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L'armée romaine


Rochambeau
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C'est essentiellement une reconstruction hollywoodienne fondée sur le cliché des galères de l'époque médiévale et surtout moderne, où les bancs de rameurs étaient fournis par la chiourme, cad des condamnés de droit commun ou des esclaves selon les lieux. A Rome comme dans les Cités grecques, les rameurs sont des volontaires rétribués, différents des soldats embarqués; je suis plus sûr si ce sont aussi des marins (et il y aurait des rotations avec ceux qui font service de pont). Dans les cités grecques antiques, les rameurs étaient des citoyens de plein droit (quoique parmi les moins fortunés, ne pouvant se payer un équipement hoplitique, un cheval ou une trirème) et c'était une partie de leur service militaire normal. A Rome, ça a commencé comme ça, pendant les guerres puniques, et ça a évolué ensuite comme le reste de l'armée: professionalisation.

On notera cependant que les marines antiques ne sont pas à représenter comme des ensembles ou des navires isolés faisant de longues croisières peu interrompues: ce sont des navires très spécifiques, reposant sur des calculs délicats d'étanchéité et de variations des poids de poids entre autres, afin de permettre de caser les 3, 4, 5 ou plus bancs de rameurs (qui doivent rester ergonomiques) dans un espace très confiné, tout en permettant une capacité de manoeuvre à la voile et surtout en offrant une plate-forme de combat valable (et une capacité d'emport en soldat). On ne dort pas à bord, sauf à de rares exceptions (s'il n'y a pas le choix lors d'une traversée sans escale possible, ce qui est rare dans la Méditerranée) pour une seule nuit, et il est même fréquent, et recommandé, de faire une pause à la mi-journée.... Et ces escales sont autant pour reposer les équipages et les abreuver (l'emport en eau n'est pas énorme sur une galère sur-staffée, contrairement aux galère et navires de commerce aux petits équipages) que pour sortir les navires de l'eau et les mettre à sécher à la moindre occasion.

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  • 3 weeks later...

Le COIN romain, un présentation dans le Small Wars Journal. Article très généraliste à l'introduction presque aussi longue que le corps du texte mais confirmant certaines choses abordées ici.

http://smallwarsjournal.com/jrnl/art/they-make-a-solitude-and-call-it-peace-counterinsurgency-the-roman-model

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  • 7 months later...

Remontage pour une découverte: un mythe semble s'effondrer....

Les découvertes archéologiques n'ont cessé, surtout dans les dernières décennies, de bouleverser l'idée qu'on avait de l'armée romaine, si bien qu'entre sa réalité et ce qu'on croit savoir, il y a désormais plusieurs mondes. Mais là! Mais là!

La plus célèbre des armures romaines, la "lorica segmentata" (l'armure lamellaire qu'on voit dans Astérix), n'aurait jamais été en très large dotation. C'est ce que les archéologues et historiens sembleraient déduire. On savait qu'elle n'avait pas existé à l'époque d'Astérix (point fondamental pour l'Histoire), qu'elle était entrée en service sous Auguste, au tout début du Ier siècle ap JC, et non pas bien plus tard, sous Claude. On savait depuis peu qu'elle se retrouvait aussi bien dans les légions que chez les fantassins lourds auxilliaires (ce qui, par ailleurs, renvoyait au fait désormais acquis que les auxilliaires impériaux n'étaient pas "moins bons" que les romains et n'étaient pas des "légers" et des cavaliers en costume folklo).... Mais on semble désormais penser qu'elle n'était pas la cuirasse des fantassins lourds/de ligne romains en général, mais d'une partie spécifique d'entre eux.

 

Que diantre! Le fait est qu'une telle hypothèse amènerait à réévaluer l'histoire de l'évolution de l'armée romaine, bousillant encore plus au passage, et c'est tant mieux, l'image du "soldat universel" au profit d'une organisation opérationnelle plus poussée vers "l'interarme organique" et la division du travail au sein même des unités essentielles.

On savait par exemple que les légions du Haut Empire n'étaient pas les monoblocs de fantassins "lourds" longtemps imaginés, mais qu'au sein même de leur orbat et de leur organisation en déploiement tactique, elles assignaient une part de leurs effectifs à un rôle de fantassins légers/lanceurs de traits (mobiles, opérant en ordre plus dispersé et sur de plus grandes surfaces, appuyant la ligne, faisant les "commandos"....), en remplacement des anciens vélites censément supprimés par les "réformes" de Marius. Ces troupes, évoquées sous les noms de lanciari ou antesignani (terme plus général, pas forcément exclusif à ces "légers"), se sont (re)spécialisées avec le temps dans de tels rôles, une armée professionnelle ayant tendance à favoriser l'excellence d'une pratique dès lors que la durée du service et la réunion durable des effectifs divers dans des unités permanentes le permettent. Les lanciari, loin de la mauvaise image des fantassins légers dans l'antiquité (surtout dans la période hellénistique), étaient considérés comme de l'élite.

 

Mais ce qu'on peut déduire, et dont on sera peut-être bientôt sûr, de la rareté "organisée" des lorica segmentata, est qu'une autre partie de l'effectif d'une légion avait un rôle de "fantassin de ligne lourd" (par rapport au légionnaire "standard", qu'on appellera du coup un "de ligne mi lourd" :happy: ). La cuirasse lamellaire, plus complexe et chère, est en effet à peu près ce qui s'est fait de mieux dans l'antiquité: bonne contre les flèches aussi bien que contre les coups d'estoc et de taille, elle est aussi assez légère, couvre assez complètement et laisse une assez bonne liberté de mouvement. C'est le must. Du coup, on se demande comment elle était attribuée: plus chère, elle mettait plus de temps à être "acquise" (comptablement) par le légionnaire (qui rembourse son équipement -fourni sans attendre- tout au long de sa carrière, par prélèvement sur solde), et en nombre moindre, elle devait nécessairement être affectée à un rôle spécifique au combat, donc à des unités et/ou soldats spécifiques. On peut supposer que l'ancienneté, la qualité et le rôle en bataille jouaient un rôle (dans quel ordre?).

 

Mais ça rejoint d'autres éléments:

- lors des guerres daciques, les légionnaires se blindèrent nettement plus pour faire face à un adversaire très organisé avec un modèle tactique efficace et une arme redoutable, la falx (sorte de grande "faucille de guerre" très efficace contre la ligne romaine): ils adoptèrent des jambières et la "manica", une armure couvrant le bras droit de l'épaule au poing (le bras gauche étant protégé par le bouclier)

- l'armée tardive, c'est un fait désormais connu, a plusieurs types de fantassins de ligne, avec pareillement des "mi-lourds" et des "très lourds", et qui ne sont pas séparés mais cohabitent dans les mêmes unités, pratiquant une division du travail, un combat combiné dans les unités essentielles (cohortes et centuries)

- dans ces mêmes unités d'infanterie de ligne de l'armée tardive, il y a aussi, et de façon organique, des troupes de missiles (différenciée des unités d'archers et javelinistes): frondeurs, mais surtout archers (des légers et des cuirassés), ils sont l'appui immédiat de chaque unité essentielle. Chaque centurie tardive a de fait, apparemment, 6 cadres, 50 fantassins de ligne (30 très lourds et 20 lourds) et 34 tireurs (10 frondeurs, 24 archers dont la moitié cuirassés), au sein d'une cohorte à environs 6 de ces "centuries".

- l'interarme organique est une réalité dans l'armée romaine au même titre que la coordination interarme entre unités de plusieurs types: les cohortes auxilliaires de fantassins lourds ne comportent pas que des fantassins de ligne, mais aussi, semble t-il des archers et des frondeurs (il n'existe pas d'unité de frondeurs romaine recensée, mais on sait que les frondeurs n'ont jamais cessé d'être dans l'armée), qui jouent de fait les "armes collectives" d'appui de ces unités, au niveau de la centurie peut-être, de la cohorte sûrement. De même, la légion (vu plus haut) pratique un certain niveau d'interarme au sein de ses propres effectifs, en plus de recourir à des unités auxilliaires pour faire des "armées complètes" (troupes de missiles, cavaleries lourde et légère, fantassins "médians et légers"): elle "fait" sa propre artillerie (pour les sièges mais aussi en campagne), par exemple

- le système de combat des cohortes légionnaires est lui-même une division du travail: tout légionnaire lance des javelots, s'en sert comme lance, ou combat avec gladius et bouclier (ou le pilum comme lance).... Mais on ne fait pas changer les rangs d'une centurie au front sans arrêt (il est plus simple de changer les centuries: une se repose et/ou appuie, l'autre combat): donc pendant que les premiers rangs combattent, les suivants lancent leurs javelots (et appuient leurs potes si il y a besoin de faire le push). A moins que les premiers rangs se fassent hacher menus avant la relève de la centurie, il y a donc un emploi différencié.

- la lance longue, d'arrêt (hasta) n'a jamais cessé d'être en dotation dans les légions: comme les lanciarii qui ont manifesté la permanence du besoin des anciens vélites, le besoin de troupes d'arrêt (et de plus en plus spécialisées dedans) après la disparition des triaires sous Marius, n'a pas disparu, et le "soldat universel" ne peut pas pallier ça par une sous spécialisation et une affectation occasionnelle à un tel rôle. On sait par ailleurs qu'il existait au Ier siècle des cohortes auxilliaires de "lanciers" portant des grandes lances d'arrêt (pour jouer les phalanges? Spécifiquement affectés à faire un écran anti-cavalerie?), ce qui témoigne de la persistance des besoins (au moins face à certains ennemis) et de l'optimisation de l'armée romaine selon les fronts d'affectation, pour créer des mix de forces adaptés (et la légion s'adaptant aussi en interne, mais semblant plus "rigide" par rapport aux auxilliaires dont les petites unités peuvent être plus variées).

- la légion "classique" est un système de progression à l'ancienneté et au mérite: les cohortes ne sont pas égales, et un légionnaire y circule tout au long de sa carrière. Typiquement, il y a des cohortes de formation (y'en a 2), pour les morveux à peine sortis de l'instruction, des cohortes de bleus, formés mais inexpérimentés, une cohorte des bleus les plus prometteurs, et 5 cohortes de vétérans de divers degrés d'ancienneté et statuts, dont la 1ère (à double effectif), faite de la crème de la crème.

 

De ces faits, et des tendances d'évolution de l'armée romaine du Ier au IIIème siècle, puis de la crise du IIIème siècle (du peu qu'on sait), et enfin de la période tardive, j'ai tendance à pencher en faveur d'une assez grande continuité: triaires et vélites n'ont jamais totalement disparus parce que, bien plus que des troupes spécifiques, ce sont des besoins et des rôles nécessaires. Comme un bataillon napoléonien, la légion romaine a besoin de, certes, une majorité de lignards "standard" (quoique différents par l'ancienneté et l'expérience), mais aussi de voltigeurs et de grenadiers (et éventuellement de ses armes d'appui: hein le canon de 4 intégré aux régiments d'infanterie)! Les voltigeurs, ce sont les lanciari, les grenadiers, ce seraient les "super lourds", et les appuis "organiques", ce seraient en fait (avant le modèle tardif où toute unité d'infanterie a un effectif d'archers organique) éventuellement quelques frondeurs, mais surtout la division du travail entre les légionnaires de chaque centurie qui sont dans les premières lignes, et ceux qui sont à l'arrière et balancent leurs javelots.

Avec le temps, il a pu y avoir une fixation des rôles plus permanente, quand on voit notamment que la rotation des effectifs pour repos pendant une bataille se fait en interchangeant, au sein de la cohorte, les centuries (une combat, l'autre est derrière), ou, au sein de l'armée en "duplex acies" (deux lignes de cohortes), les cohortes, elle ne se fait pas au sein d'une centurie en essayant de faire combattre une file de 8h à tour de rôle (cf la série Rome), mouvement plus risqué pendant le combat. Plus simple de faire passer une centurie "au travers" des rangs de celle de devant, les distances entre hommes (les 3 pieds drillés jusqu'à plus soif à Rome) le permettent même sans besoin d'un ordre plus espacé.

Du coup, la centurie en tant qu'unité de ligne semble suremployer les 4 premiers rangs, et sous-employer les 4 suivants (moyenne juste prise ici comme repère): à moins d'une situation difficile face à un ennemi aussi bon au combat d'infanterie (dans toute l'histoire romaine post guerres puniques, ça n'a été le cas.... Que face à d'autres unités romaines), il y a très peu de chances de perdre, dans chaque file, les 4 hommes de front avant la fin d'une bataille (vu qu'elle ne la fait pas en totalité: rotation des centuries et rotation des cohortes). Les 4 rangs de l'arrière sont donc "de trop" pour le combat en ligne.

A partir de là, soit on reste dans le "généralisme" pour les fantassins, soit on cherche à optimiser cette formation, en alourdissant ces 4 premiers rangs (pour en faire des "super lourds": segmentata, puis manica et jambières) pour les rendre encore plus solides et experts (et plus tard leur donner une lance d'arrêt plutôt qu'un pilum), en en gardant certains "à l'identique" (cote de mailles, bouclier, gladius, pilum) pour pouvoir appuyer par des tirs, mais aussi participer au combat de ligne et de mêlée si besoin est, et en en allégeant d'autres pour les spécialiser plus dans l'appui (même si le maintien d'armes et de blindage souligne qu'ils doivent rester un minimum aptes au combat, vu qu'on est dans le cadre d'une centurie, cad au plus près).

 

Voilà pour les ruminages du soir.... C'qui peut s'passer quand on lit le mauvais texte au mauvais moment.

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. Chaque centurie tardive a de fait, apparemment, 6 cadres, 50 fantassins de ligne (30 très lourds et 20 lourds) et 34 tireurs (10 frondeurs, 24 archers dont la moitié cuirassés), au sein d'une cohorte à environs 6 de ces "centuries".

 

Ca semble proche du ratio moyen hommes d'armes/hommes de trait de compagnies mixtes de la guerre de cent ans.

 

En pratique ça variait beaucoup, exemple de décomptes établi pour le siège d'Orléans par le trésorier du roi:

562 hommes d'armes et 414 hommes de traits

variant de 73/13 à 25/60 par compagnie

 

Ce ratio de 3/2 est il une constante historique?

Comment se gèrent les fortes variations de ce ratio tactiquement? Il y'a soit des hommes d'armes peu utiles, soit des archers mal protégés.

 

En pratique est ce que la composition théorique était respectée? Dans le cas du moyen age il est évident que la disparité est due à l'absence d'autorité centralisant les différentes compagnies (qui font leur propre ordre de bataille), mais donc le cas romain la composition théorique pouvait peut être changer selon le théatre d'opérations (hors réserve centrale du moins)?

Modifié par aqva
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Difficile à dire, et surtout à comparer au Moyen Age où la standardisation n'existe pas avant la toute fin de la Guerre de Cent Ans: les armées anglaises de ce conflit tendaient vers le 2/3-1/3 de gens de traits (le reste étant un peu d'infanterie de "billmen" et surtout des hommes d'armes à pied et à cheval), voire le 3/4-1/4, donc fondées sur une absolue majorité d'archers. Avant cela, ça dépend vraiment des endroits et des périodes: en occident, les gens de trait, avant que les Anglais mettent au point ce modèle, sont peu présents dans les guerres, alors que pendant les croisades, les armées européennes (surtout les permanentes, comme les ordres de moines soldats ou l'armée du royaume de Jérusalem) les ont remis à l'honneur. Dans la période carolingienne, on sait pas trop, tout comme dans la période mérovingienne. Mais la continuation du "warfare" romain, en version moins financée et moins sophistiquée et organisée (pas d'armée permanente) n'a pas favorisé des dispositifs super évolués; et le "moule" de la guerre féodale s'est bâti là-dessus, avec après l'arrivée de la "révolution" de la charge "à la normande". On signale des archers jouant un certain rôle à Hastings, mais on sait pas trop comment pondérer leur importance: numériquement, ils ont pas été très lourds, et évaluer leur impact est impossible en raison du biais certain en faveur des cavaliers (qui dure tout le Moyen Age) qui dévalue tout ce qui n'est pas à cheval et noble. A 'linverse, dans l'armée byzantine, l'archer reste fondamental, et il reste aussi assez important dans les Balkans, tant du côté des cavaliers bulgares que dans l'armée royale, puis impériale, serbe (une des plus fortes du Moyen Age).

Sinon, dans certaines régions, on a une survivance d'autres gens de traits, les javelinistes: les Almogavres d'Aragon en furent un grand exemple, pratiquant un combat "à la romaine", avec assaut agressif en lançant deux javelots, puis contact à l'arme blanche.

 

Les milices suisses du XVème siècle (pas les unités mercenaires, plus spécialisées encore) avaient plutôt 3/4 de fantassins (essentiellement piquiers, avec 20% d'épéistes lourds et hallebardiers environs) et 1/4 d'archers et arbalêtriers, et après elles (qui forment le "moule" à partir duquel l'infanterie pike & shot européenne va se développer, et plus tard, fin XVIIème-début XVIIIème être uniquement une infanterie de tir), on a une lente évolution, surtout lors des guerres d'Italie, où les armes à feu remplacent graduellement les arbalètes et arcs dans la composante "tir" organique aux unités d'infanterie.

Et on observe l'évolution de la proportion, en faveur des armes de tir, sur tout le XVIème et le XVIIème siècle:

- première moitié du XVIème: entre 20% et 1/3 de tireurs

- deuxième moitié: le ratio augmente et approche la moitié. Il n'y a pas de suivi facile, surtout que ça varie selon le pays et dans chaque pays (et au gré de l'évolution technologique des armes à feu), si bien que les unités de ce temps sont le cul entre deux chaises, à la fois des unités de défense et de choc offensif (par la pique et l'adjonction de petites proportions de hallebardiers), et des unités de tir groupé et de tirailleurs (par les sous-unités d'arquebusiers et de mousquetaires)

- 1ère moitié du XVIIème (et guerre de trente ans): le feu devient la composante dominante, et on est aux deux tiers de tireurs pour un tiers de piquiers, qui servent essentiellement à la défense contre la cavalerie (et encore au choc d'infanterie, avec les tireurs, quand ça arrive), moins chez certains (Espagne et France notamment) que chez d'autres (Hollande, Suède et pays protestants, passés au "feu"). Les hallebardiers (pour l'assaut) existent encore en petits groupements. Les unités essentielles diminuent en taille (le bataillon devient la norme, par rapport au régiment qui cesse d'être une unité opérationnelle), favorisant un choix clair d'une arme dominante.

- 2ème moitié du XVIIème: les piquiers sont réduits à 15-20% de l'effectif des bataillons, avant de disparaître, tant en raison de leur coût supérieur, du besoin de simplifier le dispositif et de maximiser la puissance de feu, que de l'arrivée de la baïonnette à douille

 

Je vois pas de persistance dans les proportions, à travers l'histoire. Je vois en revanche une persistance des solutions efficaces dans la coordination la plus parfaite possible entre les armes: les troupes les plus efficaces ont toujours cherché à faire fonctionner les armes ensembles, et l'intégration organique, avec un degré le plus prononcé possible de spécialisation (supposant aussi une troupe "polyvalente" entre les spécialités, pour "faire le joint"), semble être ce qui a toujours procuré les meilleurs résultats. L'évolution du modèle romain à partir d'Auguste me semble aller dans ce sens.

mais donc le cas romain la composition théorique pouvait peut être changer selon le théatre d'opérations?
 

 

Difficile à savoir, vu les manques d'inventaires exhaustifs, mais oui, les unités en Orient, par exemple, semblant avoir eu la part du lion des unités d'archers de l'armée, et des unités de cavalerie (surtout les plus spécialisées: les ultra lourds -cataphractaires- et les légers, qui pesaient ensembles 1/3 des effectifs des unités de cavalerie romaine): ça souligne un mix de forces différent, et une façon différente de faire la guerre et de faire campagne. A l'inverse, les unités sur le Rhin et le Danube occidental et central semblent plus lourdes en infanterie de contact (infanterie de ligne, infanterie légère, infanterie spécialisée -notamment de montagne), avec une archerie moins conséquente, et une cavalerie plus réduite et surtout moins spécialisée (les cavaliers lourds types dominent: les scutaires). Sur le front saharien, on voit de même cavalerie légère, archers et infanterie légère avoir une part bien plus importante, et l'armée préférer les groupements opérationnels plus petits et les dispositifs plus dilués.

 

Mais il faut garder à l'esprit des éléments relativisants ces façons de voir encore trop catégoriques:

- une légion, tout comme en fait chaque cohorte d'infanterie (de légion ou non) a aussi sa composante "tir": le tir rapproché avec les javelots est le fait de chaque fantassin (qui a 2 javelots à balancer, et dans l'armée tardive, 4-5 dards plombés), les frondeurs semblent organiques aux unités pour le tir mi-distance (et/ou on a des fantassins apprenant aussi cette spécialité et "faisant le coup de feu"), et il semble bien, donc, que graduellement, des archers aient été intégrés aux unités essentielles

- dès le premier siècle, on voit se créer plein d'unités "mixtes", parfois temporaires, parfois permanentes: les cohors equitata, des cohortes d'infanterie montée, les vexillations prélevées sur des légions.... Et la plupart de ces unités semblent avoir été faites pour une guerre désormais plus mobile (évolution de l'art militaire romain, désormais avec une armée professionnelle aux soldats à long contrat), dans la petite guerre incessante du limès comme dans les grandes opérations. L'armée subdivise et articule toujours plus ses troupes, autonomise des échelons toujours un peu plus petits.... Nombre de troupes plus faites pour être autonomes, tout comme des sous-groupements de grandes unités, sont donc de fait de plus en plus "interarmes": armes de jet et tir, mais aussi cavalerie (et/ou chevaux pour monter de l'infanterie), sont présents aux côtés de l'infanterie à des échelons plus bas qu'avant.

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Remontage pour une découverte: un mythe semble s'effondrer....

Les découvertes archéologiques n'ont cessé, surtout dans les dernières décennies, de bouleverser l'idée qu'on avait de l'armée romaine, si bien qu'entre sa réalité et ce qu'on croit savoir, il y a désormais plusieurs mondes. Mais là! Mais là!

La plus célèbre des armures romaines, la "lorica segmentata" (l'armure lamellaire qu'on voit dans Astérix), n'aurait jamais été en très large dotation. C'est ce que les archéologues et historiens sembleraient déduire.

Très interressant, cela m'intrigue.

 

J'ai essayer d'en savoir plus et je suis tombé sur des sites interressants:

http://legio6.com/forum/viewtopic.php?f=17&t=37

mais aussi:

http://www.lesleuques.net/spip.php?article242

http://www.lesleuques.net/spip.php?article243

http://www.lesleuques.net/spip.php?article244

 

En résumé, on retrouve peu le lorica Segmentata, pour plusieurs raisons, mais principalement:

-corrosion du fer,

-utilisation strategique (voir tactique) particulière des romains "selon l'adversaire".

-utilisation d'autre armures plus courantes et précoces que l'on pensait: surtout la cote de maille, et dans une moindre mesure, la lorica squamate (en écaille)

 

 

On savait par exemple que les légions du Haut Empire n'étaient pas les monoblocs de fantassins "lourds" longtemps imaginés, mais qu'au sein même de leur orbat et de leur organisation en déploiement tactique, elles assignaient une part de leurs effectifs à un rôle de fantassins légers/lanceurs de traits (mobiles, opérant en ordre plus dispersé et sur de plus grandes surfaces, appuyant la ligne, faisant les "commandos"....), en remplacement des anciens vélites censément supprimés par les "réformes" de Marius.

 

 On peut supposer que l'ancienneté, la qualité et le rôle en bataille jouaient un rôle (dans quel ordre?).

 

 

 De même, la légion (vu plus haut) pratique un certain niveau d'interarme au sein de ses propres effectifs, en plus de recourir à des unités auxilliaires pour faire des "armées complètes" (troupes de missiles, cavaleries lourde et légère, fantassins "médians et légers"): elle "fait" sa propre artillerie (pour les sièges mais aussi en campagne), par exemple

- le système de combat des cohortes légionnaires est lui-même une division du travail: tout légionnaire lance des javelots, s'en sert comme lance, ou combat avec gladius et bouclier (ou le pilum comme lance).... Mais on ne fait pas changer les rangs d'une centurie au front sans arrêt (il est plus simple de changer les centuries: une se repose et/ou appuie, l'autre combat): donc pendant que les premiers rangs combattent, les suivants lancent leurs javelots (et appuient leurs potes si il y a besoin de faire le push). A moins que les premiers rangs se fassent hacher menus avant la relève de la centurie, il y a donc un emploi différencié.

 

- la légion "classique" est un système de progression à l'ancienneté et au mérite: les cohortes ne sont pas égales, et un légionnaire y circule tout au long de sa carrière. Typiquement, il y a des cohortes de formation (y'en a 2), pour les morveux à peine sortis de l'instruction, des cohortes de bleus, formés mais inexpérimentés, une cohorte des bleus les plus prometteurs, et 5 cohortes de vétérans de divers degrés d'ancienneté et statuts, dont la 1ère (à double effectif), faite de la crème de la crème.

 

Du coup, la centurie en tant qu'unité de ligne semble suremployer les 4 premiers rangs, et sous-employer les 4 suivants (moyenne juste prise ici comme repère): à moins d'une situation difficile face à un ennemi aussi bon au combat d'infanterie (dans toute l'histoire romaine post guerres puniques, ça n'a été le cas.... Que face à d'autres unités romaines), il y a très peu de chances de perdre, dans chaque file, les 4 hommes de front avant la fin d'une bataille (vu qu'elle ne la fait pas en totalité: rotation des centuries et rotation des cohortes). Les 4 rangs de l'arrière sont donc "de trop" pour le combat en ligne.

A partir de là, soit on reste dans le "généralisme" pour les fantassins, soit on cherche à optimiser cette formation, en alourdissant ces 4 premiers rangs (pour en faire des "super lourds": segmentata, puis manica et jambières) pour les rendre encore plus solides et experts (et plus tard leur donner une lance d'arrêt plutôt qu'un pilum), en en gardant certains "à l'identique" (cote de mailles, bouclier, gladius, pilum) pour pouvoir appuyer par des tirs, mais aussi participer au combat de ligne et de mêlée si besoin est, et en en allégeant d'autres pour les spécialiser plus dans l'appui (même si le maintien d'armes et de blindage souligne qu'ils doivent rester un minimum aptes au combat, vu qu'on est dans le cadre d'une centurie, cad au plus près).

 

L'idée d'une utilsation tactique spéciale de Tancrède est séduisante mais m'interpèle aussi.

Les romains du haut-empire, auraient, en somme, conservé (en modifiant) le système républicain: Hastati, principe, triari.

 

Si je comprend bien le raisonnement, les Lorica segmentata, "meilleurs" et "couteuses", seraient donc utilisés principalement par les "rookies" qui seraient placés "à l'avant" (en cohortes ou lignes) et combattraient, et se (fatigueraient) plus longtemps que les troupes en arrière, plus légèrement "blindés", et moins "engagés" ? (j'ai bien saisi qu'il y avaient des lanciarii en "tirailleurs", plus légers" placé devant tout le reste...)

Cela suggérerait que les "anciens" cèdent/vendent leur armures "lourdes" au "jeunes", car ils en ont moins / plus besoin, car en arrière. C'est un peu paradoxal, généralement on recherche la protection avec l'âge (et la richesse) ?

 

Si c'est pas les "bleus" placés devant, alors cela laisse supposer que l'on place les "anciens" et plus "experimentés" devant, et que les jeunes "apprenent" vu de l'arrière, ça me semble peu probable.

 

Une autre possibilité, les Lorica segmentata pourraient servir dans des unités entières de "jeunes blindés" pour percer / désorganiser les lignes ennemis, et dont les fantassins légers, anciens (?), mobiles, et experimentés serviraient principalement pour l'exploitation de la percée (genre assault de cavalerie du moyen-age, ou troupes de chocs)...

 

Bref interressant et soulevant beaucoups d'autres questions...

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corrosion du fer,

-utilisation strategique (voir tactique) particulière des romains "selon l'adversaire".

-utilisation d'autre armures plus courantes et précoces que l'on pensait: surtout la cote de maille, et dans une moindre mesure, la lorica squamate (en écaille)

 

Pour la corrosion du fer, les lorica hamata sont par essence celles qui devraient en souffrir le plus et disparaîtraient le plus vite; or, ce sont celles qu'on retrouve en grand nombre.

Pour l'utilisation selon l'adversaire: oui, les armées romaines d'un endroit donné s'adaptent conjoncturellement (vêtements moins épais, on sort sans l'armure....) et, dans une certaine mesure, structurellement. Mais l'adaptation structurelle est plutôt celle du mix de forces ("dosage" de cavalerie, de tel type d'infanterie....) et de quelques unités spécifiques éventuellement (les dromadaires sont pas affectés au Rhin :happy: ). Et une telle utilisation à la carte (hors de simplement "mettre ou pas mettre l'armure"), dans le cas de la segmentata, supposerait une sorte de double dotation: l'armée romaine fonctionne pas vraiment comme ça, vu que le légionnaire est propriétaire de son matériel. On le lui file pour la formation initiale, quand il n'est encore que "tiro", et une proportion donnée de sa paie (voire plus haut dans le fil, j'ai donné les tarifs) sert à rembourser. Vu le coût de certains matériels, comme la segmentata, ça peut prendre du temps. Et jusqu'à la reprise en main du IIIème siècle, l'Etat ne fournit pas des trucs clé en main: il file la paie et l'organisation, et il fournit certaines matières premières de base (dont le grain, l'huile et le vin, certains bois spécifiques, et surtout le métal). C'est pourquoi l'armée romaine est une armée étonnamment peu chère au regard de ce qu'elle fournit comme service, en guerre et en paix: elle fabrique et entretient tout son matériel, toutes ses fortifications et logements, les routes, les ouvrages publics de l'empire, organise les recensements, lève l'impôt....

 

Mais bref, la segmentata, signalée (aujourd'hui) depuis l'an 9 apr JC, est fabriquée en légion, par des légionnaires; ce qui la rend chère, c'est vraisemblablement moins le coût initial du métal (en quantité, y'en a t-il beaucoup plus que dans une hamata ou squamata? Est-il de meilleure facture?) que le temps passé et l'expertise requise du ferronnier, ce qui réduit le nombre de ceux pouvant la produire dans une légion (dans la hiérarchie interne des métiers d'une légion, ça peut vouloir dire que seul le tout haut du panier chez les ferronniers/maréchaux ferrants peut faire ça).

 

Ca fait au final de la cote de maille l'armure type du romain à toutes les périodes depuis la réforme de Marius (au moins) jusqu'à la chute de l'occident et au-delà en orient.

 

Les romains du haut-empire, auraient, en somme, conservé (en modifiant) le système républicain: Hastati, principe, triari.

 

Moins conservé le système que "gardé la mémoire" et le besoin des fonctions disparues en tant qu'unités organiques. Surtout que n'est pas repris dans ce système le fait que les triaris soient les citoyens mobilisables âgés et riches, ou les vélites les jeunes sans fric. C'est radicalement différent parce qu'on fait ça avec des soldats faisant des carrières de 16, 20 puis 24-25 ans. Tout d'abord, ils sont par nature plus polyvalents, ce qui fait que leur usage avec spécialité dominante ne se fait pas dans les mêmes conditions: leur spécialité ne les empêche pas de faire d'autres choses, se conçoit comme plus qu'un usage ponctuel (triaires) ou "latéral" (vélites).... Ensuite, les spécialisations sont intégrées dès l'échelon de la centurie (attesté dans l'armée tardive et dans une certaine mesure dès le IIème siècle; pour plus, c'est ce qui est en débat justement), ou à tout le moins dans la cohorte avant cela (frondeurs, javeliniers légers attestés, archers légionnaires attestés en plus des unités auxilliaires d'archers -avec la recommandation connue que tout légionnaire doit savoir monter et tirer à l'arc). L'évolution "naturelle" d'une organisation militaire professionnelle tend à développer l'organisation du travail et à pousser l'expertise et l'efficacité d'armes particulières et de spécialité demandées, ce qui crée des complémentarités que l'expérience de soldats en contrats très long permet de faire fonctionner (peut poser problème en temps de crise, de plus avoir assez de vétérans: la mécanique interarme complexe est plus dure à faire fonctionner avec des newbes).

Si je comprend bien le raisonnement, les Lorica segmentata, "meilleurs" et "couteuses", seraient donc utilisés principalement par les "rookies" qui seraient placés "à l'avant" (en cohortes ou lignes) et combattraient, et se (fatigueraient) plus longtemps que les troupes en arrière, plus légèrement "blindés", et moins "engagés" ? (j'ai bien saisi qu'il y avaient des lanciarii en "tirailleurs", plus légers" placé devant tout le reste...)

Cela suggérerait que les "anciens" cèdent/vendent leur armures "lourdes" au "jeunes", car ils en ont moins / plus besoin, car en arrière. C'est un peu paradoxal, généralement on recherche la protection avec l'âge (et la richesse) ?

 

Si c'est pas les "bleus" placés devant, alors cela laisse supposer que l'on place les "anciens" et plus "experimentés" devant, et que les jeunes "apprenent" vu de l'arrière, ça me semble peu probable.

 

Une autre possibilité, les Lorica segmentata pourraient servir dans des unités entières de "jeunes blindés" pour percer / désorganiser les lignes ennemis, et dont les fantassins légers, anciens (?), mobiles, et experimentés serviraient principalement pour l'exploitation de la percée (genre assault de cavalerie du moyen-age, ou troupes de chocs)...

 

J'ai rien affirmé de ce type: là, on conjecture de toute façon. J'indiquais même plutôt (mal peut-être) que des armures plus coûteuses iraient logiquement à des plus anciens, ou en tout cas, à une portion choisie des troupes, dans l'évolution naturelle de la centurie au combat (mon histoire des 4 rangs de tête comparés aux 4 rangs de derrière); C'est en sein de la centurie que ça se joue essentiellement, il me semble, puisque les centuries tardive sont profondément interarmes et différenciées en interne par l'équipement, et que je table sur une évolution continue du modèle militaire, sans des "révolutions", qui n'arrivent pas, surtout avec la mentalité antique, par essence conservatrice. Il n'y a ainsi pas eu de "révolution manipulaire", "polybienne", "camillienne", ou de "révolution marienne" dans l'armée romaine, au sens de changements brutaux et majeurs arrivant en quelques années: Marius, par exemple, a simplement acté et codifié des usages qui de toute façon devenaient la norme de facto depuis longtemps (usage de la cohorte au détriment de la manipule depuis la 2ème guerre punique, contrats de "service conscrit" de 16 ans pour des prolétaires devenant de facto des professionnels vu que certaines légions devenaient de fait permanentes, allègement du train de légion grâce à la professionalisation....).

 

Les fantassins "alourdis" deviendraient donc structurellement les premiers rangs de chaque centurie dans chaque cohorte d'infanterie de ligne, souvent dite "lourde" (légionnaire ou auxilliaire); les "lanciarii" seraient-ils une autre partie de l'effectif de chaque centurie? Personnellement je crois pas, cet usage de tirailleurs, d'éclaireurs, de forces de flanquement (en campagne ou en bataille) ou de "commandos" (et d'escorte, puisque apparemment, leur statut d'élite amenait souvent de telles affectations, et les "singulares" -gardes du corps d'officiers- semblent avoir été prélevés chez eux), requiert un usage différent, donc des unités hors des cohortes mises en ligne. Dès lors qu'on se rend compte que la légion, avec ses 10 cohortes, n'est pas un outil tactique pratique pour la bataille (on ne "manie" pas un machin à 10 sous ensembles tactiques dans un combat mobile), et que les 10 cohortes sont très différenciées par "niveau", ça prend beaucoup plus de sens.

Comme on ne connaît pas la proportion de segmentata par rapport aux effectifs totaux, ou la proportion de soldats affectés à un rôle de première ligne/ligne d'arrêt en bataille (la segmentata n'en est pas le seul indice: les lances d'arrêt, les lorica hamata, les manica et jambières peuvent en être d'autres), c'est dur à dire, mais on peut conjecturer que les segmentata ne sont affectées qu'aux soldats des premières lignes des meilleures centuries/cohortes. Les premières lignes des autres centuries/cohortesd'une même légion (je pense surtout aux 4 ou 5 avec les "tout bleus", les "demi bleus") n'auraient pas la segmentata, mais auraient la même organisation/division du travail en revanche.

 

Pour les lanciari/post-vélites, ce qui ferait sens selon moi est un usage au niveau de la cohorte: c'est l'échelon qui monte en puissance depuis les guerres puniques, comme "extrapolation" de la manipule, qui se révèle être un échelon trop petit pour la manoeuvre. Sous Marius et César, c'est déjà l'unité de compte essentielle et la base d'organisation opérationnelle des ordres de bataille. L'armée tardive est une continuation de tendances lourdes dans l'armée romaine, et c'est une armée "bataillonnaire", fondée sur l'équivalent romain du bataillon qu'est la cohorte (des cohortes milliaires et des quingénaires cependant), à partir de laquelle on compose des task forces. Mais on voit l'organisation interne de cette unité évoluer avec une "interarmisation" qui va de pair avec son autonomisation: la cohorte (surtout d'infanterie de ligne en fait) devient l'échelon tactique de base et ne cesse de perfectionner/optimiser ce rôle: elle intègre apparemment vite, à partir des IIème-IIIème siècles, des cavaliers, ou en tout cas une dotation en chevaux (avant la fin de la légion classique, c'est moins pour les cohortes légionnaires que pour les auxilliaires et equitata, ainsi que pour les vexillations de légions), des tireurs (frondeurs et archers: soit en groupements permanents et dédiés, soit en "spécialisations secondaires" et "double dotation" de certains de leurs soldats) et une certaine division du travail entre les fantassins restant affectés au combat de ligne proprement dit.

Donc les lanciari seraient soit des "légers" mobiles, faits pour le commando et le rôle de tirailleur, soit en fait des légionnaires "polyvalents" (mais de très bon niveau) jouant de la javeline (dotée en abondance) et du combat en formation; je penche plutôt pour cet aspect des choses, puisque l'adjonction d'unités de tir en interne des unités essentielles (frondeurs et archers, jusqu'à hauteur d'1/3 de l'effectif à l'époque tardive), de même que la multiplication des unités de "légers" spécialisés (javelinistes: tir courte distance, appui et harcèlement) et d'unités de tir spécialisées (sagitarii -archers- manuballistarii - arbalêtriers-, plus une artillerie de campagne) dans l'auxiliat, remplissent largement ces fonctions. Quel besoin de tirailleurs opérant en ordre plus dispersé en interne des cohortes d'infanterie? Le rôle des vélites est moins repris en tant que tel par des unités (internes aux légions) les remplaçant nombre pour nombre et fonction pour fonction, que maintenu d'une autre façon, en partie en interne des légions (tireurs organiques et portion de fantassins opérant du tir de contact et pouvant éventuellement manoeuvrer, tout en gardant leur fonction de fantassins de ligne), et en partie en externe (augmentation du nombre et du niveau de spécialisation d'unités de tireurs de diverses distances). Un professionnalisme plus poussé (encore une fois, avec les contrats longs) permet ce genre de choses.

C'est un schéma qui s'apparente en fait graduellement à nos unités de combat et à leur histoire depuis la première guerre mondiale: fin des compagnies de plus de 250h et des bataillons d'infanterie de ligne massifs et monoblocs (métier unique) avec juste un micro appoint d'armes collectives (une petite compagnie de mitrailleuse), et évolution vers la coopération interarme à tous échelons depuis la "demi section" (puis plus tard le groupe de combat), toujours à un cran plus poussé en "grimpant" (des armes d'appui et de mêlée coopérant depuis le niveau GC jusqu'au niveau bataillon, à chaque échelon plus poussées et puissantes)

.

Placer les lanciari là-dedans est dur avec tant de conjectures, parce qu'il peut s'agir:

- d'une portion des effectif d'une cohorte affectée en permanence à ce rôle, et qui sont soit centralisés en un seul "pool" (une ou deux centuries de la cohorte?), soit intégrés à chaque centurie (mais pouvant bouger)

- d'une simple appellation pour un rôle affecté à une partie des effectifs (ceux qui ne sont ni tireurs, ni "super lourds"/affectés à la tenue des premiers rangs) dans certaines circonstances. Au moins au début du principiat, quand la différenciation et l'organisation du travail en interne des unités n'est pas encore trop poussée. Dans un tel cas de figure, l'évolution aurait abouti à rendre ces rôles plus permanents, au point d'aboutir à des équipements différenciés au sein des unités essentielles

- d'une répartition des rôles maintenue: un soldat en cote de maille, bouclier et casque n'est pas un "léger" (même par rapport à un surblindé, c'est pas un poids plume), mais formation et expérience (qu'une armée faite de contrats longue durée permet) n'empêche pas sa polyvalence et de multiples "spécialisations" qui permettent d'adopter des dispositifs complexes en bataille, mais à l'échelle de la centurie. Ce qui se faisait jadis entre les centuries d'une manipule, puis entre celles d'une cohorte (mais toujours pas groupement de 2 centuries l'une devant l'autre), se pratique aussi entre certaines portions d'une centurie: 2 à 4 rangs de "blindés" (métier principal: arrêt, offensive en ligne et mêlée) alternent les rôles avec 2 à 4 rangs de "médians" (en cote de maille, avec pour métier: appui des lourds, assaut, manoeuvre et tirailleurs) suivant la situation. La lancea (une javeline, en dotation individuelle à plusieurs exemplaires) et la hasata (lance d'arrêt) offrent comme le niveau de blindage l'élément de différenciation; mais la communalité de la formation, de l'affectation permanente dans la même unité, et d'une bonne capacité à la mêlée (cote de maille plus mêmes casques et boucliers que les blindés, mêmes épées), évitent quand même une différenciation trop importante.

- d'un rôle qu'on confond partiellement avec l'appellation d'antesignani (ceux qui marchent devant les enseignes), qui qualifie les soldats dont le rôle est d'être en première ligne. Cela ne semble pas nécessairement liés à un seul type de soldat (la première ligne), mais aussi bien à ces super lourds (ou les "normaux lourds") qui tiennent le front, qu'à ces lanciari qui peuvent avoir un rôle de tirailleurs et d'assaut (en fait plus proche du rôle du légionnaire type dans la période de Marius et des débuts du principiat).

 

Dire quoi est quoi est très dur, d'autant plus que les unités tardives dont on commence à bien comprendre le fonctionnement complexe (et après elle l'infanterie byzantine, aussi très perfectionnée et efficace), voient la polyvalence attribuer des rôles différenciés même à des soldats de même type: il n'est ainsi pas rare, au sein des "ultra lourds" en armure complète, de voir le premier rang de super lourds opter plutôt pour des armes de jets (javelines/angons et dards plombés) et tenir ensuite la ligne à l'épée, tandis que le deuxième rang de super lourds les appuie à la lance d'arrêt, un dispositif qu'on voyait au premier siècle, de façon plus "légère et artisanale", dans les légions classiques, avec le premier rang se débarrassant vite de son pilum pour dégainer le gladius, tandis que la deuxième se servait du pilum pour les appuyer (en "piquant" les gars en face si le copain en avait trop à la fois). Un tel dispositif était dur avec le court pilum et les écarts de combat adoptés par les Romains (ordre dense: pyknosis): 1,5m de front par homme environs -les 3 pieds d'écart, avec le premier rang en décalé par rapport aux fils de derrière et entre les rangs en ordre de bataille une fois les javelots lancés-, sauf passage à un ordre dense (synaspismos) fait pour la poussée, la tortue, recevoir une charge....

 

Je digresse, mais j'essaie de voir les différentes possibilités au sein d'un fait qui semble certain: la différenciation graduelle des "métiers principaux" au sein des unités essentielles d'infanterie de ligne, légions ou auxilliats (qui restent ce autour de quoi l'ordre de bataille romain s'aligne), et leur traduction jusqu'à l'équipement.

J'essaie d'éviter, mais à chaque fois, je commence à m'enfoncer dans les détails en perdant de vue les axes globaux de réflexion:

 

- l'armée romaine est un organisme en évolution continue: ralenti sous la République, hors périodes de guerres majeures (et zones de déploiements permanents dans la dernière période), le processus s'accélère constamment à partir de la "professionalisation", et surtout de la permanence complète sous Auguste, avec une sollicitation constante et la durée désormais très importante des contrats d'engagement (et du taux de "rempilage"). Comme toute armée professionnelle le démontre, quand des pros sont concentrés en garnisons, les usages évoluent, et leur mise à l'épreuve fréquente engendre souvent des cycles d'adoption de pas mal d'innovations. Le temporaire devient permanent, l'exceptionnel devient structurel, et au bout d'un temps, on rationnalise/met en cohérence à plus haut échelon. C'est encore plus vrai quand coexistent plusieurs "modèles opérationnels" au sein de la même armée: groupements légions+ auxilliaires, détachements temporaires en vexillations/task forces, groupements d'auxilliaires (avec au centre une composante d'infanterie lourde auxilliaire), croissance de la cavalerie et de ses spécialisations (croissance suffisante pour imposer un nouveau point de référence dans l'armée romaine, longtemps fondée sur un point de vue uniquement légionnaire).... Comme les forces américaines reposant sur les 2 cultures Army/Marines, l'armée romaine perd l'absolutisme de son référent légionnaire (puis celui du seul référent "infanterie lourde").

 

- l'armée de Marius n'est pas l'armée de César, qui n'est pas celle d'Auguste, qui n'est pas celle de la fin du Ier siècle, qui n'est pas celle de Trajan, qui n'est pas celle de Septime Sévère.... Les usages de fortune pendant le IIIème siècle accélèrent nombre d'évolutions en cours, et la remise en ordre sous Dioclétien et après consacrent de nouveaux usages, relançant un cycle d'adapations plus ordonnées (qui continuera en orient jusqu'au VIIIème siècle, avant une nouvelle "révolution" changeant le modèle plus fondamentalement, même si le changement sera plus continu et moins brutal si on ne regarde que les unités élémentaires). Les proportions de types d'unités changent, les spécialisations se poussent, les mix opérationnels diffèrent, les modes opérationnels à tous niveaux changent.... De la même façon, le modèle macédonien d'Alexandre avait évolué (pas toujours en bien) dans les divers royaumes des Diadoques et ailleurs (essaimage en Méditerranée: le modèle carthaginois en était un avatar), si bien que les armées grecques qui rencontrèrent Rome n'avaient rien à voir, malgré les apparences, avec l'armée de Philippe et Alexandre de Macédoine. Elles eurent cependant l'inconvénient d'évoluer trop en vase clos, se confrontant entre elles et n'évoluant que pour se faire concurrence (l'exemple caricatural vient avec l'allongement constant de la sarisse).

Modifié par Tancrède
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Pour l'aptitude à manoeuvrer, sur un docu sur arte (ou la cinq, je sais plus) il disait que l'armée romaine perd peu à peu son art de la manoeuvre et recherchait de plus en plus le choc frontal (surtout au V°s), et ce, pour différentes raisons. J'avoue ne pas trop savoir, (Tancrède va pouvoir nous en dire plus j'espère ;) ).

Faudrait peut-être switcher sur les sujets ad hoc. Faites-y un post (reprenez vos hypothèses, propositions, remarques et questions) pour les relancer si ça vous intéresse.... Je répondrais. Mais juste pour la forme, faites-le, histoire de pas avoir l'impression d'être (quasiment) le seul à y poster :'( .

Ah voilà j'ai retrouvé le docu en question et lancer Tancrède (ou d'autres) sur la sujet armée romaine tardive :

 

http://www.dailymotion.com/video/xt310b_la-chute-de-rome-part-1-sur-5_tech

 

(désolé, je suis pas doué, j'arrive pas à insérer directement la vidéo dans le post :-[ )

 

Ce dont je parlais: vers 8'30....

 

L'explication me convainc à moitié: c'est rare d'avoir une armée sans réelle stratégie.

Mais vu sous un autre angle, est-ce vraiment une armée avec de tels soldats et chefs "romains"?

 

 

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Donc l'armure lamellaire pourrait être comparée aux tenues lourdes que tercios et piquiers suisses ainsi que mercenaires allemands utilisaient en première et seconde ligne de leurs formations de piques.

 

Les "javelots"/frondeurs/plumbatae ayant un rôle de mousquetaire tandis que le reste de l'infanterie serait moins blindé mais contribuerait à la masse.

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Ce n'est qu'une hypothèse de travail, mais en regardant l'histoire de l'évolution de l'armée romaine sur une longue durée, ça a une bonne logique pour moi, en considérant les logiques qui semblent revenir sans arrêt, constat de nécessités immuables et de progrès certains. On connaît plusieurs stades de l'armée romaine à quelques époques, donc y retracer une continuité incarnant l'évolution permanente, mais lente, semble possible ainsi.

Cependant je ne parlerais pas d'une infanterie "moins blindée" juste là pour faire masse. Quand la spécialisation de certains morceaux grimpe (tireurs et "ultra lourds", dans ce cas), leur rôle est en fait crucial, et ce d'autant plus que, si j'examine par exemple la centurie d'infanterie de ligne de l'armée tardive, les super lourds n'y représentent que 30 à 35% de l'effectif. S'il n'y avait qu'eux et les tireurs qui avaient un rôle actif, ce serait léger, pour des unités qui, individuellement, ne sont pas énormes (vraisemblablement 10 de ces "centuries interarmes" dans chacun de ces "équivalents cohortes", ou "légion tardive"); ça ferait bien peu de fantassin stricto censu dans des unités.... D'infanterie (de contact). Ce sont donc bien des fantassins de contact, avec le même armement et bouclier que les lourds de devant, mais moins de blindage (pas de jambières ou de manica sur le bras, pas d'armure lamellaire. Leur rôle dans la centurie en formation en ligne est plus d'appui (tenir la formation, pousser/soutenir ceux de devant quand il faut presser, lancer javelines et plumbatae, veiller aux intervalles -fondamental-....), mais ils en ont d'autre: leur moindre encombrement et l'absence de lance d'arrêt (qui est dans le paquetage mais peu souvent utilisée) leur donne un rôle d'assaut/contre attaque et/ou de manoeuvre qui correspond à un mode opératoire "traditionnel" du légionnaire (fondé sur le couple d'une arme de jet et d'une de mêlée avec une tactique d'avance "coup de poing"). L'extrême importance des intervalles dans la tactique romaine fait que l'espace entre chaque homme dans la plupart des formations est aussi un couloir de passage entre chaque file, soit pour interchanger la place avec l'unité derrière la centurie (en la laissant passer ou en reculant soi-même: les lignes se "passent au travers"), soit pour que les rangs de fantassins "médians" (appelons-les ainsi) passent devant, ou les "légers"/tireurs (pour un surcroît de portée avant le contact). Ces médians sont aussi plus indiqués pour la poursuite (à courte portée) d'un adversaire qui craque.

 

C'est vraiment là pour moi l'évolution naturelle des cohortes d'infanterie, avec des prémisses qu'on peut deviner dès l'époque augustéenne, et on le verrait aussi à mon avis dès César si on avait des visions détaillées de sa pratique du combat d'infanterie qui change beaucoup à sa période, délaissant graduellement le combat en ligne monolithique au profit de fronts raccourcis et densifiés, avec une part croissante de cohortes retirées à l'arrière en réserve pour renforcer la ligne qui craque, mais surtout partir manoeuvrer sur les flancs (ce qui l'oppose à un Pompée plus "traditionnel"). César employait ainsi moins d'unités pour sa ligne (alors qu'une légion était à la base une organisation/optimisation d'un dispositif en ligne, ce pourquoi elle avait 10 cohortes) et plus pour la manoeuvre (et on ne peut pas faire du combat de manoeuvre avec 10 sous ensembles).

Et le combat romain montre que, pour garantir de tenir dans le temps, certes le relai des rangs au sein d'une centurie peut être important, mais il est plus commode de faire se relayer les centuries d'une cohorte, et de faire se relayer les cohortes. Du coup, si cet usage est prioritaire, avoir une centurie de soldats identiques sur trop de profondeur est un gâchis de ressource, et il vaut mieux introduire un usage différencié avec des appuis internes, à ce niveau, un renforcement des avantages des premiers rangs, et le maintien d'une troisème portion plus mobile et polyvalente.

C'est ce que les Macédoniens avaient commencé à faire sous Alexandre, avec les Hypaspistes (qui pouvaient ainsi faire les phalangistes ET jouer les "légers" et "médians"), mais à l'échelon de groupements plus grands, ce que les Romains faisaient aussi, à haut échelon, avec la division des légions en Hastati/princeps, vélites et triaires, qui semblent recouper les fonctions essentielles.

Du coup, cette partie "médiane" des unités d'infanterie (ni ultra blindés ni tireurs -cad avec frondes ou arcs/arbalètes), ce sont des fantassins "type". La centurie tardive montre que l'alignement standard de l'ordre de bataille, c'est 2 rangs de 10 "surblindés" devant (et un tout à l'arrière en réserve), 2 rangs de 10 "médians" (donc moins nombreux) et un rang de frondeurs. Sur les flancs immédiats des surblindés, un rang de 3 archers lourds de chaque côté ("lourds" veut dire qu'ils sont bien protégés), sur ceux des médians, 2 rangs de 3 archers "types" (protection normale), et 2 rangs de 3 arbalêtriers sur les flancs des frondeurs. On ajoute à à ça les cadres principaux (les 6 des lignes) que sont les décanus, et l'encadrement général de la centurie (centurion, porte enseigne....).

 

Si je les comparais à un modèle ultérieur, ces fantassins médians dans l'ordre de bataille tel qu'il évolue me font penser aux hallebardiers des carrés suisses et des unités "pike and shot" ultérieures, qui demeurent tant que la pique est majoritaire (cad jusqu'à la 2ème moitié du XVIème siècle) et que le mode combat de ces unités (qui fait de plus en plus place au feu avant qu'il ne devienne le mode d'action principal) reste centré sur l'usage offensif et défensif de cette arme maniée en paquets denses, avec effectivement une différenciation entre les piquiers de front, plus lourdement protégés, et ceux "de l'intérieur" plus légers. Les Hallebardiers, tant qu'on est donc dans le cadre d'unités "pike and shot" reposant sur le choc d'infanterie de contact, sont le complément "rapproché" des tireurs: ils chargent à courte distance quand la ligne adverse a un "trou" momentané, flanquent s'ils le peuvent, ou chargent/accrochent la cavalerie passant sur le côté ou arrêtée brutalement en face par les piques. Pour ce faire, ils sont aux aguets, en petits paquets derrière les rangs de piquiers, qui sont suffisamment espacés (ou peuvent faire des passages) pour qu'ils avancent et reviennent eventuellement se planquer à l'intérieur. C'est méchant la hallebarde, quand c'est utilisé en groupe. Mais c'est le maintien, encore au XVIème siècle, d'une infanterie "d'assaut" par rapport à l'infanterie "de ligne" que sont les piquiers: pour ces rôles, les Suisses et Lansquenets avaient maintenu un certain temps aussi des épéistes lourds, et les Espagnols des épéistes avec boucliers (mais ça a pas duré). Ca s'estompe puis disparaît avec la prédominance du feu, et il est plus dur ensuite de faire la différence entre les fonctions "arrêt", "tenue de la ligne" et "assaut" quand les fantassins sont tous des mousquetaires avec baïonnette.... Jusqu'à ce que très vite se recréent des fonctions au mode opératoire spécifique et donc des sous-unités organiques (voltigeurs, grenadiers, chasseurs....), et des corps différenciés dans des unités propres (chasseurs/Jaegers, grenadiers d'assaut, compagnies franches.... Certains noms sont identiques, mais les fonctions ne sont pas les mêmes que quand ce sont des sous-unités dans des bataillons de ligne). Pareil que pour l'armée romaine, on constate le besoin de différents "métiers", au sein des unités essentielles ET en dehors d'elles, donc de sous-unités organiques et d'unités à part, avec, quand on reconnaît leur spécificité, des matériels, organisations, mentalités, commandements.... Différents.

 

 

Pour la note: les plumbatae, qu'on peut voir, si on suit mon mode de raisonnement (pas forcément évident si je délire de trop), comme le plus bas "échelon" de la capacité de tir de l'armée romaine, ne sont pas allouées à des tireurs spécialisés, ni en unités organiques ni en unités séparées, mais sont l'apanage des fantassins de contact, étant portées accrochées à l'intérieur du bouclier (de 3 à 5 en moyenne). Ce sont des dards plombés de 30 à 60, voire 70cm de long, avec une pointe barbelée, un empennage et un lest entre le centre et la pointe (même principe que le pilum: tomber tête en avant, avec impact). On les retrouverait donc chez les fantassins blindés et les "médians" (qui eux utilisent aussi des javelots).

Modifié par Tancrède
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C'est etonnant cette histoire d'armure

 

J'ai toujours compris que les lorica hamata et squamata etaient plus longues, plus compliquées et donc plus chères à produire que les segmentata

 

De mémoire (reconstitution d'aujourd'hui donc sans les techniques antiques et le savoir faire) fabriquer un cote de maille prend entre 1200 et 1600 heures de travail (soit une année entière) parcequ'il faut associer les anneaux un à un

 

Par contre les 2 premières sont probablement plus durables dans le sens ou lorsqu'elles sont endommagées, il suffit de réparer l'accroc, pas de démonter l'armure entiere (contrairement à la segmentata qui est fixées sur un ensemble en cuir si je me rappelle bien)

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Il y a plusieurs modèle de segmentata, mais la plupart partagent, à divers degrés, une fragilité dans le maintien: les lamelles elles-mêmes sont une bonne protection (surtout aux chevauchements) et l'emboîtage offre un bon niveau de souplesse pour ce niveau de protection, mais les crochets qui tiennent l'armure ont l'air d'avoir été très fragiles et de péter très souvent (la tension du métal aidant aussi beaucoup), et ce d'autant plus que la durabilité était bouffée par l'usure du cuir en dessous (par la sueur, les mouvements). Aussi, cette armure peut rapidement être un four, comparé à la hamata.

Mais bref, la segmentata demande beaucoup plus de maintenance (et possiblement une plus complexe) et de soin.

De mémoire (reconstitution d'aujourd'hui donc sans les techniques antiques et le savoir faire) fabriquer un cote de maille prend entre 1200 et 1600 heures de travail (soit une année entière) parcequ'il faut associer les anneaux un à un

 

Peut-être la large diffusion de cette armure allait-elle avec une large diffusion de ces techniques: peut-être relativement complexe (dans les mêmes eaux que la segmentata?) à construire si on considère l'acte technique dans l'absolu, mais c'était un savoir-faire vraisemblablement largement disponible dans le monde romain, donc il y avait une capacité importante de production existante, là où la segmentata était un savoir-faire nouveau, possiblement plus poussé, mais en tout cas nettement moins répandu. Là, on est dans une analyse économique.

Sinon, pour le temps passé à une hamata: ça dépend aussi de la densité des anneaux. Tu peux faire des cotes de mailles aux anneaux très serrés, ou d'autres nettement moins, ou des cotes aux anneaux plus ou moins grands; ça peut varier, pour une couverture de taille égale, du simple au double, voire plus.

 

La squamata, en revanche, semble la moins complexe des 3 à faire, et je crois la moins chère.

 

 

Sinon, petit point vocable:

Ca peut devenir confondant de manier les termes "super lourds/blindés", "lourds/standard","médians", "légers".... Le problème est que "fantassin lourd" reflète plusieurs réalités différentes au fil de l'histoire romaine, selon les périodes. Ainsi, le légionnaire "standard" de la période qui va de Marius au Ier siècle, est considéré comme un fantassin lourd, alors même qu'au sein de ses rangs semble donc commencer une différenciation entre ce "lourd" qui devient "médian", et les "lourd" qu'on équipe plus (notamment avec la segmentata, si c'est bien ce qui se passe) mais surtout qu'on aiguille plus vers un rôle d'arrêt, là où le "médian" (en fait ce qui était le légionnaire "standard") prend corollairement un rôle plus versatile fondé sur l'assaut, l'appui et la manoeuvre. Les "légers" avant Marius étaient les vélites et frondeurs, sans aucun blindage, puis le terme recouvre ensuite une réalité plus variée, couvrant aussi bien ces lanceurs et tireurs que des fantassins de contact opérant sur les flancs de l'infanterie lourde et en avant (et ils étaient ou non bien protégés). A l'époque tardive, les "lourds" sont les "surblindés", les légers sont les fantassins de contact standard (avec pourtant bouclier et cote de maille ou hamata), et les gens pas ou peu protégés et reposant sur le tir et la poursuite sont qualifiés de tireurs (ou de noms spécifiques à leur arme principale), alors même que certains d'entre eux sont des "lourds" (archers cuirassés, faits pour la première ligne). Très confondant, mais on voit que le niveau de blindage est le critère principal définissant lourds et légers (reflétant la distance à la première ligne) sur la fin de la période, et moins le métier principal.

Modifié par Tancrède
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 mais les crochets qui tiennent l'armure ont l'air d'avoir été très fragiles et de péter très souvent (la tension du métal aidant aussi beaucoup), et ce d'autant plus que la durabilité était bouffée par l'usure du cuir en dessous (par la sueur, les mouvements). Aussi, cette armure peut rapidement être un four, comparé à la hamata.

Mais bref, la segmentata demande beaucoup plus de maintenance (et possiblement une plus complexe) et de soin.

Un fragment de segmentata a été retouvée dans des fouilles en Palestine,  ce qui semblerait suggérer une utilisation de celle-ci, dans des pays chauds.

 

De plus, un intervenant, sur un Forum, orienté reconstitution historique / archéologie experimentale, diy qu'en plein "cagnard", la chaleur n'est pas trop ressentie sous la Segmentata (armure non hermétique, tunique et cuir isolant bien la peau du fer).

 

Ce même site confirmerait la "fragilité" des crochets qui cassent... (mais aussi de "nombreux" crochets découverts dans des fouilles)

 http://www.leg8.org/viewtopic.php?f=7&t=794&start=30

 

Tout ça est à prendre avec de grosse pincettes et ne conclus rein en la matière !.

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De plus, un intervenant, sur un Forum, orienté reconstitution historique / archéologie experimentale, diy qu'en plein "cagnard", la chaleur n'est pas trop ressentie sous la Segmentata (armure non hermétique, tunique et cuir isolant bien la peau du fer).

 

J'ai vu le contraire écrit dans plusieurs livres, et aussi chez quelques intervenants en reconstitution: le cagnard du MO, pas seulement pendant un petit moment, mais plus longtemps, c'est autre chose que la Provence? Ou ton intervenant était du coin? Un truc sûr est que ça faisait suer et que beaucoup de sources diverses semblent attester qu'une abondante sueur (surtout une de quelqu'un "en guerre": plus acide via le stress) détériorerait assez vite le cuir qui tient en fait la segmentata. C'est terrible quand on en vient à se pencher dans des détails de ce genre pour trouver des conclusions plus "grandes" :happy: . On va bientôt en être à se demander si les ptéruges étaient pratiques pour pisser.

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 C'est terrible quand on en vient à se pencher dans des détails de ce genre pour trouver des conclusions plus "grandes"

C'est pour cela que je dit qu'il ne faut rien en conclure !

 

 le cagnard du MO, pas seulement pendant un petit moment, mais plus longtemps, c'est autre chose que la Provence? Ou ton intervenant était du coin? Un truc sûr est que ça faisait suer et que beaucoup de sources diverses semblent attester qu'une abondante sueur (surtout une de quelqu'un "en guerre": plus acide via le stress) détériorerait assez vite le cuir qui tient en fait la segmentata.

 

Je ne sais pas si "mon" intervenant (que je ne connais pas, je précise) est du coin, il semble faire des reconstitutions/manifestation historique (comme il y en a pour Waterloo,...)

 

 Le cagnard du MO ??? Palestine= climat mediterrannéen= températures relativement modérées = climat "standard" de l'Empire romain.... où est le problème !?. On parle pas du désert du Sahara là !. Sauf quelques fournaises locales, en été, ça dépasse rarement les 35° max, soit pas pire que dans la vallée du Rhénane ou l'Italie à la même periode, oui bien sûr ils devaient suer à grosse gouttes, (user leurs vêtements...), m'enfin, ils étaient entrainés, à ça aussi !. Les croisés y combattaient aussi dans le coin, et avec des armures de la même catégorie (voir plus lourdes encore !), non !?.

 Toi même tu suggère que les romains ne portait pas cette armure en toutes circonstances (ce qui me parait, moi aussi, logique)...

 

Bon, la segmentata, c'est bien sympa, mais je compte pas y passer l'année dessus !. Je vais donc voir ailleur sur le forum, j'ai de la lecture en retard !!!

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Les croisés y combattaient aussi dans le coin, et avec des armures de la même catégorie (voir plus lourdes encore !), non !?.

 

Ils se sont allégés en général, et sinon, l'armure, c'était de la maille à cette époque (avec un gambison, soit la même chose que les Romains), plus un heaume ou un calot de métal sur un haubert, et même là, ça leur a posé problème (voire le cas de Hattin où on reporte que l'eau bouillait sur le métal).

Toi même tu suggère que les romains ne portait pas cette armure en toutes circonstances (ce qui me parait, moi aussi, logique)...

 

Oui, c'est comme FELIN: les Romains avaient un paquetage théorique et s'adaptaient, mais mes remarques sur la segmentata renvoyaient plutôt au fait que beaucoup ne l'avaient pas et qu'elle correspondait plutôt à une partie des troupes destinées à un rôle donné (la fonction d'arrêt et de tenue des premiers rangs de la ligne de bataille), dans le cadre d'une évolution plus "néo-phalangiste", avec l'usage de la hasta qui revient de façon plus générique.

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Les croisés y combattaient aussi dans le coin, et avec des armures de la même catégorie (voir plus lourdes encore !), non !?.

 

 

Et ce n'était pas de tarte. Hattin, comme dit plus haut, est le "cas d'école" d'une bataille remportée (côté musulman, tranquillement adossé au lac de Tibériade, même si ça a faillit craquer à un moment) sur la foi d'une erreur de calcul logistique (de Guy de Lusignan, notamment). Les croisés ont a plusieurs reprises soufferts de la soif lors de ces campagnes et l'importance des lignes logistiques ainsi que des stocks se voit à chaque campagne.

Modifié par Chronos
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  • 9 years later...

Un ''podcast'' de 40 minutes sur l'armée romaine est disponible ici depuis le 6 février 2023 :

L’armée romaine a été le fer de lance de l’édification de l’Empire. Les grands généraux s’y succèdent, de César à Flavius Josèphe elle a édifié la pax romana. Le général Nicolas Richoux revient sur l’organisation de cette armée et ce que Rome peut apprendre encore aujourd’hui aux armées contemporaines.

Émission présentée par Jean-Baptiste Noé. Le général Nicolas Richoux est l’auteur de L’armée romaine. Première armée moderne, aux éditions Pierre de Taillac

https://www.revueconflits.com/podcast-rome-une-armee-au-service-de-lempire-gal-nicolas-richoux/

Fiche sur son essai :

https://editionspierredetaillac.com/products/larmee-romaine-premiere-armee-moderne

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  • 3 weeks later...

On a trouvé la fiche de paie d'un légionnaire a Massada :) On faisait payé l'équipement personnel assez cher....

https://www.lefigaro.fr/culture/patrimoine/le-bulletin-de-salaire-d-un-soldat-romain-decouvert-a-la-forteresse-de-massada-20230225

Le papyrus fragmentaire indique ainsi, en latin, qu'une très large partie des deux tiers de la solde annuelle d'un soldat anonyme est passée dans l'acquisition de bottes, d'une tunique de lin ainsi que de fourrage pour son cheval. Ce document, l'un des quatorze textes mis au jour à Massada, serait seulement le troisième bulletin de salaire connu du monde romain qui puisse être attribué à un légionnaire,...

le détail des lignes du bulletin de Massada n'a cependant pas été communiqué par les papyrologues israéliens. Fixée à 225 deniers par an pendant la plus grande partie du Ier siècle, la solde du simple légionnaire pouvait grimper jusqu'au triple selon les charges dont il pouvait être investi. Un garde prétorien, corps d'élite de l'armée romaine, touchait pour sa part 730 deniers par an. Les uns comme les autres pouvaient en outre toucher des gratifications.

 

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  • 2 months later...

Je vous conseille les vid de ce sympathique anglais qui fait un gros boulot de reconstitution:








Ici un test assez impressionnant sur l'efficacité des Pilum.

Moi, je n'imaginais pas le machin capable de perforations aussi importantes ( dans ma tête, c'était une arme lente donc avec assez peu d'énergie cinétique mais j'avais sans doute sous estimé la masse par rapport à une flèche ainsi que le design du truc qui a bien y réfléchir fait un peu penser à... un obus flèche! Si, si, comparaison osée, mais j'ai pensé à ça ).

Précisons que le gars est assez rigoureux sur les critères de ses tests et essaie dans toute la mesure du possible de se rapprocher au mieux des conditions d'époque ( ce qui est bien entendu impossible à faire totalement, mais ça donne une idée ).

@Niafron J'ai fait une erreur de manipulation en rajoutant un pluriel et le lien YouTube s'est effacé... Collectionneur

 

Edit: No problemo, voici:

 

 

Modifié par Niafron
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