclenchement de la guerre était une tragédie et non un crime. Reconnaître cela ne signifie pas qu'il faille dénigrer la paranoïa guerrière et impérialiste des politiciens autrichiens et allemands, qui a attiré à juste titre l'attention de Fritz Fischer et de son école historique. Mais les Allemands n'étaient pas les seuls impérialistes, et encore moins les seuls à souffrir de paranoïa. La crise qui a conduit à la guerre de 1914 a été le fruit d'une culture politique commune : mais elle était aussi multipolaire et véritablement interactive - ce qui en fait l'événement le plus complexe de la modernité, et c'est précisément pourquoi la discussion sur l'origine de la Première Guerre mondiale continue, même un siècle après les coups mortels de Gavrilo Princips, rue François-Joseph (48)".

Dans son livre Clark remet en question la thèse d'une culpabilité de guerre particulière de l'Empire allemand et retrace les mécanismes qui ont conduit au début de la guerre[49] Dans son interprétation, le Conseil de guerre de Berlin du 8 décembre 1912 ne joue aucun rôle important. Clark se rattache également aux positions d'Egmont Zechlin et de Gerhard Ritter et de leurs camarades d'armes dans les années 1960[50].

Gregor Schöllgen et Friedrich Kießling concluent que :

    "Les recherches de F. Fischer, issues d'un travail intensif avec les sources, font aujourd'hui partie intégrante de toute analyse de la politique étrangère de l'Allemagne impériale, que leur auteur partage ou non les thèses de l'historien de Hambourg[51] ".

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https://www.lemonde.fr/vu-d-ailleurs/article/2014/02/25/la-perception-britannique-de-la-grande-guerre-est-concentree-sur-l-experience-nationale_4373221_4366902.html (25 février 2014)

Heather Jones : Cette question reste importante dans de nombreux pays européens. Particulièrement en Grande-Bretagne, parce que ce pays n'a pas été envahi en 1914 et qu'il a choisi de soutenir la Belgique et la France alors qu'il n'était pas obligé de le faire. De nombreux Britanniques continuent de penser que la Grande-Bretagne n'aurait pas dû entrer en guerre et aurait dû rester neutre, un argument formulé par l'historien Niall Ferguson, par exemple. En d'autres termes, la première guerre mondiale est toujours considérée comme un conflit futile qui a amorcé le déclin de l'empire britannique. Par conséquent, ceux qui soutiennent l'entrée en guerre de la Grande-Bretagne doivent se justifier en trouvant une bonne cause. D'où la chasse au coupable contre l'Allemagne.

Aujourd'hui, on constate une nouvelle scission entre ceux qui continuent de penser que l'Allemagne a causé la guerre (Max Hastings, Gary Sheffield) et ceux qui pensent que la guerre est le produit d'une faillite collective des Européens et du système international.

Richard J. Evans, vous estimez que la Serbie porte les plus grandes responsabilités du déclenchement de la guerre. Cette opinion s'inscrit dans la lignée des travaux de l'historien Christopher Clark. Son ouvrage Les Somnambules a rencontré un franc succès en Allemagne. Comment a-t-il été accueilli au Royaume-Uni ?

R.J.E. : Je défends cette idée depuis des années. La lecture des Somnambules ne m'a pas fait changer d'avis. A l'évidence, l'assassinat de l'archiduc François-Ferdinand fut l'étincelle qui mit le feu aux poudres de la guerre. Il est clair qu'il y a eu collusion entre le gouvernement serbe, ou du moins entre certains de ses membres et l'organisation terroriste de la Main noire. Le gouvernement serbe a échoué à imposer un contrôle sur cette organisation violente et criminelle. Les Autrichiens ont encouragé la Main noire en échouant à introduire des réformes en Bosnie après son annexion en 1908 : les conditions de vie étaient misérables, le servage encore en vigueur, des réformes auraient pu désamorcer le sentiment d'amertume qui habitait les jeunes Bosniens comme Prinzip, l'auteur de l'attentat.

Pour ce qui est de Christopher Clark, son livre a été largement mal interprété. Il ne décharge pas l'Allemagne. Sa mise en cause des responsabilités allemandes est exemplaire. Mais parce qu'il n'affirme pas que l'Allemagne porte l'entière responsabilité de la guerre, son livre est devenu un best-seller en Allemagne, alors qu'il a été largement ignoré en Grande-Bretagne.

H.J. Si je suis en accord avec [la] description [que fait Clark] de la volatilité de l'Etat serbe, je pense toutefois que l'Autriche-Hongrie, soutenue par l'Allemagne, a provoqué la guerre. La Serbie n'était pas à ce point l'acteur-clé qui a poussé l'Europe dans la guerre, risquant une conflagration continentale.

https://www.lemonde.fr/centenaire-14-18/article/2014/02/05/la-discussion-sur-les-causes-de-la-grande-guerre-ne-prendra-sans-doute-jamais-fin_4360097_3448834.html (5 février 2014)

Margaret MacMillan : je pense pour ma part que certaines puissances et leurs dirigeants étaient plus coupables que d’autres. L’Autriche-Hongrie résolue à détruire la Serbie, l’Allemagne qui soutint l’Autriche-Hongrie jusqu’au bout, la Russie impatiente de mobiliser, toutes les trois me semblent les plus grandes responsables du conflit. Ni la France ni la Grande-Bretagne ne voulaient la guerre, mais elles auraient peut-être pu faire davantage pour l’éviter.

https://www.aphg.fr/Controverse-sur-les-causes-de-la-Grande-Guerre (23 décembre 2014)

Gerd Krumeich a publié un livre « Juli 1914, Eine Bilanz », Schoeningh, 2013 en réponse aux thèses de Clark qui atténue les responsabilités allemandes dans le conflit et charge les Serbes, les Russes et les Français. Son dernier ouvrage « Le feu aux poudres. Qui a déclenché la guerre en 1914 ? » Belin, octobre 2014, 300 pages, souligne au contraire les responsabilités allemandes dans le déclenchement du conflit.

Recourant à l’histoire de l’ensemble du conflit entre la Serbie et l’Autriche-Hongrie, Clark décrit avec une grande clarté la préparation de l’attentat. Il admet pour principe que le gouvernement serbe en était assez exactement informé et n’a pas fait assez pour l’empêcher. Sur ce point, on peut toutefois être sceptique, la preuve n’en a pas été apportée. Sa description de la Serbie et de sa relation à l’Autriche-Hongrie est en général à mes yeux le point le plus faible du livre. Faisant, déjà à l’époque, preuve d’une brutalité et d’une cruauté énormes, les Serbes sont pour lui au fond les méchants de cet avant-guerre et l’Autriche-Hongrie était en droit de se défendre face à eux.

Ce présupposé serbophobe amène dans les détails à quelques prises de position à propos desquelles on ne peut que tiquer lorsqu’on connaît les documents. Par exemple, on cherche en vain le fait pourtant clair que les Autrichiens voulaient d’emblée la guerre, raison pour laquelle ils ont consciemment posé aux Serbes un ultimatum inacceptable. Lorsque, aujourd’hui, Clark veut nous expliquer que l’ultimatum n’était pas si grave et que la réponse des Serbes, intelligente et depuis 100 ans objet de louanges, n’était en fait rien d’autre qu’une indigne finasserie, ce qui saute là aux yeux est un préjugé simplement difficile à expliquer. Quand enfin, on lit que seul « un télégramme de Saint-Pétersbourg » aurait amené les Serbes à s’opposer aux Autrichiens, ce n’est là aussi qu’une grossière déformation des faits. « Un télégramme de Saint-Pétersbourg » ? Oui certes, or il n’émanait pas des Russes, mais de l’ambassadeur serbe et disait simplement que, face à l’ultimatum autrichien à la Serbie, les Russes commençaient à prendre des mesures de préparation militaire (ce que les autres puissances faisaient déjà aussi à cette date).

Clark insinue donc une responsabilité particulière des Russes. Les Français ne sont pas mieux lotis non plus : Poincaré et son ambassadeur à Saint-Pétersbourg Paléologue, sont de véritables bellicistes, alors que, ayant lu la littérature émanant de la recherche, Clark devrait mieux connaître ce point. Par contraste, les acteurs allemands de la crise de juillet restent étrangement inconsistants : la description de Bethmann-Hollweg, le chancelier est certes très précise et haute en relief. Mais sa présentation concrète minimise l’aspect belliciste de sa politique du risque. Clark ne perçoit pas non plus que, contrairement à ce que suggère le mot, la prétendue « politique de localisation » du gouvernement allemand ne tendait pas véritablement vers l’apaisement. « Localiser » un conflit signifie en effet, communément, vouloir en empêcher l’extension incontrôlée. Mais l’intraitable exigence allemande de limiter le conflit aux seules Autriche-Hongrie et Serbie, son attention à ce que aucune autre puissance n’interfère dans le règlement de comptes de l’empire des Habsbourgs avec la Serbie, a en fait été son plus grand raté. Bethmann-Hollweg, l’empereur, Jagow, le ministre des affaires étrangères : tous suivaient ce plan pour la raison que, soit cette localisation réussissait et le dangereux foyer serbe était éliminé pour longtemps. Soit il échouait, la Russie s’en mêlait, les alliances commençaient à « jouer » : il valait alors mieux que la guerre éclate maintenant, quand l’Allemagne pouvait encore espérer être militairement plus forte que la Russie et la France. La Russie s’est effectivement immiscée, elle ne voulait ni ne pouvait permettre que la petite nation slave soit entraînée dans la guerre sous les yeux de son protecteur traditionnel. La Russie a donc effectivement mobilisé la première, ainsi l’Allemagne était-elle contrainte de mobiliser à son tour. Mais ce test de la volonté de guerre des Russes n’était pas un véritable test, seulement une [prophétie autoréalisatrice] – telle est du moins mon opinion, fondée sur les sources, en opposition à Clark qui minimise la décision allemande de recourir à la guerre.

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L'ouvrage de Krumeich est toutefois très ( trop ) court et ne joue pas vraiment dans la même catégorie que celui de Clark quant aux sources utilisées et au détail du récit : un exemple , la situation dans les Balkans ( "les guerres balkaniques" ) entre 1912 et 1914 est évoquée en moins d'une page alors qu'il s'agit du motif lointain du conflit.

Il est surprenant qu'il indique que Clark ne prouve pas l'implication du gouvernement serbe car Clark démontre bel et bien dans son ouvrage :

- que le gouvernement serbe savait qu'il existait des groupes terroristes sur son territoire et avait choisi de ne pas aller à la confrontation avec ces groupes en les démantelant ( ces groupes sont à 2 doigts de renverser le gouvernement serbe durant le printemps 1914 lors de la crise opposant le gouvernement serbe aux militaires et sont bloqués par les russes qui protègent Pasic ) 

- que le gouvernement serbe était informé du projet d'attentat puisque Clark rappelle que ce sujet a été évoqué en conseil des ministres un mois avant l'attentat lui même et que le gouvernement serbe a envoyé un avertissement à l'AH plusieurs semaines avant l'attentat ( mais tellement alambiqué qu'il n'a pas été compris )     

En ce qui concerne le bellicisme des dirigeants français durant la crise de juillet : Clark  a été rejoint sur ce point par Soutou ou Blandin ( "1914 : la France responsable" ), en contrepoint l'historien britannique Keiger continue de maintenir l'idée d'une France entrainée malgré elle dans le conflit

Krumeich est un des responsables de l'historial de la grande guerre à Péronne dans la Somme   

Pour ceux qui veulent lire en Français un ouvrage revenant sur la thèse de Fischer ( mais critique de celle-ci ) : il y a L'Or et le Sang de Soutou qui revient sur les objectifs de l'Allemagne impériale ( et des autres puissances ) en recontextualisant ces objectifs : c'est un pavé qui a été réédité récemment .

 

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L'ouvrage de Krumeich a été publié en Français sous le titre "Le feu aux poudres : qui a déclenché la guerre en 1914 ?" il ne fait que 300 pages ce qui est bien trop court pour étudier une telle question

D'une certaine manière, il porte bien son nom ( le feu aux poudres ) car il fait l'impasse sur la question essentielle : qui a mis un baril de poudres au milieu des Balkans ?

En clair le livre étudie surtout ( il y a un court chapitre introductif de 47 pages sur l'avant crise de juillet ) la crise de juillet à l'exclusion des causes de celle-ci. 

Bien que Krumeich veuille faire la leçon à Clark ( les somnambules ) et Sean McMeekin ( "the russians origins of the first world war" : un ouvrage qui reprend la méthodologie de Fischer mais en l'appliquant à la Russie ) sur la Russie, son ouvrage est en fait raté sur la politique de la Russie ( lui même n'est pas un spécialiste de la question et ne parle pas russe à la différence des 2 auteurs qu'il attaque ) et le chapitre qui traite partiellement de la mobilisation russe ( le chapitre 5 ) est en fait à la fois confus, peu documenté et ne correspond pas à l'état des connaissances actuelles sur le sujet qui démontrent tous ( mais avec des grilles de lectures qui diffèrent selon les auteurs  ) que la Russie a délibérément choisi la guerre lorsqu'elle a donné l'ordre de mobilisation                 

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En ce qui concerne la France, l'un des derniers ouvrages parus est celui de Bertrand Blandin :

Dans un livre engagé, sinon partisan, Bertrand Blandin, professeur d’Histoire et de Géographie à Dijon, livre les résultats de son enquête sur les causes de la Guerre. La thèse de Bertrand Blandin devrait d’ailleurs susciter une polémique aussi vive que justifiée. Alors que nous commémorons cette année le centenaire du grand tournant militaire de 1917, l’ouvrage est l’occasion de questionner les conditions et les objectifs profonds d’une expérience collective sans équivalent dans l’Histoire de notre communauté nationale.

 

La recherche des causes de la Grande Guerre est toujours vivace. Malgré la distance qui nous sépare maintenant des événements, le sujet demeure sensible. En Allemagne même, on se souvient de la controverse exemplaire opposant les historiens Fritz Fischer et Gerhard Ritter dans les années 1960. Fischer se basait sur les archives des Affaires étrangères pour démontrer la préparation du conflit par les autorités allemandes, au plus tard dès 1912. Comment situeriez-vous votre travail au sein de la production historiographique actuelle ?

La recherche des causes de la Grande Guerre n’est pas aussi vivace que vous l’affirmez. La thèse actuelle de « l’engrenage fatal » des alliances est celle qui domine depuis des années, l’ouvrage de Christopher Clark (Les somnambules) n’étant qu’une variante de cette thèse, même s’il réévalue la responsabilité russe. Notons cependant que la thèse de la culpabilité allemande ne convainc plus grand-monde. La preuve ? En France, plus personne ne l’enseigne aujourd’hui !

C’est en m’interrogeant sur ce qui semble presque irrationnel que j’ai commencé mon travail : comment passe-t-on en 35 jours d’un attentat à une guerre mondiale ? Comment bascule-t-on d’un conflit local, qui aurait dû rester localisé, selon les vœux de la diplomatie allemande, vers une guerre généralisée ? Comment le basculement s’est-il produit ? Quand s’est-il produit et qui a eu intérêt à ce que ce basculement se produise ? Il me semble que les réponses qui ont été apportées jusqu’à maintenant ne sont pas satisfaisantes.

 

Votre livre restitue une partie de la vie politique du temps. Vous relativisez certaines données internationales souvent bien connues, comme les tensions balkaniques, pour centrer votre analyse sur d’autres facteurs. La vie politique française occupe une place de choix; en particulier à travers les figures de Raymond Poincaré et celle, peut-être injustement minorée aujourd’hui, de Joseph Caillaux. 1914 serait donc en grande partie une affaire intérieure ?

Certaines données internationales me semblent incontournables. Les tensions dans la régions des Balkans sont capitales. L’étude de ces tensions me permet de mettre en évidence un fait : la région est un baril de poudre qui ne demande qu’à exploser, et personne ne l’ignore. Et malgré cette évidence, la France s’est choisie des alliés, la Russie et la Serbie, qui sont impliqués dans toutes les crises de cette région. Il y a donc une responsabilité évidente de la classe politique française qui a décidé de se mêler de ce qui a priori ne la regarde pas, pour des raisons que je développe dans mon livre.

Il faut comprendre que l’idée d’une responsabilité française est née de la prise en compte de faits sur lesquels on ne peut pas faire l’impasse : la recherche d’une alliance de revers avec  la Russie, l’état le plus réactionnaire et le plus antisémite d’Europe (drôle d’allié pour la France des Droits de l’Homme !),  un traité avec des clauses militaires secrètes, la volonté d’impliquer la France dans une crise balkanique, la réconciliation de la France avec son pire ennemi au regard de sept siècles d’histoire, l’Angleterre, un soutien économique et financier sans faille à la Russie, assorti d’une vaste affaire de corruption de la presse française, avouez que cela commence à faire beaucoup !

La France a tout fait pour préparer une guerre de revanche contre l’Allemagne. Seulement, il y a un gros problème : le peuple français, pour de nombreuses raisons que je développe, n’est pas prêt à mourir pour Strasbourg. Il faut donc trouver une solution…

1914 une affaire intérieure ? Observons que les seuls hommes susceptibles de s’opposer à une guerre de revanche sont opportunément mis hors jeu. Joseph Caillaux est littéralement « dézingué » par une campagne de diffamation menée par le directeur du Figaro, et Jaurès, le seul qui ait écrit des pages prophétiques sur le désastre que serait une guerre de revanche, est, là aussi fort opportunément, assassiné le jour de l’entrée en guerre, après avoir subi une campagne de haine sans précédent dans la presse française…

 

Votre démonstration insiste sur la manipulation de l’opinion par une partie des autorités politique et militaire de l’époque. Vous évoquez bien sûr la mobilisation des thèmes de « Civilisation » ou « Barbarie » par l’Entente, mais faites aussi mention de rapports truqués, de documents subtilisés… À vous lire, on songe au mot de Proudhon repris par Carl Schmitt : « Qui dit Humanité veut tromper ».

La responsabilité française dans le déclenchement des hostilités étant, à mon sens, écrasante, il devenait important de masquer la vérité. J’ai découvert que nombre de documents officiels avait été truqués, arrangés, manipulés, antidatés, pour leur faire dire ce qu’on voulait qu’ils disent : l’Allemagne et l’Autriche sont coupables, la France et la Russie ont été injustement attaquées. Certains de ces documents arrangés serviront même de pièce à charge lors de l’élaboration du traité de Versailles.

Prenons l’exemple de la dépêche de Jules Cambon, ambassadeur à Berlin, au ministre des Affaires étrangères et datée du 22 novembre 1913, qui accrédite l’idée que Guillaume II était partisan d’une guerre contre la France. Elle a été largement remaniée de manière à ce que disparaisse tous les passages où Guillaume II se désole de l’esprit nationaliste et revanchard qui règne en France, en vertu de quoi il considère la guerre comme inévitable. La phrase  « l’empereur a cessé d’être partisan de la paix » a été rajoutée. Cette version remaniée de la dépêche figure encore dans le manuel Malet-Isaac de 1972 !

   

L’ouvrage rappelle l’état de l’opinion française lors de l’entrée en guerre. La France de la IIIe République demeurait culturellement diverse, en particulier au plan linguistique. D’aucuns doutent également de l’enracinement du régime républicain à l’époque. Iriez-vous jusqu’à dire que la Guerre a fait la France contemporaine, singulièrement sous sa forme républicaine ?

Je pense, au regard de ce qu’est la situation intérieure de la France, tant sur le plan culturel que politique, que l’idée d’un régime républicain solidement enraciné ne tient pas. Rappelons seulement que la loi de séparation de l’Église et de l’État date de 1905, qu’elle fait de l’Église catholique un ennemi intérieur, rappelons également que la Loi militaire des Trois ans provoque des mutineries, et qu’en 1914, le deuxième parti de France est le Parti socialiste de Jaurès. L’idée d’un régime républicain qui ferait l’unanimité me semble fausse. Personne ne sait ce qu’une déclaration de guerre à l’Allemagne pourrait entraîner : un coup d’État, une révolution ? C’est bien pour cela que les hommes politiques aux commandes doivent forcer l’Allemagne à entrer en guerre la première.

Si l’on juge une politique à ses résultats, constatons que l’Union sacrée a rassemblé les Français par delà leur divergences, et que la langue française s’est répandue dans quasiment toutes les régions. Après la guerre, le régime républicain n’est plus contesté. Encore que la Troisième république s’effondrera en 1940, la Quatrième en 1958, et aujourd’hui, certains parlent d’une Sixième république. Avec les Français, rien n’est définitif !

 

« Encore et encore, dans la crise de juillet on est confronté à des hommes qui soudainement se sentent pris au piège et s’en remettent à un destin qu’ils sont incapables de contrôler. » Finalement, comment jugez-vous cette affirmation sublime et terrible de l’historien britannique James Joll, que l’on pourrait aujourd’hui prêter à l’auteur des Somnambules, Christopher Clark ?

Nul piège ne contraint la France à entrer en guerre. Si la France entre en  guerre, ce n’est que la conséquence logique de choix qu’elle a fait depuis quarante ans. Elle aurait pu choisir de se réconcilier avec l’Allemagne, puisqu’elle l’a bien fait avec l’Angleterre. Elle aurait pu choisir la carte de l’apaisement : ni les hommes qui sont à la tête de l’Etat, ni les diplomates, ne sont partisans de cette option.

Comment peut-on affirmer que l’engrenage des alliance était fatal, alors que l’Italie, membre de la Triple alliance, choisit de rester neutre, en 1914, pour intervenir en 1915, aux côtés de la France, trahissant ainsi ses anciens alliés. Voilà des hommes qui ne se sont pas sentis « pris au piège », mais qui ont agit en fonction de ce qui leur semblait le plus profitable.

 Ajoutons enfin que Poincaré avait toutes les cartes en main pour gérer au mieux la crise, dont une aurait pu être utilisée facilement : l’argent. Car c’est l’argent français qui maintient l’Empire russe à flot. Que la France refuse son soutien à la Russie, au besoin en lui coupant les vivres, et le géant russe serait resté l’arme au pied. Ce n’est pas ce qui a été fait, bien au contraire…

 

Pour ma part, je n'ai pour le moment que commencer la lecture donc pas encore d'avis

Modifié par loki
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L'interview de Bertrand Blandin semble être tirée de https://lincorrect.org/1914-france-responsable/ (4 décembre 2017)

Il y a 19 heures, loki a dit :

[B. Blandin :] Comment peut-on affirmer que l’engrenage des alliance était fatal, alors que l’Italie, membre de la Triple alliance, choisit de rester neutre, en 1914, pour intervenir en 1915, aux côtés de la France, trahissant ainsi ses anciens alliés.

Cela ne semble pas correspondre à ce que je lis ici :

https://en.wikipedia.org/wiki/Triple_Alliance_(1882)

Le traité prévoyait que l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie aideraient l'Italie si elle était attaquée par la France sans provocation. En retour, l'Italie aiderait l'Allemagne si elle était attaquée par la France. En cas de guerre entre l'Autriche-Hongrie et la Russie, l'Italie a promis de rester neutre. L'existence et la composition du traité étaient bien connues, mais ses dispositions exactes sont restées secrètes jusqu'en 1919.

ou là :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Triplice

Dans un premier temps, l'Italie préféra rester neutre car, selon le gouvernement d'Antonio Salandra, la Triplice étant essentiellement un pacte défensif, rien n'obligeait l'Italie à participer à une guerre offensive.

Rien dans les alliances signées par l'Italie ne l'obligeait à sortir de sa neutralité, donc on peut difficilement faire du cas de l'Italie la preuve qu'il était possible de déroger à "l'engrenage des alliances" de 1914. L'Italie n'a trahi personne avant 1915.

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Le traité de la Triplice est bien un traité défensif qui prévoit ( en gros ) :

a) que les membres de la Triplice ne doivent pas s'attaquer entre eux

b) que l'Allemagne doit secourir l'Italie si celle-ci est attaquée sans provocation préalable par la France

c) que l'Italie doit aider l'Allemagne si celle-ci est attaquée sans provocation préalable par la France

d) que les états-membres doivent se consulter dans les autres cas

L'Allemagne et l'AH n'ayant pas consulté l'Italie, celle-ci se considérera à raison comme non obligée d'entrer en guerre en 1914 

Par contre en 1915 il y a bien trahison de l'Italie car celle-ci en attaquant ses alliés ( le traité est actif jusqu'en 1918 et le délai de dénonciation est d'un an ) viole les termes de l'article 1

A signaler qu'outre ses alliances avec l'Allemagne et l'AH, l'Italie a aussi ( en 1900/1901 ) mis en place un traité informel avec la France

Je n'ai pas encore lu le livre de Blandin mais j'ai l'impression qu'il fait référence à une excuse souvent invoquée ( par Kieger notamment ) comme quoi Poincaré était obligé de suivre la Russie : Or le traité d'alliance franco-russe prévoit simplement que si l'Allemagne mobilisait la première, la France et la Russie devaient automatiquement mobiliser contre elle par la suite mais en 1914 c'est la Russie qui mobilise la première donc le traité d'alliance franco-russe ne s'appliquait pas plus que celui de la Triplice ( c'est en tout cas come ça que j'interprète le propos de Blandin mais c'est à confirmer par la lecture de son livre )

 

Modifié par loki
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