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Vérité et Généraux


Tancrède
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Je profite du sujet pour étendre un peu le débat à un point dont on discute souvent dans l'abstrait, comme ça, en passant, afin de pointer un gros doigt, juste histoire de se défouler un poil: on évoque souvent la culpabilité des EM dans les erreurs et gaspillages qui déglinguent la politique d'équipement et celle d'entraînement, empêchent les restructurations nécessaires (surtout dans les structures de commandement), diluent la décision et donc la responsabilité et maintienent les enkystements, conservatismes, chapelles et usages nuisibles au fonctionnement de l'armée. On va dire que la responsabilité propre du politique n'est pas dans le sujet.

Du coup j'essaie de déterminer à qui incombe le plus la faute, donc à qui il faut s'attaquer, parce qu'il y en a marre de dire "les EM" à chaque fois. Après tout, il y a aussi des chapelles d'officiers réformateurs en colère, même au grade de général (Desportes a d'ailleurs failli le payer, mais apparemment il avait le soutien de quelques-uns).

Selon vous, quelle chapelle, quel commandement, quels EM en particuliers sont vraiment clairement et directement les plus responsables. On blâme le CAT, mais lui n'est qu'un ventilateur de matériel, et ses sureffectifs sont peanuts (son effectif général n'est pas vraiment la cause de l'obésité des structures de l'Armée). A priori, le plus coupable me semble le CFAT qui a la charge précise de "l'entraînement des forces, il conçoit, organise, conduit et contrôle les activités d'entraînement des forces de l'armée de terre dans un cadre national et multinational" 'formulation officielle).

Bien sûr, le CFAT n'est pas le plus haut de la pyramide, mais il est le lieu de conception et de gestion de l'entraînement. On peut pointer aussi les commandements d'unités en particulier, ou plus généralement St Cyr, puisque c'est avant tout là que la maladie du commandement carriériste s'attrape. Mais le CFAT, soient à tout péter 500 personnes, me semble le plus responsable.

Après, je connais mal le fonctionnement interne des chapelles: comment s'obtiennent les commandements et l'avancement aux hauts grades. C'est toujours, au final, l'arbitre des élégances qui est le plus coupable puisqu'il choisit qui seront les décideurs et quelle sera la politique suivie. Quelle sont les parts du CEMAT et du CEMA?

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De toutes façons on sent un malaise sur la préparation des forces, déjà il y a quelques mois un officier avait écrit un propos dans l'éditorial de terre info, sur le nécessaire endurcissement de l'entraînement au combat.

Finalement si le responsable était la doctrine :

a vouloir tout faire et n'importe quoi et dans trop de régions du monde, notamment des missions ONU où on joue au CRS, on en perd peut-être les fondamentaux.

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Non, la polyvalence n'est pas si dure à gérer que ça; penser que les soldats ne doivent être préparés qu'au combat pur et dur est même l'erreur dans laquelle il ne faut pas tomber. J'entends "combat" au sens le plus strict du terme, généralement limité au conflit classique, avec quelques concessions modernes faites au combat en milieu clos, généralement limité au sens du seul combat urbain. Rien que pour le combat d'infanterie légère, en montagne ou dans tout autre milieu, il faut des soldats intelligents et formés à plus que le seul combat (ils doivent savoir se démerder avec les populations locales, surtout quand ils doivent un peu nomadiser dans le coin ou qu'ils y sont en garnison: on voit ce que la bunkerisation peut donner comme résultat grandiose).

Mais plus largement, ceux qui préconisent sans arrêt une bourrinisation à outrance des troupes devraient essayer de se rappeler ce pour quoi une armée est faite: atteindre un objectif POLITIQUE, qui exige de nos jours un spectre de capacité bien plus large que le simple combat. L'humanitaire peut en faire partie, le state building dans une zone de conflit asymétrique aussi, de même que plus généralement la "guerre au milieu des populations" et toutes les formes de violence urbaine dans des Etats faillis aussi. Et tout ça sans perdre de vue le métier initial qu'est le conflit classique symétrique, à dominante blindée et technologique, mais aussi le combat en conflit asymétrique (autant dire la confrontation avec des guérillas et bientôt techno-guérillas, et le combat d'infanterie légère en général).

Ca fait beaucoup, c'est même énorme, mais limiter les forces  au combat stricto sensu, c'est la garantie de ne jamais pouvoir les employer, soit parce qu'aucune situation de ce type ne se présente (sur spécialisation), soit surtout parce que les employer impliquerait un risque quasi total de bavures sans nombre, de pourrissement et, en définitive d'échec politique. Or l'armée DOIT être un outil capable de gérer la réalité très diverse de tout ce qui se présente: si on n'a que la destruction pure à proposer comme option politique, on risque soit de ne jamais pouvoir faire pression sur rien (hors pure situation de guerre) parce qu'on n'a que l'ultima ratio regnum absolu en réponse, auquel cas on n'est pas crédible, et on n'a pas de diplomatie. Soit on risque de n'être capables que de foutre en l'air une situation donnée en défonçant tout chaque fois qu'on intervient, parce qu'on a quand même voulu faire croire qu'on pouvait gérer une situation complexe. Des champs de bataille bien tracés avec un ennemi bien désigné et un objectif politique clair, faut pas rêver, c'est plutôt l'exception que la règle pour un certain temps (même si c'est loin d'être impossible, messieurs du LB).

Après, il ne reste que peu d'alternatives toutes portant leurs forces et leurs faiblesses et surtout leurs contraintes:

- une augmentation dramatique des niveaux et des qualités de formation, assortie nécessairement d'une augmentation certaine des effectifs combattants afin de garantir une disponibilité supérieure, tant parce que les unités élémentaires actuelles sont sous-dimensionnées que parce que plus de formation implique mathématiquement plus d'indisponibilité (nombre de formations diverses accru). Par ailleurs, une augmentation nette des rémunérations, un effort supplémentaire sur la reconversion et les perspectives de carrière, ainsi que sur la politiques sociale sont nécessaires afin de garder plus longtemps des soldats plus chers à former, mais aussi pour attirer des recrues de niveau scolaire supérieur, inévitablement nécessaires.

- une spécialisation totale des différentes branches de l'armée de terre: une partie de l'AdT sera dédiée au pur combat classique stricto censu, et aux phases de pénétration d'un théâtre (un mélange de FAR et d'un poing blindé réduit mais très fort). Mettons au total une DB à 3 brigades (mais des brigades recalibrées, pas des mastodontes de près de 7000h: 52 chars, 70 VCI, 18 canons de 155 et une unité de génie bien calibrée nécessitent bien moins que ça), 1 vraie brigade amphibie made in Fusilier, une brigade de montagne archi spécialisée et plus petite que la nôtre, et une para/aéroportée, aussi plus réduite. Cette composante est celle des soldats plus jeunes. A l'opposé, il faut une force mixte civilo militaire pour les opérations type state buiding/humanitaire en zones de combat, incluant des humanitaires et experts divers de la sécurité civils et du BTP, des Gendarmes en nombres significatifs, des moyens Génie/Log polyvalents, mais aussi des forces de combat bien réelles et rôdées pouvant gérer la guerre au sein des populations, le combat urbain, et dont le but serait la sécurisation rapprochée des zones de reconstruction/humanitaire et la coopération avec les populations (incluant le rens et l'antiterrorisme). Cette composante serait le lieu des soldats les plus malins, plus âgés, et surtout aux nerfs d'acier (distances de sécurité réduites afin d'éviter les grosses conneries, gestion des foules....). Entre les 2, idéalement, on aurait un corps de forces "médianes"/polyvalent (incluant quelques formations de MBT) pouvant coopérer avec les 2 composantes, tant dans un environnement de guerre classique que dans les autres formes de guerre: contrôle des axes, patrouille de grandes zones et sécurisation urbaine, mais aussi guerre blindée ou combat d'infanterie légère.

L'inconvénient de cette deuxième option d'armée est qu'on obtient à l'arrivée 3 composantes pesant au grand maxi 30 000h chacune (sans doute moins), dont 1/3 pour leur soutien en déploiement, soit une capacité réduite au global pour chaque mission, même si la composante médiane est de fait un renfort des 2 grandes familles de mission. Même en considérant un changement des rythmes d'OPEX en passant à 6 mois au lieu de 4, ça nous donne un maxi très théorique (purement un raisonnement de papier) de 22 500h en permanence pour chaque mission à l'année (15 000 "combat" et 7500 "médians" d'un côté; 15 000 "humanitaires/state building" et 7500 "médians de l'autre"), en supposant que la totalité des effectifs soient bien alloués, ce qui nécessiterait environs 10% de surnuméraires pour avoir l'effectif total disponible, soient une AdT projetable à 100 000h environs, pous faire simple.

De facto, tout ça pour obtenir une capacité de dispo maxi de 22 000h pour chaque mission, dont on est sûrs toutefois que les troupes sont très bien formées pour les gérer. Dans un cas de conflit majeur, on porte au mieux l'effectif de combat à 60 000 (combat + médians) pour une durée limitée, en supposant qu'on ait eu la politique matérielle adéquate. Mais 22 000h, à l'année ça pèse peu. Cette politique suppose donc nécessairement une armée européenne.

Or que voit on dans les armées européennes? Les armées italienne et allemande se répartir en 3 corps réduits dits d'intervention et de stabilisation, la formalisation d'une composante state building/humanitaire n'étant pas encore formalisée même si on parle de plus en plus de formations civilo-militaires plus permanentes et structurées (ce qui permettrait d'avoir moins à s'engueuler avec les ONG  :lol:).

Parce que la première option, celle d'un upgrade massif de la formation assorti d'une légère augmentation des effectifs et d'une montée en gamme du recrutement, est sans doute à l'arrivée bien plus chère, et surtout plus difficile, voire illusoire (faut pas se leurrer, une bonne part de l'effectif ne pourra jamais être au niveau d'exigence requis pour assumer de tels spectres de missions, à moins de multiplier par 3 ou 4 la rémunération et d'attirer en masse les classes moyennes et moyennes supérieures).

Bref, je digresse façon maousse, mais globalement Snikt59, la polyvlanece est une contrainte absolu pour que l'armée reste, voire redevienne vraiment, ce qu'elle doit être, à savoir un couteau suisse, un outil politique permettant de répondre au maximum possible de situations données. La guerre a de multiples visages (même si elle reste quoiqu'il arrive la confrontation des volontés), et l'armée doit pouvoir tous les confronter afin de pouvoir atteindre un objectif politique. Entraîne les troufions à la pure dimension de combat au sens le plus réduit, et tu auras en Afghanistan, au Kosovo, au Pakistan ou au Liban des "dommages collatéraux" massifs, des populations hostiles s'engageant en masse chez l'adversaire ou le renseignant et nous désinformant de manière quasi totale; bref, des bourbiers à pertes lourdes dont il faudra partir ou dans lesquels il faudra s'investir en masse, et où les problèmes existants seront accrus, et leurs conséquences internationales (économiques, sécuritaires, sociales et politiques) démultipliées: terrorisme, hostilité à l'occident, insécurité des axes d'approvisionnement, accroissement des grands trafics qui les financent, fragilisation des pays voisins.... Bref, échec politique quoiqu'il arrive, quel qu'ait pu être le bodycount en faveur de nos troupes sur le terrain. A quoi sert une victoire tactique si l'échec politique est total? Juste à ce que des geeks répètent mille fois sur des forums internets que leurs soldats sont forts.

Sinon, plus généralement, j'adresse une question à la cantonnade (et à Philippe et son binôme  ;) en particulier): y'a t-il un moyen d'évaluer grosso merdo l'efficacité pays par pays d'un euro (ou d'un milliard, on s'en fout) dépensé dans la défense, au regard de critères définis? Les normes OTAN de capacité permettent-elles d'évaluer ce genre de truc? Mettons, pour un milliard dépensé, chaque pays obtient une note dans de grands domaines (préparation, dispo, qualité et quantité des matos), ou à l'inverse, par exemple, tel pays obtient telle capacité donnée pour tel coût, là où un autre obtient la même capacité pour le double du prix. Je m'égare, mais existe t-il de tels ratios/indicateurs?

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Une petite question: les chefs d'EM sont désormais comptables de nouveaux agrégats et de "résultats" sur leur armes. Quelqu'un sait-il sur quels critères? Efficacité d'allocation des ressources? Rendement des investissements? Efficacité opérationnelle obtenue? Par ailleurs, des objectifs un minimum clairs, voire chiffrés, leur sont-ils désormais assignés? Sont-ils responsables de la tenue ou de la non tenue de tels objectifs? Bref, les généraux sont-ils responsables de leurs actes maintenant? Au moins un minimum?

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Tancrède: Je ne sais pas si je suis assez calé pour mettre les pieds dans le plat, mais "L'humanitaire, le state state building dans une zone de conflit asymétrique, la "guerre au milieu des populations" et toutes les formes de violence urbaine dans des Etats faillis", ça sert à quoi ?

On a jamais maté une insurrection de la sorte!

C'est comme la lutte contre la piraterie, ça me fait marrer tout ces gens qui se masturbent le cerveaux a réinventer la poudre, alors que les methodes sont connues et éprouvées depuis la nuit des temps. Pour ce qui est de la lutte anti-insurrectionnelle la méthode s'appelle TERREUR, et si il y a un savoir faire perdu, c'est pas dans les grandes écoles qu'on ira le trouver mais plutot auprès de la racaille recyclée pour les basses oeuvres. Meme pas besoin de logistique: ils peuvent vivre sur l'habitant.

La guerre est effectivement POLITIQUE, mais quand meme une politique de crise. Hors en temps de crise, depuis les Jacobins contre les Girondins, les Bolchevik contre les Menchevik, les Backtiaristes contre les Ayatollah, etc.., c'est JAMAIS les modérés qui gagnent.

En l'occurence la modération devrait etre les conditions dans lesquelle on emploie une arme extrème plutot que l'arme elle meme.

Alors les 30% de GO que tu pense etre necessaire, a mon avis ont peut en faire l'économie, ça nous évitera au moins de toujours aller fourrer notre nez dans les affaires des autres et de se prendre déculottée sur déculottée parce qu'ont pense pouvoir faire la guerre la main sur le coeur.

Au moins la bande de zouaves qui remplacerait a mon avis avantageusement tes boy scouts on ne pourrait pas les déplacer a la légère et si déplacement il y a ce ne serait pas pour rien.

Celà étant le principal obstacle a une telle politique est notre pitié mais rien n'empeche de garder une veille technologique.

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et si il y a un savoir faire perdu, c'est pas dans les grandes écoles qu'on ira le trouver mais plutot auprès de la racaille recyclée pour les basses oeuvres. Meme pas besoin de logistique: ils peuvent vivre sur l'habitant.

Dans l'histoire récente, y'a des pays qui ont fait ça. Je donne un indice: l'unité s'appelait Division SS Totenkopf.

La guerre est effectivement POLITIQUE, mais quand meme une politique de crise. Hors en temps de crise, depuis les Jacobins contre les Girondins, les Bolchevik contre les Menchevik, les Backtiaristes contre les Ayatollah, etc.., c'est JAMAIS les modérés qui gagnent.

Aucun des exemples que tu mentionnes ne sont autre chose que des cas de pays en guerre civile, donc par définition des temps de crise très intense, et même déclarée. Donc pas vraiment de quoi créer un précédent pour l'usage de la force par un pays relativement en ordre.

Pour le reste, on en a déjà parlé sur le topic de stratégie en Afghanistan: si tu choisis de méconnaître le risque qu'il y a à laisser l'Afghanistan partir en couilles et faire l'autruche, libre à toi, mais c'est pas parce que c'est loin et tout pelé que ça nous reviendra pas en pleine gueule. L'explosion des tensions en zone tribale depuis qu'on en a discuté sur le dit topic, et la fragilisation subséquente du Pakistan, en dit assez en la matière.

Quand je parle de guerre au milieu des populations et autres trucs du genre, c'est pas un discours humanitaire, ni la guerre la main sur le coeur comme tu persistes à le dire; je ne fais que répéter un avis que je partage et qui a commencé à être édifié depuis un bout de temps par de nombreuses têtes pensantes bien plus calées que moi. Si tu veux faire une armée de purs bourrins de 20 piges avec tout plein de technolgie et pas de véhicules de moins de 80 tonnes, félicitations; tu auras un truc puissant et parfaitement inutile, tout juste apte à défendre le territoire si et seulement si une armée de blindés envahit. Et strictement rien d'autre, alors que le spectre des menaces n'a jamais été aussi gigantesque et varié.

Si tu veux une armée d'emploi uniquement faite de tueurs déjantés et surqualifiés "à l'ancienne", félicitations aussi, tu auras un outil absolument inutilisable parce qu'inapte à résoudre une crise et hautement contre productif pour la politique de notre pays et ses intérêts.

Navré, mais la nature de la guerre est politique, et son application varie: que faire en Afghanistan? Tuer tout ce qui se présente? Flinguer le moindre pégu, décimer chaque village pour que personne ne prenne les armes? Le résultat opposé est garanti, avec en prime l'opprobre international et un vrai risque de sanctions, sans compter les impacts concrets sur le pays et ses intérêts (contrats commerciaux rompus, accords non négociés, vagues de boycott, affaiblissement de toute position de négociation en raison de ce bargaining chip négatif si facile à utiliser....).

Essaies un peu de te documenter sur la question au lieu de t'enfermer dans la condescendance et le mépris facile avec des termes comme "boy scouts", "masturbation intellectuelle" et autres trucs du genre; donne toi des airs en fantasmant sur des gros barbares virils et sanglants si tu veux (les goûts et les couleurs....), ou en méprisant les "intellos" (catégorie qui, dans tes posts, a l'air de commencer à tout ce qui pourrait essayer de se demander s'il se gourre), mais dis-toi bien que ces théories viennent de gens qui ont pratiqué la guerre ailleurs que sur des forums internet, qui ont mesuré les effets de telle ou telle pratique et qui ont vu ce qui pouvait merder.

Que font les Russes en Abkhazie et en Ossétie? Du state building, qui complète leur affaiblissement de la Géorgie et leur politique de positionnement au plus près des axes de transit pétrolier du Caucase. Ils font aussi un truc vieux comme le monde: ils en favorisent certains en déversant du fric, des moyens, des projets, de l'idéologie et du soutien moral, et en menacent et tapent d'autres. Ils font gaffe où ils flinguent quand ils sont dans certaines villes (en tout cas dans la mesure de leurs moyens, parce que c'est pas fameux, mais ils font de la pub quand ils arrivent à le faire). En bref, ils divisent pour mieux régner, ils créent des zones amies solides et ils agitent la carotte et le bâton; ça sonne comme des nouveaux concepts pour toi? Ce que des hommes comme Desportes, Rupert Smith et d'autres ont développé n'est qu'un affinement et l'édification doctrinale de ces concepts simples afin d'organiser un outil et des moyens afin de savoir où, quand et comment appliquer cette stratégie.

Pourquoi? Parce que la guerre n'est pas nécessairement la destruction; historiquement, la guerre totale, la guerre d'anéantissement est même l'exception plutôt que la règle: ça soulève souvent trop de nouveaux problèmes, ça coûte infiniment cher et c'est rarement possible, et encore moins pertinent. Et si tu bases une stratégie sur les seuls exemples de l'Allemagne et du Japon, ça fait un peu léger question précédent.

Sans compter que dans le cas afghan, si tu veux quand même faire mumuse à la terreur, tes bourreaux en treillis, il en faut pas 100 ou 500: il en faut 100 000 ou 500 000. Tu paies la note? Les Russes ont essayé, les Anglais aussi (eux à une époque où tout le monde se foutait des méthodes et où personne n'en entendait parler); résultat merdique. La guerre, c'est s'adapter pour atteindre un objectif politique; il faut savoir quel est cet objectif et s'y tenir. A quoi servirait de foutre l'Afghanistan à feu et à sang (enfin, encore plus qu'il ne l'est)? A rien, la situation serait pire qu'avant, la zone une poudrière, la production de came au plus haut et les Etats voisins au bord de l'explosion (y compris l'Iran et le Pakistan, ce qui amènerait des problèmes d'une autre ampleur). Résultat, tu aurais usé le capital diplomatique et politique du pays, payé longtemps le coût de l'OPEX et créé une crise monstrueuse qui coûtera bien plus sur tous les plans. Super! Mais la stratégie, c'est total ou ça n'est pas, et une armée, ça doit être adapté ou ça ne sert à rien. Et la puissance, ça s'obtient par l'efficacité réelle ET supposée, pas par le nombre de flingues en tant que tel. Et en Afghanistan, tu peux peut-être, et c'est déjà très douteux, précédents obligent, arriver à flinguer tous les insurgés à un instant T (mais ils seront vite remplacés), tu ne règleras pas le problème posé par la situation. Y faire du State building n'a rien d'angélique, c'est afin de créer un point de stabilité fort qui, dans le temps, pourra combattre lui-même les insurrections devenues, du fait de son existence et de sa coopération avec des Etats voisins plus affermis, plus marginales et gérables. Les Ricains ont foiré ça au Viet Nam et nous en Algérie, et contrairement à ce que balancent les livres d'histoire gauchistes et bien pensants, c'était avant tout en raison de mauvaises stratégies et de mauvaises méthodes au mauvais endroit et au mauvais moment.

Sinon, si c'est pour avoir une armée de tueurs rarement déployés, autant économiser et ne garder que l'arme nucléaire. D'abord, si le mot soldat existe, c'est que ce n'est pas la même chose que tueur taré. Mais surtout, une armée, c'est fait pour servir: la dissuasion de l'agression par un Etat est désormais assumée par l'arme nucléaire, l'arme blindée et l'aviation et l'ensemble de nos alliances, ce qui rend ce cas de figure hautement improbable en ce qui concerne la métropole. Pour le reste de ses missions, ce doit être un outil adaptable à chaque situation, du conflit blindé/symétrique/classique/technologique de haute intensité jusqu'au State Building, en passant par les conflits asymétriques au milieu des populations, la sécurisation de régions entières, le conflit basse intensité ou la chasse crade aux insurgés dans tous les environnements. Pourquoi? Parce que la situation l'exige, parce que c'est un outil qui doit s'adapter à un objectif politique répondant aux intérêts de la nation. Et le tout au moindre coût (l'opération US en Irak est de ce point de vue un gâchis monumental et un grand dommage aux intérêts US qui ont usé leur outil et dépensé des fortunes pour un effet politique sans doute peu durable).

Si tu continues à réduire la guerre à la seule dimension du combat stricto sensu, tu tombes dans le syndrôme d'Azincourt: tu veux que la guerre soit ce que tu souhaites. Le retour au réel fait très mal.

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Roland, à contrario et hors les guerres civiles, il me semble que les "faibles démocraties" sortent souvent victorieuses des "grandes" confrontations. Comme l'évoque Tancrede, ce qui peut fausser la perspective c'est le processus de décolonisation, vecu par beaucoup comme des défaites, affaiblissement, etc...

A mon sens  le processus de décolonisation post 45 est : "le processus de déploiement spatial de la puissance dominante issue de la 2eme guerre mondiale" (cf. USA) Ce n'est un problème militaire que marginalement...

La "décolonisation" peut parfaitement s'interpreter, comme le processus par lequel les USA "rompent" les mécanismes protectionnistes  (dans un mouvement dialectique complexe intégrant les "aspirations des peuples" , le "communisme" et "anti communisme" etc...)  inhèrents aux systèmes coloniaux ; afin de faciliter le "déploiement" du "capitalisme libéral"  dont ils sont le coeur... Autrement dit, ils agencent l'espace (mondial)  à leur convenance..

Paradoxalement, et au même temps, le mode de développement économique entre 1945 et mettons 1980 se fait sur un mode "autocentré" ; l'essentiel des échanges et de la production de valeur se faisant sur la base "nationale" (et métropolitaine pour les pays coloniaux) . Dans ce contexte, les colonies ne sont plus qu'une source très marginale de valeur et coûtent finalement plus qu'elles ne rapportent.

Bref, ce que beaucoup "pensent" ou "vivent" comme des défaites  (ou illusions de victoire...) les "guerres coloniales", ne sont qu'un processus de récomposition (voir modernisation) spatiale du modèle économique dominant. Tout le reste...

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Roland, à contrario et hors les guerres civiles, il me semble que les "faibles démocraties" sortent souvent victorieuses des "grandes" confrontations.

C'est vrai mais on peut douter que ce serait encore le cas à long terme face à un modèle libéralisme économique/pouvoir politique-qui-ne-rigole-pas/endoctrinement maximal qui s'affine notamment chez nos amis russes ou chinois (sans faire dans le péril jaune ou les barbares de l'est, hein, je n'imagine pas spécialement avoir un T90 devant ma porte demain matin). On peut espérer que ces gens calés (évoqués par Tancrède) réfléchissent aussi à ça.

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C'est vrai mais on peut douter que ce serait encore le cas à long terme face à un modèle libéralisme économique/pouvoir politique-qui-ne-rigole-pas/endoctrinement maximal qui s'affine notamment chez nos amis russes ou chinois

Le fascisme fonctionnait exactement sur les mêmes principes... Les démocraties sont toujours "faibles" au début (voir Munich et toussa..) mais quand elles se "fachent" ça fait mal...

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Le fascisme fonctionnait exactement sur les mêmes principes... Les démocraties sont toujours "faibles" au début (voir Munich et toussa..) mais quand elles se "fachent" ça fait mal...

C'est ce qu'on constate en tout cas et heureusement d'ailleurs.

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Le fascisme fonctionnait exactement sur les mêmes principes... Les démocraties sont toujours "faibles" au début (voir Munich et toussa..) mais quand elles se "fachent" ça fait mal...

L'Allemagne nazie était plus dirigiste que la Chine du 21e siècle il me semble (mais bon, ok, ça tient plus de la nuance subtile que de la différence flagrante)

C'est ce qu'on constate en tout cas et heureusement d'ailleurs.

Oui, heureusement, et pourvu que ça dure...

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Tancrede: c'est vrai que notre principal désacord c'est que moi je suis plutot isolationiste (dans la mesure du possible) et que je ne crois pas aux interventions exterieurs sauf pour défendre nos interets vraiment vitaux.

Celà étant j'aime assez ton parrallele entre les colonnes infernales et la bombe atomique: c'est exactement ça, une arme dissuasive destinée a inspirer la crainte. Comme l'a dit quelqu'un ailleurs, juste destiné a passer le message: "fallait pas nous emmerder".

Tu admettra cepandant que les colonnes infernales sont d'un emploie beaucoup plus aisé que l'arme atomique et au moins on risque moins de s'en prendre une sur la gueule en represaille.

Le reste, désolé mais j'y croit pas trop. On a obtenu quelque résultat en Cote d'Ivoire, mais ça n'a pas empeché 7000 de nos compatriotes émigrés de se faire pogromiser et spolier. Alors ça sert a quoi ?

Je voudrais bien croire qu'on peut obtenir des résultats avec du tact, mais j'attend un seul exemple de succès. ça a marché avec l'Allemagne et le Japon mais ils avaient étés préalablement préparés psychologiquement par un écrasement total.

ah et je t'ai déjà dit: je suis pas un bourrin (du moins j'espere) et respecte l'intelligence (plutot les techniciens que les communicants mais bon..)

Le fascisme fonctionnait exactement sur les mêmes principes... Les démocraties sont toujours "faibles" au début (voir Munich et toussa..) mais quand elles se "fachent" ça fait mal...

c'est vrai. mais pas vraiment faible, disons qu'elles prétendent appliquer avec l'exterieur les meme standard qu'avec l'intérieur. ça ne me parait pas pas possible c'est pour ça qu'elles devraient se contenter de cultiver leur jardin. Quand elles se fachent ça fait mal parce que, le dos au mur, toute l'intelligence quelles ont laissé développer en interne se mobilise dans un but destructeur sans s'embarasser des droits de l'enemi.

on diverge, désolé.

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Mais l'isolationisme n'amènera que la faiblesse et.... L'isolement  :rolleyes:. Ces "colonnes infernales", tu as surtout soigneusement évité de relever le principal truc à leur sujet: elles sont inefficaces et contre-productives. Si tu crois encore qu'aller farfouiller les montagnes à la recherche de Ben Laden a la moindre utilité pour la sécurité du pays, c'est que tu crois trop aux (mauvais) communicants. L'enjeu n'est pas dans l'exécution d'un barbu.

Sur la Côte d'Ivoire, on a employé aucune méthode sinon la vieille chierie onusienne d'interposition. Ca a pas été fameux, mais ça a pas si mal réussi: nos ressortissants sont pas morts, la guerre civile totale a pour l'instant été évitée. Résultat concret. Mais cette histoire sort du contexte des guerres décrites par Desportes: c'est avant tout un accord de défense, de la présence permanente, qui nous a amené là. Et on a pas fait de State Building et pas vraiment d'humanitaire hormis autour de la zone de démarcation, ce qui est plutôt rationnel: vaut mieux que les voisins te préfèrent toi plutôt que celui que tu dois combattre, c'est bon pour l'image, bon pour le rens et on dort mieux la nuit (pas d'histoire de conscience, mais on n'a pas 10 personnes avec des coupes coupes attendant celui qui s'éloigne pour pisser).

Avant les techniciens, il y a les penseurs, et c'est eux que tu devrais essayer d'écouter, même si ça emmerde (c'est généralement bon signe d'ailleurs). Des exemples d'efficacité? Ben, dans une certaine mesure nos colonies, où la terreur ne fut pas employée partout, loin de là (rien de comparable au Congo Belge). L'exemple de l'Algérie dans les premiers temps de la conquête est pas mal, avec les bureaux arabes (qui furent fermés par la République); les contacts avec la population étaient souvent bons, et la révolte d'Abd El Kader fut loin d'être un mouvement général.

Les foirades comme en Yougoslavie sont justement ce qui a inspiré la génération des penseurs comme Desportes (Morillon aussi d'ailleurs) ou Rupert Smith qui sont d'ailleurs des adversaires des forces médianes comme modèle dominant; suivant la règle édictée par Morillon, ils spécifient que l'aspect purement cohercitif des forces doit être décisivement fort pour imposer le calme dans lequel la course contre la montre s'engage pour espérer bâtir un début de structure d'Etat solide.

S'il te plaît, arrête avec les expressions toutes faites, encore une fois: les "on ne gagne pas la guerre avec du tact" et autres poncifs sortis de Walker Texas Ranger. Encore une fois, tu n'arrives pas à faire la différence entre guerre et combat, et réduire la guerre au combat, et en plus à l'aspect purement militaire stricto sensu du combat, enlève tout moyen de comprendre les conflits et leurs enjeux.

Il n'y a plus de ligne de front, de positions ou de centre hors de l'hypothèse du conflit classique symétrique; il faut donc s'adapter. Et la menace peut être non conventionnelle, sans point d'origine et frapper au coeur de notre territoire comme à perpète. Nos intérêts sont partout sur la planète, et la disruption ou une simple menace diffuse sur un axe de transport maritime nous touche autant qu'une bombe sur un terminal ferroviaire en métropole. Sans compter que notre territoire, ce n'est pas que la métropole. L'isolationisme, c'est juste un rêve théorique, un raisonnement de papier pour se rassurer en pensant tou maîtriser; et surtout, ça n'est valable que pour un pays qui n'a pas de commerce extérieur ou de dépendance vis-à-vis d'approvisionnements spécifiques. L'intervention à l'étranger, c'est pas un truc pour faire chic dans les salons ou "tenir un rang", expression qui donne l'impression que l'OPEX n'est qu'un signe extérieur de richesse.

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L'exemple de l'Algérie dans les premiers temps de la conquête est pas mal, avec les bureaux arabes (qui furent fermés par la République); les contacts avec la population étaient souvent bons, et la révolte d'Abd El Kader fut loin d'être un mouvement général.

Il semble que ta vision de la conquete de l'Algerie n'est pas partagee par tous....

"La diminution (de la population algerienne) observée lors de la première phase de conquête tient pour une grande part dans la violence des méthodes utilisées par l'armée française, attestée par de nombreux témoignages. De retour d'un voyage d'enquête en Algérie, Tocqueville écrit que « nous faisons la guerre de façon beaucoup plus barbare que les Arabes eux-mêmes [...] c'est quant à présent de leur côté que se situe la civilisation. » L'objectif de la « pacification » est comme le déclare le colonel de Montagnac d'« anéantir tout ce qui ne rampera à nos pieds comme des chiens ». La politique de la terre brûlée, décidée par le gouverneur général Bugeaud, a des effets dévastateurs sur les équilibres socio-économique et alimentaire du pays : « nous tirons peu de coup de fusil, nous brûlons tous les douars, tous les villages, toutes les cahutes ; l'ennemi fuit partout en emmenant ses troupeaux ». Selon Olivier Le Cour Grandmaison, la colonisation de l'Algérie se serait ainsi traduite par l'extermination du tiers de la population, dont les causes multiples (massacres, déportations, famines ou encore épidémies) seraient étroitement liées entre elles".

http://fr.wikipedia.org/wiki/Conquête_de_l'Algérie  (je ne sais pas pourquoi le lien ne s'affiche pas completement)

Les references figurent dans l'article original de Wiki

http://pagesperso-orange.fr/felina/doc/alg/olcg.htm

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J'ai pris l'exemple au débotté, mais contrairement à ce que laisse entendre l'article, il y a encore une vraie polémique historique sérieuse (pas une bataille d'illuminés extrêmistes nostalgiques de l'empire colonial). Le point est que des méthodes violentes ont été appliquées, c'est indéniable, mais pas partout. De facto, les deux types de politique (carotte et bâton pour aller vite) ont été appliquées: tout dépendait de l'endroit.

Si la terreur avait été la seule politique, on n'aurait pas dépensé du fric, et surtout gaspillé des effectifs et du temps dans le maillage du territoire par l'organisation mise en place par un Bugeaud qui a regretté beaucoup des actions violentes précisément par ce qu'il a mesuré, a posteriori seulement, l'efficacité supérieure de l'action non répressive.

Mais pour illustrer mon propos, il est vrai qu'il y avait de meilleurs exemples que l'Algérie; j'ai juste répondu vite.

Le problème n'est pas entre violence et tact, mais entre rationalisation et organisation de la partie non violente de l'action.

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