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Relations entre la France et l'Iran


Rochambeau
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Avant 1789 

Période pré-safavide 

Pendant le haut Moyen Âge, la Perse est surtout connue en Europe à travers des récits bibliques, grecs ou latins. Pendant les croisades, lancées par les Francs, tous les pays musulmans, dont la Perse, sont considérés comme des ennemis de la chrétienté. Les invasions mongoles permettent d'établir des contacts entre l'Orient et l'Occident et la France joue un rôle important à ce sujet. En effet, le but de l'Europe est alors de convertir les Mongols, comme ils l'ont fait plus tôt avec les envahisseurs barbares. Des missionnaires franciscains et dominicains sont envoyés en Perse Il-khanide et des missions sont établies à Sultaniya, Maragha, Tabriz et Tiflis (aujourd'hui Tbilissi).

La majorité des lettres échangées entre les Mongols et les souverains occidentaux contiennent des demandes de soumission. C'est Eljigidei, un chef mongol en Arménie et en Perse qui initie l'ouverture diplomatique en 1248 en écrivant à Saint Louis. Celui-ci en retour envoie le dominicain André de Longjumeau apporter une lettre à Güyük, mais le moine arrive après la mort du Khan (dirigeant, roi en mongol et en turc) et sa veuve et régente, Oghul Qaïmich renvoie l'ecclésiastique sans autre ouverture. Les contacts entre les Francs et les Mongols continuent, sans donner lieu toutefois à une alliance. C'est Oldjaïtou qui relance les relations en écrivant à Philippe le Bel en 1305 pour proposer une alliance contre les Mamelouks[1], une milice d'esclaves affranchis du monde musulman. Alors que les préparations d'une nouvelle croisade s'enlisent, Oldjaïtou lance une attaque infructueuse contre les Mamelouks (1312–1313). Cette politique est par la suite abandonnée par son successeur, Abu Saïd qui signe le Traité d'Alep avec les Mamelouks en 1322. Alors que la coopération diplomatique est abandonnée, les activités missionnaires, commerciales et les voyages continuent.

Période safavide 

L'avènement de Shah Ismaïl (1501) correspond à l'extension de la puissance portugaise dans le golfe Persique et l'océan Indien. Le Shah souhaite alors une alliance avec certains souverains européens pour contrer les Portugais, mais les Français restent absents. En effet, François Ier avait signé en 1536 un traité d'alliance avec Soliman le Magnifique afin de restreindre le pouvoir de Charles Quint, ce qui l'empêche de répondre aux souhaits du Shah. Suite aux invasions des Ottomans dans le nord-ouest de la Perse, en 1547 puis en 1604, les perses sont forcés de capituler et l'alliance de la France avec les Turcs empêche Henri IV de répondre aux demandes d'ouverture adressées par Shah Abbas Ier.

La première tentative pour établir des relations directes entre la France et la Perse est faite par Louis XIII, qui se sert du prétexte d'envoyer une mission de marchands marseillais pour convaincre Shah Abbas de la volonté du roi de France de servir de médiateur entre la Perse et les Ottomans. Cette mission est menée par Louis Deshayes et a pour but non avoué de réduire l'influence du Portugal (et de l'Espagne, qui est son suzerain entre 1580 et 1640) en Orient. Le Shah allait accorder des privilèges aux Français, comme les droits exclusifs de protéger les catholiques en Perse, des facilités pour établir des missions catholiques et le monopole du commerce sur la route du levant, mais cette mission est rendue impossible par le grand vizir des Ottomans.

Alors que les missionnaires présents en Iran sont surtout des augustins portugais ou des carmélites italiens et espagnols, Richelieu envoie deux moines capucins à la cour de Shah Abbas[2]. Les missionnaires français jouent par la suite un rôle important, en informant les marchands, les voyageurs et les diplomates grâce à leur connaissance poussée de l'Iran. Le plus représentatif de ces missionnaires est le capucin Raphaël du Mans, qui réside à Isfahan de 1647 à sa mort en 1696, qui joue un rôle de traducteur et de négociateur lors de l'établissement de la Compagnie française des Indes, ainsi qu'un rôle d'informateur auprès de Colbert.

La guerre de Succession d'Espagne et les projets pour diminuer la puissance navale de Mascate mettent en sommeil les relations franco-persanes, qui sont renouvelées par la mission de Jean Billon de Canserilles à la cour safavide en 1700. Celui-ci recommande que le commerce avec l'Orient se fasse par la route du Levant. La mission de Billon de Canserilles est suivie par celle de Jean-Baptiste Fabre (qui meurt en route à Erevan) puis celle de Pierre-Victor Michel. Ce dernier réussit à obtenir un traité de capitulation en 1708[3]. Ce premier traité officiel accorde la protection aux missions chrétiennes et facilite le commerce. Des clauses monétaires et une lettre additionnelle promettant le déploiement de navires de guerre français dans le golfe Persique afin de combattre les Omanis sont très avantageuses pour les Persans. Toutefois, la guerre en France et les difficultés rencontrées lors du voyage retardent la ratification du traité à 1712. Le clergé arménien, irrité par le prosélytisme des missionnaires, réussit à faire annuler leurs privilèges qui doivent être renégociés. De plus, malgré les privilèges accordés aux marchands de Saint-Malo, aucun bateau français n'apparaît dans le golfe Persique, ce qui fait douter le gouvernement persan de l'authenticité des lettres remises par les missionnaires au nom de Louis XIV. Mohammad Reza Beg, maire d'Erevan, est envoyé en France, et est reçu en grande pompe par Louis XIV à Versailles le 19 février 1715, ce qui marque le début de nouvelles négociations pour déboucher sur un nouvel accord le 13 août 1715, cette fois-ci plus favorable pour le commerce français[4]. Cependant, avec la chute de la dynastie safavide en 1722, l'accord ne sera pas appliqué et le commerce français en Perse n'augmentera pas. La création de la Compagnie française des Indes orientales (1719), privilégiant la route passant par l'océan limitera par la suite les relations franco-persanes.

Entre la Révolution française et la Première Guerre mondiale 

1789 - 1849

Malgré l'hostilité de Catherine la Grande de Russie vis-à-vis de la Perse et de la Révolution française, l'ascendance des Qajars en Perse ainsi que les changements induits par la révolution en France ne rapprochent pas les deux pays. En 1804, cependant, Fath Ali Shah espère que Napoléon pourra l'aider à récupérer la Géorgie, alors que Napoléon pense que le souverain perse pourrait accélérer la défaite de la Russie et ouvrir la voie vers l'Inde. C'est à ces fins qu'est conclu le Traité de Finkenstein le 4 mai 1807. Mais la volte-face de Napoléon, qui signe le Traité de Tilsit le 7 juillet de la même année, les difficultés rencontrées sur la route de la Perse pour faire parvenir le traité au souverain Qajar et les manœuvres diplomatiques des Britanniques rendent le traité de Finkenstein inopérant. L'inaction des Français par la suite pousse Fath Ali Shah à se tourner vers les Britanniques à la place[5]. En 1811, les relations entre la France et la Perse sont interrompues. Pendant la période qui suit, les relations sont menées par des intermédiaires sans statut diplomatique; par exemple l'Arménien Davoud Khan Malekshah Nazar, qui sert les cours française et perse entre 1802 et 1818[6], les officiers français instruisant les troupes de Abbas Mirza à Tabriz[7] et Madame de la Marinière, française servant de tuteur à certains enfants de la cour[8].

Pendant les règnes de Mohammad Shah (1834-1848) et Louis Philippe (1830-1848), les négociations sont relancées par les persans, dont les relations avec les anglais se détériorent après la perte de Herat (1837). Mirza Hosein Khan est envoyé à la cour française en août 1838 et est reçu par Louis Philippe. La France accepte ensuite de fournir des armes et des instructeurs militaires à l'Iran afin de remplacer les britanniques. En septembre de l'année suivante, Mirza Hossein Khan quitte Paris accompagné d'un souffleur de verre, d'un armurier et de neuf sous-officiers sous le commandement de Henry Boissier[9].

À Téhéran, les Russes sont peu enclins à partager leur influence, et Mohammad Shah s'arrange pour que les officiers français ne reçoivent pas leur solde. La mission quitte la Perse en 1840 mais les liens culturels demeurent forts entre les deux pays. Eugène Bore, envoyé par l'Académie des inscriptions et belles-lettres obtient un firman le 17 mai 1840[10] l'autorisant, ainsi que les lazaristes, à ouvrir des écoles françaises.

Les relations sont rétablies en 1844, cette fois à l'initiative des français, qui veulent signer un traité commercial mais aussi pour protéger les missionnaires lazaristes qui ont été maltraités en Azerbaïdjan. Cette mission débouche sur la nomination de Ernest Cloquet en tant que médecin personnel du Shah en 1846 et la proclamation de décrets visant à protéger les écoles lazaristes fondées afin d'éduquer les Chaldéens d'Iran. Ce renouveau des relations franco-perses est une nouvelle fois arrêté par la chute de Louis Philippe en février 1848, car la Perse ne fait pas partie des priorités de la République. Les condoléances pour la mort de Mohammad Shah (1848) n'arrivent à Téhéran qu'en avril 1849. Par la suite, Amir Kabir, grand vizir de Nasseredin Shah, n'aura pas confiance dans le gouvernement républicain français et rejettera toute tentative de rapprochement, dont un traité commercial en 1848, et oubliera même de payer les employés français du gouvernement persan.

1850 - 1871 

Dessin représentant Amin o Dowleh, chef de la délégation perse à la cour de Napoléon III.Ces deux décennies sont une période de compréhension et d'entente cordiale entre les deux pays, avec des délégations bien établies à Téhéran et à Paris. En 1852, le premier ministre Mirza Aqa Khan Nour Etemad al-Dawleh a besoin d'une puissance médiatrice afin de l'aider à conclure de nouveau une alliance avec les anglais. Le premier ministre perse accepte alors un traité commercial proposé par la France 3 ans plus tard, en juillet 1855. Ce traité est finalisé en 1856 et en octobre 1858, le délégué perse en France revient avec une mission militaire française en Perse[11]. Un an plus tard, un nouveau délégué perse est nommé à Paris; ce délégué est aussi en charge de l'éducation en Europe d'environ 60 étudiants, diplômés de Dar-ol Fonoun pour la plupart. À cette époque, la représentation diplomatique de l'Iran en France est relativement importante, avec un attaché militaire à Paris et plusieurs consuls à Paris et en province. Napoléon III, qui est empereur à partir de 1852, répond en établissant une légation française à Téhéran en juillet 1854. La tête de cette légation n'est considérée que comme un poste mineur depuis Paris, principalement un poste d'observation aux intérêts limités. Les fonctionnaires qui se succèdent à ce poste permettent quand même d'asseoir les bases de l'influence française en Perse à travers les rôles de protection, d'éducation, de médecins à la cour et de conseillers militaires.

C'est à cette époque que sont ouverts plusieurs consulats français en Iran, à Rasht en 1864 et à Tabriz en 1866. La tradition du médecin de cour français est maintenue avec la nomination du docteur Joseph Désiré Tholozan (du corps de santé de l'armée française) à ce poste. Les conseillers militaires retrouvent eux aussi une place d'honneur avec la mission du colonel Victor Brongniart qui sert directement sous les ordres du commandant de l'armée perse, certains officiers restant même après la fin de leur contrat en tant qu'instructeurs au Collège militaire de Téhéran ou en contribuant à la création d'usines d'armes modernes comme le capitaine Michel Rous[11]

Cette époque se finit par la défaite française à Sedan en 1870, la chute de l'empire pour la république et la capitulation de Paris, qui fait perdre toute confiance envers la France aux Iraniens.

De 1871 à la Première Guerre mondiale 

Pendant cette période, les relations sont officiellement maintenues mais n'ont pas grande importance politique, une France vaincue n'ayant que peu d'intérêt pour le gouvernement perse. Pendant cette même période, la Perse est en proie à une très grande rivalité entre la Grande-Bretagne et la Russie. La position de la France est alors inégale: influence culturelle grandissante mais déclin commercial et politique. De cette époque subsisteront d'ailleurs des emprunts au français dans la langue persane.

La représentation diplomatique de la Perse en France est alors plus forte que jamais, puisqu'on compte treize consuls ou vice-consuls perses résidants en France (deux à Paris et Bastia, un à Bayonne, Béziers, Bordeaux, Le Havre, Lille, Lyon, Marseille, Nice et Rouen). La relation cordiale entre les deux pays se renforce encore avec les visites officielles de Nasseredin Shah et de Mozaffaredin Shah en France, ainsi que la participation de la Perse aux grandes expositions de 1878 et 1900. En 1905, Samad Khan Momtaz os-Saltaneh est nommé ambassadeur de Perse à Paris.

Pendant ce temps, en Perse, l'activité diplomatique et commerciale des représentants français continue, et les médecins français des Qajars fournissent une source importante d'influence à la cour. Certains Français ont agi de leur propre chef pour développer des projets économiques en Iran, comme l'établissement de raffineries de sucre dans le Gilan en 1878 par Messieurs Barral et Rambaud, l'éclairage au gaz de Téhéran en 1881 par Boital[12], ou encore l'ouverture de pharmacies à Tabriz et Téhéran par M. Coppin. En 1912, un « syndicat franco-iranien » est même créé, permettant d'exploiter du charbon et divers minéraux au sud de la mer Caspienne.

Cependant, à partir des années 1890, la France commence à chercher une alliance avec la Russie, puis, quelques années plus tard, entrevoit la possibilité d'une triple alliance avec la Grande-Bretagne. La Russie limitera les ambitions de la France dans cette partie du globe. Malgré la création de l'Union franco-persane en 1909, l'aide de la France se limite à envoyer quelques conseillers en matières agricoles et financières.

Malgré ces quelques réussites commerciales, et en prenant en compte les exportations d'armes et d'alcool, la France n'est que le cinquième partenaire commercial de la Perse en 1914; ce qui souligne le déclin de l'influence française[13]. Malgré ce déclin économique, les contributions culturelles, archéologiques et à l'éducation en Perse montrent un fort dynamisme. De plus, le gouvernement français accorde une protection officielle aux citoyens suisses, grecs, italiens ainsi qu'aux officiers suédois de gendarmerie en Perse à partir de 1911.

Pendant la Première Guerre mondiale, cette politique est maintenue. La Perse souhaite cependant que la France participe à l'évacuation des troupes russes et britanniques de Perse en 1917, et en septembre de cette année, la France envoie un hôpital mobile (appelé "l'Ambulance") à Tiflis (Tbilissi aujourd'hui) pour traiter les blessés russes qui combattent contre les ottomans. Cette "Ambulance" est ensuite envoyée à Orumieh après le départ des russes afin de fournir une aide humanitaire ainsi qu'un assistance militaire. Cette décision, qui a été prise par le Quartier général de Tiflis sans concertation ni avec Paris, ni avec Téhéran, aura des répercussions non voulues, puisque des combats éclatent entre les milices chrétiennes présentes dans la région et le Parti démocratique de l'Azerbaïdjan.

Sur l'ensemble de la période, on voit donc que la France reste dans le cadre des relations entre l'Iran d'une part et la Grande-Bretagne ainsi que la Russie d'autre part; la politique française restant réservée par rapport à celle des autres partenaires européens.

Source :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Relations_entre_la_France_et_l%27Iran#Avant_1789

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