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[Union Européenne] nos projets, son futur


Messages recommandés

Il y a 1 heure, zaragozano a dit :

La Géorgie demande à l'UE une "formule politique" sur sa volonté d'intégration

   https://www.eldiario.es/politica/georgia-pide-ue-formula-politica-voluntad-integracion_1_8795203.html

Et en complément, entretien long sur France 24, dans un français parfait évidemment : Salomé Zourabichvili, présidente géorgienne, a été diplomate française.

Je note :

  • "Nous sommes des vôtres"
  • "Nous avons renoncé à la violence"
  • attention portée à la Moldavie, considérée de la même manière que la Georgie et l'Ukraine, donc.

Comme qui dirait : "il y a décidément plusieurs cases sur cet échiquier !"
Celle-là est assez éloignée, frontalière de la Turquie, de la Russie et distante d'une petite mer... une paille !

Si la Russie tien à conserver la Crimée, voilà bien des pays pour lesquels il pourrait y avoir, entre la Russie, "l'Occident" (et ces pays, donc) :

  • arrangements de sécurité,
  • statut original d'association avec l'UE (par exemple, par constitution d'un ensemble de pays "pré-adhérents" permettant de travailler au sujet, de progresser et laissant le temps à l'UE de réformer sa gouvernance et donc d'adapter ses traités (il va bien falloir y passer un jour, je pense).
  • idéalement, ce statut et la géographie permettraient peut-être d'imaginer la constitution de liens particuliers avec... la Russie, si elle tient à redevenir fréquentable.

--

En complément : entretien sur la même chaîne (en anglais doublé) avec le Ministre des affaires étrangères roumain; M. Bogdan Aurescu (bon niveau ! )

 

Modifié par Boule75
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La demande d'adhésion est une chose, l'adhésion effective est une autre. Il y a tout une série de dossiers à évaluer pour la mise en conformité du pays candidat avec l'acquis communautaire... La Moldavie dispose cependant d'un raccourci, si elle le voulait vraiment : référendum de réunification avec la Roumanie, et hop !

 

Mais il faut régler le problème de la Transnistrie.

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Il y a 10 heures, zaragozano a dit :

La Moldavie demande officiellement son adhésion à l'UE
La pétition moldave, initialement adressée à la France en tant que président tournant de l'UE

https://www.larazon.es/internacional/europa/20220303/zg3ytswszventl65mlnptkfase.html

Il y a 10 heures, Kiriyama a dit :

J'ose espérer que nos dirigeants européens sauront faire preuve de réflexion et de lucidité en cette époque troublée face à ces demandes farfelues...

Au point où on en est, autant ne pas fermer la porte à la Moldavie. Pas nécessairement pour l'accepter, mais pour disposer d'une source supplémentaire de compromis, quand on négociera avec Moscou. Parce qu'un jour, on négociera avec Moscou, que ce soit la semaine prochaine ou dans 5 ans.
On ne fait la paix qu'avec ses ennemis, et même si ça me navre, actuellement la Russie se comporte comme l'ennemi (entre autre) de l'Europe.

Sinon, au delà des problèmes d'approvisionnement énergétique, il faut espérer que l'UE se dotera également d'une politique sur les matériaux stratégiques. Peut-être un sujet qui sera abordé au sommet européen du  mars?
J'ai trouvé un article qui parle du cas de la France, mais qui doit concerner une bonne partie de nos voisins.

Révélation

Crise ukrainienne : la hantise de l'industrie française pour ses approvisionnements critiques
La France importe énormément de minerais stratégiques venant de Russie et, à un degré moindre, d'Ukraine. L'arrêt des livraisons russes fait peser un risque pour des secteurs clés de l'industrie française.

L'industrie française s'apprête à énormément souffrir des conséquences de la crise ukrainienne, et plus précisément des sanctions qui isolent la Russie. Elle va devoir faire face à une pénurie de nombreux minerais dont certains sont critiques pour l'industrie tricolore. Ce qui met certaines filières en risque, comme notamment la production d'aluminium très dépendante des importations d'alumine venant de Russie. "La France est très dépendante de son seul fournisseur Rusal", constate France Industrie dans une note évaluant les risques pour l'industrie française, que La Tribune s'est procurée. Ainsi, les industriels ont seulement trois mois de stock devant eux.
Les producteurs d'aluminium "ne peuvent interrompre la production sans de graves conséquences, estime l'organisation professionnelle représentative de l'industrie en France. De plus, le prix de l'aluminium étant mondial, la nouvelle hausse des prix de l'énergie ne peut se répercuter en aval et va poser d'énormes problèmes de rentabilité entraînant un arrêt peut être définitif des usines de production d'aluminium".

Si les importations de gaz de Russie sont modérées (17%) - soit moins de 6% des importations énergétiques -, l'envolée des prix du gaz en Europe va avoir "un gros impact" pour les industriels gazo-intensifs (chimie, engrais, verre, etc ...) ainsi qu'un "impact en rebond sur les prix européens de l'électricité", estime France Industrie. Ce qui va se traduire par impact significatif pour les industriels électro-intensifs (chimie, aluminium, acier, ciment, papeterie, sucrerie, amidonnerie, etc ...) Par ailleurs, l'arrêt des importations du gaz néon ukrainien fait peser un risque pour l'industrie mondiale des semi-conducteurs. Car l'Ukraine fournit plus de 70 % du néon, un composant essentiel pour les lasers utilisés dans la fabrication de puces et consommé dans le monde et plus de 90% du néon produit pour l'industrie américaine des semi-conducteurs vient d'Ukraine.

Titane, palladium, platine, ruthénium, iridium, rhodium...
Des risques significatifs pèsent sur l'aéronautique européenne et la construction navale en raison de la dépendance du titane russe. La Russie fournit environ 40 % du ferro-titane utilisé en Europe. Elle est notamment le premier fournisseur de titane pour l'industrie aéronautique mondiale, que ce soit pour les avionneurs, les motoristes ou encore les équipementiers.

Les importations de métaux stratégiques comme le palladium, le platine, le ruthénium, l'iridium, du rhodium font peser également des risques sur l'industrie française. Ainsi, 34% des approvisionnements de l'industrie automobile (pots catalytiques) proviennent de Russie. Le taux de dépendance à la Russie est de 17% pour le platine et de 15% pour le ruthénium, l'iridium et le rhodium. Des métaux qui sont utilisés dans les catalyseurs automobiles, dans l'électronique, en bijouterie, et pour fabriquer des piles à combustible et des électrolyseurs d'hydrogène. Des industriels comme Symbio/Michelin, Hyvia, Stellantis, PowiDian, EODev, Alstöm/Helion, HDF, qui sont positionnées sur les piles à combustible, pourraient être impactés par la pénurie de ces métaux. L'Afrique du sud, qui reste le principal producteur de platinoïdes, à hauteur de 80 % du marché environ, pourrait subvenir aux besoins de l'industrie tricolore.

Les industriels français pourraient être également impactés par la baisse des importations de nickel, de cuivre et cobalt. La Russie est le troisième producteur mondial de nickel avec 250.000 tonnes en 2021 sur une production mondiale de 2,5 millions de tonnes environ. Les industriels français pourraient demander à Eramet d'augmenter ses cadences pour subvenir à leurs besoins. Des industriels comme McPhy ou le belge John Cockerill sont positionnés sur les électrolyseurs alcalins en France. Le nickel joue également un rôle important d'acier inoxydable dans les batteries. C'est également le cas pour l'approvisionnement du cuivre nécessaire aux électrolyseurs et piles à combustible et du cobalt pour les catalyseurs des électrolyseurs alcalins. La Russie est respectivement le septième producteur dans le monde en 2020 avec 850.000 tonnes de cuivre (sur 20 millions de tonnes environ) et deuxième producteur mondial de cobalt en 2019 avec 6.100 tonnes (sur 140.000 tonnes environ).

Enfin, les importations de caoutchouc synthétique et noirs de carbone venues de Russie et d'Ukraine, qui sont des zones d'approvisionnement non négligeables, pourraient avoir un impact pour les fabricants de pneumatiques.
Quels impacts sur l'exportation ?

La Russie pèse sur les exportations françaises. Notamment celles de matériels de transport (automobile, ferroviaire, aéronautique) et les produits chimiques, parfums et cosmétiques qui occupaient une place prépondérante, avec respectivement 24,3 % et 21,4 % du total exporté. Les vins (Champagne), spiritueux, le matériel agricole et les semences sont aussi largement exportés. En outre, les groupes industriels français implantés en Russie pourraient être également impactés par la crise ukrainienne : Michelin, Bel, Renault (Dacia et Lada), Bonduelle, Danone, Saint-Gobain, Safran, EDF, Schneider Electric, Orange, Total Energies (près de 20 % de sa production de gaz et de pétrole), Sanofi, Pernod Ricard, ainsi que Carrefour et Auchan. L'exposition de Renault est la plus grande, la Russie étant le second marché en volume après la France. L'Alliance détient en Russie environ 35 % de parts de marché en 2021.

En Ukraine, certaines filières industrielles françaises sont exposées en Ukraine, notamment celle de l'agroalimentaire (Bel, Lactalis, Bongrain), de l'automobile (Renault et Peugeot ont 25 % de part de marché), ainsi que Sanofi, Schneider Electric, Air Liquide et la SNEF (génie électrique, génie climatique, nucléaire, BTP, télécoms). L'Ukraine est par exemple "un pays clé en matière d'essais cliniques pour Sanofi", observe France Industrie. 
https://www.latribune.fr/economie/france/crise-ukrainienne-la-hantise-de-l-industrie-francaise-pour-ses-approvisionnements-critiques-905192.html

Il semble qu'on dispose quand même de quelques stocks (pour plus de 7 jours :tongue:) et de pistes pour nous fournir ailleurs qu'en Russie, ce qui nous laisse un peu de temps pour établir une stratégie. Par chance, là aussi, la France a entamé une réflexion dont elle pourrait faire bénéficier ses voisins : 

Citation

Métaux stratégiques : les trois choses à faire pour sécuriser les approvisionnements en France (rapport Varin)
Pour réduire la dépendance de la France aux importations de métaux stratégiques (lithium, nickel, cobalt, terres rares), le rapport remis ce lundi par Philippe Varin au gouvernement préconise de créer un fonds d'investissement public/privé, de développer deux plateformes, l'une à Dunkerque pour regrouper les acteurs de la filière batteries électriques, l'autre à Lacq pour celle des aimants permanents, et d'investir dans l'innovation. A l'horizon 2030, l'Europe pourrait ainsi sécuriser de 20% à 30% de ses besoins, selon Philippe Varin. (...)  
Dans son rapport, Philippe Varin fait trois recommandations.
La première est la création d'un fonds d'investissement public/privé - dont il reste encore à déterminer le montant - dédié spécifiquement aux métaux stratégiques pour la transition énergétique. Il devrait contribuer à sécuriser l'approvisionnement des industriels français (...)  
La deuxième est celle de la localisation de plateformes réunissant toutes les compétences de la filière, du raffinage et recyclage au produits finaux en passant par toutes les étapes intermédiaires  (...)  
La troisième recommandation est celle du développement de la R&D  (...)   L'innovation est primordiale pour améliorer les techniques de recyclage tout en veillant à réduire les émissions de carbone et l'impact environnemental. Une nouvelle réglementation doit préciser les critères de fabrication des batteries pour les véhicules électriques intégrant les modalités de leur recyclage dès leur conception. (...)   De même, la (...)  nouvelle réglementation européenne sur les batteries électriques fixant les critères de leur recyclage dès leur conception pourrait être un avantage par rapport notamment à la Chine. (...)
Dans la foulée de la remise du rapport de Philippe Varin, Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, et Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée chargée de l'Industrie, ont lancé dans le cadre du plan France 2030 un appel à projets national, (...). Cet appel à projets « Métaux critiques » est ouvert jusqu'au 30 janvier 2024, (...)
https://www.latribune.fr/economie/france/metaux-strategiques-trois-recommandations-pour-securiser-les-approvisionnements-en-france-899966.html

Le problème, c'est qu'il va falloir commencer par définir les domaines stratégiques, et les matières premières concernées. Si on se passe de cette étape, tout le monde va tirer la couverture à soi, tous les industriels vont estimer que leur activité est stratégique.
Il faut espérer que les politiques prendront un temps de réflexion, puis qu'ils trancheront sans faiblir. Ils se tromperont peut-être dans certains domaines, mais je m'en tiens à ma philosophie: quand un chef décide, il fait parfois des erreurs et toujours des mécontents.

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Il y a 16 heures, zaragozano a dit :

La Moldavie demande officiellement son adhésion à l'UE
La pétition moldave, initialement adressée à la France en tant que président tournant de l'UE

https://www.larazon.es/internacional/europa/20220303/zg3ytswszventl65mlnptkfase.html

https://www.ouest-france.fr/europe/ue/elargissement-aux-balkans-face-au-veto-de-la-france-l-ue-veut-reformer-la-procedure-d-adhesion-6721062

Emmanuel Macron a refusé en octobre [2019] l’ouverture de négociations d’adhésion avec l’Albanie et la Macédoine du Nord, gelant ainsi un processus censé s’ouvrir ensuite à la Serbie, au Kosovo, au Monténégro et à la Bosnie. Le président français a réclamé que l’UE se réforme avant de poursuivre un élargissement jugé trop bureaucratique.

Fera-t-il preuve de la même fermeté vis à vis de la Moldavie ?

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Il y a 21 heures, Wallaby a dit :

https://www.ouest-france.fr/europe/ue/elargissement-aux-balkans-face-au-veto-de-la-france-l-ue-veut-reformer-la-procedure-d-adhesion-6721062

Emmanuel Macron a refusé en octobre [2019] l’ouverture de négociations d’adhésion avec l’Albanie et la Macédoine du Nord, gelant ainsi un processus censé s’ouvrir ensuite à la Serbie, au Kosovo, au Monténégro et à la Bosnie. Le président français a réclamé que l’UE se réforme avant de poursuivre un élargissement jugé trop bureaucratique.

Fera-t-il preuve de la même fermeté vis à vis de la Moldavie ?

Pour le coup, la réforme accélérée de la procédure d'adhésion avec dispositifs originaux à la clé pourraient être discutés à court terme. Je ne crois pas à une adhésion de Moldavie selon les modalités courantes et qui, de fait, sont quasi-caduques.

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Le 03/03/2022 à 02:00, Desty-N a dit :
Citation

(...) Je défendrai une stratégie d’indépendance énergétique européenne. » Sur ce sujet, Emmanuel Macron réunira les chefs d’Etat et de gouvernement européens les 10 et 11 mars à Versailles. (…)
https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/03/02/guerre-en-ukraine-nombre-de-secteurs-economiques-souffrent-et-vont-souffrir-previent-emmanuel-macron_6115897_823448.html 

Il va falloir que je remette mon titre de prophète/analyste en jeu

Comme je ne serais pas devant mon clavier la semaine prochaine, lors du sommet européen de Versailles, je balance vite fait quelques pistes et éléments de réflexion pour la politique énergétique européenne (en texte caché, vu que je reprend les articles). Pour le gaz :
"L'AIE propose 10 mesures pour se passer du gaz russe et accélérer la transition énergétique "

Révélation

Le plan de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) vise à réduire d'au moins un tiers les 155 milliards de m3 de gaz russe importés par l'Europe en 2021 tout en accélérant la réduction des émissions de CO2. (…)
"Plus personne ne se fait d'illusions. L'utilisation par la Russie de ses ressources en gaz naturel comme arme économique et politique montre que l'Europe doit rapidement se préparer à faire face à de considérables incertitudes sur l'approvisionnement en gaz russe l'hiver prochain", a mis en garde jeudi Fatih Birol, directeur exécutif de l'Agence internationale de l'énergie (AIE).

Pour ce faire, l'AIE, qui est dans son rôle puisqu'elle a été précisément créée pour conseiller les pays de l'OCDE en matière de politique énergétique, propose un ensemble de 10 mesures pour réduire la dépendance au gaz russe dans le but de s'en passer définitivement à plus ou moins long terme. Le défi est de taille au regard des volumes en  jeu. En 2021, selon les données de l'AIE, l'Union européenne (UE) a importé 140 milliards de m3 de gaz de Russie par gazoduc et 15 milliards de m3, sous forme de gaz naturel liquéfié (GNL). Ces 155 milliards de m3 représentent 45% des importations totales de gaz de l'UE, et presque 40% de sa consommation totale.

Recours au nucléaire
Pour diminuer ce volume, l'AIE préconise avant l'hiver prochain l'adoption de 10 mesures :

  1. ne plus signer de nouveaux contrats d'approvisionnement de gaz russe
  2. chercher des fournisseurs alternatifs, en particulier les Etats-Unis, l'Algérie, le Qatar, l'Azerbaïdjan pour un volume estimé à 30 milliards de m3, ce qui implique d'investir dans des infrastructures portuaires pour le GNL.
  3. imposer à chaque pays un niveau minimum de stocks stratégique gaziers (comme c'est le cas pour le pétrole)
  4. accélérer le développement des capacités d'énergie éolienne et solaire (économie de 6 millions de m3 de gaz)
  5. augmenter la production d'électricité à partir du nucléaire et de la biomasse (économie de 13 millions de m3)
  6. fiscalité augmentée sur les bénéfices exceptionnels réalisés grâce à l'envolée des prix du gaz pour réduire la facture des ménages les plus vulnérables.
  7. accélérer la substitution de pompes à chaleur aux chaudières au gaz (économie de 2 milliards de m3)
  8. améliorer l'efficacité énergétique des bâtiments (économie de 2 milliards de m3)
  9. encourager les consommateurs à baisser leur thermostat de 1 degré (économie de 10 milliards de m3)
  10. décarboner les réseaux électriques en diversifiant les sources.

Ce sont donc potentiellement 63 milliards de m3 de gaz naturel qui pourraient être retranchés des importations de gaz en provenance de Russie, soit quelque 40%. Autrement dit, l'hiver prochain, l'Europe dépendra encore pour 92 milliards de m3 du gaz russe, toutes choses étant égales par ailleurs.

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Plus modeste, l'AIE vise une réduction de 50 milliards de m3, soit un tiers des importations russes, mais qui pourrait atteindre 80 milliards de m3 si l'UE acceptait de ralentir la réduction de ses émissions de CO2, en recourant au charbon à la place du gaz pour produire de l'électricité. Le plan intègre aussi la nécessité de reconstituer des stocks gaziers, qui sont à leur plus bas, en raison même de la décision de Gazprom de réduire ses livraisons cet hiver alors même que l'Europe traversait une crise énergétique, et subissait une envolée des cours du gaz. Sur le marché TTF des Pays-Bas, le prix du gaz a atteint ces derniers jours un sommet à 199 euros le mégawattheure. Sur un an, les prix ont bondi de... 930%.

Une opportunité pour décarboner l'activité en Europe 
S'il s'agit donc de réduire les importations européennes de gaz russe, les propositions de l'AIE, comme l'a souligné Fatih Birol, s'inscrivent non seulement dans le cadre des sanctions à l'égard de Moscou mais sont aussi une opportunité pour accélérer la transition énergétique telle qu'elle est inscrite dans le "pacte vert pour l'Europe" qui doit être financé par un tiers des 1.800 milliards d'euros d'investissements du plan de relance NextGenerationEU et du budget septennal de l'UE. C'est d'ailleurs ce qu'a assuré Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, lors de cette présentation : « Plus que jamais, se débarrasser des énergies fossiles russes et des énergies fossiles en général est essentiel. Ce qui est en jeu, c'est à la fois la nécessité d'accélérer la lutte contre le changement climatique et, on le voit désormais, la sécurité énergétique à court terme du continent européen. Le plan en 10 points proposé aujourd'hui par l'AIE va enrichir notre réflexion."

Reste à savoir comment chaque pays européen va appliquer ces mesures. 

https://www.latribune.fr/economie/international/l-aie-propose-10-mesures-pour-se-passer-du-gaz-russe-et-accelerer-la-transition-energetique-905370.html 

Les mesures 2 et 3 de l'AIE (fournisseurs alternatifs, stocks stratégiques) correspondent à ce que je préconise. La 4 envisage la relance du nucléaire, ce que n'excluent pas les allemands (qui avalent une jolie couleuvre au passage).
L'agence, tout comme une de nos ministre, y voie une opportunité d'accélérer la transition énergétique et je ne peux qu'abonder: de toute façon, les énergies fossiles coutent cher, alors quitte à payer, autant que ça ne profite pas à Moscou, voire que l'UE en bénéficie, si on parvient à monter les bonnes filières industrielles.
Je note au passage qu'il est clairement écrit que Gazprom a limité à dessein ses livraisons durant l'hiver. J'espère que ça clôturera la discussion pour savoir si la Russie est un partenaire fiable:dry:

Le point 10 porte sur la diversification et la décarbonation des sources d'électricité. Là aussi, j'ai trouvé un article intéressant :
Comment les réseaux électriques font face au défi de l’intégration des énergies renouvelables 

Révélation

Soutenir l’augmentation des usages électriques en s’appuyant sur des sources plus variables et disséminées : voilà la nouvelle donne énergétique. Elle conduit les réseaux électriques à se numériser en profondeur pour se réinventer, distribution en tête.

C’est un chantier industriel méconnu. Dans l’ombre des controverses sur la production d’électricité, les réseaux électriques forment la « colonne vertébrale de la transition énergétique », et connaissent une « véritable révolution », assure la présidente du directoire d’Enedis, Marianne Laigneau. Avec l’augmentation des usages électriques, que la France relance ou non le nucléaire, comme l'a souhaité Emmanuel Macron à Belfort début février, « il faudra de toutes façons plus de renouvelables », tranche Gabriel Bareux, directeur R&D du gestionnaire Réseau de transport d’électricité (RTE).

Déjà, les parcs d’énergies renouvelables se multiplient sur tout le territoire, et l’autoconsommation photovoltaïque décolle… Entraînant une mobilisation des acteurs du réseau pour rendre la toile électrique plus numérique, plus décentralisée et plus flexible.

Dizaines de milliards d'euros investis

A la différence des grandes centrales nucléaires ou fossiles, les panneaux photovoltaïques et les éoliennes délivrent une puissance faible, variable et éparpillée entre de multiples producteurs. Une nouvelle donne qui complexifie le pilotage des réseaux, alors que tout l’enjeu est d'équilibrer en temps réel l’injection de l’électricité et sa consommation, dite soutirage.

D’où un mur d’investissements pour adapter les lignes. Côté distribution, Enedis – qui gère 95% des 1,5 million de kilomètres de câbles moyenne et basse tension qui sillonnent la France – prévoit de dépenser 61 milliards d’euros d’ici à 2035. Côté transport, RTE pilote la production et gère 100 000 kilomètres de lignes haute et moyenne tension. Le gestionnaire anticipe d’investir 33 milliards d’euros sur la même période, dont 13 milliards pour intégrer les nouvelles capacités renouvelables que le réseau actuel ne pourra absorber. Des montants qui pourraient être encore plus élevés après 2035. RTE chiffrait à l’automne que plus la part de renouvelable sera élevée en 2050, plus le chèque à signer sera gros.

Concrètement, il faut tirer davantage de lignes électriques, mais aussi modifier l’organisation pyramidale actuelle. « Le système devient diffus, décentralisé et l’électricité va dans les deux sens : 90% des capacités de production d’électricité renouvelable, soit 500 000 sites dont 140 000 auto-consommateurs, sont directement connectées au réseau de distribution », décrit Marianne Laigneau. Une révolution pour les routes moyennes de l’énergie, qui deviennent le point d’entrée des parcs éoliens et des panneaux photovoltaïques particuliers, là où les grandes centrales sont uniquement branchées sur les lignes haute tension. Enedis prévoit de connecter 3 à 4 GW de renouvelables supplémentaires par an d’ici à 2030.

Pilotage numérique

Derrière ces chiffres : de nouveaux câbles, pylônes, transformateurs et une foule de briques numériques pour piloter le système en temps réel. RTE prévoit la mise en place de centaines d’automates supplémentaires en 15 ans pour aller vers un pilotage plus décentralisé, via 180 zones électriques réactives aux variations des renouvelables. Mais la révolution numérique concerne surtout les réseaux de distribution. Longtemps aveugles, ils doivent aujourd’hui être équipés de capteurs – dont le compteur intelligent Linky fait office de fer de lance – et de logiciels pour faire remonter les informations de la production qu’ils accueillent. Dans les scénarios de recherche les plus ambitieux, le pilotage du réseau, soit l’équilibre en temps réel des besoins de puissance, se ferait en priorité à l’échelle locale, comme celle d’un complexe résidentiel, un quartier, ou une région.
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Ce pilotage passe par l’arrivée d’une foule de nouveaux logiciels : systèmes avancés de gestion de l’énergie (AEMS), de distribution (ADMS) et des ressources distribuées (DERMS et Virtual Power Plant) pour les installations productrices d’énergie…Une stratégie portée par des acteurs comme Schneider Electric, qui multiplie les briques pour proposer un jumeau numérique du réseau entier. Des expérimentations de technologies innovantes sont aussi lancées, comme le projet Star démarré en janvier par Enedis et RTE afin de tester la blockchain privée pour la traçabilité de l’insertion des énergies renouvelables.

De la mécanique aux transistors

Au-delà des nouvelles lignes, le renouvelable apporte son lot de problèmes techniques à résoudre. A grande échelle, il s’agit d’abord de maintenir la fréquence du courant alternatif, qui oscille à 50 hertz à travers l’Europe. Aujourd’hui, ce rôle de stabilisateur est joué par les grandes centrales thermiques, dont les alternateurs sont synchronisés. Mais qu’en sera-t-il demain, si l’on diminue la part du nucléaire et des combustibles fossiles (gaz et charbon), voire qu’on en sort ? « Dans 30 ans, ces grosses masses rotatives qui apportent de l’inertie au réseau pourront avoir disparu, pointe Thomas Kiesling, directeur technologie de la branche infrastructures intelligentes du constructeur Siemens. L’électronique de puissance devra donc prendre la relève pour stabiliser le réseau et assurer sa protection. » Un changement culturel pour lequel « les technologies existent », insiste l’ingénieur allemand.

Aujourd’hui, des onduleurs permettent déjà d’intégrer le courant continu issu des parcs photovoltaïques et de l’éolien en mer dans le flux de courant alternatif. Minoritaires, ils se calent sur le rythme des centrales, via la technologie dite du grid following. « Une généralisation des renouvelables imposerait de passer au grid forming », prévient Gabriel Bareux. Soit le recours à d’autres composants, capables de jouer le rôle de chef d’orchestre et de se synchroniser, aidés par des algorithmes, pour obtenir une fréquence stable, continue l’expert de RTE, qui participe à plusieurs projets de recherche sur le sujet.

Gestion de proximité

L’autre enjeu est l’équilibrage du réseau. Multiplication des points de production (ou « foisonnement » dans le jardon du secteur) pour tendre vers un équilibre global, développement des interconnexions électriques entre pays, pari sur le stockage longue durée… De nouvelles infrastructures viennent atténuer la variabilité des renouvelables. Mais au sein des marchés de l’électricité qui permettent à RTE de piloter la production, le nouveau mot d’ordre des ingénieurs est celui des « flexibilités ». Un terme parapluie qui fait florès dans le secteur pour désigner les dispositifs techniques et économiques destinés à moduler rapidement la demande [voir encadré en fin d'article] et la production d’électricité, afin de répondre aux fluctuations de l’électricité verte.
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D’où une nouvelle doctrine chez les responsables du réseau, qui prévoient désormais de niveler par le bas la production lors des rares pics afin d’éviter la création de lignes surdimensionnées. Un écrêtement lucratif : en appuyant sur le bouton arrêt les rares jours où le soleil brille trop fort, où le vent se déchaîne, RTE prévoit d’économiser 7 milliards d’euros d’investissements en infrastructures lourdes, tout en ne perdant que 0,3% de l’énergie produite.

Au niveau local, où leur variabilité se ressent davantage, éoliennes et panneaux solaires « compliquent la gestion des pics de tension et de la puissance réactive, que l’opérateur de distribution doit mieux anticiper et prévenir », résume Antoine Jourdain, d’Enedis. Là encore, l’opérateur de distribution repense ses infrastructures. Dans le cadre du projet Reflex, Enedis regarde du côté de ses transformateurs de postes sources pour y raccorder en moyenne 30% de capacités supplémentaires tout en réduisant seulement de 0,06% l’électricité produite. Un principe proche de ses offres de raccordement intelligent, lancées en octobre, pour brancher les producteurs plus rapidement, et à moindre coût, en échange d’une modulation de leur production pouvait aller jusqu’à 5% de leur potentiel.

Intégration des bornes de recharge

« Il y a une effervescence de la R&D et des idées nouvelles pour la distribution d’électricité depuis 15 ans », s’enthousiasme Florent Cadoux, fondateur et PDG de Roseau Technologique. Cette jeune pousse développe, dans l’Innovallée près de Grenoble (Isère), des logiciels pour améliorer le dimensionnement et le pilotage des réseaux basse tension en s’appuyant sur les données fournies par les compteurs intelligents. Un créneau similaire à celui de sa voisine Odit-E, qui cartographie et optimise des petites routes de l’électricité à partir des mêmes données.

De quoi « mieux comprendre le réseau et optimiser nos investissements », narre Sébastien Julien, responsable du département réseau chez GreenAlp, l’opérateur de distribution de la ville de Grenoble. Pour lui, la nouvelle intelligence des lignes électriques devrait aussi servir à l’intégration des bornes de recharge pour véhicules électriques. Si leur multiplication dans des zones parfois exiguës impose aux réseaux électriques de se réinventer, leurs batteries pourraient servir de stockage à l’échelle du réseau. Un plan déjà dans les cartons, comme en témoigne la certification, en février, d’un premier système de ce type, dit véhicle-to-grid, par RTE.

Vers une demande pilotable
Au-delà du stockage et des échanges, les gestionnaires de réseaux planchent sur la modulation de la demande, couplant briques technologiques et mécanismes de marché innovants. Au-delà des heures creuses, la tendance est à l’effacement, soit la diminution volontaire de la consommation d’électricité par des acteurs branchés au réseau. Un principe connu des gros industriels électro-intensifs, mais qui se généralise sous l’action d’agrégateurs. Energy Pool, en Savoie, rassemble consommateurs industriels et tertiaires pour proposer à RTE des blocs d’effacement. Voltalis, elle, connecte radiateurs et chauffe-eaux dans 150 000 foyers en France pour les contrôler, et écrêter les pointes de demande.

De son côté, Enedis profite d’un nouveau bac à sable réglementaire pour expérimenter des « flex locales », par exemple à l’échelle d’un village. Sans trop de succès : si une première consultation du marché a permis de signer deux contrats d’effacement de consommation dans les stations d’Isola 2000 (Alpes-Maritimes) en 2020, un appel au marché pour trois zones en 2021 n’a pas trouvé preneur. Rien d’inquiétant, juge Hubert Dupin.

Ce chargé du programme chez Enedis prépare une deuxième version pour 2022 et veut faire monter le sujet, dont l’attrait dépendra notamment des rémunérations offertes. Une autre possibilité est déjà dans les cartons pour jouer sur la demande… à la hausse. En cas de surplus d’électricité, il s’agirait alors de « trouver des gens à proximité qui veulent bien lancer leur ballon d’eau chaude, recharger leurs voitures, ou encore lancer des transferts gravitaires et regonfler les réseaux à air comprimé dans les usines, ou simplement stocker l’énergie », liste Hubert Dupin. Avec l’accroissement des renouvelables, de telles initiatives devraient se multiplier.

https://www.usinenouvelle.com/editorial/comment-les-reseaux-electriques-font-face-au-defi-de-l-integration-des-energies-renouvelables.N1787337 

Pour faire court: ça va couter cher, ce n'est pas au point, mais il y a des pistes. Les politiques peuvent jouer un rôle en créant un environnement favorable à ces nouveaux réseaux (par exemple avec des incitations fiscales pour les producteurs et les consommateurs qui acceptent de prendre le risque d'innover) et en fixant des objectifs chiffrés.
Il faudrait peut-être relancer la recherche sur le stockage. J'entrevois 3 solutions prometteuses et complémentaires : les batteries, le pompage turbinage (tout particulièrement avec de l'eau de mer) et la production d'hydrogène , mais il existe énormément de technologies. J'espère que les dirigeants européens ne négligeront pas ces sujets quand ils se réuniront à Versailles.

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Il y a 4 heures, Boule75 a dit :

Pour le coup, la réforme accélérée de la procédure d'adhésion avec dispositifs originaux à la clé pourraient être discutés à court terme. Je ne crois pas à une adhésion de Moldavie selon les modalités courantes et qui, de fait, sont quasi-caduques.

Réforme accélérée ou procédure accélérée ?

Une procédure accélérée pour faire adhérer des pays corrompus, je trouve que c'est une super idée qui nous dessine un très bon avenir.

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@Boule75 @Wallaby : on peut aussi envisager des solutions intermédiaires histoire d'ouvrir la porte, sans pour autant provoquer ouvertement la Russie. Par exemple … un statut à la Norvégienne. (je sais je radote :happy:)

Entre l'adhésion à l'espace économique européen, et la participation à l'espace Schengen, à Europol ainsi qu'à Eurojust , il y a de quoi occuper des gouvernements pour quelques années. 

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il y a 38 minutes, Desty-N a dit :

@Boule75 @Wallaby : on peut aussi envisager des solutions intermédiaires histoire d'ouvrir la porte, sans pour autant provoquer ouvertement la Russie. Par exemple … un statut à la Norvégienne. (je sais je radote :happy:)

Entre l'adhésion à l'espace économique européen, et la participation à l'espace Schengen, à Europol ainsi qu'à Eurojust , il y a de quoi occuper des gouvernements pour quelques années. 

C'est bien des solutions de cet ordre que j'avais en tête : réformer rapidement la procédure d'adhésion, voire concevoir plusieurs voies d'adhésion, ou accepter l'idée d'une ou plusieurs fédérations associées à l'UE, composées de pays destinés à la rejoindre ou à adopter ce mode de gouvernance post-national réversible.

On a à la fois :

  • un soucis des procédures d'adhésion actuelles (non-réversibles, ambiguës d'une certain manière, qui peuvent rester bloquer longtemps avec des malentendus créatifs ou pas tels ceux qui nous "lient" avec la Turquie...)
  • et un soucis de l'architecture démocratique une fois l'adhésion acquise : surreprésentation assez choquante des petits pays ; sans parler des politiques à l'unanimité parfaitement sclérosantes.
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18 minutes ago, rendbo said:

ses opinions économiques et politiques nous donnent une grille de lecture, mais pour autant peut on bâtir un raisonnement dessus ?

Je voulais juste mettre en garde ... Le personnage est "assez" idéologisé. Il est syrien ... Etc. Ça fait pas mal de biais.

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Un point de vue intéressant sur la nouvelle façon de valoriser les capacités spécifiques de la France par l'Europe.

https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/l-atout-de-la-puissance-militaire-francaise-dans-l-ue-905585.html

(..)

Dans ce nouveau contexte, la situation de la France, puissance militaire moyenne à vocation mondiale (force de frappe nucléaire, industrie de défense parmi les premières au monde, première armée de l'UE, cinq bases militaires à l'étranger, expérience certaine des opérations extérieures, deuxième domaine maritime mondial) est regardée dans l'UE avec un œil neuf.

Quelles que soient ses limites et ses lacunes, la politique française de lutte contre le djihadisme au Sahel (Serval puis Barkhane ; impulsion du G5 Sahel) s'est européanisée. D'une part avec la force Takuba, qui regroupe des forces spéciales de dix États membres de l'UE ; d'autre part, avec l'implication des Européens dans la Coalition internationale pour le Sahel, dont le siège est à Bruxelles. Cette dernière rassemble des ressources humaines et financières de pays européens, africains et américains pour l'aide au développement et au renforcement des services et des politiques publics. Ce sont deux signaux faibles qu'à l'invitation de la France, les Européens seraient en train de considérer le Sahel comme la frontière sud de l'UE.

De façon comparable, la perception de l'implication de la France en Libye a changé. Elle était classiquement perçue par les autres pays de l'Union comme une facette de l'interventionnisme post-colonial d'une France « gendarme de l'Afrique ». Après avoir été critiquée pour son interventionnisme en échec dans la guerre civile, la France est dorénavant un peu plus vue par l'UE comme porteuse d'une expérience spécifique mobilisable au service des intérêts des Européens : ramener la paix civile et à la stabilité politique aux portes de l'Europe tout en y endiguant l'immixtion des États turc et russe. La conférence de Paris sur la Libye de novembre 2021 a été conçue comme le prolongement de celle de Berlin du mois de juin précédent. Français, Allemands et Italiens convergent dorénavant plus qu'ils ne rivalisent dans leur appréhension de la crise libyenne.

Cette convergence se nourrit notamment d'un diagnostic partagé sur une Russie et une Turquie dont les menées déstabilisent les politiques européennes dans la région méditerranéenne. En Libye, donc, où la Turquie et la Russie sont devenues deux acteurs influents à la faveur de l'absence de politique commune des Européens dans la guerre civile. En Syrie, où la Russie a soutenu avec succès le régime de Bachar Al-Assad, adversaire des Européens, tandis que la Turquie a attaqué et affaibli les Kurdes, alliés des Européens contre Daech. À Chypre, la Turquie occupe militairement la partie nord de cet État membre de l'UE. En République centrafricaine et au Mali, la Russie cherche à perturber, voire à saper, les politiques françaises et européennes en Afrique centrale et au Sahel. Moscou déploie dans ces deux pays un dispositif hybride qui mêle l'implantation cœur du pouvoir de la compagnie de mercenaires russe Wagner et la diffusion d'une propagande très hostile à la présence française.

Le vigoureux soutien de la marine française à la Grèce durant les quelques semaines où la marine turque a pénétré son espace maritime pour en contester la souveraineté hellène et européenne a montré de façon inédite que l'UE comptait sur la spécificité militaire française pour faire face à des menaces extérieures.

Face aux agressions de l'administration Poutine (déstabilisation et morcellement de l'Ukraine pour punir les Ukrainiens de se rapprocher de l'UE ; instrumentalisation de la dictature biélorusse pour provoquer une crise des réfugiés sur la frontière orientale de l'UE ; viol des espaces maritimes, aériens et cyber des États membres de l'UE riverains de la Baltique...), la force de dissuasion nucléaire de la France n'apparaît plus seulement comme une bizarrerie ou un particularisme.

Le format Normandie (forum quadripartite de gestion du conflit de l'Est ukrainien) initié par les autorités françaises et allemandes, peut être perçu comme la mise au service de l'intérêt général européen de la tradition diplomatique française de gestion des crises militaires. Cela d'autant plus qu'il s'agit d'une démarche qui n'est pas solitaire mais menée avec l'Allemagne. Il y a certes débat entre, d'un côté, le couple franco-allemand, et, de l'autre, la Pologne et les États baltes sur l'opportunité de dialoguer ou non avec les autorités russes ; pour autant, tous s'accordent à considérer qu'il y a une menace russe et qu'il convient de la parer ensemble.

... et de son plaidoyer pour l'Europe de la défense

Le classique plaidoyer des dirigeants français pour une Europe de la défense, quels qu'en soient les contours, est désormais considéré avec plus d'attention et d'intérêt. Puisque l'administration Biden semble encourager les progrès de cette dernière dans le cadre de sa réassurance de l'Alliance atlantique, le chantier de l'Europe de la défense pourrait bien être la plus féconde des nombreuses priorités de la présidence française du conseil de l'UE du premier semestre 2022.

L'UE, prix Nobel de la paix en 2012, s'est en sept décennies édifiée en dehors du (voire en opposition au) paradigme de la puissance et du rapport de force. Face au retour de la géopolitique qui bouscule ce fondement de la construction européenne, l'aptitude persistante de la France à l'autonomie stratégique et aux interventions militaires offre à sa classe politique une chance d'être écoutée par ses homologues européennes. En ce sens, la présidence semestrielle du Conseil de l'UE par la France en 2022 est pour le président Macron une opportunité d'en finir avec le stéréotype de l'arrogance française.

_______

Par Sylvain Kahn, Professeur agrégé d'histoire, docteur en géographie, Centre d'histoire de Sciences Po, Sciences Po.

Modifié par herciv
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Il y a 2 heures, herciv a dit :

Le vigoureux soutien de la marine française à la Grèce durant les quelques semaines où la marine turque a pénétré son espace maritime pour en contester la souveraineté hellène et européenne a montré de façon inédite que l'UE comptait sur la spécificité militaire française pour faire face à des menaces extérieures.

moi je veux bien, mais dans ce cas là qu'on sorte une partie du budget de l'armée de leur sacro saint "déficit inférieur à 3%"... sinon on se retrouve comme dans le cas de l'OTAN : des freeloader partout

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  • 3 weeks later...

« L’Europe : changer ou périr »  tel est le titre d’un livre d’un livre récent ( mais d’avant l’Ukraine ) de Mme Nicole GNESOTTO, vice-présidente de l’Institut Jacques Delors. Dans sa préface elle reçoit le soutien de Jacques Delors qui préconise un « aggiornamento européen durable ».   Nicole Gnesotto : historienne française, experte des questions européennes et internationales

Extraits d’une analyse parue dans un quotidien ( La Croix  31/03/22, par J-C Ploquin  )  ( surlignés et caractères gras de moi  ):   Voilà donc une contribution qui rejoint nos préoccupations et discussions 

Citation

« L’auteure presse les européens à devenir plus autonomes et solidaires dans un monde redevenu chaotique et menaçant … Changer le cap suivi depuis Rome – 1957 – et surtout Maastricht – 1992 - »                                                                   « pas de réformes institutionnelles. Mais … casser  certains moules idéologiques qui façonnent les politiques communautaires et le consensus des gouvernements. »

Ces 2 moules : 

« le plus important à ses yeux est celui du libre-échangisme, devenu une fin en soi au service d’une harmonisation sans cesse plus poussée des marchés. Or la mondialisation dont l’Union Européenne ( UE ) est un acteur déterminant, a fini par buter sur 2 écueils :

-          Les crises sociales et la colère des perdants des délocalisations,

-          Et la dépendance envers des puissances économiques qui avancent leurs – propres – pions géopolitiques »

« Le marché est devenu l’alpha et l’oméga de l’intégration européenne… Les outils  commerciaux  doivent être intégrés à une vision stratégique du monde.  

« Un autre moule à briser, selon elle, est  celui de l’Atlantisme. .. choisir entre se diluer dans le camps occidental aux frontières incertaines OU se constituer en une entité autonome se souveraine… rompre avec le passé… l’emprise de l’Otan…face au bloc soviétique a limité au domaine économique le champ des coopérations proprement européennes. L’UE – ou plutôt son ancêtre, la CEE – a été évincée d’emblée des enjeux de défense, ce qui la soumet à une forme de dépendance. Or elle doit affirmer ses intérêts dans une relation d’égale à égale avec les Etats-Unis. »

 L’auteure «  invite paradoxalement les dirigeants et les diplomates français à déconstruire un discours qui politise les questions de défense, ce qui les met en porte-à-faux avec leurs partenaires. .. .Ils transposent  en effet à l’échelon européen la vision gaulliste d’une France indépendante, en tout cas autonome au sein de l’Otan… Or la plupart des pays de l’UE continent de faire confiance, pour leur sécurité, à cette organisation pilotée par Washington.   Par ailleurs la souveraineté ne se mesure pas qu’à l’armement dont un pays dispose » …

«L’autonomie européenne devrait être pragmatiquement recherchée en priorité dans des domaines tels que le numérique, l’industrie, le spatial…L’Auteur recommande donc de ne plus assimiler l’Europe politique à l’Europe de la défense mais de soutenir la constitution d’un pilier européen au sein de l’Otan, qui s’autonomiserait au gré des évènements »  

 

Modifié par Bechar06
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