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Dilution du pouvoir des états vs montée en puissance des intérêts privés


Akhilleus
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Dans le genre multinationales avide de matières premières et qui décident de prendre en charge leur approvisionnement via la constitution de cartels, il y a « Alliance » ; un groupement de géants de l’industrie allemande née en début d’année dont la tâche consiste à assurer l’accès aux ressources nécessaires à ses membres.

C’est une réponse à la rétention opéré par les chinois sur les terres rares il y quelque temps.

http://archives.lesechos.fr/archives/2012/lesechos.fr/01/30/0201870733034.htm

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  • 2 weeks later...

Un exemple peut-être parmi les plus exactement applicables à notre époque, du moins un qui permet d'envisager un processus "complet" (contrairement au cas de l'United Fruit Company ou d'autres grandes entreprises qui représentent un certain stade d'évolution), autre que le féodalisme, est celui des Cités Etats italiennes. Le cas du féodalisme est particulier, même si on peut réellement y faire un parallèle en envisageant, autant dans le cas du Japon des IXème-XIIème siècles que dans celui de l'Europe des Xème-XIIème siècles, les acteurs féodaux comme la lente jonction (parfois pacifique, parfois conflictuelle) d'un pouvoir militaire privé montant avec les détenteurs du capital foncier et des réseaux de communication.

L'Italie du Sud a vu un phénomène féodal se développer, partant de l'atomisation post byzantine et de l'arrivée des Normands comme petits "contractors" ajoutant de nouveaux acteurs dans le jeu. Les Etats pontificaux voient, pour ce qui concerne l'autorité temporelle du pape, un phénomène de désagrégation féodale.

Mais l'Italie du Nord, elle, procède tout autrement: le maintien de fortes structures (politiques, culturelles et sociales) urbaines autour des villes et le développement de l'économie de cette zone amènent un autre processus à la fin de la domination lombarde puis carolingienne. Les cités du nord s'affirment autour de ces structures, sans union de vastes territoires, et contre l'aspirant à la domination, le saint empire, qu'elles finissent par vaincre. Le processus politique interne qui naît ensuite est celui de l'affirmation des acteurs économiques de poids au sein de chacune de ces cités: concentration de la richesse, influence de plus en plus grande (et de moins en moins concurrentielle, vu qu'il y a de moins en moins d'acteurs dans le jeu politique, juste quelques "gros") sur les institutions au point d'en faire de simples instruments "pour la forme". Au XIVème siècle, en terme de pouvoir dans ces cités, la messe est dite: quelques grandes corporations de métiers, trustées par un nombre très réduit de grandes familles, dirigent tout. Et les institutions et coutumes municipales se vident de grandes parts de leur sens, compensées en apparence par la prospérité.

C'est au niveau des institutions militaires que l'évolution est la plus évidente: les milices urbaines, celles qui ont défait Frédéric Barberousse et fournissaient la meilleure infanterie d'Europe au XIIème siècle, perdent beaucoup de leur capacité, de l'importance qu'elles avaient.... Au mieux, et seulement en cas d'urgence extrême, aux XIVème-XVème siècles, elles ne fournissent plus que quelques contingents pour poster du monde sur les remparts, rien de plus.

Et ce qu'on a parallèlement, reflet de la prospérité, c'est un outsourcing généralisé de la fonction militaire au secteur privé, incarné par diverses formes du mercenariat si décrié par Machiavel:

- il y a des mercenaires s'engageant sur base individuelle, ou de petits groupes/unités (les cavaliers se louant en "lances" ou "lanze spezzate" d'environs 12h, les fantassins sont les "provisionati", recevant une "provision", un salaire), directement auprès de l'employeur et se plaçant sous les ordres d'officiers de cet employeur (des officiers de la cité ou des officiers mercenaires). Ces unités forment le coeur de la défense des cités-Etats italiennes: défense de la ville elle-même et de forts, appui des milices, garnison, patrouille.... Et éventuellement renforts pour l'appoint à des armées de campagne

- les plus connus des mercenaires sont les "condottiere", soient des entrepreneurs de guerres signant une "condotta", un contrat par lequel ils louent des forces prêtes à l'emploi, parfois de simples unités, et de plus en plus des petites (et parfois moins petites) armées plus ou moins "complètes". Celles qui comptent, et qui font une bonne partie du jeu politique de l'Italie, sont de véritables armées avec un condottiere à leur tête qui fédéralise une hiérarchie/pyramide d'autres condottiere de plus petite volée, arrivant chacun avec leur unité (unités spécialisées, ou petits groupements "généralistes"), soient de vrais holdings avec leurs branches et filiales.... Les spécificités étant 1) le secteur d'activité (la guerre, la politique en fait) et 2) le fait que ces "entreprises" sont toujours ou presque concentrées en un seul endroit, sous la forme d'une armée de campagne.... Ce qui donne des options face à des adversaires, des employeurs ou des fiefs et villes sur le chemin qui n'ont pas toujours de quoi s'opposer à un condottiere malin (ils ne le sont pas toujours) et ambitieux/agressif (ils le sont toujours).

- il reste enfin, parce que la noblesse existe aussi dans l'Italie du nord, une noblesse féodale sur les hinterland des cités-Etats, qui elle aussi se loue contre espèce sonnante et trébuchante, ou des dons en terres; eux sont moins régulièrement infidèles, et opèrent ainsi une sorte de "service militaire", d'ost féodal, mais à prix négocié. Et ils sont ambitieux aussi, savent se coaliser, n'aiment pas les institutions municipales, et essaient de prendre tout ce qu'ils peuvent. Ils cultivent comme ailleurs leur caractère de caste guerrière, ce qui leur donne une valeur sur le marché en tant que cavalerie lourde et professionnels de la guerre.

Et qu'a t-on dans les guerres d'Italie? La première phase, au XVème siècle, ce sont des guerres de mercenaires, extorqueurs et rarement fidèles, essayant souvent de trucider leur patron ou de le voler, ou s'alliant avec telle grande famille d'un endroit pour blouser les autres (et tant qu'à faire en s'asseyant sur "l'intérêt général" et le citoyen lambda), et jouant en plus, comme les chevaliers entre eux en occident, un "jeu de la guerre" qui n'est pas très très sanglant; les pros essaient de ne pas trop se faire bobo entre eux quand ils s'affrontent, vivant d'us et coutumes souvent contraires à l'intérêt des employeurs, et très favorables à leur capital (leurs troupes, leurs réseaux) et à leur business, la guerre. En faisant des conflits rarement décisifs, ils développent leur activité et en garantissent l'avenir visible, ce qui oriente en plus une partie de l'économie vers ce secteur lucratif.

La 2ème partie des guerres d'Italie, c'est celle de la fin du XVème siècle et du XVIème siècle, qui voit le prolongement de l'éclatement politique italien et le statu quo peu mouvant, prolongé par la privatisation de la guerre, la désaffection de la citoyenneté, l'appétit égoïste et polarisateur de richesses des élites, ouvrir grand la voie à l'internationalisation du conflit, faisant de l'Italie un buffet ouvert à qui s'y invite.

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