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La bataille de Dien Bien Phu


Charles XII
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La bataille de Diên Biên Phu

Les forces en présence

A la fin de la conférence de Berlin, le 18 février 1954, la tenue d'une conférence sur la Corée et l'Indochine est annoncée pour le mois d'avril à Genève. Le Viêt minh cherche alors à remporter une victoire de prestige et bénéficie d'un soutien accru du bloc communiste. Le maintien du camp retranché français à Dien Bien Phu offre à Giap une occasion qu'il ne va pas manquer. Il renonce à son offensive dans le delta du Tonkin et lance les divisions 304 et 351 dans la bataille.

Les effectifs Viet minh atteignent 28 bataillons soit 51.000 hommes bien équipés en armes lourdes : 24 pièces de 105, 15 de 75, 20 mortiers lourds de 120, 237 mortiers de 60 ou de 81 et un grand nombre de canons sans recul. 20 pièces de 37 mm antiaériennes et une centaine de mitrailleuses de 12,7 mm assurent la défense antiaérienne. Le ravitaillement provient de la base arrière de Tung Giao approvisionnée depuis la Chine par 600 à 700 camions Molotova. Le reste du trajet est assuré par 75 000 porteurs. Ceux-ci transportent 25 kilos à raison de 25 kilomètres par jour sur le plat et de 15 kilomètres en montagne. Avec l'aide de bicyclettes spécialement aménagées chaque coolie peut même emporter 75 kilos supplémentaires.

Le haut commandement français en Indochine prend connaissance à la fin du mois de février de l'effort engagé par le Viet minh. L'évacuation de la garnison vers le Laos ou la constitution de puissantes colonnes de secours sont envisagées. Mais, une nouvelle fois, la Chu Luc est sous-estimée par des Français qui souhaitent la bataille pour porter un coup décisif à l'ennemi.

Situé dans une large cuvette de 16 kilomètres de long sur 9 de large et malgré des crête environnantes culminant entre 700 et 1.200 mètres, le camp retranché de Diên Biên Phu semble imprenable. La garnison compte maintenant 12 bataillons. 24 pièces de 105, 4 de 155 et 20 mortiers de 120 doivent assurer la contrebatterie. Enfin, 10 chars moyens Chaffee ont été démontés, aérotransportés puis remontés sur place par la 2e compagnie de réparation d'engins blindés de la Légion étrangère. Avec la 5e compagnie mobile de réparation du matériel de la Légion étrangère, elle participera avec efficacité à leur entretien pendant toute la bataille.

Sur les 10.814 hommes présents dans le camp retranché, 2.969 appartiennent à la Légion étrangère : le 3e bataillon de la 13e DBLE occupe le PA Béatrice, détaché au nord-est ; son 1er bataillon est sur Claudine couvrant le flanc ouest du PC ; le 1er bataillon du 2e REI protège la piste d'aviation sur le même flanc avec les 5 PA Huguette ; le 3e bataillon du 3e REI se trouve au grand PA situé 4 kilomètres au sud de la position centrale, Isabelle ; le 1er BEP est placé en réserve de contre-attaque ; enfin, les 1ère et 2e compagnies de mortiers mixtes de la Légion étrangère (CMMLE) et la 1ère CEPML sont en soutien autour de la position centrale ou dispersées au profit des unités. 3 bataillons de tirailleurs algériens, 1 de tirailleurs marocains, 2 bataillons thaï et le 8e choc constituent le reste de la garnison.

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Premiers succès Viêt Minh

Le 13 mars 1954 à 17 heures 15, l'ensemble du camp retranché subit un barrage d'artillerie d'une violence inouïe. Les pièces d'artillerie et les postes de commandement français sont particulièrement visés. Toutes les mesures de contrebatterie apparaissent inefficaces. Au pied de Dominique 2, les servants de mortiers lourds de 120 de la Légion comptent 11 tués et de nombreux blessés.

Sur Béatrice, le 3e bataillon de la 13e DBLE disparaît sous un déluge de feu. Les positions des légionnaires sont bouleversées et les pertes augmentent rapidement. Vers 18 heures, un obus touche de plein fouet le PC du bataillon, tuant le commandant Pégot et son adjoint, le capitaine Pardi. Au même moment, le lieutenant Turpin est grièvement blessé au PC de la 11e compagnie. Puis c'est le tour du lieutenant Carrière de tomber à la tête de la 9e compagnie, fauché par une rafale de mitrailleuse. Au bout de deux heures de bombardement, l'assaut commence avec deux régiments de la division 312 opposés à deux compagnies. Réduite à 25 hommes, la 11e compagnie reçoit l'ordre de se replier sur la position de la 10e compagnie et de la CCB, à l'est du thalweg qui traverse la position. Le capitaine Nicolas commande désormais le bataillon. Il ne reste plus autour de lui que une centaine d'hommes valides. Vers minuit, un message radio tronqué fait croire que la position est tombée. Malgré des pertes énormes, les bo doïs poursuivent leur attaque, poussés par leurs officiers et les commissaires politiques. Vers 3 heures, ils sont maîtres de la position.

Dans la matinée, le sergent-chef Bleyer, le sergent Kubiak et 64 survivants de la 9e compagnie rejoignent les lignes françaises après une ultime percée vers minuit. Les Viets vont rendre 14 blessés graves dont le lieutenant Turpin, évacué le jour même par avion. Le 3e bataillon, vétéran de tant de campagnes glorieuses a disparu sans céder sous l'assaut des Viets.

La 13e DBLE est d'autant plus éprouvée qu'elle perd son troisième commandant au feu après Amilakvari et de Sairigné : un obus est en effet tombé sur le PC du colonel Gaucher vers à 19 heures 45. Les lieutenants Bailly et Bretteville sont également tués, le commandant Martinelli gravement blessé. Légèrement touché, le commandant Vadot prend le commandement.

Les bombardements se poursuivent toute la journée. A 14 heures, 3 chasseurs-bombardiers Bearcats évacuent la base. Les 6 autres et un hélicoptère sont détruits sur la piste d'atterrissage. Désormais, l'appui aérien va provenir des bases du delta, distantes de 300 kilomètres. Les appareils de transports commencent également à subir des pertes sur la piste d'atterrissage alors que la défense antiaérienne devient chaque jour plus dense.

Le deuxième objectif des Viets est le PA Gabrielle, tenu par le 5e bataillon du 7e RTA. Si le 3e bataillon de la 13e DBLE était en sous-effectif avec des compagnie de moins d'une centaine d'hommes commandées par un unique officier, ce n'est pas le cas des tirailleurs, renforcés par la section de mortiers lourds de la Légion du lieutenant Clerget. Par ailleurs, le bois ne manquait pas aux alentours de la position dont les blockhaus sont réputés être les plus solides du camp retranché. Elle est d'ailleurs surnommée le "torpilleur".

Après deux heures de préparation les Viets montent à l'assaut sans succès. En quelques heures la division 308 est saignée à blanc. Vers 3 heures, le régiment 165 de la division 312, qui n'a pas été engagé sur Béatrice, prend la relève. Lentement les défenseurs sont submergés. Le colonel de Castries promet une contre-attaque à l'aube.

Le 1er BEP fournit deux compagnies, la 3e du lieutenant Martin et la 4e du lieutenant Domigo. Arrivé en renfort le jour même, le 5e BPVN doit également participer à l'opération mais il lui faut parcourir un kilomètre de nuit sur un terrain inconnu pour rejoindre la base de départ. Les légionnaires bousculent le bataillon viet placé en bouchon avec l'aide des chars. Vers 8 heures, ils ont presque atteint Gabrielle quand ils aperçoivent les tirailleurs des 2e et 4e compagnies qui se replient. Le capitaine Gendre a en effet ordonné l'évacuation en captant un message ambiguë adressé aux légionnaires. Il a cru que tout espoir était perdu. Pourtant, les derniers défenseurs vont résister jusqu'à 13 heures.

Mal coordonnée au sommet, la contre-attaque a échouée alors que tout restait possible sur le terrain. La panique règne dans le camp retranché. Les chefs en place semblent incapable de reprendre la situation en main. Seul le lieutenant-colonel Langlais, le patron des parachutistes, conserve son sang-froid.

Pourtant, Giap renonce provisoirement à l'attaque d'Anne-Marie, son troisième objectif. La division 308 a perdu 1.500 tués dans l'attaque et la 312 plus de 500. Les blessés se comptent par milliers. La veille, la prise de Gabrielle avait été presque aussi coûteuse. Les tirs d'artillerie restent néanmoins violents. La contrebatterie française s'avère inefficace contre les pièces viets hissées à flanc de montagne, bien enterrées et bien dissimulées.

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L'espoir renaît

Le 16 mars au matin, le bataillon thaï qui tient Anne-Marie s'évanouit dans la nature. Le jour même, le 6e BPC saute sur Diên Biên Phu. Avec l'arrivée du commandant Bigeard, le lieutenant-colonel Langlais va trouver un adjoint solide. Avec eux, la garnison se sent de nouveau commandée. Le 24, Langlais assure d'ailleurs le commandement effectif du camp tandis que Bigeard prend celui du groupement aéroporté.

Tous profitent de ces jours d'accalmie pour s'enterrer un peu plus. Chaque nuit, les Viets étendent un réseau de tranchées qui enserrent de plus en plus près les PA. Le jour, les défenseurs sortent pour les reboucher sous le feu de l'ennemi.

Les ouvertures de route entre Isabelle et le reste du camp retranché deviennent de plus en plus difficile. Le 22 mars, les légionnaires du BEP se heurtent aux Viets du régiment 57. Avec l'aide d'éléments de la garnison d'Isabelle et des 10 chars Chaffee, pour la première et dernière fois employés tous ensembles, l'ennemi est repoussé perdant 175 tués dénombrés et 41 armes dont 10 lourdes. Le BEP perd dans l'affaire 9 tués dont 3 lieutenants, un disparu et 72 blessés. Le 25 mars, le 1er BEP perd 83 tués et blessés. Il lui a fallut quatre heures de durs combat pour repousser le bataillon viet installé en bouchon au village de Ban Kho Laï.

Le dimanche 28 mars, Bigeard dirige une opération pour faire taire les batteries antiaériennes qui coûtent si cher à l'aviation française. Le 6e BPC et le 8e choc sont en première ligne, le BEP en réserve. Les légionnaires du 2e REI doivent servir de guides. Toute l'artillerie du camp, l'aviation et les blindés soutiennent l'attaque qui est un succès. Le moral du camp retranché remonte en flèche.

Nouvelle offensive Viêt-Minh

Langlais met l'accalmie à profit pour faire le tour des positions françaises. Il découvre avec surprise les faiblesses du 3e bataillon du 3e RTA et du 1er bataillon du 4e RTM. Les retranchements sont insuffisants, les unités sont à bout de souffle, mal équipées, sous-encadrées et disposent d'effectifs incomplets. Le 5e BPVN et le 1er BEP doivent fournir chacun une compagnie pour étayer ces positions. La relève est fixée au 30 mars vers 18 heures. Vers 17 heures, les Dominique et les Eliane sont noyées sous un déluge de feu. Apercevant les parachutistes qui gravissent les pentes, les tirailleurs algériens de la 11e compagnie du lieutenant Chataigner abandonnent Dominique 1. Sous le commandement du lieutenant Poirier, les 40 légionnaires de la 2e compagnie de mortiers mixtes de la Légion étrangère (2e CMMLE), positionnés sur Dominique 1, résistent seuls avec leurs armes individuelles. Puis ils sont rejoints par les parachutistes Vietnamiens de la 4e compagnie du capitaine Martinais qui ont rallié une trentaine de tirailleurs. Le régiment 165 va perdre 400 tués et probablement le double blessés en deux heures avant d'emporter la décision. Seuls quelques blessés réussiront à rejoindre les lignes françaises.

Sur Dominique 2, les 9e et 10e compagnies de tirailleurs algériens succombent rapidement. Il faudra les tirs à bout pourtant des 105 du lieutenant Brunebroucke en appui de la 12e compagnie pour stopper leur ruée vers les positions centrales du camp retranché.

Eliane 2

Sur Eliane 2, la 1ère compagnie du 1er BEP réussit à rallier les tirailleurs marocains et fait face aux 3.000 bo doïs du régiment 95 montent à l'assaut. A minuit, la position tient encore alors que le commandement la croit perdue. Le lieutenant Luciani intercepte un message radio ordonnant un tir sur ses positions. Les canons et les mortiers français vont désormais encager son périmètre et ravager les rangs ennemis. Ravitaillés en munitions par les aviateurs du capitaine Charnod transformés en porteurs, les légionnaires et les Marocains rejettent à plusieurs reprises les Viets hors de leurs lignes. Vers deux heures du matin, la situation devient désespérée car l'ennemi semble prêt à tous les sacrifices pour prendre Eliane 2.

Puis une compagnie du 6e BPC au nord et la 2e compagnie du BEP au sud s'avancent pour contre-attaquer. Devant la violence de l'intervention, les Viets finissent par décrocher. Le lendemain, une compagnie du 8e choc reprend Dominique 2 a un bataillon viet. Une compagnie du 6e BPC fait de même sur Eliane 1. Mais vers 15 heures, les restes de ces deux unités doivent abandonner leurs positions faute de réserves.

Sur Eliane 2 les combats restent toujours aussi acharnés. Bigeard refuse d'évacuer la position. Il fait confiance au 1er BEP et au 1er bataillon de la 13e DBLE pour tenir la position. Les Viets continuent de monter à l'assaut par un ravin au sud-est, les Champs-Elysées mais ils sont taillés en pièces. Vers 8 heures du soir le capitaine Russeil est déchiqueté par un obus de mortier. Le radio Guenzi traîne alors le corps de son chef vers l'arrière puis retourne au combat. Ses camarades de la 13, des parachutistes du BEP ou du BPVN, des tirailleurs marocains et Thaï continuent à combattre par petits groupes composites autour d'un chef ou d'une arme lourde. La section lourde du 8e choc puis 3 chars Chaffee rejoignent les défenseurs. Le Bazeille est détruit par un bazooka mais son équipage peut l'évacuer.

Le 1er avril les combats se poursuivent sur Eliane 2 tandis que les premiers éléments du 2e bataillon du 1er RCP sautent enfin en renfort sur Diên Biên Phu. Dans la soirée, la division 316 engage un régiment frais, le 174. Rien n'y fait. Les Viets insistent encore. Le 4 avril à 5 heures du matin ils s'avouent enfin vaincus après 107 heures de combats. 1.500 Viets et 300 Français sont morts dans cette terrible boucherie qui rappelle les pires heures de la Grande Guerre.

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Les Huguettes

Le 3 avril au matin, les Viets prennent Huguette 7 mais la division 308 est saignée à blanc. Dans la soirée Giap doit engager la division 312 pour attaquer l'objectif suivant : Huguette 6. La position protège le nord de la piste d'aviation, sa perte réduirait considérablement la zone de parachutage des renforts et des approvisionnements. Le lieutenant Rastouil dispose de 86 légionnaires, rescapés du 3e bataillon de la 13e DBLE sur Béatrice et de volontaires de toutes les compagnies du 1er bataillon du 2e REI. Submergés, les défenseurs s'accrochent pourtant désespérément au terrain.

De Castries et Langlais envoient les quelques réserves qu'il peuvent détourner de la bataille qui continue à faire rage sur Eliane 2. Appuyée par deux chars, la compagnie Desmons du 8e choc réussit à prendre à revers les assaillants surpris par cette manouvre nocturne. Au même moment un tir perdu détruit le PC du régiment 209 qui coordonnait les opérations. Les assaillants refluent. Dans la nuit, le reste du 1er bataillon du 2e RCP saute en renfort.

La nuit suivante, la division 316 reprend son attaque sur Huguette 6 où la 1ère compagnie du 2e REI a pris la relève. Envoyée en renfort, la compagnie de marche du 1er bataillon de la 13e DBLE du lieutenant Viard est encerclée avec la garnison. Envoyée à la rescousse, la compagnie Bailly du 8e choc est bloquée par un bataillon entier malgré l'appui de deux chars. Langlais demande alors à Bréchignac d'envoyer une de ses compagnies en renfort. Ignorant du terrain, les derniers arrivés décident de charger à travers la piste d'aviation. Leur audace payent et ils réussissent à dégager la trentaine de légionnaires qui résistent toujours. Puis les parachutistes de la 1ère compagnie du 6e BPC renforcent ceux du 8e choc et débouchent à leur tour. A l'aube, l'aviation se joint à l'artillerie pour matraquer les Viets survivants. Plus de 800 cadavres ennemis sont dénombrés aux alentours.

Un équilibre provisoire

En 7 jours, Giap a perdu 12.000 hommes. Le moral de ses troupes est au plus bas. Il doit cesser son offensive mais les travaux de sapes se poursuivent. Isabelle est maintenant investi par un régiment viet mais ses canons appuient toujours les autres PA. Les renforts français continue de sauter chaque nuit. Le 2e BEP gagne à son tour le camp retranché dans la nuit du 10 au 11 avril. Le regroupement de ses unités sur les positions désignées lui coûte 29 hommes mis hors de combat. Des volontaires, même dépourvus du brevet de parachutistes arrivent également. On trouve parmi eux de nombreux légionnaires venir soutenir leurs camarades.

Le 10 avril, 200 parachutistes du 6e BPC reprennent Eliane 1 mais, à la nuit tombée, la relève envoyée par le 2e bataillon du 1er RCP subit l'assaut du régiment 98. A 10 heures, la moitié des hommes sont hors de combat. Dépourvu de réserves, Bigeard demande alors de l'aide à tous les bataillons.

Le BEP réagit le premier. Deux cents légionnaires montent à l'assaut en chantant, leurs voix couvrant le vacarme du champ de bataille :

" Contre les Viets, contre l'ennemi,

Partout où le combat fait signe,

Soldat de France, soldats du pays,

Nous remonterons vers les lignes ".

Bientôt les 2e et 3e compagnies du 5e BPVN les rejoignent en chantant La Marseillaise. Vers deux heures du matin les Viets décrochent, démoralisés. Une vingtaine d'entre eux se rendent même aux légionnaires. Mais ils reviennent les jours suivants, grignotant et usant lentement les défenseurs car Giap ne veut plus de ces assauts frontaux qui déciment ses divisions.

Le moral du camp retranché reste toutefois élevé. De Castries vient d'être promu général, Langlais colonel et Bigeard lieutenant-colonel. Au nord, la division 308 creuse autour d'Huguette 6. Les 180 hommes de la garnison sont de plus en plus isolés. Ils proviennent du 2e REI, de la 13e DBLE, du 5e BPVN, d'autres unités encore ou des volontaires sautés sur le camp. Leur ravitaillement demande des sacrifices quotidiens.

Toute la journée du 17, deux compagnies du 1er BEP et deux du 8e choc tentent en vain d'ouvrir la voie aux assiégés. Alors les quelques 120 survivants s'élancent à travers la piste d'aviation, derrière le capitaine Bizard, du BPVN. Moins de la moitié atteignent les lignes de 13e DBLE.

La situation est tout aussi critique sur Huguette 1 où la 4e compagnie du 1er bataillon du 2e REI est péniblement relevée par la 4e du 1er bataillon de la 13e DBLE. Le capitaine Chevalier a déjà perdu un tiers de ses hommes pour rejoindre la position. Avec les 80 survivants, il va tenir pendant 4 jours l'ennemi en respect. Celui-ci creuse des galeries souterraines. Le 23 avril peu avant minuit, toute résistance cesse. La PA semble avoir été avalé par les travaux de sape.

Contre l'avis de Langlais et de Bigeard, le général de Castries décide de reprendre la position. Il craint que la réduction de la zone d'atterrissage n'incite le commandement français à suspendre les parachutages. Le 2e BEP du commandant Liesenfelt est chargé de l'opération mais il lui manque déjà 350 hommes sur un effectif initial de 750 hommes et il faut regrouper les compagnies dispersées sur les Eliane et les Dominique. Quand la préparation de l'aviation et de l'artillerie commence, les légionnaires ne sont pas encore tous en place. Leur chef les engage alors sans attendre les retardataires mais l'adversaire s'est ressaisit les attaquants sont clouées au sol avec de lourdes pertes. En outre, la masse métallique de la piste d'aviation coupe les liaisons radio et il faut décrocher sous le feu. Au total, 82 légionnaires sont tués blessés ou disparus. Le 24 avril, les deux BEP fusionnent pour former un bataillon de marche étranger de parachutistes (BMEP) aux ordres du commandant Guiraud.

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Une situation sans espoir

Pendant une semaine, les défenseurs de Diên Biên Phu vont bénéficier d'un calme relatif. Il ne reste plus guère que 4.000 combattants en comptant les nombreux blessés légers restés à leur poste. Le commandant Guiraud commande 500 légionnaires sur les Huguette. 140 Marocains du capitaine Nicod les soutiennent. 250 autres Marocains sont juste au sud, sur Lily. Tourret et 400 de ses hommes du 8e choc tiennent Epervier avec un peu plus d'une centaine de parachutistes vietnamiens et de Thaïs blancs. Sur Dominique 3 et Eliane 10, le commandent Chenel n'a plus sous ses ordres que les 350 Thaï du bataillon 2, une compagnie de tirailleurs algériens et les restes du 6e BPC, soit au total 650 hommes. Bréchinac et Botella commandent Eliane 1, 2, 3 et 4. Ils disposent de leurs hommes, 400 du RCP et 150 du BPVN, renforcés par les 300 derniers légionnaires de la 13e DBLE du commandant Coutant dont les deux compagnies se relaient sur Eliane 2. En arrière sur Junon, se trouvent les 150 Thaïs blancs du capitaine Duluat et la vingtaine d'aviateurs du capitaine Charnod.

Sur Isabelle, la garnison a un peu moins souffert et compte encore 1.500 hommes dont 600 légionnaires du 3e bataillon du 3e REI. Bloquée par un régiment viet, elle n'est plus d'aucune utilité pour le centre de résistance principal et pourtant personne ne semble avoir eu l'idée de resserrer le dispositif quand cela était encore possible.

Les 4 derniers chars, usés jusqu'à la corde, s'apprêtent néanmoins à soutenir les défenseurs. Il reste également quelques pièces d'artillerie et quelques mortiers en état de tirer les derniers obus. Un peu partout des petits groupes continuent à combattrent ou à effectuer des tâches indispensables : sapeurs du génie réparant les lignes de défense, hommes du train réceptionnant les parachutages ou mécaniciens de la Légion entretenant les véhicules et les chars. Il y a également entre deux et trois milles blessés entassés des conditions d'hygiène déplorables malgré le dévouement du personnel médical.

En face, 25.000 jeunes bo doïs sont arrivés pour combler les pertes. Inexpérimentés, ils n'en apportent pas moins un effet de masse redoutable. Giap a décidé d'en finir rapidement. La division 304 qui a quitté le delta du Tonkin est en place à la fin du mois d'avril. La défense antiaérienne compte désormais au moins 64 pièces de 37 mm, pour certaines servies par des Chinois.

Le haut commandement français se trouve lui en pleine confusion et considère que la bataille est perdue. Pourtant, chaque soir, des volontaires sautent pour renforcer la garnison. Entre le 26 et le 30 avril, ils sont plus de 300 dont de nombreux légionnaires du 3e et du 5e REI. Le 1er BPC, va bientôt arriver. Aucune disposition sérieuse n'est prise pour secourir les assiégés dont le moral reste paradoxalement élevé. La colonne Crèvecour du colonel Godart arrive du Laos avec des moyens insuffisants : 4 bataillons dont le 2e du 2e REI. Cependant, la concentration des meilleures troupes du Viêt-Minh autour de Diên Biên Phu redonne aux maquis une grande liberté d'action.

L'assaut final

Le 30 avril, l'officier le plus élevé en grade de la Légion étrangère, le lieutenant-colonel Lemeunier, reçoit le général de Castries, le colonel Langlais et le lieutenant-colonel Bigeard pour fêter Camerone. Un peu partout dans le camp, les anciens se débrouillent également pour commémorer l'événement.

Le 1er mai dans l'après-midi, Giap lance sa troisième offensive. Après trois heures de bombardement, 3 divisions viets montent à l'assaut. Sur Eliane 1, les derniers parachutistes du RCP luttent toute la nuit. A l'aube, 18 blessés sur 180 hommes parviennent à regagner les lignes françaises. Sur Dominique 3, les Thaï et les Algériens succombent après 6 heures de résistance acharnée.

Sur Huguette 4, la division 308 se contente d'une reconnaissance en force sur les positions des légionnaires parachutistes. Puis vers 2 heures du matin, après une heure d'un bombardement d'une violence inouïe, les bo doïs déferlent sur Huguette 5 où le lieutenant Stabenrath ne commande plus que 29 hommes pour la plupart blessés. Ils tiennent cependant une heure et demie. Une cinquantaine de légionnaires du 1er bataillon du 2e REI tentent une vaine contre-attaque mais ne recueillent que 3 légionnaires dont leur chef, grièvement blessé mais ramené par le caporal Grana.

Le lendemain, la compagnie du 1er BCP larguée dans la nuit est déployée sur Eliane 2 pour relever les légionnaires de la 13e DBLE. Le 4 mai à 3 heures du matin, la division 308 submerge en un peu plus d'une demi-heure les 80 légionnaires parachutistes et tirailleurs marocains commandé par le capitaine Luciani sur Huguette 4.

Ces victoires coûtent cependant très cher au Viêt-Minh qui poursuit ses travaux d'approche lors des deux jours et des deux nuits suivantes. Du côté français, on se prépare à une percée vers le Laos dont on sait qu'elle sera meurtrière et désespérée. Dans la nuit du 5 au 6, 94 hommes du 1er BPC sautent en renfort. Ce sont les derniers. Mais le 6 mai dans la soirée, Giap déclenche une attaque générale. Les lance-roquettes multiples soviétiques, les fameux "orgues de Staline" font leur apparition et écrasent les défenseurs. A deux heures du matin, le sommet d'Eliane 2 disparaît dans l'explosion de la sape creusée par les Viets. Sonnés, les parachutistes du 1er BPC réussissent cependant à tenir une partie de leurs positions. Les soixante légionnaires survivants de la 13e DBLE contre-attaquent derrière le capitaine Coutant pour réoccuper les positions qu'ils ont quitté quelques heures plus tôt pour se reposer. Certains parviennent au sommet et vont s'y maintenir de longues heures avant de succomber. Une trentaine s'accrochent au pied d'Eliane 2 autour de leur chef. Le lieutenant Lacour Grandmaison quitte Huguette 2 pour tenter une ultime contre-attaque avec une vingtaine de légionnaires mais il est détourné sur Eliane 4 où il arrive avec une poignée d'hommes. Sur Huguette 2 et 3, les légionnaires parachutistes repoussent les assauts ennemis Sur Claudine 5, quelques légionnaires s'opposent au régiment 102.

Malgré l'intervention d'un des derniers chars opérationnel, la position est perdue dans la nuit. Eliane 10, Huguette 2 et 4 succombent à l'aube du 7 mai. Eliane 3 et 4 tiennent jusqu'à 10 heures Le sergent Kubiak et 4 légionnaires traversent la Nam You parmi les derniers. Les derniers chars ont fait leur possible pour couvrir les blessés puis les rares rescapés des points d'appui à l'est de la rivière.

La fin

La situation de la garnison est maintenant désespérée. A 17 heures 30, elle capitule après 57 jours de résistance. La bataille n'est cependant pas encore tout à fait terminée. Sur Isabelle le colonel Lalande décide de tenter une percée car ses troupes conservent toute leur cohésion. Vers minuit, trois groupes tentent de percer le dispositif viet mais celui-ci reste infranchissable. Une petite centaine de combattants seulement va réussir à rejoindre les lignes françaises. Les autres sont pris ou refoulés sur leurs positions où ils doivent se rendre au matin.

Les parachutistes et les légionnaires ont été l'âme de la résistance. Ils n'ont cédé que devant la supériorité de la puissance de feu d'un ennemi supérieur en nombre. Quatre cinquièmes des pertes sont en effet imputables à l'artillerie Viet minh. Cette victoire décisive coûte à Giap environ 10.000 tués et probablement le double de blessés.

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