Développements

La voie de développement du F414 a permis de sortir le moteur à temps pour équiper le Super Hornet, tout en fournissant les performances attendues. La stratégie de réduction des risques par l'intégration d'éléments éprouvés a donc fait ses preuves. Cependant, cette première approche modulaire permet d'envisager des remplacements et des substitutions pour certaines parties du moteur qui pourraient, du coup, bénéficier des dernières innovations technologiques. GE a ainsi validé ou planifié un certain nombre de développements qui sont tenus à la disposition des clients qui en font la demande.

C'est le cas, par exemple, de certaines pièces en composites à matrice céramique (CMC). Actuellement, seule la section terminale du moteur contient ces matériaux innovants, principalement sur des joints au niveau de la PC et sur les volets secondaires de la tuyère. Jusqu'en 2011, ces CMC étaient des fibres de carbure de silicium dans une matrice de carbone (SiC-C). Depuis 2011, un nouveau composite les remplace, en mullite d'aluminium dans une matrice de silicates d'aluminium (Ox-Ox).

Actuellement, GE conserve le projet d'implanter des CMC SiC-SiC sur les aubes de turbine, principalement haute pression. Il faut toutefois les doter d'un revêtement d'isolation thermique pour améliorer leur tenue à la chaleur. Les SiC-SiC dotés d'une barrière thermique sont potentiellement plus légers et résistants que les superalliages de nickel actuellement utilisés (comme l'Inconel 718). Ces matériaux pourraient résister à des températures plus élevées, a priori supérieures aux 1650°C présents en entrée de turbine haute-pression, moyennant une barrière thermique n'assurant que 170°C de protection.

De telles aubes de turbine ont déjà été éprouvées sur démonstrateur, mais de nouveaux tests auront lieu fin 2012 dans un environnement représentatif des conditions d'exploitation ordinaires. L'objectif est de démontrer la maturité technique de la chose en atteignant le niveau 6 sur l'échelle de maturité technologique de la NASA (Technological Readyness Level scale – RTL de la NASA, proche de celle du DoD, mais potentiellement différente).

Un autre axe de développement important, et qui fait suite à un intérêt marqué de la Navy, est une réduction des nuisance sonores du nouveau moteur. Il s'agit d'un kit de réduction de bruit, constitué de chevrons à différents niveaux de la tuyère pour augmenter le mélange entre les différents flux issus de la turbine et du corps externe du moteur ainsi qu'avec l'air ambiant. Ce kit a déjà été testé au sol avec succès et des essais en vol au cours de l'été 2012 valideront son impact sur les performances en vol et la possibilité de le monter sur les nouveaux appareils - voire en rétrofit sur toute la flotte. Cette modification diminue le bruit de l'éjection des gaz chauds, principalement à pleine puissance et avec la PC comme cela arrive typiquement au catapultage. L'attente des équipes de pont d'envol est forte vis-à-vis de cette évolution car les premiers essais montrent une réduction de 2 à 3 décibels (quasiment une diminution de moitié du niveau de bruit).

Le Kit de réduction de bruit fait partie d'un plan plus vaste de réduction des pollutions liées au Super-Hornet. Ce plan s'appelle Green Hornet. C'est lui qui a vu voler, en 2010, un Super-Hornet et un Growler alimentés avec un carburant vert. Ce carburant, mélange à 50-50% de JP-5 et d'huile végétale hydrogénée (huile non alimentaire, issue de la Caméline - ou Lin Batard), doit pouvoir être accepté par les moteurs sans modification de ceux-ci. L'objectif recherché est une équivalence pure (à l'usage) avec le JP-5, quitte à accepter une dégradation marginale de performances. Le F414 a utilisé ce carburant avec succès ce qui ouvre la porte à une possible bascule vers cet approvisionnement, entre 2016 et 2020, pour l'exploitation d'une des flottes de la Navy en mode exclusivement « vert ». En effet, il n'est pas prévu d'installer de double-cuve sur les porte-avions pour exploiter les deux modes simultanément. Il faudra donc une flotte homogène capable d'utiliser ce carburant lorsque la conversion sera decidée. Le F414 le permet et a été certifié dans ce but.

En complément, une nouvelle stratégie a été mise en place pour les prochaines évolutions : l'introduction de nouveaux éléments matériels améliorés se verra accompagné de plusieurs versions des logiciels (du FADEC), adaptées aux demandes des clients, afin de privilégier, au choix, performances ou durabilité.

Cette nouvelle stratégie vient se greffer sur le programme de développement entamé en 2004 et qui a vu un premier démonstrateur des innovations tourner au banc en 2004 et 2006, puis être relancé en 2010 et 2011 pour valider les bénéfices attendus sur la consommation spécifique. Ce démonstrateur a reçu la dénomination de F414-EDE (Enhanced Durability Engine – Moteur à Durée de Vie Améliorée), vu l'objectif de durée de vie accrue qui a présidé à sa conception.

De nombreux changements différencient le F414-EDE du modèle initial, le F414-GE-400.

Une analyse poussée des flux aérodynamiques du compresseur HP du modèle actuel, avec de nouveaux outils de simulation numérique, a conduit les concepteurs à reprendre totalement cet élément. Le nouveaux compresseur est articulé sur 6 étages au lieu de 7, avec une distance plus importante entre chacun des rotors, ce qui permet un meilleur contrôle tridimensionnel du flux et n'altère pas le taux de compression, au contraire.

Le nouveau dessin du compresseur haute-pression, ainsi que de la soufflante, a permis d'augmenter encore d'avantage le débit admis, faisant passer son maximum à 84,8 kg/s, près de 10 % au dessus du F414-GE-400, lui même 15 % au dessus du F404.

Ce débit d'air supplémentaire peut être utilisé à différents usages. Il peut servir à abaisser la température du moteur, pour une poussée identique à celle du modèle de base. Cela augmente la durée de vie des parties chaudes, allant jusqu'à tripler celle-ci, et des pièces d'usure, ce qui allonge le temps de monte du moteur entre deux visites. Ce flux augmenté peut aussi être prélevé pour le refroidissement de différentes cases à équipement de l'avion porteur, ou bien pour alimenter des dispositifs pneumatiques

Le F414-EDE a aussi vu l'introduction de nouveaux matériaux innovants, ainsi que des protections thermiques avancées sur la turbine haute-pression et le canal de post-combustion. Cela améliore encore la durée de vie des parties chaudes. De plus, certains changements de matériaux ont pour but d'augmenter la tolérance du moteur vis à vis de l'ingestion de corps étrangers.

L'ensemble fournit, en outre, une économie mesurable sur la consommation spécifique (3 à 4%). Cela rattrape un des points sur lequel le F414 avait légèrement déçu, ayant connu - à l'usage - une très légère augmentation de celle-ci par rapport au F404.

La variante EDE du F414 promet donc, à l'exploitation, de substantielles économies tant sur la consommation que sur la maintenance ou sur la durée de vie du moteur et de ses sous-éléments. Cependant, conformément à la nouvelle politique de développement, une configuration logicielle différente pourra être adaptée sur cette nouvelle architecture afin d'en accroitre la puissance, donnant ainsi naissance à une variante EPE (Enhanced Performance Engine – Moteurs aux Performances Améliorées).

Sur la variante EPE, la configuration du FADEC pour tirer partie du débit supérieur du compresseur permet d'augmenter la poussée plein-gaz sec de près de 20 %, amenant le moteur dans la classe des 12 t, aux alentours de 117 kN.

Le gain sur la consommation spécifique ne sera, cependant, pas aussi important qu'avec le réglage destiné au F414-EDE, mais devrait persister, entre 1 et 2 % par rapport aux chiffres actuels.

La prise d'air dans le compresseur haute-pression, pour les diverses servitudes de l'appareil porteur, sera maintenu mais, en contrepartie, le prélèvement destiné à améliorer le refroidissement du moteur ne sera plus optimal, ramenant la durée de vie du moteur et des pièces d'usures à celle des réacteurs actuellement en service.

Cette alternative fournie au client lui permettra de gérer au mieux ses besoins opérationnels et ses flottes d'appareils en privilégiant les économies d'usage ou bien les performances accrues.